J'accuse...!

By Émile Zola

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Title: J'accuse...!

Author: Émile Zola

Release date: May 8, 2025 [eBook #76045]

Language: French

Original publication: Paris: L'Aurore, 1898

Credits: Claudine Corbasson and the Online Distributed Proofreading Team at https://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica))


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  Émile Zola est un écrivain renommé mais aussi un journaliste
  politique (Wikipedia)

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  Deuxième Année.--Numéro 87
  Cinq Centimes

  JEUDI 13 JANVIER 1898


  L'AURORE
  Littéraire, Artistique, Sociale


  Directeur: =ERNEST VAUGHAN=


  ÉMILE ZOLA


  J'Accuse...!


  PARIS




LETTRE AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE




LETTRE A M. FÉLIX FAURE

Président de la République


Monsieur le Président,

Me permettez-vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que
vous m'avez fait un jour, d'avoir le souci de votre juste gloire et de
vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu'ici, est menacée de la
plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches?

Vous êtes sorti sain et sauf des basses calomnies, vous avez conquis
les cœurs. Vous apparaissez rayonnant dans l'apothéose de cette
fête, patriotique que l'alliance russe a été pour la France, et vous
vous préparez à présider au solennel triomphe de notre Exposition
universelle, qui couronnera notre grand siècle de travail, de vérité et
de liberté. Mais quelle tache de boue sur votre nom--j'allais dire sur
votre règne--que cette abominable affaire Dreyfus! Un conseil de guerre
vient, par ordre, d'oser acquitter un Esterhazy, soufflet suprême à
toute vérité, à toute justice. Et c'est fini, la France a sur la joue
cette souillure, l'histoire écrira que c'est sous votre présidence
qu'un tel crime social a pu être commis.

Puisqu'ils ont osé, j'oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai,
car j'ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne
la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne
veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de
l'innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un
crime qu'il n'a pas commis.

Et c'est à vous, monsieur le Président, que je la crierai, cette
vérité, de toute la force de ma révolte d'honnête homme. Pour
votre honneur, je suis convaincu que vous l'ignorez. Et à qui donc
dénoncerai-je la tourbe malfaisante des vrais coupables, si ce n'est à
vous, le premier magistrat du pays?

                                   *
                                  * *

La vérité d'abord sur le procès et sur la condamnation de Dreyfus.

Un homme néfaste a tout mené, a tout fait, c'est le colonel du Paty
de Clam, alors simple commandant. Il est l'affaire Dreyfus tout
entière, on ne la connaîtra que lorsqu'une enquête loyale aura établi
nettement ses actes et ses responsabilités. Il apparaît comme l'esprit
le plus fumeux, le plus compliqué, hanté d'intrigues romanesques, se
complaisant aux moyens des romans-feuilletons, les papiers volés, les
lettres anonymes, les rendez-vous dans les endroits déserts, les femmes
mystérieuses qui colportent, de nuit, des preuves accablantes. C'est
lui qui imagina de dicter le bordereau à Dreyfus; c'est lui qui rêva de
l'étudier dans une pièce entièrement revêtue de glaces; c'est lui que
le commandant Forzinetti nous représente armé d'une lanterne sourde,
voulant se faire introduire près de l'accusé endormi, pour projeter sur
son visage un brusque flot de lumière et surprendre ainsi son crime,
dans l'émoi du réveil. Et je n'ai pas à tout dire, qu'on cherche, on
trouvera. Je déclare simplement que le commandant du Paty de Clam,
chargé d'instruire l'affaire Dreyfus, comme officier judiciaire, est,
dans l'ordre des dates et des responsabilités, le premier coupable de
l'effroyable erreur judiciaire qui a été commise.

