Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 1/2

By Nicolas de Blegny

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Title: Le livre commode des adresses de Paris pour 1692, tome 1/2

Author: Nicolas de Blegny

Annotator: Edouard Fournier

Release date: January 25, 2025 [eBook #75205]

Language: French

Original publication: France: Paul Daffis, 1878

Credits: Mireille Harmelin, Guy de Montpellier and the Online Distributed Proofreading Team at https://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica))


*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK LE LIVRE COMMODE DES ADRESSES DE PARIS POUR 1692, TOME 1/2 ***






  LE
  LIVRE COMMODE
  DES ADRESSES DE PARIS
  pour 1692

  par
  ABRAHAM DU PRADEL
  (NICOLAS DE BLEGNY)

  Suivi d’appendices,
  précédé d’une introduction, et annoté
  par
  ÉDOUARD FOURNIER

  Tome Ier


  PARIS
  Paul DAFFIS, ÉDITEUR-PROPRIÉTAIRE
  DE LA BIBLIOTHÈQUE ELZEVIRIENNE
  7, rue Guénégaud

  M DCCC LXXVIII




OUVRAGES DU MÊME AUTEUR.


  _Histoire de la Butte des Moulins_, suivie d’une étude historique sur
    les demeures de Pierre Corneille à Paris, avec deux vues de la Butte
    en 1551 et 1652. Beau volume in-18, papier vélin.           3 fr. 50

  _Le Vieux Neuf_. Seconde édition, refondue et considérablement
    augmentée. 3 vol. gr. in-18.                                  15 fr.

  _L’Esprit des autres_. 5e édition refondue et considérablement
    augmentée. 1 vol. in-18. (Sous presse.)


Imprimerie Gouverneur, G. Daupeley à Nogent-le-Rotrou.

Caractères elzeviriens de la Librairie Daffis.




INTRODUCTION.


Les guides, les _ciceroni_ dans les grandes villes sont aussi anciens
qu’elles. Nous n’en connaissons pas une, du moins, parmi les plus
célèbres, qui n’ait eu les siens.

Athènes et Corinthe offroient aux étrangers qui les visitoient tout un
collége d’_exégètes_ (conducteurs), «dont la charge, lisons-nous dans
les _Mélanges_ publiés sous le nom de Vigneul Marville[1], étoit de leur
faire voir ce qu’il y avoit de curieux, de leur expliquer les
inscriptions anciennes et tout ce qui concernoit ce genre d’érudition.»

  [1] T. II, p. 217.

Pausanias n’a eu garde de les oublier. Ils avoient dû, en effet, lui
être fort utiles pour le renseigner sur les détails d’art et d’antiquité
que recherchoit surtout sa curiosité de voyageur. L’_Itinéraire_, qu’il
rédigea au retour, est rempli de ce qu’il recueillit à leur suite. On y
trouve, à chaque page de ses dix livres, une trace de leurs
renseignements. Aussi cette première relation d’un _Voyage en Grèce_
n’est-elle, elle-même, comme on l’a justement remarqué[2], qu’une sorte
de guide du touriste.

  [2] _Biog. génér._, t. XXXIX, p. 415.

De Rome, où, comme à Pompeï, les affiches étoient d’ailleurs en
usage[3], il nous est resté, pour la ville même, distribuée par régions,
deux de ces «guides», l’un de Publius Victor, l’autre plus incomplet
attribué à Sextus Rufus. Les indications n’y sont que sommaires, mais
d’une multiplicité de détails surprenante. Il n’y est fait grâce ni du
plus petit temple (_ædicula_), ni d’un bain, ni d’un arbre, si peu qu’il
fût consacré, etc., etc.

  [3] V. _Le Vieux-neuf_, 2e édit., t. II, p. 64, note; et 94-95.

Pour compléter ces «guides» écrits et empêcher qu’on ne s’égarât dans le
labyrinthe de curiosités qu’ils vous ouvroient, il y avoit ce qu’on
appeloit des _nomenclatores_[4], sortes de guides parleurs et bavards,
qui--leur nom le disoit--vous faisoient la liste, vous dressoient, de
mémoire, «la nomenclature», nom par nom, de toutes les personnes de
distinction qui passoient, et vous animoient ainsi la rue ou la place,
dont ils vous montroient les monuments. De cette façon, ils
n’expliquoient pas seulement le tableau, ils y mettoient les
personnages.

  [4] Cicero, _ad Atticum_, lib. IV.

Les riches patriciens avoient de ces «nomenclateurs» parmi leurs
esclaves. Ils leur faisoient tenir pour eux une sorte d’almanach des
adresses, où figuroient, avec les gens composant leur «clientèle», les
nombreux amis que leur avoit tout naturellement attirés la richesse.

L’usage de ces esclaves dresseurs de listes existoit depuis longtemps
chez les rois d’Asie, et c’est de là qu’il étoit venu à Rome. Sénèque ne
le condamna que plus sévèrement dans un de ses traités, où cet étalage
de clients et d’amis ne lui semble qu’une ostentation de cour:

«C’est, dit-il[5], une vieille coutume des rois ou de ceux qui imitent
les rois, de faire enregistrer un peuple d’amis.»

  [5] _De Beneficiis_, lib. VI, cap. 33.

A côté du renseignement curieux, l’étranger pouvoit, dans les villes
grecques, trouver le renseignement utile. Étoit-ce un Corinthien de
passage à Athènes, ou un Athénien à Corinthe? Il trouvoit chez le chargé
d’affaires de sa ville tout ce qui pouvoit l’empêcher de s’égarer ou
d’être pris pour dupe. Le gîte même, s’il arrivoit avec une mission de
ses concitoyens, lui étoit fourni par ce fonctionnaire--nous allions
presque dire ce consul--complaisant et hospitalier[6].

  [6] Boeckh, _Economie politique des Athéniens_, t. I, p. 388.

On l’appeloit _Proxène_, mot que reprirent les Romains pour en faire
celui de _Proxeneta_, qui n’eut que plus tard le sens déshonnête qu’il
devoit prendre et que nous avons laissé à son dérivé proxénète.

D’abord, le _proxeneta_ n’étoit à Rome qu’une sorte de courtier en
marchandises, un intermédiaire, _intercessor_, comme dit Apulée, entre
l’acheteur et le vendeur. Il s’entremettoit pour les affaires de change,
qui ont toujours tant importé aux étrangers. Il négocioit même pour eux
ou pour les clients urbains, des emprunts à intérêts[7]. En ce cas, il
prenoit le nom spécial de _pararius_[8]. De tout cela, il formoit un
ensemble d’affaires, auxquelles on avoit donné le nom particulier de
_proxenetica_, et que la loi reconnoissoit comme légales: _Proxenetica_,
lit-on dans le Digeste[9], _jure licito petuntur_.

  [7] Sénèque, _Epître_ 119.

  [8] _Id. Des bienfaits_, liv. III.

  [9] Liv. 50, tit. 14, loi 1re.

Malheureusement d’autres trafics s’y mêlèrent peu à peu pour primer
honteusement les premiers. Le proxénétisme devint ce que nous
l’indiquions tout-à-l’heure. Les proxénètes finirent par n’être plus que
des entremetteurs, des courtiers de débauches.

D’autres agents, les _prosagogues_ qui s’étoient faits, comme les
_exégètes_, mais avec moins de savoir, les interprètes et les
conducteurs des étrangers, tombèrent aussi, par l’abus de leur métier,
dans une infamie qui n’étoit pas moins dégradante. Ils se firent espions
et délateurs. S’ils renseignoient d’un côté ceux qui en toute confiance
les prenoient pour guides, de l’autre ils donnoient sur eux et contre
eux des renseignements à la police. Plutarque s’en est plaint dans la
_Vie de Dion_.

A l’époque même, où ils n’en étoient pas encore là, et s’en tenoient aux
choses permises de leur profession d’interprètes et de «donneurs
d’indications», ils n’avoient pas semblé au grand philosophe de la vie
pratique, Aristote, d’une utilité suffisamment étendue et sérieuse.

Pour qu’il fût possible à chacun de s’éclairer sur ce qui importoit à
son travail ou à ses affaires, il eût voulu plus et mieux que ces
_proxénètes_ et ces _prosagogues_: «Il est nécessaire, dit-il, dans sa
Politique[10], qu’il existe quelque chose, où le peuple se puisse
renseigner, et perde ainsi tout prétexte d’être oisif.»

  [10] Liv. IV, ch. 15.

Un peu plus haut, dans le même traité[11], il avoit dit: «On convient
que, dans une république bien constituée, ce qui est nécessaire à chacun
doive être en évidence. Mais comment y parvenir? Ce n’est pas facile.»

  [11] _Id._ Liv. III, ch. 7.

Il fallut, en effet, bien des siècles encore, pour trouver la solution
du problème.

Au moyen-âge, l’utilité s’éclairant par la charité qui fut sa vraie
lumière, il y eut quelques bonnes tentatives et quelques progrès. Dès le
XIe siècle, par exemple, les pauvres filles en quête de conditions
surent où se renseigner pour en trouver une, et en même temps, qui mieux
est, n’eurent plus à chercher le refuge où elles pourroient l’attendre:
les bonnes sœurs de _l’Ostellerie Sainte Opportune_, ou _Catherinettes_,
leur offroient à la fois les renseignements et le gîte[12].

  [12] Piganiol de la Force, _Descript. de Paris_, t. II, p. 149; H.
    Bordier, _les Églises et les Monastères de Paris_, 1856, in-12, p.
    23.

En 1330, autre fondation d’une charité tout aussi hospitalière et plus
maternelle encore. Les nourrices de la campagne ne savoient pas, en
venant à Paris, comment trouver des nourrissons, et les mères
n’ignoroient pas moins de quelle façon se procurer des nourrices.
L’établissement dont nous voulons parler y pourvut, en satisfaisant les
unes et les autres.

La nourrice du fils du roi, alors régnant, Philippe VI, avoit quatre
grandes filles. On leur créa quatre offices, qui constituoient à chacune
le privilége de tenir un bureau, où mères et nourrices pussent se
présenter pour s’entendre[13].

  [13] Hurtaut et Magny, _Dict. hist. de la ville de Paris_, t. IV, p.
    216-217.

On les appela _Commanderesses_, ou mieux _Recommanderesses_, mot qui
étoit moins nouveau que leur office. Il servoit déjà depuis quelque
temps à désigner certaines femmes qui faisoient une concurrence active,
mais non gratuite, aux _Catherinettes_, pour le placement des servantes.

Nous en trouvons deux dans le registre de la Taille, de 1292, et, un peu
plus tard, elles furent assez nombreuses pour donner leur nom à la
partie de la rue de la Vannerie qu’elles occupoient du côté du carrefour
Guillori[14].

  [14] Voir ce qui en est dit plus loin.

Toute pauvre fille une fois placée par ces _Recommanderesses_, leur
payoit un droit sur ses premiers gages, tandis qu’en sortant de
_l’Ostellerie Sainte Opportune_, elle n’auroit eu qu’à dire merci à Dieu
et aux bonnes sœurs.

Où celles-ci mettoient la charité, les recommanderesses mettoient le
courtage.

Il commençoit, du reste, alors à fonctionner sous toutes les formes,
dans presque tous les métiers, même ceux où il étoit inutile. Estienne
Boileau eut donc soin d’exclure ceux qui en étoient les agents,
c’est-à-dire «les couratiers», partout où il ne les trouva pas
indispensables: «El mestier devant dit, écrit-il en pareil cas, ne puet
ne ne doit avoir nul courratier[15].»

  [15] Est. Boileau, _Livre des Mestiers_, p. 149.

Ils n’en furent ni moins nombreux, ni surtout moins tenaces, pour tâcher
de se faire une double proie, aux trousses du vendeur et de l’acheteur.

Il n’est pas de trafics où on ne les trouve.

Dans chaque négoce, se faufilent «proxenettes-couratiers, comme il est
dit dans le _Coustumier général_, et autres commis à vendre marchandises
à eux confiées[16].» Veut-on, par exemple, pour entrer en campagne, ou
seulement pour quelque passe d’armes, un bon cheval qui se puisse monter
sans retard? Désire-t-on une belle haquenée dont on puisse faire
présent? Le courtier est là qui vous les procure, et qui «moyenne»,
comme on disoit, le marché. «Alors, lisons-nous dans l’_Hystoire du
petit Jehan_[17], à propos des palefreniers et maréchaux du roi
auxquels, en arrivant, il s’étoit adressé, alors envoyèrent quérir les
plus souffisants et féables couratiers de chevaux, et se informèrent des
plus belles hacquenées qui fussent à Paris.»

  [16] T. I, p. 899.

  [17] Edit. Guichard, p. 69.

Les mariages mêmes déjà n’échappoient point à ces courtages, et les
moines, disoient les mauvaises langues, s’en mêloient quelquefois. Ils
se faisoient «moyenneurs de mariages», pour nous servir d’une expression
de Philippe de Commines[18]. Une satire contre les Dominicains, que cite
Du Cange[19], le leur reproche, ainsi que d’autres petits trafics de
même sorte:

  [18] Liv. III, ch. 8.

  [19] Nouv. édition, au mot _corraterius_.

    De maint marchié sont couratiers
    Encor plus ils sont curatiers
            De mariages.

Dans tout cela, si ce n’est pour ce qui intéressoit les servantes, à
l’isolement desquelles pourvoyoit si naturellement l’œuvre des
_Catherinettes_, il n’y avoit pas eu d’avantages nouveaux et surtout
désintéressés en faveur du public.

Il lui manquoit toujours, lorsqu’il cherchoit à se renseigner sur ce qui
lui importait pour ses besoins ou ses affaires, ce qui lui avoit manqué
du temps d’Aristote.

L’idée et les vœux de celui-ci restoient ainsi pleinement à satisfaire,
lorsqu’au XVIe siècle, un homme du meilleur sens, le père de Montaigne,
s’en occupa, croyant, d’ailleurs, qu’on ne l’y avoit pas devancé. Il ne
les réalisa pas, même par un commencement de mise en pratique; mais
grâce à l’autorité de son fils qui eut l’excellent esprit d’en parler
dans ses _Essais_, et d’insister sur ce qu’il y avoit là de nécessaire,
la voie cette fois leur fut ouverte, et quelqu’un, comme nous le
verrons, éclairé, guidé par ce qu’il en avoit dit, se trouva enfin pour
les faire passer du projet à l’application.

C’est au chapitre 34 de son 1er livre publié en 1580, que sous ce titre:
_D’un défaut de notre police_, Montaigne nous a entretenus des idées de
son père sur ce point, sans savoir plus que lui du reste qu’il y avoit
eu Aristote pour précurseur.

«Feu mon père, dit-il, homme pour n’estre aidé que de l’expérience et du
naturel, d’un jugement bien net, m’a dit autrefois qu’il avoit désiré
mettre en train, qu’il y eust es villes certain lieu désigné, auquel
ceux qui auroient besoin de quelque chose se peussent rendre, et faire
enregistrer leur affaire à un officier estably pour cet effect: comme je
cherche à vendre des perles, je cherche des perles à vendre, tel demande
un ouvrier, qui ceci, qui cela chacun selon son besoin, et semble que ce
moyen de nous entr’advertir apporteroit non légère commodité au commerce
public; car à tous coups il y a des conditions qui s’entrecherchent, et,
pour ne s’entendre, laissent les hommes en extrême nécessité. J’entends
avec une grande honte de notre siècle.»

A ce propos, prenant alors l’idée par ce qu’elle a de plus élevé et de
plus charitable, il laisse tout ce qui peut y intéresser le commerce, et
ne voit que ce qui s’y trouveroit d’avantages pour ceux que, malgré leur
mérite, la misère tue, les moyens leur manquant pour faire connaître que
ce mérite est sans emploi.

Il cite, comme exemples, deux savants, l’un d’Allemagne, l’autre
d’Italie, morts ainsi, dit-il, «en l’estat de n’avoir pas leur saoul à
manger, et, ajoute-t-il, croy qu’il y a mil hommes qui les eussent
appelez avec très-avantageuses conditions, ou secourus où ils estoient
s’ils l’eussent sçu.»

Il ne croit pas, en parlant ainsi, trop présumer du monde, «qui n’est
pas, dit-il, si généralement corrompu.» Il se porte d’ailleurs garant
que son père n’eût pas autrement agi. Quant à lui-même, en toute
franchise, il avoue qu’il n’y eût peut-être pas été si empressé: «En la
police œconomique, dit-il, mon père avoit cet ordre, que je sçay louer,
mais nullement ensuivre.»

Il n’y avoit guère en ce temps, sans journaux, que les livres pour
répandre les idées, et comme beaucoup ne paroissoient que pour être
oubliés, et déjà lettres mortes, ce qu’ils devoient faire connoître
restoit comme eux inconnu. Les _Essais_, par bonheur, ne devoient pas
être de ces mort-nés de la philosophie. Le succès fut très-vif, tant
pour le livre et ses merveilleuses fantaisies de forme et d’allures, que
pour ce qui s’y animoit de ces allures, et s’y revêtoit de cette forme.

Tout germa, tout fructifia de ce qu’il portoit comme semence. Deux ans
après qu’il eut paru, nous voyons, par exemple, publier à Genève un
petit livret de renseignements, qui pourroit bien déjà n’être qu’une
variante de ce que Montaigne avoit demandé. Il vouloit, lui, qu’en
arrivant dans une ville, chacun pût savoir où trouver ce qu’il lui faut.
Le petit livret dont nous parlons, prenoit l’idée à revers. Il vous
renseignoit sur tout ce dont il faudroit se garder en s’aventurant dans
les boutiques. C’étoit arriver au même but, mais par le côté contraire,
comme on arrive à l’orthographe par la cacographie.

Voici le titre, qui, tant il est net, nous dispensera de plus longues
explications:

_Le Livre des Marchands, fort utile à toutes gens pour cognoistre de
quelles marchandises on se doit donner garde d’estre deceu_. Genève,
1582, in-24.

Sous Henri IV, ce fut mieux. L’homme à projets du règne, Barthélemy de
Laffémas, «tailleur varlet de chambre du roy», comme il aimoit à se
qualifier[20], auquel l’industrie et le commerce de son temps durent
tant de progrès[21], et en auroient dû bien davantage, si le roi n’eût
pas été tué, s’inspira de l’idée même de Montaigne, et en fit le point
de départ d’un établissement, qui auroit pu complètement et
très-largement la réaliser.

  [20] _Variétés hist. et litt._ de la Biblioth. Elzévirienne, t. VII,
    p. 303.

  [21] _Id. ibid._

Ce fut, malheureusement, parmi ses projets, un de ceux qui ne
survécurent pas au roi qui protégeoit et qui encourageoit Laffémas. Cet
appui manquant, il n’y donna pas suite. Comme la plupart des autres, il
le laissa oublier, et l’on n’en sauroit même rien, si, après sa mort,
son fils Isaac, le même qui fut le grand justicier de Richelieu[22],
n’en avoit pas parlé dans le traité où, sous ce titre: _Histoire du
Commerce de France_, il ne fait guère que l’apologie historiée des
projets de son père[23].

  [22] _Id._, t. X, p. 18.

  [23] Cimber et Danjou, _Archives curieuses_, 1re série, t. XIV, p.
    409-430.

Il ne dissimule pas pour celui-ci que l’inspiration lui en avoit pu
venir de Montaigne «que l’on tient, dit-il[24], avoir eu d’aussi
heureuses et fortes conceptions qu’homme du monde.» Laffémas n’avoit
fait que développer et étendre; mais, cela, suivant son fils, en de
telles proportions, que le projet en étoit devenu ce qu’il pouvoit y
avoir de plus profitable pour l’intérêt du commerce.

  [24] _Id._, p. 424.

Plus de difficultés dès lors, plus d’entraves. Les affaires, que
d’utiles renseignements éclairent de partout, se font d’elles-mêmes,
aussi bien sur place que par correspondance, car Laffémas n’a pas limité
à une seule ville, à Paris, les bienfaits de sa fondation. Il veut que
l’Europe, que le monde entier, s’il se peut, en profite.

Son fils, qui reprend l’idée, ne la voit pas autrement. Il
s’enthousiasme de cet accord universel entre tous les trafiquants de
l’Univers; il ne voit rien qui puisse y faire obstacle, si les Bureaux
dont son père a conçu l’idée d’après celle du père de Montaigne, peuvent
enfin s’établir:

«J’attends cela, dit-il[25], de l’invention des Bureaux publics, qui
défaillent seuls à la facilité de nostre commerce pour le rendre à sa
perfection, bureaux, autant nécessaires à l’utilité publique et
commodité des particuliers, que tout ce qu’on a inventé pour cet effet.

  [25] _Id._, p. 423-424.

«Je veux, ajoute-t-il, signaler cette proposition entre les plus belles
que mon père ait jamais faites, pour la première, plus utile, et de plus
grande importance; aussi est-ce un remède tacite à une infinité d’abuz,
et un préservatif contre la ruine de notre commerce, outre tant de
diverses particularitez que cela demanderoit autant d’histoires,
auxquelles toutesfois faudroient et le papier et le temps.

«Il me suffira de dire que seront certaines correspondances que les
agents publics auront par toutes les villes, pour faire gérer et
négocier toutes sortes d’affaires, qui leur seront volontairement et
sans contrainte apportées en leurs bureaux.»

Cela étoit écrit en 1606. Trois ans après, l’idée reparoissoit, mais
sous une autre forme, celle d’une feuille de publicité, comme nous
dirions, qui devoit répandre dans le public, ce que d’après le système
de Laffémas, on eût été obligé d’aller chercher dans ses Bureaux.

C’est sous le nom de _Gazette_, employé là pour la première fois, que
cette feuille d’annonces devoit paroître. Viollet-le-Duc possédoit le
seul livret qui en fut publié, et dont la rareté est telle, que jamais
on n’en a vu que son exemplaire[26].

  [26] Brunet, _Manuel du Libraire_, t. II, col. 1515.

Cette _Gazette_ est en rimes, comme il y en eut tant d’autres plus tard,
et comme il en couroit déjà de manuscrites. Où la prose n’eût pas été
permise alors, on toléroit ainsi les vers, surtout lorsque, comme ici,
ils ne prenoient pas l’allure trop sérieuse de l’alexandrin.

Dès son titre, _la Gazette_, dont nous allons faire rapidement
l’analyse, d’après celle qu’en a donnée Viollet-le-Duc[27], se déclare
on ne peut mieux renseignée de partout, sur les hommes et sur les
choses:

  [27] _Bibliothèque poétique_, 1843, in-8, p. 349-350.

    La Gazette en ses vers
    Contente les cervelles;
    Car de tout l’Univers
    Elle reçoit nouvelles.

On y semble savoir ce que désiroient le père de Montaigne et Barthélemy
de Laffémas. Tout ce qu’ils n’ont vu qu’en utopie, on y satisfait, on le
réalise:

    La Gazette a mille courriers
    Qui logent partout sans fourriers.
    Il faut que chacun luy réponde
    Selon sa course vagabonde
    De ça, de là diversement,
    De l’Orient en Occident
    Et de toutes parts de la sphère,
    Sans laisser une seule affaire
    Soit d’Edit, de Commissions
    De düels, d’exécutions
    De pardons pleniers et de bulles,
    D’ambassadeurs venus en mulles...
    De morts subites de seigneurs
    Pour estre trop grands besogneurs
    Des livres de maître Guillaume...
    Quoi qu’il en soit rien ne s’oublie
    Car la Gazette multiplie
    Sans relasche ses postillons
    Vistes comme des Aquilons...

Les modes auront leur chapitre, tant pour les hommes que pour les
femmes.

Les uns apprendront de quels «points» ou dentelles il sied de se parer,
et quel air il faut donner, en la portant, à «la roupille» ou cape à
l’espagnole:

    La Gazette en cette rencontre
    Comprend les poincts plus accomplis,
    Les courtes chausses à gros plis,
    Les gauches détours des roupilles, etc.;

Les autres, pour lesquelles le détail est plus étendu et plus galant,
trouveront où s’aller fournir de ce qui intéresse la coquetterie:

          ... Les méthodes,
    Les inventions et les modes,
    Des cheveux neufs à qui les veut,
    Fausses gorges à qui ne peut,...
    Nœuds argentez, lassets, escharpes,
    Bouillons en nageoires de carpes,
    Porte-fraises en entonnoir,
    Oreillettes de velours noir,
    Doubleures aux masques huilées,
    Des mentonnières dentellées,
    Des sangles à roidir le busc,
    Des endroits où l’on met le musc.

Tout cela--le ton le dit assez--n’étoit que pour rire. Cette _Gazette_
semble n’avoir paru que pour se moquer de ce que pourroit être un
journal de faits, d’avis et d’affaires, qui paroîtroit régulièrement.
C’est ce qui,--de même que la mise à exécution si longtemps attendue de
l’idée de Montaigne et de Laffémas,--ne tarda guère.

Dès 1612, Théophraste Renaudot, médecin du Roi, se disant grand ami des
pauvres, étoit en instance près de la Reine-mère, tant pour obtenir le
privilége d’une _Gazette_ que pour avoir, par privilége aussi,
permission d’ouvrir des _Bureaux d’adresses_; il complétoit ainsi une
fondation par l’autre.

Les _Bureaux_ furent la première.

Elle devança l’autre d’une année. A peine Renaudot en avoit-il émis le
projet, qu’il recevoit l’approbation royale. Ce n’étoit malheureusement
qu’un premier pas. Cinq ans se passèrent avant qu’il pût en faire un
second. L’approbation royale étoit du 14 octobre 1612, il n’eut que le
30 octobre 1617 l’approbation du Conseil. Il fallut ensuite aller devant
le Parlement pour obtenir arrêt de jouissance. Les démarches traînèrent,
avec une formalité par étape, du 30 octobre 1617 au 3 février 1618, et
du 16 février 1618 aux 28 février et 22 mars 1624.

Ce n’est pas tout, quand le Parlement eut approuvé, une nouvelle halte
fut nécessaire pour attendre la déclaration royale. Elle n’arriva que
quatre ans après, le 31 mars 1628. Enfin, Renaudot touchoit à son
privilége, mais il fallut, pour qu’il l’eût en main, plus de quatorze
mois encore. Il n’est daté que du 8 juin 1629.

C’est à la fin de cette année qu’il ouvrit, je ne dirai pas _son_, mais
ses _Bureaux_. Lui-même, en effet, nous donne à entendre qu’il en avoit
plusieurs, par la façon dont il fait connoître son adresse, à la fin du
titre de la brochure gr. in-4º de 34 pages, qu’il publia aussitôt pour
mettre son idée au grand jour:

«_Inventaire des addresses du Bureau de rencontre, où chacun peut donner
et recevoir advis de toutes les nécessitez et commoditez de la vie et
société humaine, par permission du Roy contenue en ses brevets_, etc.
_Dédié à Mgr le Commandeur de la Porte_, par T. Renaudot, médecin du
Roy, à Paris, à l’enseigne du Coq, rue de la Calandre, sortant au Marché
neuf où l’un desdits bureaux d’addresse est estably.»

Dans la longue préface, dont il fit précéder cet «inventaire», et que
reproduisit le _Mercure françois_ de l’imprimeur Richer[28], seul
journal qu’il y eût alors, il avoue, tout en exposant son idée, à
quelles sources il l’a prise. Il la déclare «fondée sur l’autorité
d’Aristote»; il invoque aussi celle du sieur de Montagne (_sic_) «pour
servir de preuve, dit-il, au bien qui en reviendra.»

  [28] T. XXII.

C’est en faveur des pauvres gens surtout qu’il veut que ce bien se
produise. En cela, «Messieurs de la Ville» l’ont compris, puisqu’ils lui
ont donné leur approbation, et Messieurs de l’Hôtel-Dieu de même, qui,
le 28 janvier 1628, lui ont accordé leur patronage.

Renaudot est médecin, et ne l’oublie jamais. C’est ce qui lui a fait
rechercher, et sans doute aussi obtenir cette protection de
l’Hôtel-Dieu. L’indication des remèdes qu’il aura, d’ailleurs, soin de
choisir parmi les plus efficaces, sera pour une bonne part dans les
annonces qu’il fera, et dont il complétera le détail à ceux qui voudront
bien venir se renseigner au «Bureau d’adresse.»

Par une singulière rencontre, Blegny, le faux Abraham du Pradel, dont
nous publions le volume, s’occupoit aussi--nous ne le verrons que trop
bientôt--de remèdes de toutes sortes.

S’il publia son _Livre commode_, ce fut avant tout pour les faire
connoître, de même que Renaudot n’établit en grande partie ses bureaux,
nous en jurerions, que pour donner de la publicité aux siens[29]. Ainsi
les deux premières sources de renseignements qui se soient ouvertes pour
le public, seront parties du même point vers un but identique.

  [29] _V._ notamment à ce sujet dans le _Sommaire du chapitre de
    l’Inventaire des addresses du Bureau_ ou _table de Rencontre_, les
    chap. XVI-XVIII.

Renaudot, le médecin, pour trouver l’emploi de sa science et de ce
qu’elle possédoit, fonde _le Bureau d’adresse_; Blegny, l’apothicaire,
pour faire connoître et placer ses marchandises d’empirique, crée
_l’Almanach des adresses_.

Renaudot n’avoua qu’à mots couverts, on le comprend, cette particularité
tout égoïste de sa fondation. La charité en fut le but le plus en vue.
Venir en aide aux pauvres sans ouvrage, voilà, nous l’avons dit, voilà
surtout ce qu’il veut. Il reprend aussi, mais plus largement et à poste
fixe, la mission des _proxènes_ antiques et des _couratiers_ du
moyen-âge, mais cela sans vouloir faire concurrence à ceux qui, de son
temps, pouvoient encore avoir des métiers pareils. Loin de chercher à
les gêner, il les aidera: son bureau, dit-il, «sera commode même aux
entremetteurs et proxenettes.»

Il va de soi que ces mots sont pris par lui dans le sens le plus
honnête.

Ensemble, eux et lui serviront de guides aux nouveaux venus de
l’étranger et de la campagne, dont Paris, s’ils ne savent comment s’y
retrouver, épuise si vite les ressources.

Il se dévouera plus qu’aux autres encore à ces imprudents des villages
et des champs qui s’y risquent à l’aventure, sans prévoir que les pires
dangers les attendent à l’arrivée:

«Ils accourent à trouppes en cette ville, qui semble être le centre et
le pays commun de tout le monde, sous l’espérance de quelque avancement,
qui se trouve ordinairement vaine et trompeuse: car ayant despencé ce
peu qu’ils avoient au payement des bienvenuës et autres frais inutiles
ausquels les induisent ceux qui promettent de leur faire trouver employ,
et aux desbauches qui s’y présentent d’elles-mêmes auxquelles leur
oisyveté donne un facile accez, ils se trouvent accueillis de la
nécessité avant qu’avoir trouvé maistre: d’où ils sont portés à la
mendicité, aux vols, meurtres et autres crimes énormes... Au lieu qu’ils
pourront désormais une heure après leur arrivée en cette ville, venir
apprendre au Bureau s’il y a quelque employ ou conditions présentes, et
y entrer beaucoup plus aisement qu’ils ne feroient après avoir vendu
leurs hardes; ou, n’y en ayant point, se pourvoir ailleurs. Ce qui fera
discerner plus facilement les fainéants et gens sans adveu, pour en
faire la punition qu’il appartiendra.»

Combien en coûtoit-il pour aller se renseigner chez Renaudot, et pour
faire inscrire sur son registre l’emploi qu’on désiroit, la marchandise
qu’on vouloit acheter ou vendre, la maison qu’on cherchoit à louer, et
jusqu’à la femme ou au mari, dont il pouvoit vous pourvoir, car la
variété de ses indications s’étendoit à toutes ces choses? Il a oublié
de nous l’apprendre, mais nous l’avons su autrement.

Pendant le second carnaval, c’est-à-dire celui de 1631, qui suivit
l’installation du Bureau de rencontre, lequel, on le pense bien, avoit,
comme invention nouvelle, fait événement, un faiseur de «ballets»,
sortes de pièces, moitié dansées, moitié chantées, où tous les à-propos
étoient volontiers saisis, s’avisa de prendre pour types Renaudot et ses
clients. Il le fit assez habilement pour que le Roi demanda que la
représentation fût donnée devant lui; et aussi,--ce qui étoit un succès
peu commun,--pour que la pièce après avoir été chantée et dansée fût
imprimée.

En voici le titre: _Ballet du Bureau de rencontre dancé au Louvre devant
Sa Majesté_, Paris, Julian Jacquin, 1631, in-8º[30].

  [30] Les vers furent publiés à part, la même année, sous ce titre:
    _Vers du ballet du Bureau des addresses_, 1631, in-4º; ils ont été
    reproduits dans la publication de J. Gay, _Ballets et mascarades de
    Cour_, 1869, in-12, t. IV, p. 175.

Le Maistre du Bureau avoit, cela va de soi, l’un des principaux rôles.
Il commençoit par un récit en trois couplets, dont nous vous devons au
moins le premier, car c’est là que se trouve le détail sur le prix des
consultations oublié dans la préface de Renaudot. Il étoit, comme on va
le voir, des plus modiques:

    Filles, qui cherchez maris,
    Beaux garçons qui cherchez femmes,
    Voici l’unique à Paris
    Pour satisfaire vos âmes;
    Donnez trois sols tant seulement
    Vous aurez contentement.

Quelques couplets d’avant-propos adressés _aux Curieux_, avoient avec
une assez gaillarde bonhomie expliqué le secret de l’affaire, où, en
payant si peu, l’on pouvoit tout apprendre. C’est la préface même de
Renaudot résumée en rimes:

    En ces lieux il vient d’arriver
    Un homme qui sçait tout trouver,
    Et chez qui de tout se fait montre;
    Sans dire ni quoy ni comment,
    Son registre ne faut, ne ment;
    Il tient le bureau de rencontre.

    Par luy vous aurez des laquais
    Et pour faire de bons acquets,
    Vous sçaurez les terres en vente,
    Les offices à résigner,
    Les deniers qui sont à donner
    Et prendre à interests ou rente.

    Aussi vous serez advertis
    Qu’il enseigne les bons partis
    Pour assortir un mariage,
    Et fait, comme bien entendu,
    Retrouver ce qu’on a perdu,
    Fors des filles le pucelage.

    Pour les femmes il est adroit
    A leur trouver en bon endroit
    Nourrice ou servante à les suivre.
    En son fait, il est diligent,
    Et ne couste guère d’argent
    A se faire escrire en son livre[31].

  [31] Il parut une nouvelle édition de ce livret l’année suivante, avec
    des preuves de la reconnoissance de Renaudot: _Ballet du Bureau de
    rencontre, ensemble le remercîment du maître du Bureau d’Adresse, à
    ceux qui dansent son ballet_, 1632, in-12.

Tout cela n’est que de la vérité en riant. Renaudot, en son bureau, vous
pourvoyoit réellement, si pour trois sous on vouloit bien s’adresser à
lui, de tout ce qui vient d’être ici annoncé aux curieux.

On a connu la diversité des renseignements dont il disposoit, et l’ordre
avec lequel il en tenoit registre, par la découverte et la
reproduction[32] que nous fîmes, il y a quelques années, de l’une des
feuilles qui, ajoutant une publicité de plus à son établissement, en
étoient, pour ainsi dire, les _petites affiches_.

  [32] _Variétés histor. et litt._, t, IX, p. 51 et suiv.

Il en sera parlé un peu plus loin dans une note[33].

  [33] P. 9-10.

Ces feuilles, qui paroissoient tous les trois mois--celle que nous avons
publiée est la quinzième--complétoient pour Renaudot non-seulement son
Bureau d’adresse ou de publicité, comme nous dirions, mais aussi son
autre fondation, _la Gazette_, qui, à partir de 1631, c’est-à-dire un an
après que ce Bureau eut été fondé, marcha de pair avec lui.

Lorsqu’un événement n’avoit pas assez d’importance pour figurer dans la
Gazette, ou exigeoit un récit trop développé pour qu’il y pût trouver
place, Renaudot l’ajournoit jusqu’à sa prochaine feuille d’annonces. Il
l’y publioit en tête, et les petites affiches venoient à la suite avec
tout leur détail.

Pour cette _Quinziesme feuille du Bureau d’addresse_, datée du 1er
septembre 1633, c’est le récit du _Duel signalé d’un Espagnol et d’un
Portugais_ qui marche en avant. Puis viennent les annonces les plus
diverses: Terres seigneuriales à vendre; Maisons et héritages aux champs
en roture à vendre; Maisons à Paris à vendre; Maisons à Paris à donner à
loyer; Maisons à Paris qu’on demande à prendre à loyer; Rentes à vendre,
Bénéfices à permuter, Offices à vendre; Meubles à vendre, et enfin
Affaires meslées, où se trouve en effet le pêle-mêle de demandes ou de
propositions le plus singulier et le moins attendu.

On demande par exemple: «un homme qui sçache mettre du corail en œuvre.»
Plus loin, c’est quelqu’un qui «voudroit compagnie pour aller en Italie
dans quinze jours.» Mais l’article le plus curieux est le dernier: «On
vendra un jeune dromadaire à prix raisonnable.»

Nous ignorons quel fut au juste le sort du Bureau d’adresse, et surtout
celui de ses feuilles d’annonces. Renaudot, qui ne mourut qu’au mois
d’octobre 1653, laissa-t-il cet établissement dans un état aussi
prospère que La Gazette, qui, elle, ne périclita jamais, l’appui du Roi,
dont le gazetier n’étoit guère que le mandataire, étant toujours là pour
la garer de tout péril? Nous ne le pensons pas.

Un livret antérieur de six ans à la mort du gazetier, et que nous ne
connaissons malheureusement que par son titre: _Renouvellement des
bureaux d’adresse_, prouveroit que l’affaire n’avoit pas marché sans
encombre[34]. Si on la renouveloit, c’est qu’elle avoit été interrompue,
et la ténacité de Renaudot étant connue, la malechance pouvoit seule
avoir été cause de cette interruption.

  [34] Il existoit sans doute encore toutefois en 1640, car à cette
    époque un nouveau _Ballet du Bureau des Addresses_ fut dansé à Dijon
    devant Mgr le Prince. _V._ le recueil cité plus haut, t. VI, p.
    17-31.

La brochure, qui semble annoncer la reprise, est de 1647, mauvaise date,
car elle touche de bien près celle des premiers troubles de la Fronde,
où--ce qui arriva du reste--le journalisme des libelles pouvoit bien
naître, mais où, par contre, celui des annonces n’étoit pas de nature à
revivre. Nous sommes donc autorisés à penser que la _Feuille du bureau
d’adresse_, malgré ce que Renaudot avoit fait pour la ressusciter, étoit
bel et bien morte, lorsqu’il mourut lui-même en 1653.

Il n’en resta que le privilége, qui fut plusieurs fois cédé plus tard,
comme nous verrons.

La _Gazette_, qui avoit aussi le sien, survécut à Renaudot. Transmise à
son fils Eusèbe, comme un héritage, elle fit survivre le Bureau
d’adresse, d’où elle étoit sortie avec l’autre feuille.

Le logis de Renaudot, où Eusèbe resta jusqu’à ce que le roi lui eut
donné un logement au Louvre, n’eut plus que ce nom: le Bureau.

Il n’y falloit plus aller, comme auparavant, chercher «les adresses» et
les renseignements, qu’il sembloit toujours annoncer, mais à la place on
y trouvoit des nouvelles. Loret, lorsqu’il en manque pour avoir de quoi
mettre en rimes dans sa _Muse historique_, ne va pas autre part, et il
recommande de faire comme lui, pour peu qu’on veuille, sur un fait
quelconque, en savoir plus qu’il n’en a pu dire.

«Mais», dit-il, par exemple[35], à propos des merveilles d’une fête
donnée à Naples,

    Mais si quelques gens curieux
    Désirent de s’instruire mieux...
    Il faut aller chez Renaudot,
    C’est-à-dire au Bureau d’adresse.

  [35] _La Muse historique_. Édit. Elzévir., t. III, p. 268 (16 octobre
    1660).

Cette source, la seule où voulut puiser son journalisme naïf, étoit pour
lui celle de toutes vérités.

«Messieurs du Bureau d’adresse», comme il appelle Eusèbe Renaudot et ses
aides[36], se tenoient-ils muets sur une affaire, elle étoit pour lui
non avenue. Si le bruit, par exemple, s’est répandu que le maréchal
Fabert est mort à Sedan, le 17 mai 1662, il n’y veut pas croire, la
_Gazette_ n’en ayant pas parlé. Le fait, vrai pour tout le monde, ne le
sera pour lui que lorsqu’elle l’aura certifié:

  [36] _Ibid._, p. 578 (2 décembre 1662).

    Mais je doute un peu sur ce point
    Car le Bureau n’en parle point,
    C’est-à-dire la gazette en prose,
    Qui doit parler de toute chose[37].

  [37] _Ibid._, 540 (19 août 1662).

La _Gazette_, qui ne paroissoit alors que tous les samedis[38], est «son
oracle hebdomadaire». Ses «ordinaires», c’est-à-dire ses numéros de
chaque semaine suffisent plus ou moins à Loret, mais lorsqu’elle se
donne le luxe assez fréquent d’un «extraordinaire»--nous dirions d’un
supplément--il est ravi.

  [38] _Id._, t. II, p. 278 (21 juillet 1657).

Les événements d’importance, dont le récit demande à être développé,
fournissoient la matière de ces extraordinaires, qui étoient, à la suite
de la _Gazette_, ce qu’avoient été, comme nous l’avons vu plus haut, les
récits ou descriptions à développements de même sorte, mis en tête des
feuilles du Bureau d’adresse, dont, par là, survivoit ainsi quelque
chose.

La _Gazette_ n’en avoit rien gardé de plus. Jamais, dans aucune partie
de ses numéros, ne figurèrent ce qu’alors on appeloit «adresses», et ce
que nous appelons «annonces et réclames».

En cela, Loret la suppléa. Sa _Muse historique_ ne s’en fit pas faute.
Chaque fois qu’il y peut recommander quelqu’un, faire valoir quelque
chose, indiquer où se peut voir tel spectacle ou telle curiosité et à
quel prix, il y est exact et empressé.

Les feuilles du Bureau se retrouvent ainsi en détail dans les siennes
avec la rime de plus.

Il nous fait par exemple connoître le premier les expériences de la
machine à calculer du jeune Pascal[39], sans trop se douter qu’il donne
l’éveil sur le génie d’un grand homme. A quelques rimes plus loin, en
effet, il est bien autrement enthousiaste pour l’empirique de
philosophie Lesclache.

  [39] _Id._, t. I, p. 232 (14 avril 1652).

Richesource, autre charlatan, mais de beau langage, obtient de même la
faveur d’une chaude recommandation de sa part, avec regret de ne pouvoir
dire encore où se donneront ses conférences. Il y aura heureusement un
moyen de la savoir, et il l’indique:

    Les affiches qu’en grosse lettre
    Aux lieux publics il fera mettre
    Pourront apprendre où ce sera
    Au curieux qui les lira[40].

  [40] _Id._, t. II, p. 553 (16 nov. 1658).

Quand il peut lui-même dire l’adresse, il n’y manque pas. Ainsi, à
propos de la _Philosophie_ de René Bary, après avoir écrit:

    Ce livre de rare mérite
    Chez son propre auteur se débite,

il met en marge: «Rue des Petits-Champs, chez madame Bataille[41].»
C’est, comme on voit, l’annonce complète.

  [41] _Id._, t. III, p. 186 (3 avril 1660).

Ailleurs, s’il parle d’un concert, tel que ceux qu’on faisoit entendre
en 1656, dans la salle du Palais-Royal, construite par Richelieu pour sa
_Mirame_, et qui devoit quelques années après devenir le théâtre de
Molière, il nous en dit le prix:

      ... obligeamment on les donne
    Pour trente sols chaque personne[42].

  [42] _Id._, t. II, p. 263 (11 nov. 1656).

Il annonce aussi, avec le même détail, chaque livret des Ballets du Roi,
que publie Balard, «et», dit-il,

    Et qui doit être lu de tous
    Car on ne le vend que dix sous[43].

  [43] _Ibid._, p. 292 (20 juillet 1657).

Pour les théâtres en général, il ne ménage pas les recommandations, ou,
suivant le mot d’aujourd’hui, «les réclames». Celui du Marais est en
cela toutefois son préféré. C’est là que Corneille donne le plus
volontiers ses pièces, et en qualité de Normand, Loret croit se devoir
tout entier à cette gloire de la Normandie. La tragédie à machines, _la
Toison d’or_, que Corneille appela d’abord _Jason_, est-elle à l’étude
dans cet ancien Jeu de paume de la rue Vieille-du-Temple, vite, il en
avertit le public. Dès que les premières affiches sont placées, sans
perdre de temps il lui dit: lisez-les:

    Les affiches marquent l’endroit,
    L’heure, le prix et la journée
    Et c’est toujours l’après-dînée[44].

  [44] _Ibid._, p. 437 (3 déc. 1661).

Voilà, certes, un beau zèle de littérature. Il ne faut pas lui en savoir
trop de gré. Pour des spectacles bien inférieurs: pour un jeune géant
qui se fit voir au bout du Pont-Neuf, une première fois[45], et qui,
deux ans plus tard, y revint, après avoir encore grandi[46]; pour une
baleine bien conservée, que l’on pouvoit aller admirer à Chaillot[47],
il n’a pas des réclames moins empressées.

  [45] _Ibid._, p. 543 (15 oct. 1659), et p. 552 (16 nov.).

  [46] _Id._, t. III, p. 288 (4 déc. 1660), et p. 306 (8 janv. 1661).

  [47] _Id._, t. II, p. 543 (19 oct. 1659), et p. 549 (2 novembre).

Que gagnoit-il à tout cela? Rien, ou fort peu de chose: son entrée
gratuite, par exemple, de même qu’il avoit, sans doute à meilleur
compte, après les avoir maintes fois annoncées, quelques billets des
loteries, dont il couroit avidement les hasards[48].

  [48] _Ibid._, 433 (19 janv. 1658) et p. 439 (2 fév.).

Il trouvoit aussi en voisin quelques profits à grappiller lorsqu’il
avoit agréablement parlé des fournisseurs renommés qui se groupoient,
non loin du Louvre, aux environs de l’hôtel Schomberg, son premier
logis, ou tout près de la rue de l’Arbre-Sec, qu’il habita ensuite.

Il est certain que lorsqu’il s’étend complaisamment sur les merveilles
de l’industrie de sa voisine Madame Touzé, qui fait les perruques du bel
air[49]; sur les friandises de la célèbre boutique de Francœur,
l’épicier-confiturier[50], et sur l’excellence de l’hypocras de
Maillard, «apothicaire près Saint-Honoré[51]», c’est-à-dire à deux pas
de Francœur, ses rimes ne doivent pas être désintéressées. Il y aura
gagné, nous n’en doutons pas: ici, une perruque de la bonne façon; là,
quelques sucreries, et, chez Maillard, quelques-unes de ces bonnes
rasades, qui ne lui déplaisoient point.

  [49] _Ibid._, p. 186 (29 avril 1656).

  [50] _Id._, t. III, p. 293 (18 déc. 1660).

  [51] _Ibid._, p. 307 (8 janv. 1661).

Du Laurens, qui lui succéda, sous le pseudonyme de Robinet, fit de même
et eut sans nul doute les mêmes profits. Il étendit, qui plus est, la
réclame et la détailla mieux. Comme en ce temps-là tout étoit curiosité:
soit une belle maison, telle que l’hôtel d’O, dans le quartier du
Temple, qu’on alloit voir pour un sou[52], soit simplement quelques
beaux meubles, dont la mise en montre se payoit aussi, mais souvent plus
cher, il ne perdit pas l’occasion de faire quelques bénéfices par
l’annonce de ces choses à recommander. Il nous semble notamment plus que
probable que ce ne fut pas pour rien qu’il se complut à décrire trois
meubles, dont au mois d’avril 1669 on faisoit l’exposition rue de
Richelieu. Il eut certainement sa part plus ou moins forte dans les
quinze sous par personne qu’on payoit pour les aller voir. _Ce sont_,
dit-il,

  [52] Sauval, t. II, p. 241.

    Ce sont trois rares cabinets
    Dont plus de mille Robinets,
    Comme moi, seroient fort à l’aise,
    Et même, ne vous en déplaise,
    Des comtes, barons et marquis[53].

  [53] _Gazette_ de Robinet (13 avril 1669).

En marge, il ajoute pour bien fixer l’annonce par l’adresse exacte: «Rue
de Richelieu, vis-à-vis le bain royal; la porte est marquée par des
affiches.»

Il y avoit dans tout cela un vieux reste de la Feuille d’adresse, mais
cette feuille même ne reparaissoit pas.

Personne ne s’en faisoit céder le privilége resté aux Renaudot. Au
commencement de 1670, il y eut un essai, sans doute par suite d’une
cession. Il semble n’avoir pas abouti. Nous n’avons vu qu’un numéro, le
premier, de la feuille nouvelle qui portoit ce titre: _Liste des avis du
Bureau d’adresse_.

Six ans se passèrent sans qu’il y eût d’autre tentative pour reprendre
et exploiter le privilége.

François Colletet, le poète crotté de Boileau, s’en avisa enfin avec
l’audace des gens qui n’ont rien à perdre.

En 1676, à la fin de juin, on vit tout à coup paraître une feuille,
s’annonçant comme hebdomadaire et portant ce titre: _Journal de la ville
de Paris contenant ce qui se passe de plus mémorable pour la curiosité
et avantage du public_.

C’étoit la Gazette d’affaires et d’adresses de François Colletet. Il y
procédoit un peu comme Renaudot, avec cette différence qu’au lieu d’y
mettre en tête, avant les annonces et avis, quelque long récit, tenant
toute la place, il y débitoit les nouvelles intéressantes de la semaine,
jour par jour.

C’est ce qui le perdit. Sur une plainte qui vint, soit de la _Gazette_,
qui ne vouloit pas qu’on touchât à ces nouvelles mondaines auxquelles
elle-même pourtant dédaignoit de toucher; soit du _Mercure_, encore
nouveau et d’autant plus ardent à repousser tout ce qui pouvoit lui
faire concurrence, Colletet reçut ordre de ne pas continuer, du moins
sous cette forme. Son journal n’eut qu’un seul numéro.

Ce n’étoit pas une fin, toutefois, ce n’étoit qu’une évolution. Se
conformant à l’ordre reçu, sans abandonner l’idée qu’il reprenoit,
Colletet ne perdit pas un jour, pas une heure, pour publier une feuille
nouvelle, où il se tiendroit, en un cahier de quelques pages, aux seules
choses, dont on lui laissoit la disposition: les annonces.

Le contenu de la feuille changeant ainsi, son titre devoit changer de
même. Il prit celui-ci: _Journal des avis et affaires de Paris_.

La première fondation de Renaudot renaissoit. Colletet donna même à
entendre que son entreprise n’en étoit que la suite. Dans le préambule
d’un de ses numéros, il parle du privilége obtenu sous Louis XIII pour
une feuille de même sorte que la sienne, et qui seroit devenu le
sien[54]. Ce ne peut être certainement que celui de Renaudot le père,
dont il seroit ainsi, nous ne savons comment et avec quel argent,
parvenu à se faire accorder la cession.

  [54] V. un excellent article de M. Hatin, _Bulletin du Biblioph._,
    1861, p. 620.

A son Journal d’affaires, il joignit, lui aussi, comme c’étoit naturel,
un Bureau d’adresse. Il y recevoit trois fois par semaine: les lundi,
mercredi et vendredi, de une heure à six heures dans les grands jours,
et jusqu’à quatre et demie seulement en hiver. C’est là qu’il
complétoit, pour quiconque venoit le consulter, les avis donnés par sa
feuille, et que prudemment il n’avoit fait qu’y ébaucher.

Ce bureau, d’abord, fut bien loin du centre des affaires pour lesquelles
il étoit fondé. Colletet n’avoit pas voulu quitter la maison du quartier
Saint-Victor, où avoit vécu son père, et dont comme lui il étoit fier,
car c’étoit celle que Ronsard avoit habitée. C’est donc rue du Mûrier,
derrière le séminaire de Saint-Nicolas-du-Chardonet, qu’étoit installé
son bureau. Personne ne vint, et force lui fut, la clientèle n’arrivant
point, de faire quelques pas pour aller à elle. Nous voyons que lorsque
parut son onzième numéro--c’étoit peut-être un peu tard--il s’y étoit
enfin décidé.

Son nouveau logis fut du reste d’un bon choix, il se trouvoit sur le
quai de l’Horloge, entre le Palais et le Pont-Neuf, les deux centres du
mouvement et de la vie de Paris en ce temps-là. Dans cette même onzième
feuille, il donne cette nouvelle adresse de son bureau, aussi bien qu’on
pouvoit la donner alors, le numérotage des maisons n’existant pas: «Les
affiches, ajoute-t-il, marqueront la porte.» Trois semaines après, le
public ne l’avoit pas trouvée. Colletet nous l’apprend avec une certaine
mélancolie dans son numéro quatorze, celui du 27 octobre. Il y avoue
qu’on ne le connoît encore que bien peu, mais il ne perd pas courage. Il
espère que les affaires viendront, «Dieu aidant, écrit-il, quand les
affiches auront fait connoître plus amplement notre demeure, et que nos
cahiers auront appris à tout le monde ce qui résulte de notre innocent
commerce.»

Le mot «innocent» n’est pas mis là pour rien par Colletet. Sa feuille
étoit menacée, comme l’avoit été la première, on intriguoit contre elle
auprès de La Reynie, qui, par un mémoire, en référoit à Colbert, dont le
fils, Seignelay, se chargeoit d’en résumer la teneur au roi. Le pauvre
Colletet avoit plus ou moins vent de tout cela, et il croyoit aller
au-devant du coup et le parer, en faisant valoir, comme on l’a vu, ce
que son humble feuille avoit d’inoffensif. Il en fut pour sa peine.

Le 27 novembre, c’est-à-dire jour pour jour un mois après sa timide
protestation d’innocence, M. de La Reynie reçut ordre de supprimer ses
cahiers. Voici la lettre qu’à ce propos lui écrivit Seignelay:

«J’ai rendu compte au Roy du mémoire que vous avez donné à mon père au
sujet du _Journal des affaires de Paris_, que le nommé Colletet s’est
ingéré de faire imprimer. Sa Majesté m’a ordonné de vous dire qu’elle
veut que vous en défendiez le débit et l’impression[55].»

  [55] _Correspondance administrative de Louis XIV_, t. II, p. 369.

C’étoit formel. Colletet, à qui La Reynie ne fit pas attendre la
décision royale, dut se soumettre. Par suite, nouvelle interruption de
la publicité des adresses et des avis. Deux ans après, l’instant
paraissant favorable, car on parloit de la paix, qui en effet ne tarda
pas, elle reprend son cours. Il paroît en 1678 un petit livret in-12
sous ce titre: _Le Bureau d’adresse établi pour les maîtres qui
cherchent des serviteurs et pour les serviteurs qui cherchent des
maîtres_. On ne pouvoit être plus modeste. L’échec de Colletet, puni
d’avoir voulu trop faire, servoit de leçon. L’idée revenoit timidement à
son berceau. Quand on lisoit le livret on ne la trouvoit plus, il est
vrai, aussi élémentaire; elle reprenoit toutes les proportions que lui
avoient rêvées Montaigne et Laffémas et qu’elle avoit prises avec
Renaudot et Colletet.

Au lieu d’être seulement, comme l’indiquoit le titre, une sorte
d’extrait des registres d’une recommanderesse, la feuille du Bureau
redevenoit un véritable Journal d’avis. Eusèbe Renaudot, à qui Colletet
dépossédé n’a voit pu que rendre son privilége, y étoit-il pour quelque
chose? Rien de plus probable. La feuille, en effet, est privilégiée du
roi, et s’en fait gloire sur son enseigne, comme on le verra par cette
mention, qui se trouve à la fin: «Le bureau est establi au Marché neuf,
vers le milieu du costé de la rivière, vis à vis un tabletier: on verra
le tableau sur la porte avec les _armes du roy_.»

Ce ne lui fut pas une recommandation de succès. Nous ne connoissons
qu’un numéro de cette feuille.

Une autre ne tarda pas. Le courant étoit pris: coûte que coûte, malgré
obstacles et insuccès, il falloit que, jusqu’à ce qu’enfin elle se fût
fait complètement jour, cette idée de publicité ne cessât pas de
renaître, sous l’impulsion des exigences nécessaires, qui, de tous
côtés, la poussoient en avant.

Ce nouveau _Journal du bureau de rencontre_--c’est ainsi qu’il
s’appeloit--parut en 1681. Les Renaudot n’y furent pour rien que par la
cession du privilége, comme avec Colletet. Eusèbe étoit mort en 1679, et
son fils, l’abbé, s’occupoit beaucoup moins de ces sortes d’affaires que
de philologie orientale.

C’est à Devizé, qui depuis neuf ans faisoit vivre tant bien que mal le
_Mercure galant_, dont il étoit le fondateur, que le privilége avoit,
cette fois, été cédé ou plutôt, comme on disoit, «loué». Devizé voulut
en étendre plus que de raison les dispositions, et l’affaire périclita
encore. Une de ses prétentions étoit de ne pas faire seulement du Bureau
d’adresse ou de rencontre un bureau d’avis et de petites affiches, mais
une boutique, un «magazin». Après avoir annoncé des marchandises, il
vouloit les vendre.

Les six corps marchands s’en émurent.

Il y eut plainte de leur part au lieutenant de police La Reynie, qui
leur donna raison par une lettre du 25 novembre 1681 au commissaire
Delamarre, où se trouvoit, entre autres choses, une désapprobation
formelle de ces sortes d’entreprises, qu’il s’étonnoit de voir toujours
reparoître: «Tant de personnes de première qualité, disoit-il dans sa
lettre, ont fait effort pour parvenir à cet établissement sans y pouvoir
réussir, qu’il seroit inutile de le tenter de nouveau.»

De simples avis donnés au Bureau d’adresses ou publiés par lui dans une
feuille sans conséquence, voilà tout ce qu’il permet[56].

  [56] _Collection Delamarre_, aux mss. de la Biblioth. nat., 21, 741,
    p. 165.

Devizé, à qui son _Mercure_ donnoit une sorte d’autorité et de franc
parler, ne persista pas moins dans son idée de Bureau-Magasin, et, à cet
effet, coup sur coup, il écrivit deux lettres au lieutenant de police,
dont la réponse, de plus en plus catégorique et nette, ne se fit pas
attendre. Elle est du 29 novembre et est adressée, comme l’autre, à
Delamarre: Jamais il ne permettra l’établissement d’un pareil bureau,
«capable, dit-il, de renverser tout le commerce de Paris... Il y a là,
continue-t-il, un nombre infini d’inconvénients très-dangereux.»

Pour finir, il donne à entendre que si Devizé ne se soumettoit pas, il
lui interdiroit même la feuille d’avis[57].

  [57] _Id._, p. 166.

Devizé ne répliqua plus et abandonna l’affaire, y compris cette feuille
d’avis, qui ne lui sembloit rien sans l’autre combinaison. Jusqu’en
1688, nous ne la voyons pas reparoître.

Alors seulement, au mois d’août, un numéro se risque, daté du Bureau
d’adresse, d’où la _Gazette de France_ datoit toujours les siens, et qui
avoit encore pour principal intéressé l’abbé Renaudot, à cause du
privilége que le désistement de Devizé lui avoit remis en main.
Vouloit-il, par cette réapparition de sa feuille, qui avoit pris pour
nouveau titre: _Liste générale du Bureau d’adresse et d’avis par
privilége du Roi_, rappeler l’attention sur ce privilége et tâcher de
trouver ainsi quelqu’un à qui le céder encore? Je le crois, et ce qui me
donne raison c’est que, vers la fin de la même année 1688, ce quelqu’un
s’étant trouvé, l’abbé lui loua le privilége.

Il s’appeloit Chomat. Marché fut conclu au mois de décembre, sous la
réserve que le lieutenant de police approuveroit. Il n’approuva pas. Le
commissaire Delamarre, à qui s’étoient adressés l’abbé Renaudot et
Chomat, soumit par lettre leur demande à La Reynie, qui la repoussa par
une simple note très-nette, mise en marge[58].

  [58] _Id._, p. 169.

La feuille d’avis dut ainsi, malgré le vif désir de l’abbé, revenir au
Bureau d’adresse, où là, du moins à cause de lui, La Reynie, qui n’étoit
hostile qu’aux nouveaux venus, vouloit bien la tolérer. Au mois de
février 1689 elle y reparut, et, pendant quatre mois consécutifs, dont
nous avons vu les numéros, elle ne cessa plus. En 1693, nous la trouvons
encore, mais avec un changement dans le mode de publicité et une
modification dans le titre.

L’unique numéro de cette année-là, que nous ayons vu, porte celui-ci:
_Liste des avis du Journal général de France, ou Bureau de rencontre,
pour servir au public, depuis le mercredy 18 novembre jusqu’au mercredy
2 décembre 1693_. La feuille, au lieu de ne paroître que tous les mois,
paroissoit donc alors tous les quinze jours, ce qui étoit un progrès et
sembloit une preuve de prospérité. Comme elle n’a cependant laissé
qu’une trace--celle dont nous parlons--nous sommes tenté de croire
qu’elle n’a pas duré longtemps avec son nouveau titre.

L’année d’auparavant, une autre du même genre avoit eu des velléités de
paroître, mais ne semble pas y être parvenue. Sous la forme «d’un cahier
volant», et avec le titre assez singulier, _Les Adresses casuelles de la
ville de Paris_, elle auroit, chaque mois, indiqué les ventes publiques,
l’adjudication des héritages licités et décrétés, etc., etc.; puis,
comme un véritable journal de courtage, «l’état des marchandises, dont
les courtiers commissaires se trouvoient chargez[59]», etc.

  [59] V. plus loin, p. 9-10.

D’où seroit partie cette nouvelle feuille d’affiches? De chez un homme
qui n’en étoit pas à sa première entreprise, mais auquel on ne doit pas
de publication plus intéressante que celle-là même, commencée un an plus
tôt, en 1691, dont nous reproduisons ici la seconde et dernière année:
_Le livre commode, contenant les adresses de la ville de Paris_.

Pour ce petit volume, si réellement nouveau alors, et que son journal,
_Les Adresses casuelles_, n’auroit fait que compléter, un livre anglois
du même genre, dont les éditions se succédoient à Londres depuis 1677,
lui avoit certainement servi de guide[60]; mais il s’étoit bien gardé
d’en parler. Le silence en pareil cas faisoit partie de ses procédés
d’accapareur, comme nous le verrons, et disons le mot,--qui, d’ailleurs,
est du temps[61]--de ses habitudes de «faiseur».

  [60] _Le Bibliophile français_, août 1872, p. 255.

  [61] _Le Livre à la mode_, par l’abbé Bordelon, p. 28.

La première édition ou première année de son livre d’indications avoit
pour titre: «_Les Adresses de la ville de Paris, avec le trésor des
almanachs, livre commode, en tous lieux, en tous temps et en toutes
conditions_, par Abraham du Pradel, astrologue lionnois.» Ce nom étoit,
on le devine, aussi imaginaire que le titre, dont il le faisoit suivre,
et qu’il modifia l’année suivante. Au lieu d’Abraham du Pradel,
«astrologue lionnois», il se contenta de mettre «philosophe
mathématicien», ce qu’au reste il n’étoit pas plus qu’astrologue.