Le bordereau était depuis quelque temps déjà entre les mains du
colonel Sandherr, directeur du bureau des renseignements, mort depuis
de paralysie générale. Des «fuites» avaient lieu, des papiers
disparaissaient, comme il en disparaît aujourd'hui encore; et l'auteur
du bordereau était recherché, lorsqu'un _a priori_ se fit peu à peu
que cet auteur ne pouvait être qu'un officier de l'état-major, et
un officier d'artillerie: double erreur manifeste, qui montre avec
quel esprit superficiel on avait étudié ce bordereau, car un examen
raisonné démontre qu'il ne pouvait s'agir que d'un officier de troupe.
On cherchait donc dans la maison, on examinait les écritures, c'était
comme une affaire de famille, un traître à surprendre dans les bureaux
mêmes, pour l'en expulser. Et, sans que je veuille refaire ici une
histoire connue en partie, le commandant du Paty de Clam entre en
scène, dès qu'un premier soupçon tombe sur Dreyfus. A partir de
ce moment, c'est lui qui a inventé Dreyfus, l'affaire devient son
affaire, il se fait fort de confondre le traître, de l'amener à des
aveux complets. Il y a bien le ministre de la guerre, le général
Mercier, dont l'intelligence semble médiocre; il y a bien le chef de
l'état-major, le général de Boisdeffre, qui paraît avoir cédé à sa
passion cléricale, et le sous-chef de l'état-major, le général Gonse,
dont la conscience a pu s'accommoder de beaucoup de choses. Mais, au
fond, il n'y a d'abord que le commandant du Paty de Clam, qui les
mène tous, qui les hypnotise, car il s'occupe aussi de spiritisme,
d'occultisme, il converse avec les esprits. On ne croira jamais les
expériences auxquelles il a soumis le malheureux Dreyfus, les pièges
dans lesquels il a voulu le faire tomber, les enquêtes folles, les
imaginations monstrueuses, toute une démence torturante.

Ah! cette première affaire, elle est un cauchemar, pour qui la connaît
dans ses détails vrais! Le commandant du Paty de Clam arrête Dreyfus,
le met au secret. Il court chez madame Dreyfus, la terrorise, lui dit
que, si elle parle, son mari est perdu. Pendant ce temps, le malheureux
s'arrachait la chair, hurlait son innocence. Et l'instruction a été
faite ainsi, comme dans une chronique du quinzième siècle, au milieu
du mystère, avec une complication d'expédients farouches, tout cela
basé sur une seule charge enfantine, ce bordereau imbécile, qui n'était
pas seulement une trahison vulgaire, qui était aussi la plus impudente
des escroqueries, car les fameux secrets livrés se trouvaient presque
tous sans valeur. Si j'insiste, c'est que l'œuf est ici, d'où va
sortir plus tard le vrai crime, l'épouvantable déni de justice dont la
France est malade. Je voudrais faire toucher du doigt comment l'erreur
judiciaire a pu être possible, comment elle est née des machinations du
commandant du Paty de Clam, comment le général Mercier, les généraux
de Boisdeffre et Gonse ont pu s'y laisser prendre, engager peu à peu
leur responsabilité dans cette erreur, qu'ils ont cru devoir, plus
tard, imposer comme la vérité sainte, une vérité qui ne se discute
même pas. Au début, il n'y a donc de leur part que de l'incurie et
de l'inintelligence. Tout au plus, les sent-on céder aux passions
religieuses du milieu et aux préjugés de l'esprit de corps. Ils ont
laissé faire la sottise.

Mais voici Dreyfus devant le conseil de guerre. Le huis clos le plus
absolu est exigé. Un traître aurait ouvert la frontière à l'ennemi,
pour conduire l'empereur allemand jusqu'à Notre-Dame, qu'on ne
prendrait pas des mesures de silence et de mystère plus étroites. La
nation est frappée de stupeur, on chuchote des faits terribles, de
ces trahisons monstrueuses qui indignent l'Histoire, et naturellement
la nation s'incline. Il n'y a pas de châtiment assez sévère, elle
applaudira à la dégradation publique, elle voudra que le coupable reste
sur son rocher d'infamie, dévoré par le remords. Est-ce donc vrai,
les choses indicibles, les choses dangereuses, capables de mettre
l'Europe en flammes, qu'on a dû enterrer soigneusement derrière ce huis
clos? Non! il n'y a eu, derrière, que les imaginations romanesques et
démentes du commandant du Paty de Clam. Tout cela n'a été fait que pour
cacher le plus saugrenu des romans-feuilletons. Et il suffit, pour
s'en assurer, d'étudier attentivement l'acte d'accusation lu devant le
conseil de guerre.