Il étoit de son métier chirurgien apothicaire, et de son vrai nom,
Nicolas Blegny ou de Blegny, ainsi qu’il s’appeloit lui-même plus
volontiers, se donnant la particule avec une complaisance qui nous
paroît suspecte.

Il n’étoit pas de Paris et nous ignorons le lieu aussi bien que la date
de sa naissance. Peut-être venoit-il de Lyon, ce qui expliqueroit
pourquoi, en prenant le pseudonyme de du Pradel, astrologue, il se donna
pour «Lionnois.»

Le rédacteur de la _Biographie universelle_, qui s’est occupé de lui,
mais seulement comme empirique et sans connoître le curieux petit livre
qu’on lui doit, a dit qu’il mourut en 1722, ayant soixante-dix ans. Il
seroit né ainsi, par conséquent, en 1652. C’est, croyons-nous, une
erreur. D’après un document émané de Blegny lui-même et que nous aurons
à citer longuement tout-à-l’heure, nous savons, en effet, qu’en 1683 il
avoit déjà «dix-sept ans d’établissement», ce qui feroit remonter sa
naissance non à 1652, mais au moins dix ans plus tôt, et lui donneroit à
sa mort quatre-vingts ans au lieu de soixante-dix. Pour tout ce qu’il
entreprit, écrivit, projeta, car il fut surtout, comme dit Moreri,
«fertile en projets»; pour tout ce qu’il s’attira d’ennuis, de
persécutions et même d’emprisonnements, il ne falloit pas moins.

Quand--vers 1666 probablement--il vint à Paris, son apprentissage étoit
fait, et, tout aussitôt, il se mit à pratiquer, comme s’il étoit maître.
Il ne tarda pas non plus à se faire auteur. Par le titre de ses
ouvrages, on jugera du peu de sérieux de sa science et du charlatanisme
de ses pratiques.

C’est aux maladies, malheureusement les plus répandues alors et qui
étoient d’un produit excellent pour les empiriques, tant à cause des
remèdes à vendre que du scandale à exploiter contre tout malade qui ne
payoit pas leur silence, que Blegny s’attaqua d’abord.

Un des premiers livres que nous connoissions de lui et qu’il publia en
1673, est: _L’art de guérir les maladies vénériennes, expliqué par les
principes de la nature et de la mécanique_, in-12. Pareil traité ne
pouvoit être que d’un charlatan. Le succès n’en fut que plus vif, et
cela partout: à Paris, où il eut deux éditions; à Lyon, où on le
réimprima; à La Haye, à Amsterdam, et aussi à Londres, où il fut traduit
en anglais.

Son ouvrage, _L’art de guérir les hernies de toute espèce dans les deux
sexes, avec le remède du Roi_, qui parut en 1676, sembla plus sérieux;
mais Blegny revint au charlatanisme des attrape-niais, lorsque, trois
ans après, il publia un petit in-12 avec ce titre: _Histoire anatomique
d’un enfant qui a demeuré vingt-six ans dans le ventre de sa mère_.

Vers le même temps, ne trouvant pas qu’être apothicaire, faire de la
chirurgie, tenir une _Académie de découvertes_--nous en parlerons
bientôt--écrire des livres, où il inventoit des remèdes ou des monstres,
etc., suffisoit à son activité d’empirique à projets, il se fit
journaliste médical. Sous le titre de _Nouvelles découvertes dans toutes
les parties de la médecine_, il se mit à publier, en 1679, une sorte de
gazette mensuelle, qui ne mentit pas à ce qu’elle promettoit. Toutes les
découvertes y furent réellement passées en revue, mais par la façon dont
elle en parla, chaque fois que les remèdes nouveaux n’étoient pas de
Blegny lui-même, on la considéra bientôt moins comme un journal utile
que comme un pamphlet intéressé.

Le docteur Théophraste Bonnet aggravoit ces médisances par le
contre-coup qu’il en donnoit à Genève, dans sa gazette latine, _Zodiacus
medico Gallicus_, qui n’étoit guère que la traduction de celle de
Blegny.

Il y eut de très-vives plaintes, et, en 1682, ordre lui vint, de par
arrêt du Conseil, de mettre fin à son Journal. Il fit la sourde oreille.
Soutenu par le frère du Roi, dont quelques petits services secrets lui
avoient sans doute gagné les bonnes grâces, qu’il avoit suivi en Flandre
pendant la campagne de 1676, et qui lui avoit permis de mettre sur
l’enseigne de sa boutique, voisine alors du Palais-Royal, devant
l’Opéra: «Chirurgien ordinaire du corps de Monsieur»; assez avant aussi
dans les faveurs du lieutenant de police La Reynie; enfin, ce qui est
plus singulier, hautement protégé par Daquin, premier médecin du Roi, il
continua, malgré l’arrêt, de publier ses _Nouvelles découvertes_, et
Bonnet continua aussi à les traduire en latin. Blegny se contenta de n’y
plus mettre son nom.

Il en fut ainsi pendant toute l’année 1683. L’ordre alors étant sans
doute devenu plus formel, il cessa, mais pour reprendre ailleurs ce
qu’on l’obligeoit d’interrompre à Paris. Le Journal des _Nouvelles
découvertes_ étoit à peine mort en France, qu’il ressuscitoit en
Hollande, sous le titre: _le Mercure savant_.

Un médecin de Niort, nommé Gautier, établi alors à Amsterdam, y aida
Blegny. Celui-ci envoyoit de Paris la matière du Journal et Gautier
veilloit à l’impression. On y trouvoit mille choses: des pièces de vers,
mêlées à de petits traités de médecine, des chansons avec leur musique,
des nouvelles relatives aux affaires d’État, et, sur le tout, beaucoup
de méchancetés. Elles n’en firent pas le succès.

Le _Mercure savant_ ne dura que deux mois; il s’arrêta après son second
volume, celui de février 1684.

Il n’eut qu’un seul bon résultat, mais très-indirect, et sans que Blegny
son rédacteur s’y trouvât pour rien. Il fut cause que quelqu’un donna à
Bayle l’idée de la célèbre publication périodique, où, comme on l’a dit,
il fonda la critique littéraire. Lui-même avoua ce qu’en cela il devoit
au Journal de Blegny, que, d’ailleurs, il trouvoit détestable:

«Je vous dirai, écrit-il le 8 août 1684 à M. Lenfant, à Rotterdam, que
le dessein du Journal que l’on m’inspira et que je goûtai quand j’eus vu
les deux tomes du _Mercure savant_, qui avoient paru en janvier et en
février, et qui avoient fort déplu, quant à l’exécution, quoique le
projet en eût été agréable, s’exécute depuis le mois de mars. Il
s’intitule, non pas Journal, mais _Nouvelles de la République des
lettres_.»

D’autres affaires que celles de sa Gazette avoient vivement occupé, et
même, à un certain moment, gravement inquiété Blegny, pendant le temps
qu’il la faisoit paroître.

Il tenoit chez lui, on l’a vu plus haut, une _Académie de nouvelles
découvertes_, dont cette Gazette n’étoit pour ainsi dire que le
compte-rendu mensuel; de plus, il avoit ouvert un _cours de Chirurgie_,
où il donnoit des leçons particulières aux garçons chirurgiens, et un
_cours de Pharmacie_, qui étoit une école du même genre pour les garçons
apothicaires. Son ardeur de professer et de doctoriser étoit telle que,
suivant Moréri, «il s’avisa même de faire un _cours de perruques_ pour
les garçons perruquiers.»

On s’en amusoit dans le public, mais on n’en rioit pas dans le monde des
médecins et des chirurgiens, dont cette rage d’accaparements narguoit et
froissoit les priviléges. Pouvoit-on souffrir qu’un intrus, sorti l’on
ne sait d’où, qui n’étoit ni de l’Académie de médecine, ni de celle de
chirurgie, autrement dite Académie de Saint-Côme, se permît de
pratiquer, comme s’il appartenoit à l’une et à l’autre, de professer sur
toutes les matières de leur compétence, et, qui plus est, d’en écrire?

Chacun de ses ouvrages y avoit soulevé de véritables tempêtes, ceux
notamment où, avec aussi peu de mesure que de modestie, il s’adjugeoit
une sorte de science universelle, et se posoit presque en dieu de la
médecine. N’avoit-il pas osé publier, dès 1673, trois volumes sous ce
titre: _Nouvelles découvertes sur toutes les parties de la médecine_,
et, en 1679, deux volumes encore, qu’il avoit intitulés le _Temple
d’Esculape_, comme si lui seul en avoit la clé?

Toutefois, le sachant très-puissamment soutenu, on le laissoit faire.
C’est à peine s’il y eut contre ses livres quelque protestation écrite,
telle que la brochure du chirurgien Devaux, _Découverte sans
découverte_, faite à propos de l’impudente publication de Blegny,
_Découverte du véritable remède anglois contre les fièvres_[62].

  [62] V. les _Mémoires littéraires_ du P. Des Molets, t. VIII, 1re
    partie, _Éloge de Devaux_.

On attendoit pour l’attaquer et tâcher de détacher de lui les
protections dont il faisoit sa force, qu’il donnât prise à quelque
action sérieuse. C’est ce qui arriva vers la fin de 1681, dans une
circonstance que ses ennemis de la Faculté surent envenimer, et qui leur
permit non-seulement de faire passer M. de La Reynie de leur côté, mais
encore d’ébranler la confiance que Monsieur avoit en Blegny.

Un _factum_ que celui-ci dut rédiger pour se défendre, et dans lequel
les besoins de sa justification l’entraînèrent à donner de nombreux
détails sur lui-même, va nous mettre au fait de cette affaire et
incidemment nous compléter plusieurs points de sa biographie.

A cette époque les dissections n’étoient permises qu’à ceux qui
relevoient des Académies de chirurgie ou de médecine, ou qui en avoient
obtenu, de la Faculté, l’autorisation. Faire enlever un cadavre sans
qu’elle eût été prévenue et le disséquer en dehors de l’amphithéâtre des
Écoles, étoient choses des plus graves, et qui pouvoient vous attirer
une peine fort rigoureuse.

Or, il arriva qu’en décembre 1681 les doyens et docteurs furent avisés
qu’un jeune chirurgien nommé Desnoues, qui, en qualité de membre de
l’_Académie des nouvelles découvertes_, fondée par Blegny, «donnoit des
leçons secrettes à plusieurs étudiants», dans une chambre dépendant de
cette Académie, s’étoit fait apporter par le garçon de salle, Baptiste,
de chez le fossoyeur Pajot, le corps d’une petite fille de cinq ans, et
en avoit commencé la dissection.

Les doyens firent saisir le corps par l’huissier Masson, chez Desnoues,
et, sur leurs instances, le lieutenant de police ouvrit une action dans
laquelle ils insinuèrent tout d’abord que Blegny, qu’ils visoient
surtout, devoit être compris, comme maître de l’Académie où la
dissection s’étoit faite.

On commença toutefois par n’arrêter que Desnoues. Quand il fut à la
Conciergerie, il parla. C’est ce qu’on désiroit. Il chargea Blegny; or,
comme, en attendant, une démarche avoit été faite avec plein succès, le
21 janvier 1682, par Me Nicolas Liénard, doyen de la Faculté de
médecine, à la tête de sa compagnie, auprès de Monsieur, «en son
Palais», pour lui remontrer respectueusement, ainsi que d’ailleurs l’en
avoit déjà prévenu M. de La Reynie, qu’une protection telle que la
sienne n’étoit pas due à un pareil homme «qui, disoit le doyen, profane
en tout lieu vostre grand nom[63]»; Blegny se trouvoit alors sans
défenseur.

  [63] _Discours à S. A. R. en son palais à Paris_, par Me Nicolas
    Liénard, etc., in-4º.

Lors donc que, quelques jours après, sur la dénonciation de Desnoues,
arrêt de prise de corps eut été lancé contre lui, personne n’intervint
pour empêcher la justice d’avoir son cours.

Doyens et docteurs triomphoient. Ce qu’ils désiroient depuis si
longtemps étoit obtenu: «Si», avoient-ils dit, d’après le témoignage
même de celui qu’ils accusoient et qui les connaissoit bien[64], «si
nous pouvons tenir Blegny, il ne nous échappera pas; nous avons en main
de quoi le faire pendre. Il sera bien heureux s’il en est quitte pour
les galères. Il y a trois cents témoins qui déposeront contre lui. M. de
La Reynie en a informé S. A. R. à notre considération, et ce magistrat a
promis à notre doyen de nous délivrer bientôt du chagrin que nous avons
de voir un chirurgien écrire sur toutes les matières de la médecine et
présider dans une Académie à des docteurs de diverses facultés[65].»

  [64] _Factum pour Me Nicolas de Blegny_, etc., in-4º, p. 4.

  [65] _Id._, p. 9.

Cela dit, pour prouver la partialité de ceux qui le dénoncent, il prend
corps à corps l’accusation et la rejette sur Desnoues qui l’en a chargé.
C’est lui seul qui s’est permis les dissections défendues, et cela
non-seulement cinq ou six fois, comme on le pense, mais quarante au
moins. Il alloit disséquant n’importe où, dans tous les quartiers.
Quelqu’un qui le savoit lui joua le tour de le surprendre un soir, rue
de l’Université, à l’hôtel Tambonneau, et de lui faire la plus forte
peur, en se disant commissaire. Desnoues, qui le crut, décampa par la
fenêtre de la mansarde où il disséquoit, emportant le corps à moitié
dépecé. Il le laissa dans la gouttière, où un couvreur le retrouva le
lendemain.

S’est-il, lui Blegny, livré à ces opérations clandestines, a-t-il jamais
couru les risques de pareilles surprises? Ses dénonciateurs n’osent même
le supposer, et cependant ils font tout pour l’écraser par leurs
allégations:

«Il n’est pas», s’écrie-t-il avec une certaine éloquence[66], «il n’est
pas d’injures dont ils n’aient tâché de le noircir en toute occasion,
point d’artifices dont ils ne se soient servis pour lui faire perdre la
protection qu’il avoit naguère du sieur lieutenant de police et qu’il a
encore du sieur premier médecin du Roy; point de prétextes qu’ils
n’aient inventés pour luy dénier la justice qu’ils luy doivent; point de
moyens secrets qu’ils n’aient mis en usage pour le diffamer, pour
diminuer son employ, pour luy attirer l’indignation de S. A. Monsieur;
point d’entreprises qu’ils n’aient faites pour troubler ses exercices et
pour empêcher la publication de ses ouvrages; point d’occasions qu’ils
n’aient recherchées avec empressement pour luy susciter des procez;
enfin, point d’intrigues qu’ils n’aient pratiquées pour porter ses
confrères et ses meilleurs amis à se déclarer contre luy.»

  [66] _Id._, p. 10.

Ce qui lui tient le plus au cœur, c’est qu’ils ont vilipendé ses
ouvrages. Il n’en est pas un auquel ils aient fait grâce. N’ont-ils pas
prétendu aussi que les chirurgiens, de même que les médecins, avoient eu
tous à se plaindre de lui, chose absolument fausse, ainsi que le prouve
l’approbation accordée par beaucoup d’entre eux aux instruments par lui
inventés.

On l’accuse, continue-t-il, «d’être sans doctrine, et d’avoir des
auteurs à gages»; or, il a passé dix-sept ans d’établissement sans
tomber dans la moindre impéritie, et il s’est rendu la voix publique
favorable par l’exactitude de sa conduite et par l’heureux succès des
cures qu’il a entreprises.

S’il n’a pas été examiné à Saint-Côme, c’est qu’il n’a pas fait son
apprentissage à Paris[67]. Il est donc faux que la maîtrise lui ait été
déniée «à cause de ses mauvaises mœurs et de son incapacité».

  [67] _Id._, p. 12.

Ils ont été encore plus loin que cette accusation de mœurs scandaleuses.
Ils ont fait courir le bruit qu’une de ces terribles affaires
criminelles, comme il y en eut tant à l’époque de la Brinvilliers et de
la Voisin, l’avoit eu pour complice, et qu’il avoit même fallu à cette
occasion s’assurer de lui. «Pendant, dit-il, qu’il estoit en Flandres
près de S. A. R. Monsieur, ils publièrent partout qu’il estoit à la
Bastille, pour le poison.»

Son seul crime--et c’en est un des plus impardonnables à leurs yeux--est
d’avoir écrit quelque part «qu’il y a des docteurs sans doctrine et des
doctes sans doctorat». Ils se sont reconnus, et leur première vengeance
a été de crier que lui aussi étoit un faux docteur. Il est vrai qu’il
n’a point passé par les colléges et qu’il n’a pris de degrés dans aucune
faculté. Il n’en est pas moins prêt à soutenir dans une dispute réglée
les questions les plus difficiles, «soit de médecine, soit de physique»,
contre les plus savants.

Son livre sur la guérison des fièvres a été le plus attaqué; il le
défend à outrance. Il se montre aussi très-ardent à prouver l’excellence
d’un cordial--on le trouvera décrit plus loin--«auquel il a donné la
forme d’opiatte (_sic_)», et qui ne seroit, à les entendre, autre chose
que «l’orviétan», dont il auroit acheté le secret à Hiéronimo Cei. Il ne
récuse pas celui-ci, son ami et son compère, mais il nie le reste.

Pour conclure, il espère que ses juges le feront sortir de cette
affaire, non-seulement libre et justifié, mais indemnisé:

«Il oze préjuger que la Cour, en prononçant son absolution et déclarant
l’escrou fait de sa personne injurieux, tortionnaire et desraisonnable,
condamnera ceux qui l’accusent à luy faire réparation d’honneur, en
10,000 livres de dommages et intérêts, à quoi il se restreint, et en
tous les despens du procez.»

Une note manuscrite, mise au bas de l’exemplaire du _factum_ qui nous a
servi pour tous ces détails, dit que l’arrêt fut rendu sur le rapport de
M. Amproux, le 12 juillet 1683, mais n’ajoute pas s’il fut ou non
favorable. Nous croyons qu’il dut l’être, car nous trouvons quelques
mois après Blegny reprenant ses publications avec plus d’impudence et
d’emphase que jamais. En 1684, par exemple, peu de mois après sa mise en
liberté, il fait paraître un volume in-12 avec ce titre singulier: _La
doctrine des rapports, fondée sur les maximes d’usage et sur la
disposition des nouvelles ordonnances_.

Ses emplois semblent lui être restés, du moins en partie. Peut-être
n’a-t-il plus sa charge chez Monsieur, ni celle de «premier chirurgien»,
qu’il s’étoit fait donner chez la Reine en 1678, mais il est toujours
médecin du Roi, «préposé, comme il ne manque pas de le répéter partout,
à la recherche et vérification des nouvelles découvertes de médecine.»

Son peu de fidélité dans l’exercice de cette fonction délicate lui
attira une nouvelle disgrâce. Il avoit fondé, aux environs du faubourg
Saint-Antoine, à Pincourt--nous dirions aujourd’hui Popincourt--une
sorte de maison de santé avec jardin de plantes médicinales, dont il
sera parlé plus bas, et près de laquelle logeoit «un certain prieur»,
comme il l’appelle[68], qui se mêloit aussi de remèdes.

  [68] V. plus loin, p. 157, note.

Il en avoit, à ce qu’il semble, trouvé d’assez efficaces, dont il avoit
livré le secret au roi, à condition que le public en profiteroit pour
rien.

Blegny abusa de ce qu’il étoit chargé de la vérification de ces sortes
de découvertes pour accaparer au passage les remèdes du Prieur et les
ajouter aux siens. Il s’en occupa dans les Conférences de son bureau ou
Académie, qu’il avoit transféré de la place du Palais-Royal à la rue
Guénegaud; et, qui pis est, il les vendit avec ses propres drogues.

De nouvelles plaintes arrivèrent alors, auxquelles il opposa son
impudence ordinaire, ce qui fut cause qu’elles ne tardèrent pas à être
suivies d’un nouvel arrêt de prise de corps. Voici ce que nous lisons à
ce sujet dans un curieux recueil manuscrit: _Lettres historiques et
anecdotiques_[69], sous la date du 15 janvier 1686:

  [69] Bibl. nat., _Mss._ Suppl. franç. nº 10,265.

«Blegny, chirurgien, a esté mis à la Bastille, pour s’estre voulu mesler
d’enseigner la manière d’user des remèdes que le prieur de Cabrie avoit
donné au Roy et que S. M. fait distribuer gratuitement. Il avoit dit des
impertinences.»

Ce dernier détail suffiroit, connoissant Blegny comme nous le
connoissons, pour ne nous laisser aucun doute sur l’authenticité de la
nouvelle.

Cette captivité, qui explique pourquoi Bernier, parlant de lui,
l’appelle «le bastillé et le bastillable[70]», ne dut pas être de bien
longue durée, mais ne le laissa pas moins un peu plus mesuré et plus
modeste. L’année d’après il ne publia qu’un livre des plus anodins: _Le
bon usage du thé, du café et du chocolat pour la préservation et la
guérison des maladies_, in-12; et, en 1688, deux autres petits volumes
sans beaucoup plus de conséquence: _Secrets concernant la beauté et la
santé_, qui ont fait dire avec raison par un de ses biographes: «Le
titre seul de cet ouvrage annonce le charlatanisme: les vrais médecins
ne connaissent pas de secrets[71].»

  [70] _Anti-Menagiana_, préface, p. 16.

  [71] _Biog. universelle_, art. Blegny.

De 1688 à la fin de 1690, il ne publia rien. Il étoit occupé de son
livre: _Les Adresses de la ville de Paris_, dont, ainsi que nous l’avons
dit, il avoit sans doute emprunté l’idée à celui des adresses de Londres
publié en 1677. Il lui falloit un privilége, mais, comme dans cet
ouvrage, il vouloit plus ou moins exploiter ceux qu’il y recommanderoit,
et, sous prétexte de parler de tout le monde, parler sans cesse de
lui-même, en se ramenant à chaque coin de page, à tort et à travers et
pour n’importe quelle raison, il se garda bien de demander ce privilége
en son propre nom. Sa voisine, la veuve Nyon, libraire sur le quai
Conti, se le fit accorder à sa place dès le 14 juillet 1690 et se
chargea de faire imprimer le manuscrit chez l’imprimeur Rondot. Un
pseudonyme sur le titre, celui d’Abraham Du Pradel, fut, pour lui-même,
afin de ne pas se trahir, tout ce que se permit Blegny.

Le petit volume, qui se compliquoit d’un almanach, devoit de toute
nécessité être prêt le premier janvier 1691; il le fut. Réussit-il? Nous
le pensons. Il avoit d’avance une clientèle de lecteurs toute faite:
chez les étrangers de passage à Paris, chez les gens de province et même
chez les Parisiens qui, à cette époque comme à la nôtre encore,
n’ignoroient rien tant que ce qui se trouve à Paris de bon à acheter et
de curieux à voir.

Ce succès, quoiqu’il eût rencontré de l’opposition, car beaucoup, même
dans le monde des marchands, s’étoient trouvés froissés de ce qu’on les
eût nommés sans leur permission, encouragea Blegny. Pour l’année
suivante, tout en tenant compte de ces plaintes, qui paraîtront bien
singulières à présent que la réclame est partout courue et nulle part
évitée, il voulut faire mieux, être plus varié, plus complet. Ce fut sa
perte.

Il s’en étoit tenu, la première année, presque exclusivement aux
adresses marchandes ou industrielles. Pour la seconde, que nous
reproduisons ici, avec le titre nouveau qu’il lui donna, il prétendit y
joindre les adresses de Messieurs des Fermes, du Conseil d’État, etc.,
etc., celles aussi des Curieux célèbres et des Dames curieuses, et bien
d’autres encore.

Les plaintes grossirent en conséquence. De quoi se mêloit-il? De quel
droit ces indiscrétions qui ne pouvoient qu’attirer des nuées
d’importuns chez les personnes dont il indiquoit ainsi la qualité et
l’adresse? N’empiétoit-il pas d’ailleurs, en bien des points, sur ce
que, par privilége, l’_État de France_ pouvoit seul publier.

Il y avoit dans tout cela beaucoup plus qu’il n’en falloit pour faire
supprimer _Le Livre commode_. Camusat dit que Blegny reçut ordre de ne
pas le continuer parce qu’il fut trouvé détestable[72]. Nous croyons
bien plutôt que ce fut pour les raisons dont nous venons de parler,
qu’il dut ne plus paroître, et que même--ce qu’ignoroit Camusat--il fut
saisi. Nous avons trouvé les procès-verbaux qui le prouvent[73].

  [72] _Histoire critique des journaux_, t. I, p. 230-231.

  [73] _Collection Delamarre_, aux mss. de la Biblioth. nat., nº 21,739,
    p. 110.

Le 29 février 1692, c’est-à-dire deux mois après la publication de la
seconde année, la veuve Nyon fut requise par Denis Aumont, sergent à
verge, d’avoir à lui présenter le privilége en vertu duquel elle avoit
fait imprimer le _Livre commode contenant les adresses de la ville de
Paris_ et à lui déclarer le nombre d’exemplaires qui lui en restoit.
Elle répondit que le privilége étoit demeuré entre les mains du sieur
Rondot, par qui elle en avoit fait faire l’impression, et elle offrit de
le retirer et de le rapporter. Quant aux exemplaires, dont la plus
grande partie n’avoit pas encore été vendue, elle offrit aussi de les
rapporter «en blanc», c’est-à-dire non reliés, au nombre de deux mille
cinq cents.

Aumont se les fit présenter et les saisit. Même visite fut faite chez
Rondot l’imprimeur.

A la première réquisition du sergent à verge il présenta le privilége,
qui fut saisi comme l’avoient été les exemplaires. Ce n’étoit, disent
les procès-verbaux, que par simple provision, et jusqu’à nouvel ordre;
mais l’ordre contraire ne vint jamais. Exemplaires et privilége étoient
saisis, ils le restèrent jusqu’à ce qu’on les eût détruits. C’est ce qui
explique pourquoi cette seconde année du _Livre commode_ est beaucoup
plus rare encore que la première.

Ce fut le coup de grâce pour Blegny. Dès lors il cesse de publier. Un
livre, bien inattendu de sa part et qui prouveroit qu’il a même renoncé
à la médecine, est le seul qui paroisse sous son nom. Il est de 1694 et
il a pour titre: _Projet de l’histoire générale des religions militaires
et des ordres politiques et séculiers de chevaliers_[74]. Pourquoi
l’avoit-il fait? Quel but y visoit-il? Peut-être étoit-ce un moyen
d’exploiter les gens si nombreux alors qui cherchoient à se faufiler par
la chevalerie dans la noblesse et qui n’arrivoient ainsi qu’à devenir,
suivant le mot du temps, des «chevaliers de l’industrie». Blegny étoit
homme à en créer beaucoup de cet ordre.

  [74] Il n’est pas indiqué dans la _Biblioth. Script. Medic._ de
    Manget, qui n’avoit du reste à donner que la liste des livres de
    médecine de Blegny.

Quoi qu’il en soit, de mauvais bruits coururent alors sur son compte. On
parla même d’escroquerie[75]; il perdit les dernières charges qui lui
restoient, et, le terrain lui manquant tout à fait sous les pieds, il
quitta Paris pour Angers. On l’y arrêta. Nous ignorons pourquoi, mais ce
devoit être pour affaire grave, car il resta huit ans prisonnier dans le
château. Lorsqu’il eut fait son temps, il chercha un pays plus
hospitalier. Il se retira sur terre papale, à Avignon, où il mourut en
1722 à quatre-vingts ans.

  [75] _Biog. univ._, art. Blegny.

Voilà l’homme, vous allez juger à présent de son essai d’_Almanach des
adresses_. L’auteur est un assez vilain personnage, mais le livre est
curieux.




  LE
  LIVRE COMMODE
  CONTENANT
  LES ADRESSES
  DE LA
  VILLE DE PARIS
  ET
  LE TRÉSOR DES ALMANACHS
  POUR L’ANNÉE BISSEXTILE 1692

  avec
  les scéances et les vacations des Tribunaux, l’ordre et la discipline
  des exercices publics, le prix des Matéraux et les ouvrages
  d’Architecture, le Tarif des nouvelles Monnoyes, le Départ des
  Courriers et des Voitures de Routes, et généralement toutes les
  commoditez sujettes aux mutations.

  Par Abraham Du Pradel, Philosophe
  et Mathématicien.


  A PARIS,
  chez la Veuve de Denis-Nion, Marchand-libraire sur le quay de Nesle,
  devant l’Abrevoir de Guénégaud, à l’image Sainte Monique.

  M. DC. XCII.
  Avec privilége du Roy.




AVERTISSEMENT.


L’auteur ne s’étoit pas trompé en présumant que son ouvrage seroit jugé
généralement utile; l’approbation du public et le débit qui s’en est
fait en sont de fortes preuves; il s’en trouve très honoré, et il se
propose d’en être autant reconnaissant qu’on le peut désirer. Il vient
de redoubler ses soins et ses recherches pour le rendre plus exact et
plus complet: il en fera de même dans les années suivantes; il examinera
par luy-même les mémoires qui luy seront donnés, et il préviendra par
cette précaution, le reproche qu’il s’est attiré l’année précédente,
pour s’en être tenu aux protestations de quelques personnes qui lui
avoient donné de fausses adresses, et qui avoient attribué à certains
artisans une réputation qu’ils n’avoient pas encore acquise.

Il ne faut pas croire néanmoins qu’il prétende demeurer garand du mérite
des personnes qu’il doit indiquer. C’est le public qui donne la
réputation. Il est luy-même responsable de ses propres injustices. Un
particulier n’est pas en droit de s’opposer au torrent de la voix
publique quand même il seroit assez téméraire pour le faire, il ne
seroit pas écouté. Il s’agit ici uniquement des adresses de personnes
renommées. Il suffit qu’un nom ait été célébré pour avoir place dans cet
Opuscule: et il n’est pas permis à l’Auteur d’y ajouter celui dont on
n’a pas encore parlé, quand même il appartiendroit au plus digne homme
d’une profession.

La seule omission qu’on pourroit reprocher à l’Auteur, est celle de
n’avoir rien dit d’un grand nombre de personnes qui ont acquis dans le
Commerce et dans les Arts une distinction particulière; mais il ne
tiendra qu’à ces personnes mêmes ou à leurs amis, qu’il ne leur rende
là-dessus bonne justice l’année prochaine, et elles peuvent même
s’assurer qu’elles auroient été prévenues dès la première édition de cet
Ouvrage, si l’Auteur eut été assez intrigué[76] dans le monde, pour
savoir tout ce qui mérite d’être connu.

  [76] Nous dirions aujourd’hui «lancé». Boileau, dans l’_Art poétique_,
    chant III, a donné à ce mot le même sens:

        L’âge viril, plus mûr, inspire un air plus sage,
        Se pousse auprès des grands, _s’intrigue_, se ménage.

Un Médecin et quelques autres personnes indiquées dans l’édition
précédente, avoient trouvé mauvais qu’on se fut étendu sur leurs talens
autant qu’on avoit cru le devoir faire. Elles connaîtront par celle-ci,
qu’on a eu soin de flatter leur modestie, autant qu’elles le pouvoient
raisonnablement désirer.

Il auroit été à souhaiter qu’on eut pu suivre l’ordre de dignité en
parlant des Compagnies, des personnes et des professions; mais outre
qu’il pourroit y avoir des contestations à l’infini sur les rangs et sur
les préséances, il auroit été presque impossible à l’Auteur de s’en
assurer, quand même il y auroit quelque certitude; c’est pourquoi il a
dû avertir qu’il a traité sans aucune distinction de droits ni de
mérite, toutes les différentes choses qui sont le sujet de cet Ouvrage,
ce qui doit contenter ceux qui ne se trouveront pas dans l’ordre qui
leur conviendroit en autre chose.

Comme on s’est proposé en ceci de donner annuellement au public toutes
les instructions qui luy sont nécessaires sur les choses sujettes à
mutations, on ne sera pas surpris d’y trouver les vacations des
Tribunaux et le prix des matereaux et des ouvrages concernant les
batimens: car si d’un côté ces choses ne sont pas du genre de celles
qu’on doit indiquer par des adresses, elles sont du moins de celles qui
peuvent être changées en quelques circonstances.

Ceux qui prétendent que l’Auteur auroit dû comprendre dans cet ouvrage,
tout ce qui est contenu dans les listes des Tribunaux et dans les
catalogues des Compagnies et des Communautés, devroient se ressouvenir
de la protestation qu’il a faite de servir tout le monde sans nuire à
personne, et réfléchir sur le tort qu’il feroit à ceux qui ont accoutumé
de vendre ces listes et ces catalogues; outre que le seul recueil qu’on
en feroit composeroit un trop gros volume pour un simple manuel
journalier, et qu’ainsi il étoit plus expédient et plus raisonnable
d’indiquer seulement, comme il a fait, les sièges où l’on peut recouvrer
les listes et les Bureaux où l’on peut trouver les catalogues.

Sur ces deux considérations que l’Auteur ne veut nuire à personne, et
qu’il ne s’est proposé de traiter que les choses sujettes à mutations,
on peut inférer qu’on ne trouvera dans cet Ouvrage, ni la situation des
Eglises, ni la description des Palais, des Hotels, des Fontaines, ni des
autres Edifices de Paris, puis que ce seroit dérober le sujet de M. le
Maire à qui nous devons un Livre en trois volumes, qui a pour titre
Paris ancien et nouveau[77], et celui de M. l’abbé Brice, qui nous a
donné une description de la Ville de Paris[78], et que d’ailleurs ces
choses ne regardent qu’indirectement les commoditez qui doivent
satisfaire les besoins ausquels on s’est proposé de pourvoir.

  [77] Il avoit paru, in-12, en 1685. Voici le titre complet: _Paris
    ancien et nouveau, avec une description de tout ce qu’il y a de plus
    remarquable dans toutes les églises, communautés, palais, maisons,
    rues, places, etc._ D’après le P. Lelong et les éditeurs de la
    neuvième édition du livre de G. Brice, dont nous parlerons dans la
    note suivante, cet ouvrage de Le Maire n’est guère qu’une copie, en
    style moins ancien, des _Antiquités de Paris_ du P. Du Breul.

  [78] Elle avoit été publiée en 1684, c’est-à-dire un an avant le livre
    de Le Maire, en 2 vol. in-12, sous le titre de: _Description
    nouvelle de ce qu’il y a de plus remarquable dans la ville de
    Paris_, par M. B... L’auteur, Germain Brice, qui se déroboit sous
    cette initiale, portoit, sans être prêtre, l’habit ecclésiastique,
    c’est pourquoi il est ici appelé abbé. Il se mettoit au service des
    étrangers de qualité pour leur apprendre le françois et leur faire
    voir Paris, ce qui, disent avec bonhomie ses éditeurs posthumes, lui
    valoit «de la part de ces seigneurs des reconnoissances utiles». Son
    livre avoit eu huit éditions, et, toujours s’augmentant, étoit monté
    de deux volumes à quatre, lorsqu’il mourut en 1727, à
    soixante-quatorze ans. La neuvième édition qu’il préparoit ne fut
    achevée par Mariette, dit-on, et l’abbé Perrault qu’en 1751 et fut
    publiée l’année suivante. C’est un ouvrage très-utile et qu’il est
    bon surtout de suivre dans toutes ses transformations de 1684 à
    1752.--Nous ajouterons que Brice n’étoit pas seul à faire le métier
    de cicerone parisien, almanach des adresses allant et venant au
    service de chacun. Le _Novitius_, dictionnaire latin-françois de
    1721, nomme, au mot _Nomenclator_, un certain Herpin, qui gagnoit sa
    vie de la même manière: «C’est un homme qui enseigne à Paris les
    noms et les demeures des gens de qualité».

Au surplus, comme ce Livre sera chaque année publié dès les premiers
jours du mois de Novembre, et qu’on en commencera par conséquent
l’impression dès le commencement d’Aoust, il serait inutile d’envoyer
des mémoires ni pour les nouvelles adresses, ni pour les mutations passé
la S. Jean, l’Auteur ayant besoin d’un temps considérable pour diriger
sa matière.




AVIS

SUR LES ADRESSES CASUELLES.


Dans le courant de l’année précédente, bien des gens ont donné des
mémoires que l’Auteur a reservez, et qu’il ne publira que dans un cahier
volant, par cette raison qu’ils ne contiennent que des commoditez qui
n’ont rien de permanent, c’est à dire qui sont aujourd’hui existantes,
et qui ne le seront peut-être pas le mois qui vient, ce qui ne
conviendroit pas dans un Recueil, qui doit servir une année entière, et
dans lequel même il ne se doit presque faire aucun changement que par
rapport aux simples mutations.

Ce cahier volant sera renouvellé tous les mois, et aura pour titre _les
Adresses casuelles de la Ville de Paris_[79]; on y trouvera, par
exemple, le dessein des Auteurs qui auroient besoin de mémoires,
l’arrivée et le départ des Marchands forains, l’ouverture des ventes de
meubles publiques et judiciaires qui mériteront d’être sçues,
l’adjudication d’héritages licitez et décretez, les Bureaux pour la
levée des charges de nouvelles créations, les Fermes à bailler
et les biens à vendre, l’état des Marchandises dont les
Courtiers-Commissionnaires se trouveroient chargez; la qualité des
Equipages, Meubles et Bijoux dont les particuliers voudront se défaire
par vente ou par échange, les bois qui seront à couper, les Emplois qui
seront vacans, les ouvrages et fournitures qui seront à faire au rabais,
les fonds qui seront à placer, les emplois qu’on proposera d’en faire,
et généralement les adresses de toutes commoditez dont la fin paroitra
prochaine.

  [79] C’étoit un essai de _petites affiches_ mensuelles dont nous
    n’avons rien retrouvé. Peut-être Blégny n’y donna-t-il pas suite.
    Renaudot en avoit tenté du même genre, mais trimestrielles, sous
    Louis XIII. On en trouve le _plan_ dans sa rarissime brochure:
    _Inventaire des adresses du bureau de rencontre_, 1630, gr. in-4º.
    Le roi lui avoit, à cet effet, accordé un privilége le 8 juin 1629.
    On ignoroit si l’exécution avoit suivi le projet, lorsque nous fûmes
    assez heureux pour découvrir à la Bibliothèque Nationale un numéro
    de ces premières _petites affiches_, portant la date du 1er
    septembre 1633 et l’indication que c’étoit la 15e _feuille_ de cette
    publication. Or, comme elle avoit dû commencer à la fin de 1629, il
    y avoit juste quinze trimestres qu’elle existoit en septembre 1633.
    Nous avons publié, avec des notes, dans le tome IX de nos
    _Variétés_, p. 51 et suiv., cette 15e feuille, la seule que l’on
    connoisse encore.




SUCCEZ DES REMEDES

INDIQUEZ L’ANNÉE PRÉCÉDENTE.


L’Auteur étant persuadé qu’entre tous les besoins ausquels il s’est
proposé de pourvoir, il n’y en a point de plus pressans que ceux qui
concernent le rétablissement de la santé, il a jugé qu’on trouveroit
ici, avec plaisir, une relation qu’il tient de son libraire par qui elle
est certifiée véritable, puis qu’elle contient un grand nombre de cures
merveilleuses opérées dans le courant de l’année précédente, par l’usage
des remèdes spécifiques qui avoient été par lui annoncez.

Plus de trente personnes de l’un et de l’autre sexe accablées par des
Rhumatismes habituels et inveterez, par la Sciatique, par les Gouttes
des pieds et des mains, et par des douleurs causées par les panacés et
autres poudres mercurielles, ont été parfaitement guéries en peu de
jours, par l’usage des Etuves vaporeuses et de la liqueur anodine
marquée à la page 51.

Autant en est-il arrivé à un paralitique qui avoit d’ailleurs au bras
droit des nodus d’une prodigieuse grosseur, les membres paralitiques
ayant été parfaitement rétablis, et les nodositez entièrement dissipées
dans l’espace de cinq semaines.

Ces remèdes ont encore opéré dans un jeune homme à peu près dans le même
espace de temps, la guérison de la Goutte des pieds et la dissipation de
plusieurs Loupes et Tumeurs froides qu’il avoit aux deux genoux.

Un homme d’une particulière considération, en qui il s’étoit fait un
effroyable dépôt d’humeurs sur les jambes, après avoir fini par le
quinquina des vapeurs dont il étoit tourmenté, a été parfaitement guéri
en six semaines par la liqueur vulnéraire, quoi qu’extraordinairement
replet, non seulement de cette fluxion, mais encore de plusieurs grands
ulcères qu’elle causa subitement avec mortification de la peau et des
chairs, accompagnez d’une fièvre terrible et d’un vomissement continuel
que le quinquina avoit causé.

L’un des domestiques de ce malade fût guéri dans le même temps d’une
Hidropisie formée en deux prises d’un Sirop spécifique.

Plus de cinquante personnes ont été gueries de Décentes de Boyaux, les
unes en un mois ou cinq semaines en faisant retraite à la pension de
Pincourt, les autrefois mois ou environ, en vacquant à leurs affaires;
par les Bandages[80] et par les emplatres de la Manufacture royale.

  [80] C’étoit une invention très-ancienne, ainsi que nous l’avons
    prouvé dans _le Vieux-neuf_, 2e édition, t. I, p. 133-134, note. En
    1647, un charlatan avoit inventé un bandage dont il promettoit
    merveille. Les _Annales du Bibliophile_, t. I, p. 38, ont publié
    l’affiche qui en énuméroit les miracles.

Vingt deux malades accablez d’une longue suite de cours de ventre, de
flux de sang et de dissenteries, ont été guéris sans retour et sans
ressentir la moindre incommodité, avec une ou au plus deux prises d’un
vin composé qui nourrit comme le vin ordinaire.

On a pareillement guéri un grand nombre de fébricitans par l’usage de la
Liqueur fébrifuge.

On a d’ailleurs guéri par la Liqueur balsamique, en deux femmes
différentes, un ulcère formé dans la matrice; et par cette même liqueur
aidée par les grains balsamiques, un grand nombre de personnes de
Gonorrhées habituelles et de Pertes blanches.

Onze personnes ont été parfaitement guéries de la grosse maladie, sans
régime et sans retraite par le seul usage du mercure d’or[81].

  [81] Nous n’avons pas besoin d’expliquer ce que Blégny entend par «la
    grosse maladie». En la guérissant par le mercure, il étoit arriéré.
    Locke, lorsqu’il vint à paris, vit, affichée sur les murs, l’annonce
    d’un «remède sans mercure», pour lequel le roi avoit accordé un
    brevet, dont le duc de Bouillon avoit le bénéfice, et qui datoit du
    7 septembre 1667. Voy. dans la _Vie de Locke_ par lord King, un
    extrait de ses _Voyages_ à la date du 13 février 1679.

Rien n’est plus commun que de voir des gens guéris sur le champ et pour
jamais de la douleur de la carie des Dents, par l’application de
l’Essence végétale.

Une religieuse qui ne vivoit depuis quatorze mois que de trois
cuillerées de bouillon par jour, chacune desquelles luy coutoit un
martire par les sanglots et mouvements convulsifs qu’elle luy causoit
pendant près d’une heure, et les douleurs d’estomach qu’elle ressentoit
ensuite, fut soulagée très considérablement dès la première prise de
l’opiate digestive, et se trouva après la deuxième en état de faire deux
grands repas par jour sans aucune incommodité.

Deux poulmoniques ont été parfaitement guéris par l’usage de la Conserve
pulmonaire.

Une fistule lacrimale accompagnée d’un flux de larmes involontaires, a
été guérie en peu de jours sans opération par une simple pomade.

Quand l’Auteur connoitroit les personnes sur qui ces Cures ont été
faites, il ne pourroit les nommer sans imprudence, mais les incrédules
pourront s’assurer de la verité, par le témoignage de diverses autres
personnes qui ont eu occasion de voir opérer le Medecin par qui elles
ont été entreprises, et dont le Libraire qui débite cet Ouvrage, offre
de donner les noms et les adresses selon l’exigence des cas.




  LE
  LIVRE COMMODE
  CONTENANT
  les Adresses de la Ville de Paris et le Trésor des Almanachs
  POUR L’ANNÉE 1692.




AFFAIRES ECCLÉSIASTIQUES.


Monseigneur l’Archevêque de Paris donne Audience aux particuliers dans
les appartemens de l’Archeveché, près Notre-Dame, le matin à onze heures
quand il est à Paris. C’est au même lieu qu’on s’adresse à Monsieur de
Morange pour impetrer les dispenses et autres grâces Ecclésiastiques qui
emanent de mondit Seigneur.

Monsieur Ameline Grand Archidiacre, et M. de la Baude Archidiacre de
Brie, demeurent au Cloître.

Messieurs les Abbez Daquin[1] et de Bourlemont Agens du Clergé,
demeurent; sçavoir, le premier au Jardin du Roi[2], et le deuxième ruë
d’Enfer près les Chartreux.

  [1] C’étoit le frère du médecin du roi, qui lui avoit donné, en avril
    1688, l’abbaye de Saint-Laurent (_Journal_ de Dangeau, t. II, p.
    130).

  [2] C’est comme frère du premier médecin que l’abbé Daquin y logeoit,
    la surintendance du Jardin royal étant encore, pour la plus grande
    part, dans les attributions du premier médecin du Roi.

Monsieur de Bouquenet Doien de Notre Dame, à qui l’on s’adresse pour les
affaires du Chapitre, demeure dans le Cloître, et tient Chapitre les
Lundis, Mercredis et les Vendredis.

M. Chéron Official de Paris, à qui l’on s’adresse pour obtenir
permission de publier Monitoire[3], demeure ruë du petit Musc près
l’Arsenal. On le trouve aussi bien souvent à la maison de Pincourt rue
des Amandiers Fauxbourg saint Antoine[4].

  [3] Ordonnances de l’autorité ecclésiastique, avec menace
    d’excommunication, ayant pour objet d’obliger ceux qui avoient
    connoissance d’un crime de déclarer ce qu’ils en pouvoient savoir.

  [4] «Monsieur l’Official de Paris qui connoît des fonctions et actions
    bénéficiales, demeure rue du Petit-Musc et est souvent à Pincourt,
    où il a une maison de bon air.» Edit. 1691, p. 5.

Il tient son Audience en la premiere cour de l’Archeveché, le Mercredi,
et le Samedi à midi, où l’on porte toutes les Causes concernant les
fonctions Curiales et les Accessoires; et par conséquent les questions
matrimoniales, la Morale des Prêtres[5], etc.

  [5] L’Official, en effet, connoissoit de toutes ces choses. C’est lui,
    par exemple, qui légitimoit par mariage les unions qui n’avoient pas
    jusque là été régulières. Celle du perruquier Lamour et d’Anne, sa
    perruquière, avoient longtemps été du nombre, ainsi que Boileau nous
    l’apprend au chant Ier du _Lutrin_:

          ... ce couple charmant
        S’unit, dit-on, longtemps avant le sacrement,
        Mais depuis trois moissons à leur saint assemblage
        L’Official a joint le nom de mariage,

    L’officialité de Paris, abolie par la Révolution, fut rétablie par
    Napoléon, pour qu’on y statuât sur son divorce.

M. Coignet Promoteur de cette jurisdiction, qui conclud pour la
manutention des Canons et Discipline Ecclésiastique, est Curé de la
Paroisse de S. Roch.

M. Robert Grand Pénitencier qui absout les cas reservez[6], confesse
presque tous les matins et quelquefois l’apresdiné.

  [6] Il auroit pu, si l’on en croit la chronique, garder pour lui-même
    beaucoup des pénitences qu’il distribuoit. Sa vie n’étoit pas des
    plus édifiantes. L’abbé Legendre, _Mémoires_, p. 59, se contente de
    dire qu’il avoit «des talents, autant pour le monde que pour sa
    profession.» Les chansons en disoient plus. V. le _Recueil de
    Maurepas_, t. XXV, p. 363. Il avoit une pension de mille francs
    «pour écrire l’histoire de ce que Louis XIV avoit fait en faveur de
    la religion.» Il n’en écrivit pas un mot. (Legendre, _Mém._, p. 99.)
    Ajoutons toutefois que Nicole, qui étoit de Chartres comme lui, le
    tenoit en grande estime. (Goujet, _Vie de Nicole_, 1re part., p. 16,
    et 2e part., p. 130, 144.)

M. Le Chantre de la même Eglise[7], à la nomination duquel sont tous les
Maitres et toutes les Maitresses des petites Ecoles de Paris, et qui
connoit des causes concernant cette profession[8], demeure aussi dans le
Cloître, où il tient son Audience le Jeudi à trois heures de relevée.

  [7] Ce chantre n’étoit pas moins que le célèbre Claude Joly, dont nous
    trouvons un si bel éloge dans le _Valesiana_, p. 39. Il avoit été, à
    Munster, le conseiller intime du duc de Longueville pour les
    négociations du traité. Après la Fronde, où il fut des plus hostiles
    à Mazarin, il devint official de l’Église de Paris, puis, ce que
    nous le voyons ici, grand chantre. Il ne mourut que le 19 janvier
    1700, à quatre-vingt-treize ans, des suites d’une chute. V. le
    _Mercure de France_ à cette date, p. 276.

  [8] Il leur avoit consacré tout un livre en trois parties: _Traité
    historique des Ecoles épiscopales_ par Claude Joly. Paris, Muguet,
    1678, in-12. Il eut, à leur sujet, bien des contestations avec
    l’Université, et aussi avec les curés de Paris qui n’acceptoient pas
    que le droit des Ecoles de Grammaire appartînt seulement à MM. du
    Chapitre et au grand chantre, comme ceux-ci le prétendoient. On peut
    lire dans l’excellente édition, donnée par M. Cocheris, de
    l’_Histoire du Diocèse de Paris_, de l’abbé Lebeuf, t. I, p. 43-44,
    le détail des factums qui furent échangés entre les deux partis.

Messieurs Jousse et Moussinot au Parvis. M. Marais ruë Cocatrice, et M.
Chevalier ruë saint Pierre aux bœufs, sont les quatre Marguillers Laics
de l’Eglise de Paris.

Les Procureurs de l’Officialité et les Notaires Apostoliques chez qui on
peut passer tous actes recevables en Cour de Rome, sont tous établis ruë
Neuve, Cloître et Parvis Notre Dame.

Les douze Banquiers Expeditionnaires en Cour de Rome, par l’entremise
desquels on obtient toutes les Bulles et Expéditions du saint Siége, à
peine de nullité et d’amende[9], sont:

  [9] Ils étoient conseillers du roi, et faisoient leurs expéditions par
    courriers, non-seulement pour la Cour de Rome, mais pour les
    légations. Ils eurent leur chapitre spécial dans l’_Almanach royal_,
    dès la première année, 1699. Leur création datoit du mois de mars
    1673.

_Messieurs_

Du Bourgt, ruë Bailleul.

De la Nouë, ruë de la Harpe.

Le Pelletier, ruë saint Severin[10].

  [10] Jacques Le Pelletier. En 1702, il étoit doyen des banquiers
    expéditionnaires, et s’étoit rapproché de Notre-Dame; il logeoit rue
    Saint-Christophe. (_Alman. royal_, 1702, p. 75.)

Daquinet, Parvis Notre Dame.

Noyer, ruë de la Licorne.

Ruelle, ruë des Prouvaires.

Le Roy, ruë Bardubec.

Chubuté, ruë des Prêtres saint Germn l’Auxerrois[11].

  [11] Son nom, défiguré ici, était Chubéré (Jean-Pierre). _Alman.
    royal_, 1702, p. 75.

Le Zineau, ruë des Massons[12].

  [12] Laurent Lezineau. (_Id._)

Antoine, ruë saint Christophle.

Beaudet de Beaumont, ruë saint André.

Le Maine, ruë Hautefeuille[13].

  [13] Au lieu de douze banquiers-expéditionnaires, il devroit y en
    avoir vingt ici. Un édit du mois de septembre de l’année précédente,
    1691, avoit, en effet, rétabli définitivement les huit offices
    héréditaires créés au mois de décembre 1689, et supprimés le mois
    suivant.

On trouve des instructions très importantes sur l’obtention et sur le
dénombrement des Benefices de France, dans les livres que M. Le
Pelletier a composés, et qu’il vend chez luy[14], et encore dans
quelques autres que Michallet a imprimés, ruë saint Jacques à l’Image
saint Paul.

  [14] «M. Pelletier, banquier expéditionnaire en cour de Rome, qui
    demeure rue et devant Saint Séverin, est auteur de deux livres très
    instructifs sur l’obtention et le dénombrement des bénéfices.» Edit.
    1691, p. 5.

Le Sieur François Muguet[15] seul Imprimeur de l’Archeveché pour les
Mandemens, Monitoires, Jubilez, Catéchismes, etc., demeure rue de la
Harpe.

  [15] Nous avons vu plus haut que c’est lui qui avoit publié en 1673 le
    _Traité_ de Claude Joly sur les écoles épiscopales.

Les Brefs à l’usage de Rome, se vendent chez la Veuve Coignard, rue
Saint Jacques[16].

  [16] «Chez Jean-Baptiste Coignard, rue Saint-Jacques, _à la Bible
    d’or_.» Edit. 1691, p. 4. «Le bref de Paris se vend chez la veuve
    Cramoisy, même rue, _aux Cigognes_.» _Ibid._--La _Bible d’or_
    devint, au siècle suivant, l’enseigne des Didot, et _les Cigognes_
    celle des Barbou, puis des Delalain.

Les usages Romains, à scavoir Breviaires, Diurnaux, Missels, Rituels,
Processionnels, Antiphonètes, Graduels etc. se trouvent chez presque
tous les Libraires de la rue S. Jacques, et particulièrement chez la
Veuve Coignard, et chez les Sieurs de La Caille[17], Josse et Hérissant.

  [17] Jean de la Caille. Sa boutique étoit rue Saint-Jacques, à
    l’enseigne de _la Prudence_. C’est à lui qu’on doit l’excellent
    ouvrage, devenu rare aujourd’hui, _Histoire de l’Imprimerie et de la
    Librairie_, 1689, in-4º. V. ce qu’en dit Chevillier, _l’Origine de
    l’Imprimerie de Paris_, 1694, in-4º, p. 58.

Les Livres de l’Office Divin à l’usage du Diocèse de Paris, se vendent
chez les sieurs Josse et Léonard, ruë Saint Jacques[18].

  [18] «Les heures et autres livres de piété généralement compris sous
    le titre d’usages, se vendent chez différents libraires rue Neuve
    Notre-Dame, Quay de Gesvre et Pont au Change.» Edit. 1691, p. 4.

M. Mariochaud Avocat en Parlement et Bailly de la Justice Nostre-Dame,
demeure dans le Cloître.

M. Chevalier qui est Procureur Fiscal de cette Justice, demeure ruë
saint Pierre aux bœufs.

M. Savin qui en est Greffier, demeure derrière Saint Denis de la
Chartre.

M. Des Combes Greffier de l’Officialité, demeure rue de la Draperie.

M. Taupinard Bailly de la Temporalité[19] et qui tient son Audiance le
Lundy et le Jeudy à midy, demeure rue Galande.

  [19] C’est ce qu’on appeloit aussi Bailliage de la duché-pairie de
    l’Archevêché de Paris. On y connoissoit des appellations de
    sentences rendues en matière civile par les officiers de justice sur
    les domaines de l’archevêché. Un bailli, un procureur fiscal et un
    greffier étoient attachés à cette juridiction.

M. Le Comte son Greffier, demeure rue des Noyers.




EXERCICES DE PIÉTÉ.


Le Roi à qui Dieu a concédé le pouvoir de guérir par un simple
attouchement les malades atteints des Ecrouelles, a la bonté de toucher
tous ceux qui ont été visitez par M. le premier Chirurgien de Sa
Majesté, la veille de Paques, de la Pentecoste, de la Toussaints, et de
Noël, après avoir fait ses dévotions[1], et de leur faire ensuite
distribuer à chacun quinze sols par forme d’aumone, à cause dequoi
Monseigneur le Grand Aumonier de France est toujours présent à la
Céremonie.

  [1] Pour plus de détails, on peut lire l’_Etat de France_ de 1692, t.
    I, p. 238. Le nombre des scrofuleux que le roi touchoit était
    quelquefois très-considérable. Nous lisons, par exemple dans le
    _Journal de Dangeau_, sous la date du 21 avril 1685, c’est-à-dire à
    l’époque de Pâques, une de celles où, comme on le voit ici, cette
    cérémonie revenoit tous les ans: «Le roi fit son bonjour (ses
    pâques) à la paroisse entre les mains du cardinal de Bouillon, et
    toucha ensuite treize cents malades.»

Le Roi pratique aussi chaque année le Jeudi Saint, une action digne de
sa singulière Piété; car après le Service, l’Absoute et la Prédication,
Sa Majesté accompagnée de tous les Seigneurs de sa Cour, lave les pieds
à treize pauvres enfans, revetus d’une longue Robe de ratine rouge ayant
une serviette au col qui s’estend jusqu’à leurs pieds[2], à chacun
desquels elle distribue ensuite par les mains de Monseigneur le Grand
Aumonier de France, treize plats de bois garnis de poissons chacun avec
la figure de l’un des Apostres, un pot de vin, deux Aulnes de toile, et
treize écus blancs dans une bource à treize pendans, ce qui est mis dans
une manne et donné ensemble à chacune des Mères de ces enfans[3].

  [2] L’_Etat de France_ de 1692 contient aussi, à ce sujet,
    d’intéressants détails, t. I, p. 20, 70, 120, 387.

  [3] Ce que Blégny devroit ajouter, c’est que les princes prenoient
    part à cette cérémonie de la _Cène_, comme on l’appeloit, et y
    servoient: «Le roi, écrit Dangeau, à la date du Jeudi Saint, 7 avril
    1689, entendit le sermon de l’abbé Roquette, qui prêcha à merveille;
    ensuite le Roi fit la cérémonie de laver les pieds des pauvres.
    Monseigneur le duc de Bourgogne servit à la cène pour la première
    fois. Monseigneur--c’est le Dauphin--communia à la paroisse, et puis
    revint servir à la cène.»

Le même jour Monseigneur l’Archeveque de Paris, fait aussi la Sêne dans
la grande salle de l’Archeveché, où il lave pareillement les pieds à
douze pauvres, à chacun desquels il distribue trois plats de bois garnis
de poissons, un pain, un pinte de vin et un écu blanc.

M. De Pelisson Fontanier Maitre des Requestes logé dans la maison
Abbatialle de Saint Germain des Prez[4], distribue par ordre du Roy, une
infinité d’Aumones et de pensions considérables aux Nouveaux
Convertis[5].

  [4] Il y logeoit comme administrateur de l’économat de l’abbaye,
    charge qu’il occupa durant quinze ans. (Marcou, _Pellisson, Etudes
    sur sa vie et ses œuvres_, 1859, in-8, p. 331.)

  [5] Il ne s’y épargnoit pas, en effet, en bon converti qu’il étoit
    lui-même. Ces aumônes faisoient, au reste, partie de ses fonctions:
    en même temps que l’économat de Saint-Germain des Prés, il
    administroit la caisse des conversions créée en novembre 1676.
    (_Id._, p. 342.)

Mesdames de Guise[6], de Créqui et de la Trémoüille[7] qui sont
Directrices de la Charité de la Paroisse S. Sulpice, font d’ailleurs de
grandes aumosnes aux pauvres honteux.

  [6] C’est en souvenir de son père Gaston d’Orléans, et du palais du
    Luxembourg, où elle étoit née de son second mariage, que la duchesse
    de Guise étoit restée une des grandes aumônières de la paroisse
    Saint-Sulpice. Sa résidence étoit alors, en effet, bien loin de là,
    au Marais, dans l’Hôtel occupé aujourd’hui par les Archives.

  [7] Mesdames de Créquy et de la Trémoille étoient la mère et la fille.
    Mme de la Trémoille mourut la première, au mois d’août 1711.

Autant en font Mesdemoiselles de la Moïgnon[8] rue de Taranne, et
l’Eschassier[9] derrière la même Eglise.

  [8] Elle avoit, pour les œuvres de charité, succédé à sa mère la
    présidente, qu’on y avoit vue si active pendant la Fronde. (Feillet,
    _Misère au temps de la Fronde_, 1862, in-8, p. 231.) Elle avoit
    contribué surtout à l’œuvre des prisons, dont elle fut une des
    premières trésorières. (_Etat ou tableau de la Ville de Paris_,
    1760, in-8, p. 72.) C’étoit une des œuvres où les dévots, comme
    Tartuffe, s’entremettoient le plus volontiers, surtout par leurs
    fréquentes visites. (_Athenæum_, t. II, p. 565.)

  [9] Elle étoit sœur de l’avocat du roi, que nous trouverons plus loin.

Il y a paraillement dans toutes les Parroisses de Paris des Communautez
de Dames Pieuses[10], qui font assister les pauvres malades honteux
d’Alimens, de Remèdes, et d’Opérations Chirurgicales, et qui font même
instruire des orphelins de l’un et de l’autre sexe.

  [10] «Sous la direction des quelles il y a des médecins, des
    chirurgiens et des sœurs grises.» Edit. 1691, p. 3.

Quelques unes de ces Dames pratiquent encore la charité avec un zèle
exemplaire, pour la délivrance des pauvres prisonniers retenus pour
dettes[11]. Celles là sont connuës de tous les Concierges et Geolliers
des Prisons, à qui on peut s’adresser pour en avoir les addresses[12].

  [11] V. l’avant-dernière note.

  [12] «On apprendra les noms et demeures de ces Dames redemptrices,
    dans les geolles mêmes des prisons, et entre autres en celle de la
    Conciergerie du Palais, où l’on trouve la dame Bourcier, femme du
    concierge, de qui elles sont très-bien connues.» Edit. 1691, p. 4.

Les Pauvres Prisonniers du Châtelet, et du Fort l’Evêque, peuvent
impetrer avec succez le secours de Madame Lieve Tresoriere de la Charité
de Saint Germain de Lauxerrois qui demeure dans le Cloître.

Madame de Miramion[13] Institutrice et Supérieure de la Congrégation des
Filles de Sainte Geneviève établie sur le Quay de la Tournelle[14], a
toujours la même application aux œuvres pieuses et charitables; et
particulierement en faveur des pauvres Malades qu’elle fait assister
dans tous leurs besoins.

  [13] Marie Bonneau, veuve de Jean-Jacques de Beauharnois, seigneur de
    la terre de Miramion, à une lieue d’Orléans. S’étant vouée aux
    œuvres pieuses, dès qu’elle fut veuve, l’année même qui suivit son
    mariage, et après que Bussy eût tenté de l’enlever, elle fonda la
    _Maison du Refuge_ pour les filles qu’on arrachoit de force à la
    débauche, et celle de _Sainte Pélagie_, pour les repentantes, qui
    s’en retiroient volontairement. Sa dernière fondation fut la
    Congrégation dont il est parlé ici. Ce ne fut d’abord, en 1661,
    qu’une Communauté de douze filles pieuses, destinées à tenir les
    petites écoles, panser les blessés, assister les malades. Son
    premier nom fut _la Sainte Famille_, puis elle prit celui de _Sainte
    Geneviève_ qu’elle a ici, quand on l’eut réunie à une autre
    communauté ainsi nommée, et dont le but étoit le même. Mme de
    Miramion en fut la supérieure jusqu’à sa mort, le 24 mars 1696.