Ah! le néant de cet acte d'accusation! Qu'un homme ait pu être condamné
sur cet acte, c'est un prodige d'iniquité. Je défie les honnêtes gens
de le lire, sans que leur cœur bondisse d'indignation et crie leur
révolte, en pensant à l'expiation démesurée, là-bas, à l'île du Diable.
Dreyfus sait plusieurs langues, crime; on n'a trouvé chez lui aucun
papier compromettant, crime; il va parfois dans son pays d'origine,
crime; il est laborieux, il a le souci de tout savoir, crime; il
ne se trouble pas, crime; il se trouble, crime. Et les naïvetés de
rédaction, les formelles assertions dans le vide! On nous avait parlé
de quatorze chefs d'accusation: nous n'en trouvons qu'une seule en
fin de compte, celle du bordereau; et nous apprenons même que les
experts n'étaient pas d'accord, qu'un d'eux, M. Gobert, a été bousculé
militairement, parce qu'il se permettait de ne pas conclure dans le
sens désiré. On parlait aussi de vingt-trois officiers qui étaient
venus accabler Dreyfus de leurs témoignages. Nous ignorons encore leurs
interrogatoires, mais il est certain que tous ne l'avaient pas chargé;
et il est à remarquer, en outre, que tous appartenaient aux bureaux de
la guerre. C'est un procès de famille, on est là entre soi, et il faut
s'en souvenir: l'état-major a voulu le procès, l'a jugé, et il vient de
le juger une seconde fois.

Donc, il ne restait que le bordereau, sur lequel les experts ne
s'étaient pas entendus. On raconte que, dans la chambre du conseil,
les juges allaient naturellement acquitter. Et, dès lors, comme l'on
comprend l'obstination désespérée avec laquelle, pour justifier la
condamnation, on affirme aujourd'hui l'existence d'une pièce secrète,
accablante, la pièce qu'on ne peut montrer, qui légitime tout,
devant laquelle nous devons nous incliner, le bon dieu invisible
et inconnaissable. Je la nie, cette pièce, je la nie de toute ma
puissance! Une pièce ridicule, oui, peut-être la pièce où il est
question de petites femmes, et où il est parlé d'un certain D... qui
devient trop exigeant, quelque mari sans doute trouvant qu'on ne
lui payait pas sa femme assez cher. Mais une pièce intéressant la
défense nationale, qu'on ne saurait produire sans que la guerre fût
déclarée demain, non, non! C'est un mensonge; et cela est d'autant
plus odieux et cynique qu'ils mentent impunément sans qu'on puisse
les en convaincre. Ils ameutent la France, ils se cachent derrière
sa légitime émotion, ils ferment les bouches en troublant les cœurs,
en pervertissant les esprits. Je ne connais pas de plus grand crime
civique.

Voilà donc, monsieur le Président, les faits qui expliquent comment
une erreur judiciaire a pu être commise; et les preuves morales, la
situation de fortune de Dreyfus, l'absence de motifs, son continuel
cri d'innocence, achèvent de le montrer comme une victime des
extraordinaires imaginations du commandant du Paty de Clam, du milieu
clérical où il se trouvait, de la chasse aux «sales juifs», qui
déshonore notre époque.

                                   *
                                  * *

Et nous arrivons à l'affaire Esterhazy. Trois ans se sont passés,
beaucoup de consciences restent troublées profondément, s'inquiètent,
cherchent, finissent par se convaincre de l'innocence de Dreyfus.