  [14] On l’appela aussi, jusqu’à la Révolution, _Quai des Miramionnes_,
    à cause des saintes filles que dirigeoit Mme de Miramion. L’hôtel,
    dont elle avoit fait pour elles un couvent, est aujourd’hui la
    Pharmacie centrale des hôpitaux civils. Celui de sa fille, mariée au
    maître des requêtes, Guillaume de Nesmond, est auprès, avec son
    marbre à lettres d’or au-dessus de la porte: «Hotel ci-devant de
    Nesmond.»

Madame de Poncarré[15] occupée du même zèle, demeure ruë Neuve Saint
Mederic.

  [15] Femme du maître des requêtes, nommé en 1703 premier président à
    Rouen.

Les Revérends Pères Celestins font distribuer tous les jours du pain, à
tous les pauvres qui se présentent à leur porte à huit heures du matin,
à deux, et à six heures de relevée.

Les Revérends Pères de Saint Lazare, donnent tous les jours à disné à
vingt quatre pauvres.

Les Révérends Pères Chartreux, donnent à disné tous les Vendredis à un
grand nombre de pauvres honteux.

Les Reverends Pères de l’Oratoire de l’Enfant Jésus ruë d’Enfer, donnent
aux pauvres la déserte[16] de leur table.

  [16] Lisez «desserte.»

On donne à disné tous les Dimanche à douze pauvres honteux au Jardin
Médicinal de Pincourt, Fauxbourg Saint Antoine[17].

  [17] «Où ils sont servis par Monsieur le Directeur.» Edit. 1691, p. 4.
    C’étoient, y est-il dit aussi, «les médecins de la Société Royale»
    qui donnoient le dîner.

L’_Almanach Spirituel_ qui marque toutes solemnitez des Eglises de
Paris, les jours et la condition des Indulgences, se vend rue Saint
Jacques chez George Josse[18] à la Couronne d’Epine.

  [18] Un des plus vieux libraires du quartier Saint-Jacques. De 1659 à
    1661, il avoit été syndic.

Tous les Dimanches après Vespres M. l’Abbé Galliot sous Pénitencier de
Paris, tient une conférence publique de Controverse en la Chapelle du
Collége des Lombards ruë des Carmes.




FINANCES ROYALES.


_Chef du Conseil Royal des Finances._

M. De Beauvilliers, ruë Sainte Avoye[1].

  [1] Paul, comte de Saint Aignan, puis duc de Beauvilliers, gouverneur
    du duc de Bourgogne. Il étoit chef du Conseil des finances, depuis
    1685, et le roi l’avoit fait ministre d’état en 1691. Il habitoit
    rue Sainte-Avoie, englobée aujourd’hui, comme on sait, dans la rue
    Vieille-du-Temple, l’Hôtel d’Avaux, qui prit à cause de lui le nom
    d’_Hôtel Saint Aignan_, inscrit encore au-dessus de la haute porte,
    seule partie qui en soit restée à peu près intacte.


_Contrôleur Général des Finances._

M. de Ponchartrain[2], au bout de la ruë Vivienne devant les Filles
Saint Thomas[3].

  [2] Louis Phelippeaux de Pontchartrain fut dix ans, de 1689 à 1699,
    contrôleur général des finances. Il fut ensuite chancelier de 1699 à
    1704. M. de Maurepas, ministre sous Louis XVI, étoit son petit-fils.

  [3] L’année précédente, il logeoit dans un tout autre quartier: «M. de
    Pontchartrain a son hôtel à Paris, près les Carmes dechaussez du
    faubourg Saint-Germain.» Edit. de 1691, p. 5.


_Intendans des Finances._

M. De Breteuil, ruë du grand Chantier[4].

  [4] François le Tonnelier de Breteuil, d’abord conseiller au
    Parlement, puis intendant en Picardie et en Flandre, et enfin, en
    janvier 1684, intendant des finances et conseiller d’État.

M. Le Pelletier, ruë Couture Sainte Catherine[5].

  [5] Michel Le Pelletier de Souzy, qui, après avoir été conseiller au
    Parlement, et successivement intendant de Franche-Comté et de
    Flandre, s’étoit trouvé en passe de devenir contrôleur général à la
    place de son frère. C’est celui-ci qui lui fit préférer
    Pontchartrain, «par un motif rare de conscience», dit Saint-Simon
    dans une note sur Dangeau, mais par pure jalousie, suivant
    nous.--Son hôtel de la rue Culture est occupé aujourd’hui par la
    pension Jauffret.

M. De Caumartin, ruë Sainte Avoye[6].

  [6] L. Lefèvre de Caumartin, marquis de Saint-Ange, fut intendant des
    finances de 1690 à 1715, après avoir été conseiller au Parlement et
    maître des requêtes. M. de Caumartin, prévôt des marchands de 1778 à
    1784, qui donna son nom à l’une des rues de la Chaussée-d’Antin,
    étoit son petit-fils.

M. Du Buisson, ruë Simon le Franc[7].

  [7] Beau-frère de Sonning, qui, beaucoup plus connu que lui,--nous en
    parlerons plus loin,--avoit aidé à sa fortune.

M. De Chamillart, à la Place Roiale[8].

  [8] «Rue des Bernardins.» Edit. 1691, p. 6.--C’est Michel de
    Chamillard, qui, après avoir été maître des requêtes, intendant à
    Rouen, puis, en 1690, intendant des finances, eut une fortune si
    haute, lorsque de cette dernière charge, étant passé, en 1699, à
    celle de contrôleur général, qu’il garda jusqu’en 1707, il finit par
    devenir alors ministre de la guerre.

M. Darmenonville, vieille ruë du Temple[9].

  [9] Il devint plus tard directeur des finances. Il avoit de
    très-grands biens, entre autres Rambouillet, qu’il échangea avec le
    roi, pour qu’il y mît un haras, et la Muette qu’il vendit à Mme de
    Berry, fille du Régent. La direction des finances, dont il étoit
    titulaire, ayant été supprimée, il eut une pension de douze mille
    livres, et en attendant qu’on le fît secrétaire d’Etat des affaires
    étrangères, la charge, créée exprès pour lui, de capitaine du bois
    de Boulogne. Il y fit bâtir le pavillon, qui s’appelle encore à
    cause de lui «pavillon d’Armenonville.»


_Gardes du Trésor Royal._

M. De Frémont, ruë Neuve Saint Augustin[10].

  [10] Avant d’être, à partir de 1689, garde du Trésor royal, il avoit
    été dans les finances, et s’y étoit souvent empêtré, notamment en
    1682, où l’on avoit dû nommer deux commissaires pour l’examen de ses
    affaires, et mettre garnison chez lui. Il ne s’en étoit tiré que
    moyennant quatre millions. (V. aux _Mss._ de la Biblioth. Nat.,
    _Lettres hist. et anecdot._, 10 et 17 avril et 8 may 1682.) Le
    maréchal de Lorges, que sa fille Geneviève avoit épousé en 1676,
    l’avoit beaucoup aidé dans ce mauvais pas. Saint-Simon épousa l’une
    des filles nées de ce mariage, quoique le grand-père fût, comme
    ancien traitant, de la classe des gens que son orgueil de duc avoit
    le plus en mépris.--L’hôtel de la rue Neuve-Saint-Augustin, où nous
    voyons ici Frémont, devint, après lui, la propriété de son gendre,
    M. de Lorges. Il fut acheté ensuite par la princesse de Conti. C’est
    sur son emplacement que fut percée en 1777 la rue à laquelle le
    prévôt des marchands, M. de La Michodière, a laissé son nom.

M. Brunet, ruë des Francs Bourgeois[11].

  [11] Brunet de Chailly, frère de Brunet de Rancy, et de Brunet de
    Montferrand, auquel il succéda comme président des Comptes, après
    avoir vendu à la fin de mai 1696, sa charge de garde du Trésor,
    moyennant un million à M. de Turmenies. Il y a dans les poésies de
    P. Du Cerceau, t. I, p. 38-41, de jolis vers à sa femme.


_Fermiers Généraux des Domaines, cinq Grosses Fermes, et Domaine
d’Occident comme cautions de M. Pierre Domergue preneur[12]._

  [12] Ce Pierre Domergue était le prête-nom, l’homme de paille de
    Berthelot, qui, en mars 1687, avoit pris pour trente-six millions le
    bail des Gabelles et des Cinq grosses fermes. Ce bail succédoit à
    celui de Jean Fauconnet, dont on sait le nom par La Bruyère, qui
    appelle «les Fauconnet» ceux qui, comme Berthelot et consorts pour
    Domergue, lui servoient de caution. Ces prête-noms, seuls
    contractants officiels, avec la responsabilité de la prise de corps,
    étoient de pauvres diables, qu’on payoit de leurs risques par une
    pension de deux ou trois mille livres. Monteil avoit vu une de leurs
    quittances d’appointements.

M. Brunet, ruë des Francs-Bourgeois[13].

  [13] Un des frères de Brunet de Chailly, dont il a été parlé dans
    l’avant-dernière note.

M. Pelissier, ruë du Boulloy[14].

  [14] Avant celui-ci, dans l’Edit. précédente, p. 6, se trouve: «Colin,
    rue Saint-Martin.»

M. de Reaupalu, ruë Vivienne.

Mrs Arnaud, et de Blaine[15], ruë Neuve saint Augustin.

  [15] Melchior de Blair, et non de Blaine, étoit un simple intéressé
    aux fermes qui avoit, comme tel, eu des missions en 1689 et 1691,
    dans la Picardie et la Bretagne. En 1716 il fut mis à la taxe par la
    Chambre de justice pour 240,000 livres.

M. Remond, ruë de la Verrerie[16].

  [16] Remond de la Renouillère. Il fut taxé, en 1716, à 437,000 livres.

Mrs de Furgis[17] Hocquart, et Doüilli, ruë des fossez Montmartre.

  [17] «Turgis.» Edit. 1691, p. 6. C’est le vrai nom. Sa femme, Marie de
    Maupeou, étoit cousine de Mme de Pontchartrain.

Mrs Granval[18], de Lagni[19] et Corneri[20], ruë de Richelieu.

  [18] Charles de Poirel de Grandval. En outre de son intérêt dans les
    fermes, il avoit une charge de munitionnaire de la marine.

  [19] J.-B. de Lagny. Il fut directeur général du commerce en 1694.

  [20] «De Cormery.» Edit. 1691, p. 6. C’est le nom véritable. Louis
    Bauyn de Cormery devint fermier général à Lyon en 1694.

Mrs Hotman[21], et l’Huillier, ruë Sainte Anne.

  [21] Il avoit été en 1689 directeur des fermes à Rouen, et c’est lui
    qui, en 1682, avoit dû avec un autre commissaire faire cet examen
    des affaires de Frémont, dont il a été parlé plus haut.

M. Ricoult, vieille ruë du Temple.

M. de Saint Amant, ruë Vieilles Audriettes.

M. Berthelot l’ainé à l’Arsenal[22].

  [22] C’est lui, comme il a été dit dans une note précédente, qui étoit
    le véritable preneur de ce bail des fermes, sous le nom de Domergue.
    Il y avoit eu l’agrément complet du roi, et plus même: «depuis ce
    traité fait, écrit Dangeau, le 7 mars 1687, le roi a donné à
    Berthelot, la valeur de plus de 500,000 livres, et a dit qu’il le
    choisissoit comme l’homme d’affaires le plus capable de faire les
    recouvrements sans tourmenter les peuples.» Il avoit été fermier
    général en Flandre sous Colbert, puis munitionnaire des guerres, ce
    qui lui avoit valu le logement que nous lui voyons ici à l’Arsenal
    et, par suite, le surnom de «Berthelot des poudres.» Sa fille épousa
    le baron de Beauvais, fils de cette Beauvais la borgnesse qui
    passoit pour avoir déniaisé Louis XIV, et dont l’hôtel fait, comme
    disoit Brienne, avec des pierres du Louvre, existe encore rue
    Saint-Antoine, nº 64.

M. Berthelot de Belley[23], ruë Plastrière.

  [23] Frère du précédent, mêlé à ses affaires, mais moins riche.

M. le Jariel, ruë Verderet.

M. Brunet de Vauge, vieille ruë du Temple[24].

  [24] De cette famille des Brunet que nous connaissons déjà, et qui
    formoit dans le quartier du Temple une vraie tribu de financiers.

M. Baugier[25], ruë Sainte-Croix de la Bretonnerie.

  [25] Edme Baugier, qui avoit été longtemps intéressé dans les fermes
    en Bourgogne.

M. Valier[26], ruë Beaubourg.

  [26] Guillaume Vallier, qui, avant d’être fermier général, avoit été
    greffier du Conseil privé et contrôleur du parlement de Metz.

M. le Juge, ruë du grand Chantier[27].

  [27] Sa maison, bâtie par de Cotte, étoit des plus belles, avec ses
    bas-reliefs de Coysevox, son magnifique jardin, etc. _V._ G. Brice,
    édit. 1701, t. I, p. 266.

M. Germain, ruë des Victoires[28].

  [28] Jean Germain fut secrétaire du roi en même temps que fermier
    général, après avoir été dans les fermes à La Rochelle.

M. de Courchant, cloître Saint Mederic[29].

  [29] C’est lui, suivant _les Clés_, que La Bruyère dénonce dans le
    chapitre des _Biens de fortune_, § 16, comme s’étant démesurément
    engraissé «dans le huitième denier: quelle monstrueuse fortune,
    dit-il, en moins de six années!»

M. le Tellier, ruë Neuve Saint Eustache[30].

  [30] P. Le Tellier, qui, en 1687, n’étoit que sous-fermier en
    Champagne.

M. le Normand, ruë de Torigni[31].

  [31] Il étoit secrétaire du Roi, et avoit été d’abord fermier général
    en Flandre. Son fils, le Normand de Tournehem, fut aussi fermier
    général, puis, en 1745, directeur-ordonnateur des bâtiments. Il eut
    pour neveu et héritier le Normand d’Etioles, mari de Mme de
    Pompadour.

M. Boulanger, ruë Neuve des Bons Enfans[32].

  [32] Charles Boulanger, qui avoit été, en 1689, receveur général en
    Flandre.

M. Hénault, ruë du Boulloy[33].

  [33] Jean-Remi Henault, père du président si célèbre, selon Voltaire,
    par ses soupers et sa _Chronologie_. Il avoit, suivant son fils
    (_Mémoires_, p. 4), toute la confiance de Pontchartrain. Il n’eut
    pas moins celle de Chamillard, qui lui abandonna le détail des
    Fermes, et l’auroit fait, pour peu qu’il y eût consenti, secrétaire
    d’Etat de la Guerre. Ce que le président n’ajoute pas, c’est que
    sous la Régence, son père avoit des comptes à rendre. La taxe alloit
    le frapper quand il la devança, en faisant la part du feu. Il avoua
    2,500,000 francs de biens, plus 500,000 donnés à son fils et
    pareille somme à sa fille, Mme de Jonsac. En abandonnant un million,
    au lieu de 1,250,000 livres qu’on vouloit d’abord, il fut tenu
    quitte, avec le profit de passer pour fort habile, grâce à ses
    propositions faites d’avance. (_Journ. de Dangeau_, 6 octobre et 5
    décembre 1716.)


_Fermiers Généraux des Aydes et Domaines de France et Droits y joints,
comme cautions de M. Christophle Charrier[34] preneur._

  [34] «Charriere.» Edit. de 1691, p. 7. C’est le vrai nom. Le bail des
    aides et domaines, fait en même temps que celui de Domergue, dont
    nous avons parlé plus haut, ayoit été adjugé moyennant vingt-sept
    millions: pour les aides, vingt-et-un; pour les domaines, six.

M. Logeois, ruë de l’Université[35] à Saint-Germain des Prez.

  [35] «Rue Jacob.» _Ibid._--Il étoit fils du receveur des consignations
    du Châtelet, ce qui ne l’empêcha pas de se faire appeler M.
    d’Imbercourt, quand il eut acheté la seigneurie de ce nom. Sa fille,
    mariée d’abord au riche traitant La Popelinière, épousa en secondes
    noces le maréchal de Tourville, à qui elle apporta, en outre de ce
    que lui avoit laissé son premier mari, 200,000 livres que lui donna
    son père. (_Journ. de Dangeau_, 15 janvier 1690.) Laugeois, suivant
    _les Clés_, seroit le _Chrysippe_ de La Bruyère.

M. Dapougni, ruë Bar-dubec[36].

  [36] Un des traitants les plus riches et les plus intraitables. C’est
    lui, suivant Richelet (_Recueil de Lettres_, t. I, p. 410, note),
    qui harcela le plus vivement Patru pour quelques dettes, et qui
    l’eût fait mettre au Châtelet, si Boileau ne l’eût tiré de peine.

M. Robert, ruë Neuve Saint Eustache[37].

  [37] Il avoit commencé par être payeur des gages du Châtelet. Il
    parvint par l’intendant d’Armenonville, dont Gilbert, son neveu,
    fils du riche drapier, à l’enseigne des _Rats_, étoit le beau-frère.

M. Delpeche, ruë Saint Martin[38].

  [38] Encore un traitant parti de fort bas, s’il falloit, d’après _les
    Clés_ de La Bruyère, voir en lui le type de ce caractère: «Sosie, de
    la livrée a passé par une petite recette à une sous ferme...»

M. Romans, ruë Sainte Croix de la Bretonnerie.

M. Thomé, ruë des fossez Mommartre[39].

  [39] Thomé de Lesse, comme l’appellent les auteurs des _Clés_ de La
    Bruyère qui veulent voir en lui le type du _Caractère_: «un homme
    d’un petit génie peut vouloir s’avancer, il néglige tout, il ne
    pense du matin au soir, il ne rêve la nuit qu’à une seule chose qui
    est de s’avancer...»

Mrs Mainon[40] et le Maistre, ruë Beaubourg.

  [40] Il étoit alors nouveau dans les affaires. Il s’y poussa davantage
    lorsqu’il eut épousé la veuve de Despech que nous trouverons plus
    loin.

M. de Mouchi, ruë Jacob[41].

  [41] Vincent Maynon. Il resta, jusqu’en 1717, fermier général des
    aides, d’où alors il demanda «à être osté», à la seule condition
    qu’on lui rembourseroit sa charge. Ce qui fut fait. Il vouloit plus,
    la ferme des Tabacs, dont l’an d’après il offrit 2,200,000 livres.
    Law eut la préférence. (_Journ. de Dangeau_, 24 avril 1717; 31 août
    1718.)

M. Blein, ruë de Cléry.

M. Dumas, ruë Beaubourg.

M. de la Porte, ruë de Braque.


_Receveurs Généraux des Finances._

_Paris._ M. Carel, place Royale.

  --   M. Sonning, ruë des petits Champs[42].

  [42] Beau-frère de l’intendant des finances Dubuisson, dont il a été
    parlé plus haut. Il n’étoit pas encore, rue des Petits-Champs,
    parvenu à l’énorme fortune dont il étala le luxe dans l’hôtel que
    Dulin lui bâtit un peu plus tard rue de Richelieu, près de l’endroit
    où avoit été la porte, c’est-à-dire à la hauteur de la rue Feydeau
    actuelle. Sa vie, de même qu’à Neuilly, où il avoit une autre belle
    maison, y fut des plus galantes, comme on peut le voir par ce qui
    est dit de la diversité de ses bonnes fortunes dans les _Partisans
    démasqués_, 1707, in-12, p. 189. Il y recevoit aussi beaucoup de
    gens d’esprit: Chaulieu, J.-B. Rousseau, l’abbé Courtin, etc. A tous
    ces titres, il avoit droit au curieux chapitre que M. G.
    Desnoiresterres lui a consacré dans ses _Cours galantes_, t. III, p.
    269. Si l’on connoît un peu sa vie, on ignore complètement quel
    étoit son vrai nom, tant l’orthographe en varie suivant les livres.
    Dans les uns, il est écrit Sonning, comme ici; dans les autres, tels
    que les _Partisans démasqués_, il est orthographié Sonnen; ailleurs,
    c’est Sonnin ou Sonningen. Ce dernier nom, qui feroit supposer une
    origine allemande, nous paroît devoir être le vrai. Il étoit, en
    1716, devenu caissier général des fermes. Il fut mis à la taxe pour
    600,000 livres.

_Lion._ M. du Pile, ruë de Cléry[43].

  [43] Jacques-André Du Pille avoit été receveur des finances à Lyon,
    avant de l’être à Paris, puis munitionnaire de l’armée et de la
    marine.

  --   M. Prondre, au petit Hôtel de la Vrillière[44].

  [44] Paulin Prondre, d’abord receveur des finances et «traitant» à
    Lyon, suivant Dangeau, qui le nomme Prond. Ayant fait une belle
    fortune, il voulut, au commencement de la Régence, marier sa fille,
    à laquelle il donnoit 200,000 écus de dot, avec le chevalier de
    Roye, mais ce mariage manqua pour un autre qui sembloit plus beau,
    et qui manqua de même. Mlle Marg.-Pauline Prondre alloit épouser le
    marquis de Rochefort, lorsqu’en septembre 1716, la charge de son
    père, ses maisons, ses terres furent saisies par la Chambre de
    justice. Il fut taxé finalement à 1,900,000 livres. (_Journal de
    Dangeau_, 6 et 29 déc. 1715; 9 sept. et 27 nov. 1716.) Sa fille, dès
    l’année suivante, n’en épousoit pas moins le comte de Clermont
    Tonnerre. V. dans le _Journal de Verdun_, sept. 1756, p. 240, un
    article sur elle, à l’époque de sa mort.--Prondre avoit commencé par
    être garçon de boutique à Lyon. (_Correspond. des contrôleurs
    généraux_, t. I, p. 279.)

_Rouen._ M. Aubry, rue des deux portes, quartier S. Sauveur[45].

  [45] Il étoit mort au commencement des terribles exécutions de la
    Chambre de justice, mais sa succession restoit. Elle figure au 8e
    rôle pour 887,000 livres de taxe.

  --   M. Poulletier, rue Sainte Anne[46].

  [46] Il acheta plus tard, pour 800,000 livres, une charge d’intendant
    des finances, qu’il voulut se faire rembourser, quand ces charges
    furent supprimées en 1716; on lui fit dire qu’il ne seroit pas mis à
    la taxe, et qu’il se tînt pour satisfait. C’est ce qu’il fit.
    (_Journ. de Dangeau_, 11 nov. 1716.)

_Soissons._ M. Lallemant, porte Montmartre[47].

  [47] Lallemant de Betz, qui fut, lui, mis à la taxe. On lui fit rendre
    480,000 livres.

  --   M. Hubert, rue Sainte Avoye.

_Orléans._ M. Bachelier, rue de la Corderie, près le Temple.

  --   M. Desespoisses, près les Enfans Rouges[48].

  [48] Charles Vireux des Espoisses. Tout ce que nous savons de lui,
    c’est qu’il fut mis à la taxe en 1716, pour 380,000 livres.

_Tours._ M. de la Tour Rollot, rue de Richelieu.

  --   M. de Valiere, rue Saint Antoine.

_Bourges._ M. Héliot, ruë du Mail.

  --   M. Jannay, ruë des Bernardins[49].

  [49] Jean-Etienne Janet. Il étoit mort, en 1716, quand les financiers
    durent rendre gorge. On s’en prit à sa veuve, qui paya une taxe de
    43,000 livres.

_Bordeaux._ M. du Jardin Beaussart; ruë de Richelieu.

  --   M. Crozat, place des Victoires[50].

  [50] Antoine Crozat qui devint, suivant le Journal de l’avocat Barbier
    (février 1723), «le plus riche particulier de France.» Il avoit
    commencé par être caissier de Penautier, que nous trouverons plus
    loin, puis traitant à Montpellier, et receveur général des finances
    à Bordeaux, comme nous le voyons ici. Il étoit déjà fort riche, et
    s’étoit fait, à prix d’argent, marquis Du Châtel, lorsqu’en 1707 il
    maria sa fille, qui n’avoit guère que douze ans, au comte d’Evreux.
    (_Journ. de Dangeau_, 23 fév. 1707.) La taxe à laquelle il fut mis,
    en 1716, ne fut pas moins de 6,600,000 livres. Ses trois fils, qui
    firent grande figure, furent Crozat, marquis Du Châtel, le président
    de Tugny et le baron de Thiers, un des grands amateurs de son temps.

_Poitiers._ M. de la Ravoye, ruë d’Anjou au Marais[51].

  [51] Il étoit encore, à la fin de l’année précédente, receveur général
    de la Rochelle. Sa fille, dont la dot fut de 410,000 livres, argent
    comptant, épousa, au mois de janvier 1712, le marquis Du Plessis
    Châtillon.

  --   M. Chambelin, ruë Sainte Anne[52].

  [52] Sa veuve, mise à la taxe en 1716, dut rendre 180,000 livres.

_Moulins_. M. Raymond, ruë des Blancs-Manteaux[53].

  [53] Il avait échangé pour celle de Poitiers la recette générale de
    Moulins, qu’il avait déjà en 1684.

  --   M. de la Croix, ruë Saint Antoine.

_Riom_. M. de Romanet, ruë Sainte Croix de la Bretonnerie[54].

  [54] Claude de Romanet, beau-frère de Racine, et mari de l’une des
    filles de Vitart, ancien ami du poëte. Il ne se contenta pas, comme
    son père, André de Romanet, d’être trésorier de France en quelque
    généralité, il se lança dans les plus grosses affaires, où il gagna
    une fortune qui le dénonça à la Chambre de justice de nov. 1716. On
    peut évaluer ce qu’il possédoit par le chiffre de la taxe à laquelle
    on l’imposa: elle fut de 4,453,000 livres. Il la subit sans
    sourciller et sans faire attendre. Dangeau annonce le 24 novembre
    qu’il est condamné à la payer, et, deux jours après, il ajoute
    qu’elle est payée déjà. Il mourut l’année suivante. Son fils épousa
    Mlle d’Estrade. (_Journ. de Dangeau_, 24 et 26 nov. 1716; 11 déc.
    1717.)

  --   M. Despech, ruë Saint Martin[55].

  [55] Paul Despech. Il était mort en 1716, mais la taxe eut des
    reprises sur sa veuve, qui, nous l’avons dit, avoit épousé Mouchi.
    Elle dut restituer au trésor 150,000 livres.

_Caën_. M. Groüin, ruë d’Orléans, au Marais[56].

  [56] Pierre Gruyn ou Grouïn. Il étoit depuis longtemps dans les
    affaires, où il avoit commencé comme receveur des fortifications. Il
    devint garde du Trésor royal, et ne fut pas dans cette charge d’une
    aménité rare. Son aventure avec Jean Bart, qui avoit dû venir le
    trouver dans ses bureaux de la rue du Grand-Chantier, où il logeoit
    alors, et qu’il reçut avec une brutalité qui, d’ailleurs, lui fut
    bien rendue, court tous les _ana_. Une autre du même genre est moins
    connue, c’est la scène que lui fit un officier de gendarmerie, qui
    alla jusqu’à le maltraiter chez lui. Grouïn se contenta de le faire
    mettre à la Conciergerie. (_Journ. de Dangeau_, 10 et 17 avril
    1698.) Son vrai nom étoit Desbordes-Grouïn, et il venoit de fort
    bas: «jadis garçon de cabaret, dit Guy Patin, fils du maître de _la
    Pomme de pin_, il est aujourd’hui grand partisan, et même un des
    gabelles.» Plus il fut haut, plus on se souvint d’où il venoit. Sa
    nomination de garde du Trésor fut accueillie par cette chanson:

        Garde du trésor de la France,
        Gruyn quelle est ton insolence!
        Connais-tu _la Pomme de pin_?
        C’est là que l’épouse peu fière
        D’un maudit frelateur de vin
        Te donna jadis la lumière.

  --   M. Chaillon, ruë des blancs Manteaux.

_Allençon._ M. Haette, ruë de la Tixeranderie.

  --   M. de la Marliere, Cloître Saint Mederic.

_Metz._ M. Chevalier, ruë Neuve Saint Eustache.

  --   M. Goujon, ruë Neuve des petits champs[57].

  [57] C’est, croyons-nous, le même qui fut intendant de Rouen à la
    place de Ronjault en 1715.

_Picardie._ M. Boutin, Cloître Saint Honoré[58].

  [58] René Boutin qui n’étoit, quatre ans auparavant, qu’un simple
    intéressé dans la ferme du Tabac.

  --   M...

_Montauban._ M. Berthelot de Schelles[59], ruë Platrière.

  [59] Lisez Berthelot de Séchelles. Après avoir été receveur à
    Montauban, il venoit d’être munitionnaire en Italie.

  --   M. du Jardin, ruë de Richelieu.

_Limoges._ M. Sandrieu, à l’Hôtel de Lavrillière[60].

  [60] J.-B. Sandrier, et non Sandrieu, qui de la recette de Montauban
    passa à celle de Limoges, fut secrétaire du Roi.

  --   M. Deschauffour, ruë des Bons Enfans[61].

  [61] Il avoit été directeur des franchises au Mans, et mena si grand
    train dans toutes ses charges qu’il mourut misérable. L’un de ses
    fils, qui avoit été lieutenant dans le régiment de Tessé, eut une
    fin plus triste encore. Convaincu de se livrer au vice infâme, et
    pour ainsi dire d’en tenir maison, il fut brûlé vif en Grêve le 24
    mai 1726. Comme on crioit son arrêt par les rues, sans oublier le
    nom du crime, les filles de Madame la Princesse demandèrent à leur
    mère ce qu’étoit ce crime-là. Elle leur répondit: c’est une espèce
    de fausse monnoie.

_Bourg-en-Bresse._ M. Jauranché, ruë Haute Fueille.


_Receveurs du don gratuit des Etats._

_Flandres._ M. Brunet de Revey, ruë des Francs bourgeois.

  --   M. Berthelot de Belloy, ruë Plâtrière.

_Franche-Conté._ M. du Rey, ruë du Roi de Sicile.

_Bourgogne._ M. Chartraire, ruë Saint Antoine.

_Languedoc._ M. Penautier, ruë[62].

  [62] Si son adresse n’est pas donnée, c’est qu’il n’en avoit pas à
    Paris. Il étoit toujours en Languedoc, où il mourut à la fin de
    juillet 1711. Saint-Simon écrivit alors en marge de la copie qu’il
    avoit du _Journal de Dangeau_, cette note qui résume bien sa vie:
    «Penautier étoit devenu de caissier un très-riche financier,
    trésorier du clergé et des Etats de Languedoc; homme de beaucoup
    d’esprit, bien fait, galant, magnifique et obligeant. Il fut mêlé
    dans les affaires de la Brinvilliers et des poisons, et mis en
    prison avec grand danger.» Nous avons vu que Crozat commença par
    être son caissier.


_Trésoriers des Parties Casuelles._

M. Damon, ruë de Cléry.

M. Bertin, ruë Neuve Saint Augustin[63].

  [63] Il avoit encore cette charge en 1702, mais plus tard, sa fortune
    monta. Le Régent, dès son arrivée au pouvoir, le fit un de ses plus
    intimes conseillers en matière de finance. En 1697, il quitta la rue
    Neuve-Saint-Augustin pour la rue Saint-Honoré, où il avoit acheté,
    pour l’embellir encore, le bel hôtel du doyen des conseillers
    d’Etat, Henri Pussort, dont il sera parlé plus loin. _V._ G. Brice,
    _Description de Paris_, 3e édit., 1701, in-12, p. 125-126.


_Trésorier du Marc d’or._

M. Chupin[64], ruë Saint Honoré.

  [64] Il étoit mort en 1716; sa veuve fut mise à la taxe, mais pour une
    faible somme: 22,500 livres. Son fils, qui se fit appeler Chuppin de
    Gouzampré, fut reçu premier président de la Cour des monnoies, le 15
    août 1727.


_Trésorier du Sceau._

M. Bechet, place des Victoires[65].

  [65] Il devint plus tard greffier en chef du Parlement, et mourut à 83
    ans, le 24 juillet 1717: «il avoit toujours été fort estimé», dit
    Dangeau à cette date. Il étoit fils d’une sœur aînée de Boileau,
    qui, par ironie pour les grands airs qu’il se donnoit, l’appelle
    souvent dans ses lettres «mon illustre neveu.» Il logea de longues
    années chez lui, cour du Palais. Voltaire, dont le père, M. Arouet,
    après avoir été notaire, devint, comme «receveur des épices», le
    collègue de Dongois, s’est aussi moqué dans son _Epître à Boileau_
    des ridicules de ce neveu, chez qui on l’avoit souvent mené étant
    enfant:

        Chez ton neveu Dongois je passai mon enfance,
        Bon bourgeois, qui se crut un homme d’importance.


_Receveur des Amandes du Parlement._

M. Dongois, Cour du Palais[66].

  [66] Dans l’_Almanach royal_ de 1702, p. 42, où nous le trouvons à la
    même adresse, on ajoute: «chez lequel on retire les lettres, quand
    elles sont scellées.»


_Receveur des Amandes du Châtelet._

M. de l’Autel, ruë Jean Robert[67].

  [67] Simon de l’Autel, qui vivoit encore en 1716, et ne fut mis à la
    taxe que pour 6,400 livres.




TRÉSORIERS PAYEURS.


_Généraux de l’Extraordinaire des Guerres._

M. de Turmenies, ruë d’Orléans, au Marais[1].

  [1] Louvois avoit eu en lui la plus grande confiance, ainsi qu’on le
    vit à sa mort: Turmenies déclara alors quinze millions que le
    ministre lui avoit donnés en réserve pour l’extraordinaire des
    guerres (_Journ. de Dangeau_, 23 août 1691). Nous avons vu plus haut
    qu’en 1696, il acheta de Frémont une des charges de gardes du
    Trésor. Il la remit en 1702 à son fils Turmenies de Nointel,
    intendant du Bourbonnais, maître des requêtes.

M. de la Touanne, ruë Neuve Saint Augustin[2].

  [2] Un des hommes de finances, dont la fortune, puis la chute firent
    le plus grand bruit. Il se soutint par le crédit de Bontemps, dont,
    en 1690, son fils avoit épousé la nièce Mlle Dubois. Il avoit les
    plus belles terres, menoit le plus grand train; bref il faisoit
    parler de lui partout, même à l’Opéra, où il disputa la célèbre
    Fanchon Moreau au Grand Prieur. (_Chansonnier Maurepas_, ms. t. VII,
    p. 269.) Sous le ministère de Chamillart, ses affaires et celles de
    Saurion, qui étoit alors avec lui à l’Extraordinaire des guerres, se
    gâtèrent, et en vinrent à un tel point que Saurion dut avouer au
    ministre quatre millions de déficit dans leur caisse. Il fut mis à
    la Bastille. On en eût fait autant pour La Touanne, si la maladie,
    dont il mourut bientôt, ne l’eût mis hors d’état d’y être
    transporté. Le roi confisqua tout ce qu’il avoit, et paya ses
    dettes.


_Payeurs des Gages du Parlement._

M. Guygou, ruë de Vantadour.


_Des Gages du Grand Conseil._

M. Baudoüin, ruë des fossez Montmartre.

M. Biguet, rue Mauconseil.


_Des Gages de la Cour des Aydes._

M. Cailly, rue Sainte Croix de la Bretonnerie.

M. Faure, devant les Blancs Manteaux.


_Des Gages de la Chambre des Comptes._

M. Henin, ruë Jacob.

M. des Isles, ruë


_Des Gages de la Cour des Monnoyes._

M. Poulet, rue des Postes.

M. Mongeot, ruë du Plastre.

M. Guilbert, ruë de la Tixeranderie.


_Des Gages du Chastelet._

M. Amelon, rue Barbette.


_Des Secretaires du Roy._

M. Raymond, rue des Blancs Manteaux.

M. Baudouyn, rue des fossez Montmartre.


_Des Gardes Françoises._

M. Bourret, ruë de Brac.

M. Duvaux, ruë Saint Sauveur.


_Des Gardes Suisses._

M. de Chaufourneau, ruë d’Orléans, aux Marais.

M. du Mée, ruë du Mail[3].

  [3] Son vrai nom était Du May. Dans la correspondance de Pontchartrain
    et de D’Argenson se trouve une curieuse lettre sur la vie
    scandaleuse qu’il menoit, quoique marié, avec une fille Grossot,
    dont le dévergondage était à ce point éhonté qu’il l’avoit fait
    chasser de l’Opéra. _V._ Clément, _La Police sous Louis XIV_, p.
    451.


_Des cent Suisses._

M. Alvarez, rue Thibaut-Thodé[4].

  [4] Louis Alvarès, qui se fit plus tard baron de Coursan, étoit un
    intrigant bon à tout pour s’enrichir. Nous le trouvons ici trésorier
    des Cent-Suisses; plus loin, nous le verrons joaillier de la Cour.
    Il étoit en outre banquier, traitant, et fournisseur de la marine.
    L’espionnage et la délation étoient aussi son fait. C’est lui qui
    fit prendre, selon Foucault (_Mémoires_, p. 327), Chauvigny, dit La
    Bretonnière, qui faisoit le _lardon_, c’est-à-dire la _Gazette de
    Hollande_, et qu’on accusoit d’être l’auteur du _Cochon Mîtré_ (V.
    nos _Variétés_, t. X, p. 327). Foucault fit tirer Chauvigny de la
    cage de bois où Louis XIV l’avoit fait enfermer au Mont
    Saint-Michel, mais dut le laisser dans la prison même, où il mourut
    après vingt ans de captivité.--D’après les dernières découvertes de
    M. Jung (_la Vérité sur le Masque de fer_, 1872, in-8, p. 376),
    Alvarès pourroit bien avoir été pour quelque chose dans la capture
    du prisonnier masqué.


_Des Chevaux Légers de la Garde._

M. Poupart, ruë

M. Bourgevin, ruë

M. Rullault, ruë


_Des Gens d’Armes de la Garde._

M. Pardé des Mottes, rue du Temple.




RENTES DE L’HOTEL DE VILLE.


_La première partie des Rentes assignées sur le Clergé est payée par_

Mrs Boileau, vieille ruë du Temple, et Roberge, ruë des Rosiers.


_La deuxième le Vendredy, par_

Mrs de la Bruyère, ruë des Augustins[1], et Guybert, ruë du Cimetiere S.
André.

  [1] Louis de La Bruyère, frère cadet de l’auteur des _Caractères_.
    D’abord premier huissier du Parlement, il avoit quitté cette charge
    vers 1686, pour celle que nous lui voyons ici. Il mourut, un an
    avant son frère, le 12 mai 1695, n’ayant que quarante-sept ans.
    (Jal, _Dictionn. critique_, p. 715.)


_La troisième le Jeudy, par_

M. le Bœuf, Cloître Notre Dame.


_La première partie des Rentes assignées sur les Aydes et Gabelles est
payée le Mardy, par_

M. Lerelle, ruë du grand Chantier.


_La deuxième le Mardy, par_

M. Bachelier, ruë de la Corderie.


_La troisième le Mercredy, par_

M. Desponty, rue Tizon.


_La quatrième le Mercredy, par_

M. Boiteux, rue de la Cerisaye.


_La Cinquième le Jeudy, par_

M. Deschamps, près les Minimes.


_La Sixième le Mercredy, par_

M. le Droit, rue de Grenelle.


_La Septième le Vendredy, par_

M. Amiot, rue Michel le Comte.


_La Huitième le Vendredy, par_

M. Fredy, Cloitre Saint Benoist.


_La Neuvième le Vendredy, par_

M. Routier, rue Geoffroy Lasnier.


_La Dixième le Vendredy, par_

M. du Noyer, Cul de sac des Blancs Manteaux.


_La Onzième le Samedy, par_

M. Tissart l’Ainé, rue Saint Sauveur.


_La Douzième le Samedy, par_

Mrs Le Mesle, rue des Ecrivains, et Issaly, rue des Rats.


_La Treizième le Samedy, par_

M. Houdiart, ruë Perpignan.


_La Quatorzième le Samedy, par_

M. Hocart, rue des Fossez Montmartre.


_La Quinzième le Jeudy, par_

M. Roüalle, rue des Audriettes.


_La Seizième le Jeudy, par_

M. Tissart le Jeune, rue Saint Sauveur.


_La Dix septième le Mercredy, par_

Mrs Boureau, rue de la Tisseranderie, et Berger, rue d’Orléans, au
Marais.


_La Dix huitième le Mardy, par_

Mrs Priaux, rue de la Colombe, et Soüet, rue Verderet.


_Les douze cens mil livres[2] de l’Edit du mois de Novembre 1689 sont
payez par_

  [2] Dangeau (_Journal_, 1er déc. 1689) dit 1,400,000 livres, ce qui
    est le vrai chiffre. Il ajoute que cette somme étoit constituée en
    rentes viagères sur l’Hôtel de Ville, «acquises suivant les
    différents âges, avec accroissement de l’intérêt des mourants sur
    les survivants.» C’étoit la réalisation de _la Tontine_, proposée
    plus de trente ans auparavant par l’italien Tonti, de qui venoit son
    nom. (Isambert, _Anciennes lois françoises_, t. XX, p. 87.) La somme
    affectée aux intérêts, en principal, devoit être prise sur les
    droits d’aides et gabelles, et sur les cinq grosses fermes,
    «spécialement hypothéquées, disoit l’édit, au payement desdites
    rentes, même par préférence à la partie de notre Trésor royal.»
    Cette tontine eut un très-grand succès: «J’aurois, écrivoit
    l’intendant du Berry, Seraucourt, au Contrôleur général, à l’époque
    où le projet en fut émis, j’aurois peine à vous expliquer
    l’applaudissement qu’on lui donne dans toute cette province, tant
    pour l’invention (chacun présumant qu’il vivra plus que les autres,
    et espérant par-là parvenir à une grande fortune) que par la
    sagesse, avec laquelle tous les cas qui peuvent tomber dans
    l’imagination ont été prévus.» (Boislisle, _Correspond. des
    contrôleurs généraux_, in-4º, p. 211.)

Mrs de Bellecour, rue des Victoires, Berger le Jeune, rue de Poictou au
Marais, et Boucher, ruë Plastrière.


_La Tontine ou Rentes Viagères sont payées par_

M. Durand, à l’Hôtel d’Albret, rue des Francs Bourgeois.


_Les Syndics Onéraires[3], sont_

  [3] C’est-à-dire responsables, ayant réellement charge (_onus_).
    Presque sous la même forme, c’est ainsi un mot tout opposé à
    «honoraire.»

_pour les 1e, 2e, 3e, 4e, 5e et 6e Classes_

M. de Lonpré, à l’Hôtel de Ville.


_Pour les 7e, 8e, 9e et 10e Classes._

M. Tiercelet, rue Saint Antoine au dessus de S. Paul.


_Et pour les 11e, 12e, 13e et 14e Classes[4]_

  [4] Une dame Charlotte Bonnemay, veuve Louis Barbier, avoit pris une
    action de la 13e classe, et, quand une seconde tontine fut créée en
    1696, une action encore, mais de la 14e classe. En 1726, elle vivoit
    toujours, et, se trouvant la survivante des rentiers de ces deux
    classes, elle n’avoit pas moins de 76,000 livres de rente. Elle
    mourut cette année-là, le 9 mars, à quatre-vingt-seize ans.
    (_Gazette de France_, 9 mars 1726.)

M. de Courcelles, près Sainte Marine.


_Le Million de livres de l’Edit du mois de May 1691[5] est payé par_

  [5] «Le roi, dit Dangeau, à la date du 28 mai 1691, a créé un million
    de rentes à la Maison de Ville, au denier dix-huit.» Nous dirions à
    cinq et demi pour cent. C’étoit dix sous de plus que le taux légal
    qui, dès le temps de Colbert, étoit au denier vingt, c’est-à-dire
    cinq pour cent. (Chéruel, _Fouquet_, t. II, p. 269.)

Mrs Perelle, rue du grand Chantier, Bachelier, rue de la Corderie et
Despontis, rue des Tournelles.

Le Bureau des Officiers Conservateurs des Hipotheques sur les Rentes de
la Ville est rue de la Verrerie près la rue Bardubec, où M. de la Porte
principal Commis reçoit les Oppositions, Main levées, et Ratifications
et en delivre les Expéditions, ainsi que des échanges, Donations etc.




CONSEILS DU ROY, ET CHANCELLERIE.


Monseigneur Boucherat[1] Chevalier des ordres du Roi, Chancelier et Chef
de la Justice de France a son Hôtel rue Saint Louis, au Marais[2], où il
tient souvent le Conseil des Parties et l’Audiance du Sceau.

  [1] Louis Boucherat, chancelier de France et garde des sceaux, depuis
    le 1er nov. 1665. Après avoir été successivement conseiller au
    Parlement, maître des requêtes, intendant de Guyenne, de Languedoc,
    de Champagne et de Picardie, il étoit à quarante-neuf ans, par la
    protection de Turenne, monté à ces hautes fonctions, qu’il garda
    jusqu’à sa mort, le 2 septembre 1699.

  [2] Il existe encore au nº 40, mais est plus connu dans le quartier
    sous le nom d’hôtel d’Ecquevilly, qu’il eut ensuite, que sous le nom
    de Boucherat. Quand celui-ci mourut, on commençoit le percement
    d’une rue qui devoit relier la rue Vieille-du-Temple à la rue
    Charlot. On lui donna son nom qu’elle garda jusqu’en 1851; elle fut
    confondue alors avec la rue Saint-Louis, aujourd’hui de Turenne,
    dont elle est, en effet, le prolongement.


_Conseillers d’Etat ordinaires._

M. l’Archevêque Duc de Rheims[3], rue Saint Thomas du Louvre.

  [3] Charles-Maurice Le Tellier, archevêque de Reims, le même qui fut
    si cruellement satirisé dans le _Cochon Mîtré_, dont nous avons
    parlé plus haut.

M. l’Archevêq. de Rouen[4], rue de Verneuil.

  [4] Jacques-Nicolas Colbert, un des fils du ministre. Avant d’être
    archevêque à Rouen, il y avoit été coadjuteur, avec le titre
    d’archevêque de Carthage.

M. Pussort[5], rue Saint Honoré.

  [5] Henri Pussort, doyen du Conseil, le dernier survivant des juges de
    Fouquet, contre lequel il avoit déployé une véhémence dont s’indigna
    Mme de Sévigné, et qu’expliquoit sa parenté avec Colbert, dont il
    étoit l’oncle maternel. Il mourut le 18 février 1697, «dans une
    grande vieillesse, dit Saint-Simon, et toujours dans une grande
    considération.» Pour sa maison, achetée en 1697 par Bertin des
    parties casuelles, voy. plus haut ce que nous avons dit de celui-ci.

M. Voisin[6], rue Sainte Croix de la Bretonnerie.

  [6] Le même, qui devint ministre de la guerre, puis chancelier, puis
    garde des sceaux, le 2 juillet 1714, et qu’il eût fallu, suivant
    Saint-Simon, laisser dans quelque intendance, comme celle du
    Hainaut, où il avoit montré des qualités, mais de second ordre:
    «Noyé, dit-il, dans la science d’intendant qu’il possédoit
    parfaitement, et dans l’exercice de laquelle il avoit passé presque
    toute sa vie.»

M. Courtin[7], rue Saint Louis, au Marais.

  [7] Honoré Courtin, doyen du conseil après la mort de Pussort. Il
    avoit été plusieurs fois ambassadeur, notamment en Angleterre, à
    l’époque de la fuite de la reine, femme de Jacques II: «Il avoit,
    dit Saint-Simon, signé le traité de Heilbronn, celui de Bréda et
    plusieurs autres. Il avoit toujours été fort estimé et fort honoré
    dans tous les emplois où il avoit passé.» Il mourut le 27 décembre
    1703.

M. Benard de Rezé[8], rue d’Orléans.

  [8] Fut longtemps du Conseil, dont il mourut le sous-doyen, le 9
    décembre 1702. Un de ses fils fut évêque d’Angoulême.

M. d’Aligre[9], ruë Saint Dominique, Quartier Saint Germain.

  [9] Fils du chancelier Etienne d’Aligre. Il avoit dû à la haute
    position de son père d’être fait conseiller ordinaire, sans passer
    par le titre de conseiller de semestre. Cette faveur étoit grande,
    et personne de son rang ne l’obtint après lui, ce que Dangeau
    n’oublia pas de constater, en parlant de sa mort le 19 mai 1695.

M. de Pommereu[10], vieille rue du Temple.

  [10] Aug. Rob. de Pommereu, seigneur de la Bretêche-Saint-Non, fut
    intendant du Bourbonnais et de Bretagne, où Mme de Sévigné le trouva
    le plus honnête homme et le plus bel esprit de la robe. Il fut
    ensuite à Paris prévôt des marchands de 1676 à 1683, et devint deux
    ans après conseiller d’Etat. Quand il mourut en septembre 1699,
    Saint-Simon écrivit en marge de son manuscrit du _Journal de
    Dangeau_ cette note qui vaut une oraison funèbre: «homme droit,
    ferme, et transcendant, qui avoit et méritoit des amis.»

M. d’Argouges[11], ruë de l’Echarpe.

  [11] Frère du lieutenant civil. Il fut fait conseiller d’Etat avec
    Caumartin, le 20 janvier 1685: «Ils étoient, dit Dangeau, les plus
    anciens du semestre.»

M. Bignon[12], ruë des Bernardins[13].

  [12] Jérôme Bignon, fils de l’avocat général au Parlement, et
    conseiller d’Etat depuis le 28 mars 1686. Saint-Simon, qui «étoit de
    père en fils ami particulier des Bignon», l’avoit en grande estime.

  [13] L’hôtel patrimonial des Bignon s’y trouvoit. Il avoit été
    construit en 1566 pour Jacques Lefèvre, abbé de la Chaise-Dieu,
    conseiller intime de Charles IX. L’étage inférieur, dont les
    sculptures allégoriques, datées de 1567, sont attribuées à Jean
    Goujon, fut transporté, après la démolition de l’hôtel, en 1830,
    dans la seconde cour de l’École des Beaux Arts, où il est toujours.
    L’abbé Bignon, fils du conseiller d’Etat et bibliothécaire du roi,
    avoit, au commencement du XVIIIe siècle, vendu l’hôtel au chancelier
    de la principauté de Dombes, M. Chol de Torpane, dont il avoit pris
    le nom.

M. Rouillé[14], Isle Notre Dame.

  [14] Rouillé, comte de Melai, dont Mme de Sévigné désiroit tant que
    son fils épousât la fille. Il avoit été fait conseiller d’Etat à la
    mort de Caumartin, et il fut président du Conseil des finances au
    commencement de la Régence.

M. de la Reynie[15], ruë du Boulloy.

  [15] Gabriel-Nicolas de la Reynie, si célèbre comme lieutenant de
    police. C’est à ce titre que nous parlerons de lui plus loin. Sa
    nomination au Conseil d’Etat datoit du 28 mars 1686.

M. le Marquis de Villars[16], rue sainte Anne.

  [16] Un des trois conseillers d’état d’épée. Le célèbre maréchal duc
    de Villars étoit son fils. C’est l’_Orondate_ de Mme de Sévigné. Il
    avoit été ambassadeur en Danemarck, puis à Madrid, d’où il rapporta
    ce curieux _Mémoire sur la Cour d’Espagne, depuis 1679 jusqu’en
    1681_, publié en 1733, pet. in-8, et réimprimé à Londres, à petit
    nombre, en 1861, d’après un manuscrit, par M. W. Stirling qui le
    croyoit inédit. Le marquis mourut le 28 mars 1698, à plus de
    quatre-vingts ans. Sa femme a laissé des _Lettres_, dont le
    chevalier Perrin possédoit le recueil, et dont la publication qu’il
    se réservoit n’a été faite qu’en 1760, six ans après sa mort. Léop.
    Collin les réimprima sous l’empire, et plus récemment M. Courtois en
    donna une édition fort soignée.

M. de Saint Romain[17], rue saint Louis.

  [17] Melchior de Harod de Senevas, marquis de Saint-Romain, mort en
    juillet 1694, à plus de quatre-vingts ans. Il étoit le plus intime
    ami de Courtin que nous avons vu plus haut: «tous deux conseillers
    d’état, dit Saint-Simon, l’un d’épée, l’autre de robe.»

M. le Comte de la Vauguion[18], rue de Grenelle, Quartier S. Germain.

  [18] Cette note de Saint-Simon, dans le _Journal de Dangeau_, à la
    date de sa mort, le 29 décembre 1693, peut lui servir de biographie:
    «Après diverses folies, il se tua de deux coups de pistolet, chez
    lui à Paris, dans son lit. Il étoit chevalier de l’Ordre depuis
    1688, conseiller d’Etat d’épée, et avoit eu plusieurs ambassades,
    fort gueux, plein d’esprit et de galanterie; veuf et sans enfant,
    très petit et simple gentilhomme.»

M. l’Archevesque d’Ambrun[19], près le Collége des 4 Nations.

  [19] Charles Brulart de Genlis, mort en 1714.


_Conseillers d’Etat du Semestre de Janvier._

M. d’Aguesseau[20], Quai de Nesle.

  [20] Henri d’Aguesseau, d’abord maître des requêtes, président au
    grand Conseil, puis intendant à Limoges, à Bordeaux, dans le
    Languedoc, et enfin conseiller d’Etat. L’idée de créer l’ordre de
    Saint-Louis est de lui. A sa mort, le 5 sept. 1699, Saint-Simon,
    dans une note du _Journal de Dangeau_, fit amplement son éloge.
    L’illustre chancelier d’Aguesseau étoit son fils.

M. de Ribeyre[21], ruë de Taranne.

  [21] Antoine de Ribeyre, qui étoit aussi conseiller d’honneur au
    parlement de Paris, après avoir été intendant à Poitiers, puis à
    Tours, et commissaire du Conseil en Bretagne. A sa mort, en octobre
    1712, son gendre La Bourdonnois, intendant d’Orléans, lui succéda
    comme conseiller d’Etat.

M. le Comte d’Avaux[22], ruë sainte Avoye.

  [22] Jean-Antoine de Mesme, qui s’étoit donné le titre de comte
    d’Avaux qui n’appartenoit qu’à son frère aîné: «Ses fréquentes
    ambassades, dit Saint-Simon, l’avoient accoutumé à l’épée et à se
    faire appeler le comte d’Avaux en pays étranger. Dans ses divers
    retours en France, il ne put se résoudre à se défaire de cette
    qualité de comte, ni à reprendre l’habit de son état.» C’est lui que
    Mme de Sévigné appelle _Figuriborum_. Il mourut en février 1709.
    Nous avons, p. 26, note 3, parlé de son hôtel.

M. l’Abbé le Pelletier[23], ruë de la Couture sainte Catherine.

  [23] Ancien commissaire aux Grands Jours d’Auvergne, frère du
    contrôleur général Le Pelletier et de Le Pelletier, de Souzy. Il
    étoit conseiller d’Etat depuis 1685, et il mourut le 17 octobre
    1696.

M. de Breteuil[24], rue du Grand Chantier.

  [24] Ancien intendant des finances, et conseiller d’Etat depuis 1685.

M. du Gué de Bagnols[25], Intendant en Flandres.

  [25] Dreux-Louis Du Gué de Bagnols, conseiller d’Etat depuis 1687.
    C’est le même dont la femme amusoit tant Mme de Sévigné avec ses
    ridicules.


_Conseillers d’Etat du Semestre de Juillet._

M. de Marillac, ruë Sainte Avoye[26].

  [26] Ancien avocat général au grand Conseil et intendant à Poitiers.
    Il eut la charge de conseiller d’Etat de semestre en 1603, parce que
    son père s’en démit pour lui, «ce qui, dit Dangeau, ne s’étoit
    jamais pratiqué.»--L’escalier de son hôtel, rue Sainte-Avoye, étoit
    remarquable. _V._ G. Brice, 3e édit., t. I, p. 256.

M. le Pelletier de Souzy[27], rue de la Couture S. Catherine.

  [27] Nous avons dit comment il fut en passe de succéder à son frère
    comme contrôleur général au lieu de Pontchartrain. Il étoit d’une
    grande capacité. C’est avec lui que le roi faisoit tous les lundis
    le travail des fortifications.

M. de la Moignon de Basville, Intendant en Languedoc[28].

  [28] Cinquième fils du président de Lamoignon. Il fut d’abord
    intendant à Poitiers. En Languedoc, après la révocation de l’Edit,
    il fut terrible contre les protestants.

M. Bazin de Bezons, Intendant en Guyenne[29].

  [29] Avoit été d’abord intendant à Limoges et à Orléans. Il étoit
    conseiller d’Etat de semestre depuis le 28 mars 1686.

M. de Harlay de Bonneuil[30], ruë Saint Louis, au Marais.

  [30] Nicolas-Auguste de Harlay de Bonneuil, d’abord conseiller au
    Parlement, maître des requêtes et intendant en Bourgogne. Il fut
    conseiller d’Etat de semestre en 1686, et conseiller d’Etat
    ordinaire en 1700. Le chancelier Boucherat étoit son beau-père.

M. de Fourcy[31], rue de Jouy[32].

  [31] Autre gendre de Boucherat, dont il avoit épousé la fille aînée.
    Il fut prévôt des marchands à Paris, de 1684 à 1691.

  [32] A l’époque de sa prévôté on ouvrit, près de son hôtel, une rue
    qui faisoit communiquer la rue de Jouy avec la rue Saint-Antoine. On
    lui donna son nom qu’elle a gardé.


_Maitres des Requestes de l’Hotel du Roy._

Pour M. le Doien, voiez le Chapitre des principaux Magistrats, et pour
les autres prenez la liste dans la Grand’Salle du Palais, près la
Chapelle, au bas du dégré des Requestes de l’Hôtel, ou chez les Sieurs
Michallet et Rondet imprimeurs ruë Saint Jacques.


_Les Grands Audianciers de France, Examinateurs et Rapporteurs des
Lettres qui doivent passer au Grand Sceau, sont_

Pour le quartier de Janvier, M. Boucher, ruë des Quatre Fils. Pour celuy
d’Avril, M. le Mire, ruë de Paradis. Pour celuy de Juillet, M. le Fevre,
Place du Collége Mazarini[33]. Et pour celuy d’Octobre, M. le Menestrel,
ruë du Hazard[34].

  [33] Il logeoit, en effet, au collége des Quatre Nations, ou collége
    Mazarin, qui est, comme on sait, devenu le palais de l’Institut.

  [34] Fils du trésorier du Conseil des bâtiments. Il habitoit, rue du
    Hazard, une des nombreuses maisons dont son père avoit eu, grâce à
    sa charge, le terrain presque pour rien, à l’époque où l’on
    construisoit ce quartier. V. notre _Histoire de la Butte des
    Moulins_, p. 84.


_Les Contrôleurs Généraux de l’Audiance de la Chancellerie de France qui
veillent à ce que les Lettres accordées ne soient soustraites, et que
nulles autres ne passent au sceau, sont_:

Pour le quartier de Janvier, M. Contard[35], ruë saint Honoré. Pour
celui d’Avril, M. Pitot[36], ruë de Ventadour. Pour celui de Juillet, M.
Benoist, ruë de Grenelle, quartier saint Germain. Et pour celui
d’Octobre, M. de Jonquiere, rue Vivienne.

  [35] Il faut lire Coustard, d’après _l’Alman. royal_ de 1702, p. 41.

  [36] Le même _Almanach_ le nomme Pirot.


_Les Gardes des Rolles des Offices de France, sont_:

Pour le quartier de Janvier, M. Préval, ruë de la Sourdiere. Pour celui
d’Avril, M. Hevin[37], rue des Fossez Montmartre. Pour celui de Juillet,
M. Boucot[38], rue Hautefueille. Et pour celui d’Octobre, M. Ausbourg,
rue des Fossez Montmartre.

  [37] Hénin, d’après le même _Almanach_, p. 41.

  [38] C’étoit un des plus grands _curieux_ de Paris, comme on le verra
    plus bas, à propos de sa bibliothèque. Il eut la visite de Lister,
    quand celui-ci fit son second voyage à Paris. Grand amateur de
    coquilles, il admira surtout celles qui étoient une des nombreuses
    curiosités du cabinet de Boucot (_Voyage de Lister à Paris en 1698_,
    traduct. de la Société des bibliophiles, 1873, in-8, p. 64-66). G.
    Brice, qui lui aussi, dans sa _Description de Paris_, parle
    longuement, t. II, p. 97-99, des collections de Boucot, y mentionne
    en particulier la bibliothèque: «On y voit, dit-il,... une grande
    quantité de livres très-bien conditionnés, entre lesquels il y en a
    plusieurs de cartes et d’estampes rares et singuliers.» A la mort de
    Boucot, en 1699, la vente de ses livres prouva que Brice avoit dit
    vrai; il nous suffira de donner le titre du _Catalogue_, qui
    annonçoit cette vente pour le 16 nov.: _Catalogue de la Bibliothèque
    de défunt M. Boucot, garde rolle des officiers de France, composée
    de plus de dix huit mille volumes de livres imprimez, très-bien
    conditionnez, plusieurs des in-folio étant de grand papier, et
    reliez en maroquin, de plus de soixante et dix mille estampes, entre
    lesquels il y a dix sept mille portraits_. M. G. Duplessis a publié,
    en 1870, sur cette vente, une curieuse lettre de Nicos Clément à
    Gaignières, dans _le Bibliophile françois_, t. V, p. 97.


_Trésorier General du Sceau._

M. Bechet, Place des Victoires.




SECRETAIRES DU ROY. MAISON ET COURONNE DE FRANCE.


_Syndics en Charge._

M. de la Baune, ruë Thibaut Thodé.

M. Rouillet de Beauchamps, rue des Rosiers, quartier S. Germain.

M. Gourdon, à l’Hôtel de Guise.

M. Gamard, ruë Neuve des petits champs.

M. Hubert, rue Sainte Avoye.

M. Hérardin, à l’Hôtel de la Monnoye.


_Trésorier de la bourse commune._

M. de Lamet, près Saint Eustache.

Ces Officiers tiennent les Assemblées du Collége en la Chancellerie du
Palais, où l’on peut recouvrer la liste générale de ceux qui en sont
Membres, et encore chez le sieur Rondet Imprimeur, rue S. Jacques.


_Advocats ez Conseils du Roy._

M. Aubery leur Doyen, demeure ruë Saint Denis devant la rue du petit
Lion.

On peut recouvrer leur Liste chez le sieur du Brec Clerc de leur Collége
rue de la Calandre, ou encore chez le même Rondet.




PRINCIPAUX MAGISTRATS.


_Juges ordinaires et gens du Roy, des Cours souveraines et Juridictions
subalternes de Paris._


PARLEMENT.


_Premier Président._

M. de Harlay[1], Cour du Palais.

  [1] Achille de Harlay, qui avoit succédé dans cette charge à M. de
    Novion, en sept. 1689. Sa complaisance, lorsqu’il étoit procureur
    général, pour la légitimation des bâtards du Roi, «doubles
    adultérins», fut, selon Saint-Simon, la source de sa fortune. Il
    avoit été «l’adroit auteur de cette légitimation... sans nommer la
    mère.» Saint-Simon, _Mém._ 1877, in-18, t. XX, table rédigée par
    lui-même, p. 257.