Je ne ferai pas l'historique des doutes, puis de la conviction de M.
Scheurer-Kestner. Mais, pendant qu'il fouillait de son côté, il se
passait des faits graves à l'état-major même. Le colonel Sandherr
était mort, et le lieutenant-colonel Picquart lui avait succédé
comme chef du bureau des renseignements. Et c'est à ce titre, dans
l'exercice de ses fonctions, que ce dernier eut un jour entre les
mains une lettre-télégramme, adressée au commandant Esterhazy, par
un agent d'une puissance étrangère. Son devoir strict était d'ouvrir
une enquête. La certitude est qu'il n'a jamais agi en dehors de la
volonté de ses supérieurs. Il soumit donc ses soupçons à ses supérieurs
hiérarchiques, le général Gonse, puis le général de Boisdeffre, puis
le général Billot, qui avait succédé au général Mercier comme ministre
de la guerre. Le fameux dossier Picquart, dont il a été tant parlé,
n'a jamais été que le dossier Billot, j'entends le dossier fait par
un subordonné pour son ministre, le dossier qui doit exister encore
au ministère de la guerre. Les recherches durèrent de mai à septembre
1896, et ce qu'il faut affirmer bien haut, c'est que le général
Gonse était convaincu de la culpabilité d'Esterhazy, c'est que le
général de Boisdeffre et le général Billot ne mettaient pas en doute
que le fameux bordereau fût de l'écriture d'Esterhazy. L'enquête du
lieutenant-colonel Picquart avait abouti à cette constatation certaine.
Mais l'émoi était grand, car la condamnation d'Esterhazy entraînait
inévitablement la revision du procès Dreyfus; et c'était ce que
l'état-major ne voulait à aucun prix.

Il dut y avoir là une minute psychologique pleine d'angoisse. Remarquez
que le général Billot n'était compromis dans rien, il arrivait tout
frais, il pouvait faire la vérité. Il n'osa pas, dans la terreur
sans doute de l'opinion publique, certainement aussi dans la crainte
de livrer tout l'état-major, le général de Boisdeffre, le général
Gonse, sans compter les sous-ordres. Puis, ce ne fut là qu'une minute
de combat entre sa conscience et ce qu'il croyait être l'intérêt
militaire. Quand cette minute fut passée, il était déjà trop tard. Il
s'était engagé, il était compromis. Et, depuis lors, sa responsabilité
n'a fait que grandir, il a pris à sa charge le crime des autres, il
est aussi coupable que les autres, il est plus coupable qu'eux, car il
a été le maître de faire justice, et il n'a rien fait. Comprenez-vous
cela! voici un an que le général Billot, que les généraux de Boisdeffre
et Gonse savent que Dreyfus est innocent, et ils ont gardé pour eux
cette effroyable chose. Et ces gens-là dorment, et ils ont des femmes
et des enfants qu'ils aiment!

Le colonel Picquart avait rempli son devoir d'honnête homme. Il
insistait auprès de ses supérieurs, au nom de la justice. Il
les suppliait même, il leur disait combien leurs délais étaient
impolitiques devant le terrible orage qui s'amoncelait, qui devait
éclater, lorsque la vérité serait connue. Ce fut, plus tard, le langage
que M. Scheurer-Kestner tint également au général Billot, l'adjurant
par patriotisme de prendre en main l'affaire, de ne pas la laisser
s'aggraver, au point de devenir un désastre public. Non! le crime
était commis, l'état-major ne pouvait plus avouer son crime. Et le
lieutenant-colonel Picquart fut envoyé en mission, on l'éloigna de
plus loin en plus loin, jusqu'en Tunisie, où l'on voulut même un jour
honorer sa bravoure, en le chargeant d'une mission qui l'aurait fait
sûrement massacrer, dans les parages où le marquis de Morès a trouvé la
mort. Il n'était pas en disgrâce, le général Gonse entretenait avec
lui une correspondance amicale. Seulement, il est des secrets qu'il ne
fait pas bon d'avoir surpris.

A Paris, la vérité marchait, irrésistible, et l'on sait de quelle
façon l'orage attendu éclata. M. Mathieu Dreyfus dénonça le commandant
Esterhazy comme le véritable auteur du bordereau, au moment où M.
Scheurer-Kestner allait déposer, entre les mains du garde des sceaux,
une demande en revision du procès. Et c'est ici que le commandant
Esterhazy paraît. Des témoignages le montrent d'abord affolé, prêt
au suicide ou à la fuite. Puis, tout d'un coup, il paye d'audace, il
étonne Paris par la violence de son attitude. C'est que du secours
lui était venu, il avait reçu une lettre anonyme l'avertissant des
menées de ses ennemis, une dame mystérieuse s'était même dérangée de
nuit pour lui remettre une pièce volée à l'état-major, qui devait le
sauver. Et je ne puis m'empêcher de retrouver là le lieutenant-colonel
du Paty de Clam, en reconnaissant les expédients de son imagination
fertile. Son œuvre, la culpabilité de Dreyfus, était en péril, et
il a voulu sûrement défendre son œuvre. La revision du procès, mais
c'était l'écroulement du roman-feuilleton si extravagant, si tragique,
dont le dénouement abominable a lieu à l'île du Diable! C'est ce
qu'il ne pouvait permettre. Dès lors, le duel va avoir lieu entre
le lieutenant-colonel Picquart et le lieutenant-colonel du Paty de
Clam, l'un le visage découvert, l'autre masqué. On les retrouvera
prochainement tous deux devant la justice civile. Au fond, c'est
toujours l'état-major qui se défend, qui ne veut pas avouer son crime,
dont l'abomination grandit d'heure en heure.