_Présidens à Mortier._

M. de Nesmond[2], Quay de la Tournelle[3].

  [2] Il avoit acquis, en 1689, de Lamoignon, qui en garda la
    survivance, cette charge de président à mortier. Lorsque Nesmond
    mourut en 1693, Lamoignon eut ainsi le droit, moyennant 350,000
    livres données à sa famille, de reprendre la charge. (Dangeau,
    _Journal_, 4 déc. 1689 et 19 mars 1693.)

  [3] Son hôtel y existe encore presque intact, auprès de la _Pharmacie
    centrale_, qui étoit alors, nous l’avons dit plus haut, l’hôtel dont
    Mme de Miramion, belle-mère de Nesmond, avoit fait un couvent. Selon
    Saint-Simon, c’est Nesmond qui fit le premier poser au-dessus de sa
    porte un marbre avec son nom en lettres d’or. V. nos _Enigmes des
    rues de Paris_, p. 181.

M. de Maisons[4], ruë de l’Université.

  [4] Il est beaucoup parlé de lui dans Saint-Simon, qui dit beaucoup de
    bien de son esprit, et assez peu de son caractère. Il mourut en août
    1715, dans toute la force de son influence sur le Parlement, et avec
    l’espérance qu’à la mort du roi, qui ne devoit tarder que de
    quelques jours, il seroit fait garde des sceaux. Le nom de sa
    famille étoit Longueil. Elle l’avoit échangé pour celui de Maisons,
    lorsque l’aïeul du président avoit obtenu l’érection en marquisat de
    la terre de Maisons, où il avoit fait bâtir un si beau château,
    pendant qu’il étoit surintendant des finances. Ses malversations le
    firent révoquer. Il se contenta de dire: «Ils ont tort; j’avois fait
    mes affaires, j’allois faire les leurs.» Saint-Simon, notes sur
    Dangeau, 12 avril 1705.

M. de Champlatreux[5], ruë du Brac.

  [5] De l’illustre famille des Molé, et fils de l’un des derniers
    gardes des sceaux. Il céda sa charge à son fils, lorsqu’il eut
    trente et un ans. (Dangeau, 11 avril 1707.)

M. le Pelletier[6], vieille ruë du Temple.

  [6] Il devint premier président après la démission de M. de Harlay, et
    se démit lui-même de cette charge, en 1712, à la mort de son père,
    Claude Le Pelletier, ancien ministre d’Etat et contrôleur général,
    qui l’y avoit fait rester malgré lui. Un accident arrivé au Palais,
    dans l’Hôtel de la Présidence, où le plancher de la salle à manger
    croula sous lui, avoit dérangé son cerveau, jusqu’à le rendre
    presque incapable de tout travail. (Saint-Simon, t. IV, 78; VI, p.
    212.) C’est son père, étant prévôt des marchands avant d’arriver au
    Ministère, qui avoit fait construire près de la Grêve, en 1675, le
    quai nommé, à cause de lui, quai Pelletier. (_Id._, t. I, p. 301.)

M. de Mesmes[7], ruë Sainte Avoye.

  [7] Jean-Antoine de Mesme, neveu du comte d’Avaux dont il a été
    question plus haut. Il avoit succédé, comme président à mortier, à
    son père mort en janvier 1688. Il devint premier président en 1712,
    par suite de la démission de Le Pelletier.

M. de Novion[8], ruë du Baac.

  [8] Potier de Novion, de l’Académie française, qui avoit été jusqu’en
    septembre 1689 premier président. Sa vénalité força le roi de lui
    faire abandonner cette charge pour la céder à M. de Harlay. «Sur ses
    injustices réitérées, dit Saint-Simon, le roi prit enfin le parti de
    l’obliger à se défaire.» (_Note_ sur Dangeau, 20 septembre 1689.)

M. Talon[9], ruë Saint Guillaume.

  [9] Denis Talon, d’abord avocat général. Il avoit eu, en novembre
    1690, une des deux places de présidents à mortier que le roi venoit
    alors de créer, et pour chacune desquelles il avoit fait verser à
    l’un et à l’autre des titulaires une somme de 350,000 livres, afin
    de dédommager les présidents à mortier de ce qu’on augmentoit leur
    nombre. (Dangeau, 12 nov. 1690.)--Sa maison existe encore au nº 16
    de la rue Saint-Guillaume, avec cette «structure tout à fait belle»,
    dont parle G. Brice, édit. de 1684, t. II, p. 187. «Les
    appartements, ajoute-t-il, sont très agréables, ayant les vues
    tournées sur les jardins des maisons voisines. La cour est grande,
    et enfin il paroît que cette maison a été élevée avec beaucoup de
    dépense; mais ce qui lui donne un merveilleux ornement, est
    l’excellente bibliothèque qui y est, composée de tout ce qu’il y a
    de plus rare et de plus recherché, soit pour les manuscrits, soit
    pour les livres imprimés.»

M. de Menars[10], porte de Richelieu[11].

  [10] Jean-Jacques Charron de Ménars, frère de Madame Colbert, qui
    avoit d’abord été conseiller au Parlement et surintendant de la
    maison de la Reine. Il avoit eu la seconde des deux charges de
    président à mortier créées en 1690, et dont Talon, nous l’avons dit,
    avoit eu la première. Il mourut au mois de mars 1713, à sa belle
    terre de Ménars, près de Blois: «plein d’honneur, dit Saint-Simon
    (t. X, p. 28), de probité, d’équité, et modeste, prodige dans un
    président à mortier.»

  [11] Son hôtel étoit en effet «à côté de la porte de Richelieu», dans
    l’impasse qui a gardé, en devenant une rue, le nom de Ménars qu’elle
    lui devoit. Il avoit d’abord logé rue Vivienne, près de l’hôtel de
    son beau-frère Colbert (G. Brice, édit. 1684, t. I, p. 89). La
    bibliothèque de De Thou, qu’il avoit achetée tout entière un fort
    grand prix, le suivit dans ces deux hôtels, où Quesnel, puis l’abbé
    Du Guay en furent les gardiens intelligents. Quant à lui, il ne s’en
    occupoit guère, et celui qui l’acquit à sa mort n’en prit pas
    beaucoup plus de souci: «Le cardinal de Rohan, dit Saint-Simon (t.
    X, p. 28), acheta sa précieuse bibliothèque, qui étoit celle du
    célèbre M. de Thou, qui fut pour tous les deux un meuble de fort
    grande montre, mais de très-peu d’usage.»


_Présidens des Enquestes._

Première Chambre, Mrs de Meaupou, ruë Pierre Sarrazin[12], et de la
Barde[13], Cloître Notre Dame.

  [12] Il devint président à mortier à la mort de Ménars, par suite d’un
    marché que Saint-Simon qualifie d’extraordinaire, et qui l’est, en
    effet, il lui acheta en 1717 la survivance de sa charge pour la
    somme énorme de 750,000 livres, dont 250,000 comptant, et 500,000 à
    verser aux héritiers. Il y eut de plus 20,000 livres de pot de vin!

  [13] Denis de la Barde, qui en même temps que président des enquêtes
    étoit archidiacre de Josas et chanoine de l’église de Paris, ce qui
    explique sa demeure au cloître Notre-Dame. Il mourut le 2 mars 1709,
    à soixante et onze ans.

Deuxième Chambre, Mrs Sevin de Quinsi, ruë des Blancs Manteaux, et de
Thumery de Boissise, ruë Barbette.

Troisième Chambre, Mrs Briçonnet, ruë porte Foin, et Amelot[14], rue
Dauphine.

  [14] Amelot de Chaillou, qui étoit arrivé à cette présidence des
    enquêtes, après avoir été longtemps doyen des maîtres des requêtes.
    Il avoit, en 1688, marié son fils, qui n’avoit pas moins de 100,000
    livres de rente, avec la fille de Barillon, notre ambassadeur à
    Londres.

Quatrième Chambre, Mrs Crosset[15], ruë Neuve Saint Augustin, et
Feydeau, Cloistre Nostre Dame.

  [15] Louis-Alexandre Croiset, et non Crosset, qui mourut le 19
    novembre 1728, à quatre-vingt trois ans, président d’honneur au
    Parlement.

Cinquième Chambre, Mrs de la Baroire[16], ruë de Taranne, et le Clerc de
Lesseville[17], Cloître Saint Méderic.

  [16] Il ne devroit plus figurer ici, puisqu’il étoit mort au mois
    d’octobre de l’année précédente. Son entrée au Parlement, comme
    conseiller, datoit du 19 décembre 1659. Il avoit épousé une vieille
    mais très-riche veuve, avec laquelle il se conduisoit fort mal,
    suivant Mme de Sévigné, qui l’appelle de la Baroie. V. sa lettre du
    4 juin 1676. C’est lui, d’après les _Clés_, qui, pour cela, auroit
    servi de type au 26e _caractère_ de La Bruyère, dans le chap. de
    _Quelques usages_.

  [17] C’est, d’après les _Clés_, un des _Sannions_ de La Bruyère. Ils
    étoient plusieurs frères, tous dans la haute robe, qui descendoient,
    disoit-on, d’un tanneur de Mantes dont la fortune étoit venue d’un
    prêt qu’il avoit fait sur parole à Henri IV, dans le temps de la
    bataille d’Ivry.


_Présidens des Requestes du Palais._

Première Chambre, Mrs Ferrand, ruë Serpente[18], et Besnard de Rezé,
près les Capucins du Marais.

  [18] C’est ce pauvre président Ferrand, dont la femme, une Belizani,
    fit tant parler d’elle, moins pour l’_Histoire des amours de Cléante
    et de Belise_, assez piètre roman de sa façon, que pour l’histoire
    de ses propres amours. Le scandale en fut si grand, que le président
    refusa de reconnoître une fille, dont elle étoit accouchée, et
    qu’elle dut faire élever sous un nom supposé, dans un couvent. Cette
    fille, dont le prénom étoit Michelle, plaida par la suite pour se
    faire reconnoître, mais n’obtint du Parlement que d’être reconnue
    par sa mère. Le célèbre libraire De Bure, qui avoit habité, rue
    Serpente, l’hôtel du président, recueillit avec soin, comme
    souvenir, toutes les pièces de ce curieux procès. (V. le _Catalogue_
    de sa bibliothèque, pp. 35 et 40.)

Deuxième Chambre, Mrs de Boiquemare[19], rue de Bourbon, et Brunet de
Thorigny, ruë des Francs-Bourgeois.

  [19] Lisez de Bocquemart. La présidente d’Osembray, grande coquette du
    temps, la _Lise_ de La Bruyère, l’avoit épousé en secondes noces,
    mais sans vouloir perdre son premier nom. C’est ce qui a fait dire à
    La Bruyère (_Des femmes_, § 76), à propos de certains maris et de
    leurs femmes: «ils n’ont souvent rien de commun... pas même le
    nom... chacun a le sien.»


_Avocats Generaux._

M. de Harlay[20], Cour du Palais.

  [20] Fils du premier président, nommé plus haut. Il étoit avocat
    général depuis le mois de janvier 1691, et devint conseiller d’Etat
    en février 1697, tout cela fort jeune pour de si importantes
    fonctions, car lorsqu’il mourut, le 23 juillet 1717, il n’avoit que
    quarante-neuf ans.

M. de la Moignon[21], à l’Hostel d’Angoulesme[22].

  [21] Chrétien de Lamoignon, fils aîné du célèbre premier président
    Guillaume de Lamoignon, à qui est adressée une des épîtres de
    Boileau. Ce fils devint président à mortier en avril 1698, et mourut
    le 7 août 1709.

  [22] Au coin de la rue Pavée et de la rue des Francs-Bourgeois, il
    existe encore, avec ses curieuses façades sur la cour, telles
    qu’elles avoient été construites par Diane de France, fille
    naturelle de Henri II, dont l’initiale et les emblèmes se voient
    encore dans les frontons, et après laquelle l’hôtel, pour rester
    dans la bâtardise, passa au duc d’Angoulême, fils naturel de Charles
    IX et de Marie Touchet, de qui lui vint le nom qu’on lui donne ici.
    Il prit celui de Lamoignon, qu’il a gardé, lorsque les Lamoignon s’y
    furent succédé. Le premier fut Chrétien, l’avocat général, qui fit
    de grandes réparations dans les jardins, qui étoient alors d’une
    grande étendue; et dont la bibliothèque, qui avoit Adrien Baillet
    pour bibliothécaire, y devint célèbre. (Germain Brice, édit. de
    1701, t. I, p. 323.)

M. d’Aguesseau[23], ruë Pavée, prés Saint André[24].

  [23] L’illustre chancelier. Avant d’arriver à l’être, le 2 février
    1717, il fut, dès le 12 janvier 1691, avocat général, comme nous le
    voyons ici, puis en octobre 1700, procureur général.

  [24] Son hôtel existe encore. C’est le premier qu’on trouve à gauche
    en entrant, de la rue Saint-André-des-Arts, dans la rue Pavée, qui
    s’appelle aujourd’hui _rue Séguier_, du nom d’une autre illustre
    famille de magistrats, qui occupoit l’hôtel voisin de celui-ci. Le
    27 juin 1714, éclata à l’hôtel d’Aguesseau un terrible incendie qui
    donna lieu à de grands procès, par suite de la destruction de
    nombreux dossiers appartenant à diverses parties. (Bruneau,
    _Observations sur les lois criminelles_, in-4º, p. 93.)


_Procureur General._

M. de la Brisse, rue Barbette.




GRAND CONSEIL.


_Premier Président._

M. Bignon[1], rue Saint Jacques.

  [1] Deuxième fils de l’avocat général Jérôme Bignon. Son prénom étoit
    Thierry. Il fut d’abord simple président au grand Conseil, puis, en
    mars 1690, premier président. Il mourut à soixante-cinq ans, le 19
    janvier 1697.


_Présidens du premier Semestre._

M. le Boulanger, ruë des petits Augustins.

M. Feydeau de Brou[2], ruë neuve Saint Paul.

  [2] Il étoit de cette famille des Feydeau qui donna son nom à l’une
    des rues du quartier Richelieu, construite vers la fin du XVIIe
    siècle, lorsque Catherine Vivien, veuve de Pierre Feydeau, étoit
    dame du fief de la Grange-Batelière, sur lequel on en avoit pris le
    terrain. (Lebeuf, _Hist. du diocèse de Paris_, t. IX, p. 38.)
    Feydeau de Brou avoit eu du roi la présidence au grand Conseil, en
    1689, «comme plus ancien maître des requêtes.» (_Mém. de Foucault_,
    p. 254.)

M. Joly de Blaizy[3], ruë des Rosiers.

  [3] Lisez Joly de Bézy.

M. Roüillé de Marbœuf, ruë Philippeaux.


_Présidens du second Semestre._

M. Poucet de la Rivière[4], ruë des Francs Bourgeois.

  [4] Mathias Poncet de la Rivière, comte d’Ablis, d’abord conseiller au
    Parlement, puis maître des requêtes, intendant en Alsace, à Metz, à
    Bourges, à Limoges, et en même temps, depuis 1676, président au
    grand Conseil. Il mourut en 1693. Son père, Pierre Poncet,
    conseiller d’Etat, avoit été en passe de succéder en 1677 au
    chancelier d’Aligre. Un livre qu’il venoit de publier,
    _Considérations sur les avantages de la vieillesse_, etc., l’en
    empêcha par le ridicule qu’il jeta sur lui, bien qu’il s’y fût
    couvert par le pseudonyme de baron de Prelle. C’est sa mésaventure
    qui a fait dire par La Bruyère: «un magistrat alloit par son mérite
    à la première dignité, il étoit délié et pratique dans les affaires:
    il a fait imprimer un ouvrage moral, qui est rare par le ridicule.»
    _Des ouvrages de l’Esprit_, § 3.

M. Du Tillet de la Bussiere, vieille ruë du Temple[5].

  [5] Son fils Jean François, qui fut greffier en chef du Parlement,
    embellit beaucoup son hôtel de la rue Vieille-du-Temple, dont on
    remarquoit surtout la porte «avec un balcon au-dessus et une grande
    fenêtre couronnée d’un fronton.» (G. Brice, édit 1701, t. I, p.
    274-275.)

M. de l’Isle, ruë de Torigny.

M. Pinon[6], ruë des Lions, près Saint Paul.

  [6] Il étoit de cette famille des Pinon, alliés aux d’Ormesson, qui
    furent, après les Vivien, seigneurs de la Grange Batelière, près de
    laquelle une rue bâtie en 1780 porta leur nom jusqu’en 1850, où elle
    devint la rue Rossini.


_Avocats Generaux._

M. de Benoist, rue Beautreillis.

M. Anjoran, rue du Four, près Saint Eustache.


_Procureur General._

M. Hennequin, Cloître Notre Dame[7].

  [7] Hennequin de Charmont, qui logeoit au cloître chez son frère,
    chanoine de Notre-Dame et conseiller au Parlement. C’est à lui
    qu’étoit arrivée cette peu honorable aventure du testament de Mme
    Valentin, dont il fut fait un conte, attribué à La Fontaine, publié
    avec plus de vraisemblance dans les _Œuvres_ de Régnier Desmarets,
    et qui se trouve aussi avec de très-curieuses notes dans le
    chansonnier Maurepas, t. VII, p. 137-142: Mme Valentin, près de
    mourir sans enfant, et voulant laisser à son mari tout ce qu’elle
    possédoit, fit en faveur d’Hennequin, leur ami, un testament qui
    n’étoit qu’un fidéi-commis impliquant, sans doute possible,
    restitution au mari. Hennequin ne l’entendit pas ainsi; il se mit en
    grand deuil comme héritier sérieux, et se hâta de mettre la main sur
    le bien. Le coup par bonheur étoit prévu. Un second testament, qui
    annuloit le premier, fut produit à temps en faveur du conseiller des
    aides, Jérome Bragelogne, un autre ami, mais plus honnête et plus
    fidèle, qui rendit l’héritage, comme l’avoit voulu la testatrice.
    «Hennequin, dit une des notes du chansonnier Maurepas, fut déshonoré
    et vilipendé partout.» La Bruyère a fait une allusion directe à
    cette affaire dans les _Caractères_ 59 et 60 de son chapitre _de
    Quelques usages_.




COUR DES AYDES.


_Première Chambre._

Mrs le Camus, Premier Président, ruë de Berry[1] au Marais, et de
Briou[2], ruë Michel-le-Comte.

  [1] Frère du lieutenant civil, que nous trouverons plus loin, et du
    cardinal Le Camus. Ils descendoient de Nicolas Le Camus, marchand de
    la rue Saint-Denis, qui avoit été un des entrepreneurs de la place
    Royale, où, comme on sait, les bâtiments devoient d’abord servir à
    l’établissement de grandes manufactures de soie. Un pélican étoit
    l’enseigne de Le Camus. Ses petits-fils en mirent un d’argent sur
    champ de gueules, dans leurs armes.

  [2] C’est lui dont le fils fit tant de bruit par son mariage avec Mlle
    de la Force. Quoiqu’il fût gardé à vue chez son père, que son amour
    pour cette vieille fille, plus âgée que lui de près de vingt ans,
    désespéroit, elle trouva moyen de le voir et de le faire échapper.
    Un prêtre, qu’ils avoient gagné, mais qui n’avoit pas l’autorisation
    de son curé, les maria le 7 juin 1687, le jeune de Briou étant
    majeur depuis à peine deux mois. Son père ne perdit pas de temps.
    Dès le 17 juin il faisoit ouvrir une enquête, puis il obtenoit une
    audience du roi, auquel il remontroit que Mlle de la Force qui étoit
    pauvre n’en avoit voulu qu’au bien de son fils qui étoit
    considérable; et le roi lui promettoit que, malgré la puissance de
    la famille de Mlle de la Force, il laisseroit toute liberté à la
    justice. L’incarcération du fils à Saint-Lazare fut un des premiers
    effets de cette promesse. Ensuite vint le procès, qui aboutit, le 15
    juillet 1689, à un arrêt qui cassoit le mariage pour abus de
    célébration. (Nic. Nupied, _Journal des principales audiences du
    parlement_, 1733, in-fol., t. IV, p. 189.) La Fontaine a parlé de
    cette affaire dans sa deuxième lettre au prince de Conti (18 août
    1689).


_Deuxième Chambre._

Mrs Payen, dans le Temple, et Chassepot de Beaumont, rue Beautreillis.


_Troisième Chambre._

Mrs de l’Estoile de Gravelle, rue de Sorbonne, et le Vasseur, ruë de
Berry.


_Avocats Generaux._

M. des Aguests[3], ruë Vivienne.

  [3] Il avoit cette charge depuis six ans: «M. des Aguets, homme de
    beaucoup d’esprit, écrit Dangeau, le 20 mai 1686, a été fait avocat
    général de la Cour des Aydes.»

M. Bignon, ruë des Bernardins.

M. des Aguets de Gueitot, rue Mauconseil.


_Procureur General._

M. du Boscq, Isle Notre Dame.




CHAMBRE DES COMPTES.


_Premier Président._

M. Nicolaï[1], vieille ruë du Temple.

  [1] Le sixième de cette grande famille des Nicolaï qui, de 1506 à
    1791, fournit, sans interruption, son président à la Chambre des
    comptes. Il étoit si bien admis, dans l’ancienne Cour, qu’un Nicolaï
    devoit seul occuper cette charge que pendant la Restauration, le
    prince de Condé ne pouvoit s’empêcher d’appeler le marquis de Barbé
    Marbois, alors président des Comptes: «Mon cher Monsieur de
    Nicolaï.»--Celui qui figure ici, Jean-Aymard de Nicolaï, fut en
    charge pendant quarante-huit ans, de 1686 à 1734. Nous ajouterons
    que ce sont les archives de cette famille, mises à la disposition de
    M. A. de Boislisle par M. le marquis de Nicolaï, qui lui ont fourni
    les éléments de son bel ouvrage, _la Chambre des Comptes de Paris_.


_Autres Présidens._

M. de Bretonvilliers[2], Isle Notre Dame[3].

  [2] Le Ragois de Bretonvilliers, qui mourut en janvier 1700, sans
    qu’on eût beaucoup parlé de lui, si ce n’est à cause de sa femme,
    Claude-Élisabeth Perrot, dont l’intimité avec l’archevêque de Harlay
    fit quelque peu scandale, et à cause aussi des magnificences de son
    hôtel.

  [3] L’hôtel Bretonvilliers, bâti de 1641 à 1643, pour le père du
    président nommé ici, et qui étoit, lui, secrétaire du roi, et
    intéressé dans les fermes, se trouvoit à la pointe de l’Ile
    Notre-Dame ou Saint-Louis. Le quai sur pilotis qu’il avoit fait
    construire à l’entour de cette pointe et les fondations seules de
    son hôtel lui avoient coûté huit cent mille livres. On peut juger
    par-là de la dépense du reste, dont on peut lire d’ailleurs le
    curieux et magnifique détail dans l’ouvrage de Brice (1701, in-8, t.
    I, p. 392-394).--A la mort du président des Comptes, en 1700, son
    hôtel fut aussitôt mis en vente, mais ne trouva acquéreur qu’en
    1716. C’est le maréchal de Tallard qui l’acheta, pour la somme
    relativement minime de 220,000 livres. On y plaça sous Louis XV la
    Cour des Aides. Les principales façades furent détruites pendant la
    Révolution. Ce qui restoit de l’hôtel du côté du quai fut emporté
    dernièrement pour le percement du boulevard Henri IV.

M. Lambert de Torigny[4], la même[5].

  [4] Claude-Jean-Baptiste Lambert de Thorigny, mort en août 1700. Il
    avoit eu, au mois de juin 1685, la survivance de son père. Il étoit
    gendre du fameux Bontems.

  [5] Il s’agit de l’hôtel Lambert, situé en effet dans «la même» Ile,
    tout près de l’hôtel Bretonvilliers. Le Vau le construisit pour
    Nicolas Lambert, dit «le riche», suivant Tallemant, grand-père de
    celui qui figure ici, et comme lui président des comptes. Il y eut
    de sa part en le faisant bâtir un peu de dépit contre
    Bretonvilliers, par qui, selon Tallemant encore, il s’étoit laissé
    enlever la riche héritière Elisabeth Perrot. Vaincu par lui sur le
    terrain du mariage, il voulut l’emporter contre lui sur un autre,
    celui des constructions, en se bâtissant un hôtel plus beau que
    celui que Bretonvilliers tenoit de son père. Il n’y réussit pas.
    L’hôtel Lambert, tout superbe qu’il fût, avec ses peintures de
    Romanelli, de Lebrun et de Lesueur, resta, comme magnificence des
    bâtiments, étendue et point de vue, inférieur à son voisin. G.
    Brice, édit. de 1701, t. I, p. 388-391, en a donné une intéressante
    description, et il existe, sous le nom de _galerie Lambert_, une
    collection de gravures de Picard, datées de 1740, qui reproduisent
    les peintures qu’y avoient faites Lebrun et Lesueur. L’hôtel, qui
    fut plus tard la propriété du fermier général Dupin, où Voltaire
    logea avec Mme du Châtelet, etc., appartient aujourd’hui, depuis
    1842, à la famille Czartoriski.

M. Paris[6], rue neuve Saint Paul.

  [6] Il avoit succédé à son père, l’un des députés de la Chambre des
    comptes aux conférences de Rueil, pendant la Fronde (_Gazette de
    France_, 6 mars 1649).

M. Rezé[7], rue des Bourdonnois.

  [7] De la même famille que le président des requêtes Bernard de Rezé,
    que nous avons vu plus haut.

M. Rossignol[8], près les Filles Saint Thomas.

  [8] Il avoit eu sa charge, en octobre 1688, par l’influence de
    Louvois, à la mort de M. Dupré. Il étoit fils de Rossignol, qui
    avoit été si utile à Richelieu, puis à Mazarin, par sa facilité à
    déchiffrer les écritures secrètes. (_Historiettes de Tallemant_,
    édit. P. Paris, t. II, p. 33-34.) Son fils avoit hérité de son
    savoir. «C’étoit, dit Dangeau (14 octobre 1705), à l’époque de sa
    mort, le plus grand déchiffreur de l’Europe.» Peut-être M. Paulin
    Paris a-t-il raison, lorsque parlant du père, qui avoit eu si bien
    le premier _la clé_ de toutes les écritures cachées, il dit: «Je
    croirois assez que de cet habile homme vient le nom de _rossignols_,
    donnés aux clés _passe-partout_.» Notes sur Tallemant, t. II, p. 94.

M. le Vassan[9], rue neuve Sainte Geneviève.

  [9] Lisez de Vassan.

M. Brunet de Monferrant[10], rue des Francs-Bourgeois.

  [10] Il avoit acheté une des nouvelles charges 100,000 écus, «comme le
    roi, dit Dangeau, les a fixées.» Un beau portrait de lui gravé par
    P. Drevet, d’après F. de Troye, se trouve en tête des _Nouvelles
    remarques, ou réflexions critiques, morales et historiques_, par
    l’abbé Bordelon, vol. in-12 publié en 1695, qui lui est dédié.

M. Gilbert[11], rue de Torigny.

  [11] Louis-Charles Gilbert, qui occupoit cette charge de président à
    la Chambre des Comptes, depuis 1691. Il étoit fils du marchand
    Gilbert, qui vendoit du drap, près des Saints Innocents, à
    l’enseigne des _Rats_, et à qui sa grosse fortune avoit valu de
    pouvoir marier sa fille Jeanne au Conseiller d’Etat, Fleuriau
    d’Armenonville, dont il a été parlé plus haut. Ce mariage avoit été
    beaucoup remarqué et chansonné. (V. _le Chansonnier_ ms. de
    Maurepas, t. VII, p. 43 et 275.) Le président Gilbert étoit des plus
    entendus. Il fit notamment un rapport célèbre, qui donna gain de
    cause au Roi contre le duc de Bouillon dans un important procès.
    (Dangeau, 9 avril 1715.) Il étoit aussi fort riche. En 1705, son
    fils avoit pu acheter 55,000 livres le régiment de Chamillart.

M. Tambonneau[12], rue de l’Université[13].

  [12] Son père, auquel il succéda, comme président des Comptes, en
    1684, a, dans Tallemant, son _historiette_, où ni lui ni sa femme ne
    sont fort bien traités. (Edit. P. Paris, t. VII, p. 80, etc.) Le
    fils, avant d’avoir sa charge, avoit dès 1657 été conseiller au
    Parlement, puis envoyé extraordinaire à Cologne, et ambassadeur en
    Suisse. Il mourut, ayant environ quatre-vingt-huit ans, au mois de
    novembre 1719.

  [13] Il habitoit «cette belle maison auprès du Pré aux Clers», comme
    dit Tallemant, que Le Vau avoit bâtie pour son père, et qu’on voit
    déjà figurée, en 1652, sur le plan Gomboust. Elle est décrite par G.
    Brice (édit. de 1701, t. II, p. 267), avec son ordre dorique en
    pilastres, sa cour «d’une étendue considérable», ses appartements
    doubles, et son jardin où, ajoute G. Brice, «La Quintinie fameux
    jardinier du Roy a fait son apprentissage.» Tambonneau la vendit
    longtemps avant de mourir. En février 1698, il entra en marché avec
    M. le comte de Marsan, et après quelques difficultés à propos de la
    propriété d’une moitié de jardin, qui sont curieusement racontées
    dans les _Annales de la Cour et de Paris_, t. I, 221, l’affaire
    s’arrangea. Tambonneau avoit, paroît-il, besoin de vendre. Le prix
    fut de 235,000 livres, mais l’on calcula qu’avec les réparations à
    faire, et l’achèvement de quelques parties, l’hôtel ne monteroit pas
    à moins de 100,000 écus (Dangeau, 5 fév. 1698). En 1710, le comte de
    Marsan le vendit à M. de Matignon. Quatorze ans après son
    petit-fils, le prince de Pons, le racheta, et le garda toute sa vie.
    On ne l’a démoli qu’en 1845, pour percer la rue _Neuve de
    l’Université_, dont le nom actuel est rue du _Pré aux Clercs_, et
    qui par sa longueur, de la rue de l’Université à la rue
    Saint-Guillaume, permet d’apprécier ce qu’étoit l’étendue de ce
    magnifique hôtel.

M. Robert[14], rue Neuve Saint Augustin.

  [14] Louis Robert de Fortille. Nous nous étonnons qu’il figure ici,
    car il avoit, deux ans auparavant, le 20 décembre 1690, donné
    démission de sa charge pour payer ses dettes, à la suite d’énormes
    pertes au jeu. (Dangeau, 20 déc. 1690.) C’étoit un des plus gros
    joueurs de Paris. On veut que La Bruyère l’ait eu en vue dans le
    _75e Caractère_ de son chapitre _des Biens de fortune_: «Mille gens
    se ruinent au jeu...» Un jour, chez Lauzun, il avoit perdu contre le
    prince Philippe dix mille pistoles «qu’il paya, sans vouloir de
    composition», dit Dangeau (13 août 1686). Il étoit parent de
    Louvois, dont il avoit très-énergiquement secondé les projets en
    Hollande, comme intendant des places conquises. (C. Rousset, _Hist.
    de Louvois_, t. I, p. 435.) L’Espine, des bâtiments du roi, que nous
    trouverons plus loin, étoit son beau-père.

M. Larcher[15], Couture Sainte Catherine.

  [15] Pierre Larcher, marquis d’Esternay, qui fut président à la
    Chambre des Comptes, de 1651 à 1700, époque où il se démit en faveur
    de son fils. Il passoit pour avoir été le conseiller de la princesse
    de Carignan, pour la rédaction de ce fameux testament par lequel
    trois de ses enfants étoient déshérités.