On s'est demandé avec stupeur quels étaient les protecteurs
du commandant Esterhazy. C'est d'abord, dans l'ombre, le
lieutenant-colonel du Paty de Clam qui a tout machiné, qui a tout
conduit. Sa main se trahit aux moyens saugrenus. Puis, c'est le
général de Boisdeffre, c'est le général Gonse, c'est le général Billot
lui-même, qui sont bien obligés de faire acquitter le commandant,
puisqu'ils ne peuvent laisser reconnaître l'innocence de Dreyfus,
sans que les bureaux de la guerre croulent sous le mépris public. Et
le beau résultat de cette situation prodigieuse, c'est que l'honnête
homme là-dedans, le lieutenant-colonel Picquart, qui seul a fait son
devoir, va être la victime, celui qu'on bafouera et qu'on punira. O
justice, quelle affreuse désespérance serre le cœur! On va jusqu'à dire
que c'est lui le faussaire, qu'il a fabriqué la carte-télégramme pour
perdre Esterhazy. Mais, grand Dieu! pourquoi? dans quel but? Donnez un
motif. Est-ce que celui-là aussi est payé par les juifs? Le joli de
l'histoire est qu'il était justement antisémite. Oui! nous assistons
à ce spectacle infâme, des hommes perdus de dettes et de crimes dont
on proclame l'innocence, tandis qu'on frappe l'honneur même, un homme
à la vie sans tache! Quand une société en est là, elle tombe en
décomposition.

Voilà donc, monsieur le Président, l'affaire Esterhazy: un coupable
qu'il s'agissait d'innocenter. Depuis bientôt deux mois, nous pouvons
suivre heure par heure la belle besogne. J'abrège, car ce n'est ici,
en gros, que le résumé de l'histoire dont les brûlantes pages seront
un jour écrites tout au long. Et nous avons donc vu le général de
Pellieux, puis le commandant Ravary, conduire une enquête scélérate
d'où les coquins sortent transfigurés et les honnêtes gens salis. Puis,
on a convoqué le conseil de guerre.

                                   *
                                  * *

Comment a-t-on pu espérer qu'un conseil de guerre déferait ce qu'un
conseil de guerre avait fait?

Je ne parle même pas du choix toujours possible des juges. L'idée
supérieure de discipline, qui est dans le sang de ces soldats, ne
suffit-elle à infirmer leur pouvoir même d'équité? Qui dit discipline
dit obéissance. Lorsque le ministre de la guerre, le grand chef, a
établi publiquement, aux acclamations de la représentation nationale,
l'autorité absolue de la chose jugée, vous voulez qu'un conseil
de guerre lui donne un formel démenti? Hiérarchiquement, cela est
impossible. Le général Billot a suggestionné les juges par sa
déclaration, et ils ont jugé comme ils doivent aller au feu, sans
raisonner. L'opinion préconçue qu'ils ont apportée sur leur siège est
évidemment celle-ci: «Dreyfus a été condamné pour crime de trahison par
un conseil de guerre; il est donc coupable, et nous, conseil de guerre,
nous ne pouvons le déclarer innocent; or nous savons que reconnaître la
culpabilité d'Esterhazy, ce serait proclamer l'innocence de Dreyfus.»
Rien ne pouvait les faire sortir de là.

Ils ont rendu une sentence inique qui à jamais pèsera sur nos conseils
de guerre, qui entachera désormais de suspicion tous leurs arrêts.
Le premier conseil de guerre a pu être inintelligent, le second
est forcément criminel. Son excuse, je le répète, est que le chef
suprême avait parlé, déclarant la chose jugée inattaquable, sainte et
supérieure aux hommes, de sorte que des inférieurs ne pouvaient dire
le contraire. On nous parle de l'honneur de l'armée, on veut que nous
l'aimions, que nous la respections. Ah! certes, oui, l'armée qui se
lèverait à la première menace, qui défendrait la terre française, elle
est tout le peuple et nous n'avons pour elle que tendresse et respect.
Mais il ne s'agit pas d'elle, dont nous voulons justement la dignité,
dans notre besoin de justice. Il s'agit du sabre, le maître qu'on nous
donnera demain peut-être. Et baiser dévotement la poignée du sabre, le
dieu, non!

Je l'ai démontré d'autre part: l'affaire Dreyfus était l'affaire des
bureaux de la guerre, un officier de l'état-major, dénoncé par ses
camarades de l'état-major, condamné sous la pression des chefs de
l'état-major. Encore une fois, il ne peut revenir innocent, sans que
tout l'état-major soit coupable. Aussi les bureaux, par tous les moyens
imaginables, par des campagnes de presse, par des communications,
par des influences, n'ont-ils couvert Esterhazy que pour perdre
une seconde fois Dreyfus. Ah! quel coup de balai le gouvernement
républicain devrait donner dans cette jésuitière, ainsi que les appelle
le général Billot lui-même! Où est-il, le ministère vraiment fort et
d'un patriotisme sage, qui osera tout y refondre, et tout y renouveler?
Que de gens je connais qui, devant une guerre possible, tremblent
d'angoisse, en sachant dans quelles mains est la défense nationale!
et quel nid de basses intrigues, de commérages et de dilapidations,
est devenu cet asile sacré, où se décide le sort de la patrie! On
s'épouvante devant le jour terrible que vient d'y jeter l'affaire
Dreyfus, ce sacrifice humain d'un malheureux, d'un «sale juif»! Ah!
tout ce qui s'est agité là de démence et de sottise, des imaginations
folles, des pratiques de basse police, des mœurs d'inquisition et de
tyrannie, le bon plaisir de quelques galonnés mettant leurs bottes sur
la nation, lui rentrant dans la gorge son cri de vérité et de justice,
sous le prétexte menteur et sacrilège de la raison d'Etat!

Et c'est un crime encore que de s'être appuyé sur la presse immonde,
que de s'être laissé défendre par toute la fripouille de Paris, de
sorte que voilà la fripouille qui triomphe insolemment dans la défaite
du droit et de la simple probité. C'est un crime d'avoir accusé de
troubler la France ceux qui la veulent généreuse, à la tête des
nations libres et justes, lorsqu'on ourdit soi-même l'impudent complot
d'imposer l'erreur, devant le monde entier. C'est un crime d'égarer
l'opinion, d'utiliser pour une besogne de mort cette opinion qu'on
a pervertie, jusqu'à la faire délirer. C'est un crime d'empoisonner
les petits et les humbles, d'exaspérer les passions de réaction et
d'intolérance, en s'abritant derrière l'odieux antisémitisme, dont la
grande France libérale des droits de l'homme mourra, si elle n'en est
pas guérie. C'est un crime que d'exploiter le patriotisme pour des
œuvres de haine, et c'est un crime enfin que de faire du sabre le dieu
moderne, lorsque toute la science humaine est au travail pour l'œuvre
prochaine de vérité et de justice.

Cette vérité, cette justice, que nous avons si passionnément voulues,
quelle détresse à les voir ainsi souffletées, plus méconnues et
plus obscurcies! Je me doute de l'écroulement qui doit avoir lieu
dans l'âme de M. Scheurer-Kestner et je crois bien qu'il finira par
éprouver un remords, celui de n'avoir pas agi révolutionnairement, le
jour de l'interpellation au Sénat, en lâchant tout le paquet, pour
tout jeter à bas. Il a été le grand honnête homme, l'homme de sa vie
loyale, il a cru que la vérité se suffisait à elle-même, surtout
lorsqu'elle lui apparaissait éclatante comme le plein jour. A quoi
bon tout bouleverser, puisque bientôt le soleil allait luire? Et
c'est de cette sérénité confiante, dont il est si cruellement puni.
De même pour le lieutenant-colonel Picquart, qui, par un sentiment de
haute dignité, n'a pas voulu publier les lettres du général Gonse.
Ces scrupules l'honorent d'autant plus, que, pendant qu'il restait
respectueux de la discipline, ses supérieurs le faisaient couvrir
de boue, instruisaient eux-mêmes son procès, de la façon la plus
inattendue et la plus outrageante. Il y a deux victimes, deux braves
gens, deux cœurs simples, qui ont laissé faire Dieu, tandis que
le diable agissait. Et l'on a même vu, pour le lieutenant-colonel
Picquart, cette chose ignoble: un tribunal français, après avoir laissé
le rapporteur charger publiquement un témoin, l'accuser de toutes les
fautes, a fait le huis clos, lorsque ce témoin a été introduit pour
s'expliquer et se défendre. Je dis que cela est un crime de plus et que
ce crime soulèvera la conscience universelle. Décidément, les tribunaux
militaires se font une singulière idée de la justice.

Telle est donc la simple vérité, monsieur le Président, et elle est
effroyable, elle restera pour votre présidence une souillure. Je me
doute bien que vous n'avez aucun pouvoir en cette affaire, que vous
êtes le prisonnier de la Constitution et de votre entourage. Vous n'en
avez pas moins un devoir d'homme, auquel vous songerez et que vous
remplirez. Ce n'est pas, d'ailleurs, que je désespère le moins du monde
du triomphe. Je le répète avec une certitude plus véhémente: la vérité
est en marche, et rien ne l'arrêtera. C'est d'aujourd'hui seulement que
l'affaire commence, puisque aujourd'hui seulement les positions sont
nettes: d'une part, les coupables qui ne veulent pas que la lumière se
fasse; de l'autre, les justiciers qui donneront leur vie pour qu'elle
soit faite. Quand on enferme la vérité sous terre, elle s'y amasse,
elle y prend une force telle d'explosion, que le jour où elle éclate,
elle fait tout sauter avec elle. On verra bien si l'on ne vient pas de
préparer, pour plus tard, le plus retentissant des désastres.

                                   *
                                  * *

Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de
conclure.

J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier
diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire,
et d'avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les
machinations les plus saugrenues et les plus coupables.

J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par
faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.

J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves
certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de
s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice,
dans un but politique et pour sauver l'état-major compromis.

J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus
complices du même crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre
peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre
l'arche sainte, inattaquable.

J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir
fait une enquête scélérate, j'entends par là une enquête de la plus
monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un
impérissable monument de naïve audace.

J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard
et Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins
qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et
du jugement.

J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse,
particulièrement dans _l'Eclair_ et dans _l'Echo de Paris_, une
campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir leur faute.

J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit,
en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j'accuse le
second conseil de guerre d'avoir couvert cette illégalité, par ordre,
en commettant à son tour le crime juridique d'acquitter sciemment un
coupable.

En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le
coup des articles 30 et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881,
qui punit les délits de diffamation. Et c'est volontairement que je
m'expose.

Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai
jamais vus, je n'ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour
moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte
que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter
l'explosion de la vérité et de la justice.

Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui
a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée
n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me traduire en cour
d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour!

J'attends.

Veuillez agréer, monsieur le Président, l'assurance de mon profond
respect.

  ÉMILE ZOLA




  Directeur
  ERNEST VAUGHAN


  LES ANNONCES SONT REÇUES:
  =142--Rue Montmartre--142=
  AUX BUREAUX DU JOURNAL

  _Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus_

  ADRESSER LETTRES ET MANDATS:
  =à M. A. BOUIT, Administrateur=
  Téléphone: 102-55

  POUR LA RÉDACTION:
  S'adresser à M. A. BERTHIER
  _Secrétaire de la Rédaction_

  ADRESSE TÉLÉGRAPHIQUE: AURORE-PARIS


                  *       *       *       *       *

  Modification: «ministère» remplacé par «ministre» (Lorsque le
                  ministre de la guerre,)





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