_La Charge d’Avocat Général vacante._


_Procureur Général._

M. Roüillé[16], près l’Hôtel d’Angoulesme.

  [16] Il ne quitta cette charge qu’en juin 1701, pour celle de
    Directeur des finances, moyennant 800,000 livres payées au Trésor.
    Elle venoit d’être créée en double. Armenonville eut l’une, comme on
    l’a vu plus haut, Rouillé eut l’autre. Il passoit pour ami des
    lettres. Sénecé lui a adressé une de ses épigrammes qui finit ainsi:

        A vous qui reconciliez
        Les Muses avec les finances.


_Requestes de l’Hôtel du Roy._

M. De Fortia[17], premier Président, rue de Baune, près le Pont royal.

  [17] Bernard de Fortia, doyen des maîtres des requêtes de l’Hôtel. Il
    mourut le 20 octobre 1694.


_Procureur Général._

M. Maboulle[18], rue de Sorbonne.

  [18] Il occupoit cette charge, depuis vingt ans, par la cession que
    lui en avoit faite Nicolas Foucault, qui en parle ainsi dans ses
    _Mémoires_ (in-4º, p. 16): «1672. Le 1er janvier, j’ai passé ma
    procuration _ad resignandum_ de la charge de procureur général des
    requêtes de l’hôtel à M. Maboul, en exécution du traité fait avec
    lui de ladite charge, moyennant 78,000 livres, dont il s’est obligé
    à payer 38,000 livres comptant. Le même jour, je lui ai rendu les
    provisions en main.»




COURS DES MONNOYES.


_Premier Président._

M. Colignon de Champigny[1], rue S. Thomas du Louvre.

  [1] Il venoit de succéder à son père Nicolas Cottignon--et non
    Colignon--de Chauvry, mort le 22 mars 1692, à 83 ans, et qui
    cumuloit cette charge à la Cour des Monnoies, avec celle de
    généalogiste du roi.


_Autres Présidens._

M. Cousin[2], rue de Guenegaud.

  [2] Louis Cousin, que ses traductions des principaux auteurs byzantins
    publiées sous différents titres, de 1672 à 1683, firent nommer de
    l’Académie françoise, le 19 mai 1697. Il mourut en mars 1707.

M. Feydeau, Isle Notre Dame.

M. de Lochefontaine, rue de Guénégaud.

M. Hourlier[3], Porte Saint Michel.

  [3] Claude Hourlier, que nous trouverons plus loin, bailli du Palais.

M. le Vacher, à l’Arsenac.

M. Desbiais, rue Sainte Avoye.

M. Faudet[4], rue Barbette.

  [4] Lisez Faudel. Il avoit épousé la fille de Zacharie Morel, maître
    de la Chambre aux deniers. Suivant les _Clés_ de La Bruyère, c’est à
    sa femme qu’il seroit fait allusion dans le _28e Caractère_ du
    chapitre de _Quelques usages_: «la fille d’Aristippe est malade...»
    Le président Faudel mourut en septembre 1707.


_Avocats Generaux._

M. Guillaine, ruë d’Enfer.

M. Hurez, ruë Quinquempoix.


_Procureur General._

M. de Selles, rue des fossez Montmartre.




AMIRAUTÉ.


M. le Comte de Thoulouse, Grand Amiral en Cour.

Les Charges de Lieutenants Généraux et Particuliers, de Conseillers et
d’Avocats du Roy, vacantes.

M. Jacob, Procureur du Roy, rue Perdue.




CHASTELET.


_Prevost de Paris[1]._

  [1] Le prévôt de Paris y étoit le représentant de l’autorité et de la
    justice royale, mais depuis la création de la Lieutenance de police
    en 1666, sa charge s’y étoit singulièrement amoindrie.

M. de Bullion[2], ruë Platrière[3].

  [2] Le marquis de Bullion, fils du surintendant Claude de Bullion, qui
    s’étoit fait sous Richelieu une si grosse fortune. Le marquis avoit
    prêté serment au Parlement, comme prévôt de Paris, le 22 mai 1685.
    Cette charge rapportoit 8,000 livres, il l’avoit payée 50,000 écus.
    Toute diminuée qu’elle fût, elle avoit son importance, surtout comme
    prestige d’autorité: «les arrêts du Châtelet, écrit Dangeau (20
    octobre 1684), se rendent au nom du prévôt de Paris, et le
    lieutenant civil est à son égard ce que sont les lieutenants
    généraux dans les présidiaux, à l’égard du grand bailli ou du
    sénéchal de la Province.» Le marquis de Bullion mourut fou, en 1721,
    dans une de ses maisons de la Beauce, où on l’avoit enfermé. «Un de
    ses cadets, écrit Saint-Simon, étoit dès lors prévôt de Paris, sur
    sa démission.» (_Mémoires_, in-18, t. XI, p. 397.)

  [3] Il habitoit l’hôtel que Le Vau avoit bâti pour Claude de Bullion,
    de 1630 à 1634, et qui existe encore en partie au nº 3 de la rue
    Jean-Jacques Rousseau, ancienne rue Platrière. On y lit toujours
    au-dessus de la porte: _Hôtel Bullion_. Il fut longtemps un des plus
    beaux du quartier et des environs. (_V._ notre _Histoire de la Butte
    des Moulins_, p. 95.) Il perçoit jusqu’à la rue Coq-Héron. C’est
    même de ce côté-là que s’en trouvoient la galerie basse, avec sa
    série des douze mois peinte par Blanchard, et la galerie haute, où
    Simon Vouet avoit peint, en 1634, les aventures d’Ulysse. Cette
    partie fut détachée de l’hôtel dans la seconde moitié du XVIIIe
    siècle. La loge maçonnique de _Saint Jean d’Ecosse_ s’y établit en
    1779, dans la galerie même de Vouet, qui étoit encore très-bien
    conservée. L’autre partie, sur la rue Platrière, étoit devenue ce
    qu’elle resta longtemps, presque jusqu’à nos jours: l’hôtel des
    ventes. De nombreux locataires l’occupoient. On voyoit entre autres
    écriteaux sur la porte, en 1789, suivant _le Provincial à Paris_
    (Quartier du Louvre, p. 134): «M. Taima dentiste.» C’étoit le père
    du grand tragédien.


_Lieutenant Civil._

M. le Camus[4], ruë de Paradis.

  [4] Frère du président à la Cour des aides, dont nous avons parlé plus
    haut. Il avoit commencé par être maître des requêtes, puis intendant
    d’Auvergne. C’est depuis le 4 septembre 1671 qu’il étoit lieutenant
    civil. Lorsqu’en 1684 les juridictions du grand et du petit
    Châtelet, qui avoit aussi son lieutenant civil, furent réunies, sa
    charge, devenue plus importante, puisqu’elle restoit seule, lui fut
    conservée. C’étoit, suivant Saint-Simon, un fort honnête homme,
    mais, ajoute-t-il (t. V, p. 342), «glorieux à un point qu’on en
    rioit, et qu’on en avoit pitié.» Il étoit frère du premier président
    de la Cour des Aides, et du cardinal Le Camus, et quand il disoit:
    «Mon frère le Cardinal», il se rengorgeoit que c’étoit un plaisir.


_Lieutenant General de Police._

M. de la Reynie[5], rue du Boulloy.

  [5] La charge de Lieutenant de police avoit été créée pour lui en
    1666. Il l’occupa jusqu’à ce qu’en 1697 le roi l’en eût déchargé sur
    sa demande. Il ne garda que la place de Conseiller d’Etat, qu’il
    avoit depuis 1680. Il étoit né à Limoges le 25 mai 1625, de Nicolas
    de la Reynie, qui depuis 1608 y étoit conseiller du roi en la
    sénéchaussée et siége présidial. Lui-même commença dans un
    présidial, celui de Bordeaux, où il fut président en 1646. Il devint
    ensuite Maître des requêtes, en 1661, puis enfin, cinq ans
    après, lieutenant de police. Il mourut le 24 juin 1709, à
    quatre-vingt-quatre ans. Il fut enterré sans aucune pompe, au petit
    cimetière Saint-Joseph, «ainsi qu’il l’avoit demandé.» (_Mercure_,
    juin 1709, p. 297.)


_Lieutenant Criminel._

M. d’Effila[6], rue de la Verrerie.

  [6] Lisez Deffita. Il avoit, en 1666, succédé dans cette charge à
    Tardieu, si fameux par son avarice, et dont Boileau a rappelé
    l’assassinat dans sa Xe satire. Deffita, qui avoit d’abord été
    procureur du roi des requêtes de l’hôtel, charge qu’il céda à
    Nicolas Foucault, pour devenir lieutenant criminel, conserva ce
    dernier emploi jusqu’à sa mort à la fin de novembre 1700. Nicolas Le
    Comte lui succéda le 1er février suivant.


_Lieutenans Particuliers._

Mrs du Martray[7], rue du Mail, et Pasquier, rue Bourlabbé.

  [7] Il étoit gendre de Félix, premier chirurgien du roi, qui lui fit
    avoir en 1699 une pension de 500 écus. (Dangeau, 17 octobre 1684, et
    14 juillet 1699.)


_Lieutenant Criminel de Robe Courte._

M. Bachelier du Moncel, rue de Clery.


_Prevost de l’Isle de France[8]._

  [8] C’étoit le titre que prenoit le prévôt des maréchaux, dont la
    juridiction s’étendoit sur toute l’Ile de France. Un autre prévôt
    siégeoit à Melun, pour le reste de la généralité de Paris.

M. Francine de Grand Maison[9], rue des Prouvaires.

  [9] Il étoit frère de Francine, qui avoit épousé une sœur de Lulli, et
    qui devint, après celui-ci, directeur de l’Opéra. Francine de
    Grandmaison se démit de sa charge en faveur de son fils, qui la céda
    lui-même, mais fort tard, en 1718. «Suivant l’usage, écrit Dangeau
    (12 novembre 1718), son successeur fut installé à la table de marbre
    par MM. les maréchaux de France.»


_Chevalier du Guet._

M. Chopin, rue de la Verrerie.


_Juge Auditeur._

M. Testebone, rue Saint Antoine.


_Avocats du Roy._

M. Brochard, rue Haute-fueille.

M. Leschassier[10], rue du Jardinet.

  [10] Il étoit frère du supérieur du séminaire de Saint-Sulpice, et de
    Mlle Lechassier dont nous avons vu plus haut les grandes aumônes. Il
    mourut à 84 ans, le 12 août 1725.

M. Mallet, rue Neuve Saint Mederic.


_Procureur du Roy._

M. Robert[11], rue Sainte Avoye.

  [11] Claude Robert. Il étoit depuis longtemps attaché à la juridiction
    du Châtelet, où il avoit commencé par être lieutenant particulier.
    Il y a deux lettres de lui dans _la Correspondance des contrôleurs
    généraux_, publiée par M. de Boislisle.


PREVOSTÉ DE L’HOSTEL DU ROY[12].

  [12] Tribunal que présidoit le grand prévôt. Il jugeoit les délits et
    procès survenus entre les gens de cour, et de plus tous les crimes
    commis à Paris, lorsque le roi y résidoit.


_Grand Prevost._

M. de Sourches[13], rue de l’Université.

  [13] Louis-François du Bouchet, marquis de Sourches, avoit eu de son
    père la survivance de la grande prévôté, le 15 septembre 1649. Il
    fut, avant d’en être titulaire, conseiller d’Etat, colonel du
    régiment d’infanterie qui portoit son nom, major général de M. de
    Luxembourg en Hollande, gouverneur du Maine et du Perche. Il se
    démit de la grande prévôté, le 25 août 1714, en faveur de son fils,
    et mourut le 4 mars 1716. Il a laissé des _Mémoires_ qui sont du
    Dangeau développé et du Saint-Simon éteint. Le troisième volume, qui
    comprend les années 1685 et 1686, a seul été publié en 1836 par M.
    Adelhm Bernier, d’après le manuscrit trouvé par lui un peu
    auparavant, et qui provenoit de la bibliothèque du président Roland,
    vendue en 1834. Le reste existe au château de Sourches, propriété du
    duc Descars.


_Lieutenans Generaux._

M. Barbier, cul de Sac Saint Sauveur.

M. Cornu de Noyon, rue Poupée.


_Procureur du Roy._

M. Colinet, prés Saint Gervais.




CHAMBRE DU TRÉSOR.


_Lieutenant General._

M. Vigneron, rue Jean Lointier.


_Procureur du Roy._

M. le Sec de Saint Martin, rue de la Harpe.


CONNESTABLIE ET MARESCHAUSSÉE.


_Lieutenant General._

M. de Ladarel, rue du Puis, près les Blancs Manteaux.


_Lieutenant Particulier._

M. Favart, rue Saint Honoré.


_Procureur du Roy._

M. de la Fond, rue Saint Martin.




HOSTEL DE VILLE.


_Prevost des Marchands._

M. de Fourcy[1], rue du Jour[2].

  [1] Le même que nous avons vu plus haut parmi les conseillers d’Etat
    de semestre.

  [2] Lisez rue de Jouy, comme plus haut, p. 51.


_Eschevins[3]._

  [3] Il y en avoit seize et non pas quatre seulement. Ceux qui suivent
    ne figurent ici que parce qu’ils avoient été les derniers élus en
    1690 ou 1691.

M. de la Leu[4], rue Saint Denis.

  [4] Il étoit conseiller du Roi et notaire au Châtelet. L’une de ses
    filles épousa le fermier général Dupleix de Bacquancourt, et l’autre
    Verani de Varennes, receveur des tailles de l’élection de
    Montdidier. (_Mercure_, sept. 1734, p. 2089.)

M. Tardif[5], rue Saint Honoré.

  [5] Il étoit, de plus, conseiller de ville. Son élection datoit de
    1691.

M. Chauvin[6], rue Saint Denis.

  [6] Son titre de _quartenier_, c’est-à-dire d’officier de police,
    chargé de faire respecter dans son quartier l’autorité municipale,
    ne l’avoit pas empêché, ce qui étoit rare, à cause du double emploi,
    d’arriver à l’échevinage, en 1690.

M. Savalette[7], rue Saint Antoine.

  [7] Notaire au Châtelet. Il étoit fils du fameux vinaigrier de la rue
    Beaubourg, Savalette, dont l’histoire un peu arrangée par Le Noble,
    dans son _Gage touché_, 1711, in-12, p. 83, servit de sujet à
    Mercier pour sa pièce, _la Brouette du Vinaigrier_.


_Procureurs du Roy._

M. Titon, rue Sainte Avoye.

M. Girard Substitud, Quay Pelletier.


JUGE ET CONSULS DES MARCHANDS.


_Grand Juge._

M. Clerambault, rue Jean Loinctier.


_Consuls._

M. Rosseau, Chevalier du Guet.

M. Arnot, rue Saint G. Lauxerrois.

M. Convert, Quay des Orfèvres.

M. la Roze, rue de la Cossonnerie; lesquels Juge et Conseils seront
chargez le 27 Janvier de la presente Année 1692.




EAUX ET FORESTS.


_Lieutenant General._

M. Brachet, ruë Saint Martin.


_Lieutenant Particulier._

M. Goupy, rue Sainte Avoye.


_Avocat General._

M. de l’Hommeau, vieille rue du Temple.


_Procureur General._

M. Menard, rue Perdue.




ELECTION[1].

  [1] Juridiction des _Élus_, c’est-à-dire des magistrats, chargés par
    voie d’élection d’assister les commissaires royaux dans la levée des
    Aides, et la répartition des Tailles. Ils avoient en outre la garde
    des deniers qui en provenoient. Les _pays d’État_ n’avoient pas
    d’Élus, aussi appeloit-on, pour les distinguer, _pays d’Élection_
    ceux qui en avoient. Paris figuroit dans le nombre, avec un
    personnel considérable: un président, un lieutenant, un assesseur,
    vingt conseillers, un avocat du Roi et un procureur du Roi, un
    substitut et un greffier en chef. Les deux principaux de cette
    magistrature figurent seuls ici.


_Président._

M. de Chevriere, rue Saint André.


_Procureur du Roy._

M. de Chenedé[2], rue des Billettes.

  [2] Joachim de Chénedé, qui, après avoir été conseiller au présidial
    d’Angers, et maire de la ville, fut successivement conseiller,
    avocat et procureur du Roi, en l’Élection de Paris. Il avoit épousé
    la fille de Bachelier, premier valet de la garde-robe du Roi. Il
    mourut le 8 avril 1694.


BAILLIAGE DU PALAIS.


_Bailly._

M. Hourlier[3], porte Saint Michel.

  [3] Claude Hourlier, que nous avons vu plus haut président de la Cour
    des Monnoies. Il avoit, comme bailli du Palais, droit d’inspections
    sur toutes les boutiques qui s’y trouvoient, entre autres celles des
    libraires du perron de la Sainte-Chapelle, et des galeries
    _Mercière_ et _des Prisonniers_. C’est ce qui fait comprendre
    pourquoi Thomas Quinet, à qui Molière avoit cédé son privilége pour
    la publication du _Dépit amoureux_, le dédia à M. Hourlier. Celui-ci
    mourut en juillet 1700.


_Procureur du Roy._

M. Robert, rue Sainte Avoye.


MASSONNERIE.


_Lieutenant General._

M. de l’Espine[4], prés Saint Roch.

  [4] Beau-père du président Robert, dont il a été parlé plus haut. Il
    avoit, en 1667, donné «l’avis et plan pour l’aplanissement de la
    _Butte des Moulins_ ou _Saint Roch_», ce qui lui avoit permis de s’y
    faire une belle part dans les terrains à construire. (_V._ notre
    _Histoire de la Butte des Moulins_, 1877, in-18, p. 81, 84.)




SCEANCES DES TRIBUNAUX, ET JURISDICTIONS DE PARIS.


Les Tribunaux sont au dedans, ou hors de l’enclos du Palais.

Ceux qui sont dans l’enclos du Palais, sont le Parlement, la Chambre des
Comptes, la Cour des Aydes, la Cour des Monnoyes, l’Amirauté, les
Requestes de l’Hotel, les Requestes du Palais, la Chancellerie du
Palais. Le Bureau des Trésoriers de France, la Chambre Souveraine, des
Decimes, l’Amirauté, la Table de Marbre, Eaux et Forests, la Chambre du
Trésor, l’Election, le Bailliage du Palais[1] et la Maçonnerie.

  [1] L’_Almanach royal_, pour 1702, p. 65, ajoute ici: «la Bazoche, qui
    est la juridiction des clercs.»

Ceux qui sont hors l’enclos du Palais sont, le grand Conseil du Roy, et
la Prevosté de l’Hotel de Sa Majesté, qui tiennent leurs Seances à
l’Hotel d’Aligre, rue Saint Honoré, et rue Bailleul[2].

  [2] Le grand Conseil dut quitter, sous Louis XV, l’hôtel d’Aligre qui
    menaçoit ruine. Il fut alors installé au Louvre, dans la partie qui
    longe le jardin de l’Infante. Il ne reste de l’hôtel d’Aligre, rue
    Saint-Honoré, qu’une cour, qui la met en communication avec la rue
    Bailleul, et qu’on appelle passage d’Aligre.

Les Prevost des Marchands et Eschevins, qui ont leur siége à l’Hôtel de
Ville.

Les Juge et Consuls des Marchands, qui tiennent leurs Audiances au
Cloitre Saint Mederic[3].

  [3] C’est-à-dire Saint-Merry. La maison des Juges Consuls, qui servit,
    après eux, au Tribunal de Commerce, jusqu’à ce qu’on l’eût transféré
    à la Bourse, existe encore en partie dans la rue du Cloître, telle
    qu’elle avoit été reconstruite sous Louis XV. M. de Crissé dans ses
    _Souvenirs du vieux Paris_, 1836, in-fol., pl. 26, a donné une
    lithographie exacte de l’escalier qui en est le reste le plus
    curieux.

La Jurisdiction des Poudres et Artillerie, et celle de la Chambre
Royale, qui se tiennent à l’Arsenal.

La Justice des Garennes et Chasses, qui se tient aux Galleries du
Louvre.

Celle des Officiers du Grenier à Sel, qui ont leur siege au Carrefour
des trois Maries.

L’Officialité, la Justice Notre-Dame, la Temporalité et la Chambre de
Jurisdiction de M. le Chantre, qui se tiennent à l’Archeveché et au
Cloitre Notre Dame.

Enfin la Justice du Temple, et celle de saint Jean de Latran, qui se
tiennent dans les enclos de ces deux Prieurez[4].

  [4] L’enclos de Saint-Jean de Latran, siége de la commanderie des
    Hospitaliers de Saint-Jean, qui relevoit de l’ordre de Malte, se
    trouvoit place Cambray; en face du Collége de France, et s’étendoit
    jusqu’à la rue Saint-Jean de Beauvais, où étoit la Chapelle. La Tour
    d’entrée qui étoit sur la place et qu’on appela dans les derniers
    temps _Tour Bichat_, du nom du célèbre médecin qui s’y étoit fait un
    cabinet pour ses expériences anatomiques, n’a été détruite qu’en
    1855.

L’Ouverture du Parlement se fait le lendemain de la Saint Martin, auquel
jour la Cour après avoir assisté en Robes rouges à la Messe solennelle
qui se dit dans la grand’Salle du Palais[5], reçoit le Serment des
Avocats et Procureurs.

  [5] L’autel de Saint-Nicolas, qui étoit, en effet, dans la
    Grand’salle, et où l’on disoit chaque jour la messe.

Messieurs les Avocats Generaux, font leurs harangues à la Cour le Lundi
de la huitaine franche d’après la Saint Martin.

Les Mercuriales[6] se font par M. le Procureur Général, le même jour et
le lendemain de la Quasimodo.

  [6] C’est ce que nous appelons _discours de rentrée_. Il ne faut pas
    les confondre avec les anciennes _mercuriales_, que le Procureur
    général avoit le droit d’adresser, dans les assemblées du
    mercredi--leur nom en étoit venu--comme observations et remontrances
    aux Magistrats sur leur conduite, et la façon dont ils
    administroient la justice.

Depuis Pâques jusqu’aux Vacations qui arrivent le sixieme Septembre,
lors qu’une Fête arrive le Jeudi on plaide le Vendredi à la grand
Chambre.

Tous les jours ouvrables depuis la Saint Martin jusqu’au Careme, la Cour
se leve le matin à 10 et de relevée à quatre heures.

Pendant le Careme et jusqu’à la fin du Parlement, elle se leve le matin
à onze heures, et de relevée à cinq.

Le Mardi-gras, le Vendredi de l’Octave de Paques, et le jour de la saint
Nicolas[7] en Mai, la Cour se leve le matin à neuf heures et n’entre
point de relevée[8].

  [7] C’étoit un patron très-fêté au Palais, où nous venons de voir
    qu’il avoit son autel dans la Grand’salle.

  [8] L’_Almanach royal_ de 1702, p. 66-67, après avoir donné ce détail,
    ajoute: «Delà vient le proverbe: _Quand la Cour se lève matin, elle
    dort l’après dînée_.»

Nosseigneurs de la grand Chambre du Parlement, tiennent les grandes
Audiances de Robes rouges sur les hauts Sieges, les Lundis, les Mardis,
et les Jeudis, depuis huit heures du matin jusqu’à dix; et celles de
Robes noires de relevée les Mardis pour les causes du Role, et les
Vendredis pour celles des Placets[9].

  [9] Le _placet_ étoit une démarche succincte, par écrit, pour obtenir
    justice. Le mot vient du latin _placere_, plaire.

Les Audiances ordinaires de la grand Chambre qui se tiennent sur les bas
Sieges en Robes noires, sont données les Mercredis, Vendredis, et
Samedis, outre les petites Audiances qui se donnent tous les jours à
l’exception des Lundis depuis sept jusqu’à huit heures du matin.

Nosdits Seigneurs donnent encore Audiance à la Tournelle civile tous les
jours depuis dix heures jusqu’à midi; à la grande Tournelle criminelle
le samedi, et à la petite Tournelle criminelle le Mercredi, et le
Vendredi depuis 8 jusqu’à dix heures[10].

  [10] On appeloit ces juridictions _tournelles_, parce qu’elles avoient
    d’abord été établies au Palais dans les deux tours jumelles qui
    flanquent l’entrée de la _Conciergerie_ sur le Quai. Sauval (t. III,
    p. 407) donne l’extrait d’un compte de 1472 où on lit: «A...
    charpentier, pour la réparation par lui faite en deux tournelles
    estant au Palais du côté de la rive de la Seine, l’une appelée la
    Tournelle civile, et l’autre la Tournelle criminelle.»

Les Audiances de la première et de la deuxième Chambre des Enquestes, se
tiennent le Mercredi et le Samedi, celles de la cinquième les Lundis et
Jeudis, et celles de la quatrième le Mardi et le Vendredi.

Nosseigneurs les gens du Roy, tiennent tous les matins leurs Audiances
au Parquet où ils jugent les affaires qui leurs sont renvoyées, les
conflits d’entre les Chambres du Parlement, etc., et où Nosseigneurs les
Avocats Généraux prennent communication par les Avocats et Monseigneur
le Procureur Général par les Substituts de toutes les affaires dans
lesquelles ils doivent conclure.

La Tournelle où Mrs les Avocats Généraux vont alternativement de trois
en trois mois est composée de six Conseillers de la Grand Chambre, et de
huit des Enquestes; c’est de quoi Mrs les Doyens de la Grand Chambre et
de la première Chambre des Enquêtes se peuvent dispenser.

Tous les jours ouvrables ausquels il n’y a point d’Audiances de relevée
excepté la veille de la Fete Dieu et la veille de la Notre Dame d’Aoust,
la Cour juge de Commissaires les Procez de Rapport.

La Séance de Grace pour les Prisonniers, se tient la surveille de Noel,
le Mardi de la Semaine Sainte, la surveille de la Pentecote, la veille
de la Saint Simon Saint Jude.

Le premier Rolle qui se plaide est pour la Province de Vermandois, il
commence après la Saint Martin et finit au dernier Décembre.

Celui du Bailliage d’Amiens va jusques au quinze Janvier, et celui du
Bailliage de Senlis jusqu’à la fin du même mois.

Le Roolle de Paris commence après la Chandeleur, et continue tout le
Careme, quelque fois même après Paques, au gré de Monseigneur le premier
Président.

Le Roolle de Champagne et de Brie, commence après la Quasimodo et finit
en Mai, quelques fois au commencement, d’autres fois au quinze et
souvent à la fin.

Le Roolle de Poitou se plaide pendant le reste de Mai, et tout le mois
de Juin.

Le Roolle de Lion, pendant la premiere quinzaine de Juillet.

Le Roole de Chartres dure le reste des Plaidoiries, excepté les deux
derniers jours dont l’un est pour le Roolle d’Angoumois, et l’autre pour
les présentations.

Les Lundis et Mardis on plaide du Roolle ordinaire des Provinces et
Bailliages, les Jeudis matins et les Mardis et Vendredis de relevée du
Roolle extraordinaire.

Nosseigneurs des Requestes de l’Hotel du Roy, et Nosseigneurs des
Requestes du Palais, donnent leurs Audiances, les Lundis et Jeudis,
depuis dix heures du matin jusqu’à midi, et les Mardis et Vendredis,
depuis deux heures de relevée jusqu’à cinq[11].

  [11] «A compter, lit-on dans l’_Almanach royal_, à compter du jour de
    la rentrée jusqu’au mois de mars; et, depuis le premier mars, les
    audianciers commencent à pareille heure jusqu’à six. Quelques fois,
    ajoute encore l’Almanach, nos Seigneurs des Requêtes de l’hôtel
    donnent des audiances extraordinaires de relevée, pendant un tems,
    dont ils font avertir à la communauté des Procureurs.»

Les Audiances de la Chancelerie du Palais tiennent les Mercredis et
Samedis du matin.

Nosseigneurs du grand Conseil du Roy, donnent Audiance les Lundis,
Mardis, Jeudis et Vendredis, depuis neuf heures jusqu’à midi, et jugent
les Procez de Rapport les Mercredis et Samedis, pendant que Nosseigneurs
les gens du Roy, jugent au Parquet les affaires qui leurs sont envoyées,
et prennent communication les autres jours des affaires dans lesquelles
ils doivent conclure.

Nosseigneurs de la Chambre des Comptes tiennent tous les jours leurs
Audiances depuis neuf heures du matin jusqu’à onze, et de relevée depuis
deux heures jusqu’à cinq.

Nosseigneurs de la Cour des Aydes, donnent leurs Audiances en la
première Chambre, les Lundis, Mardis, Jeudis, et Vendredis, et dans la
deuxième et troisième Chambre les Mercredis, Vendredis et Samedis.

Les Plaidoiries du Roolle ordinaire de la Cour des Aydes, sont les
Mercredis et Vendredis matin, et pour l’extraordinaire le Lundi de
relevée depuis le mois de Décembre jusqu’à la fin de Mai.

Les Audiances de la Cour des Monnoyes, se tiennent le Mercredi et le
Samedi.

A l’égard du Siège Présidial du Châtelet, on plaide à la Prévoté, au
Parc Civil, au Présidial, et aux Auditeurs, tous les jours de la semaine
à l’exception du Lundi; à la Chambre Civile le Mercredi et le Samedi, à
la Police, au Criminel, et en la Chambre de M. le Procureur du Roy, le
Mardi et le Vendredi.

Il y a plusieurs Sièges dans l’enclos du Palais, qui ont leurs Audiances
réglées le Mercredi et le Samedi, à sçavoir: l’Amirauté, la Chambre du
Trésor, le Bailliage du Palais, la Chambre Souveraine des Décimes, la
Connétablie, la Maçonnerie et la Table de Marbre, qui tient encore des
Audiances le Lundi et le Jeudi, pour juger au Souverain.

Messieurs les Prévosts des Marchands et Eschevins de la Ville de Paris,
donnent Audiance les Mardis, Mercredis, Vendredis et Samedi du matin.

Mrs les Juges et Consuls des Marchands, tiennent trois jours de la
semaine leurs Audiances les Lundis, Mercredis, et Vendredis du matin et
de relevée.

Les Officiers de l’Election donnent Audiance tous les jours, depuis neuf
heures jusqu’à midi, et ceux du Grenier à Sel seulement le Mercredi et
le Samedi.

On tient Audiance le Mercredi, et le Samedi à l’Officialité et à la
Justice Nostre-Dame; le Lundi à midi à la Temporalité, et le Jeudi de
relevée à la Justice de Monsieur le Chantre.

L’Audiance de la Chambre Royale de l’Arsenal, se tient tous les Lundis
matins, et celle des Poudres et Salpestres tous les Samedis de relevée.

Celle du Bailliage du Temple, se tient le Samedi à trois heures de
relevée.

La Jurisdiction du Bailliage de S. Jean de Latran se tient le Lundi à
trois heures de relevée.




VACATIONS DES TRIBUNAUX.


PARLEMENT.

La Cour vaque depuis le 6. Septembre jusqu’au lendemain de la Saint
Martin, c’est à dire jusqu’au 12. Novembre, du moins si on en excepte la
Chambre des Vacations qui est préposée pour les matières provisoires et
autres qui requièrent célérité. Elle ne dure que depuis le 7. Septembre
jusqu’au 27. Octobre, en sorte que depuis ce jour jusqu’au 12. Novembre,
il ne se fait aucun Acte de Judicature au Palais.

La Cour vaque aussi dans le reste de l’année tous les Dimanches et Fêtes
solennelles, et encore en Décembre le 6. jour de la Saint Nicolas, en
Janvier le 23. Fête de Saint Hilaire, et le 28. Fête de Saint
Charlemagne, en Mars le 19. Fête de Saint Joseph seulement le matin, le
22. pour la Procession Générale de la reduction de Paris[1], et le 25.
Fête de l’Annonciation Notre Dame, en Mai le 2. Fête de Saint Gatien, en
Juin un jour de choix pour le Lundi ou Foire de Saint Denis, en Juillet
le 22. Fête de la Magdelaine, et le 28. Fête de Sainte Anne, en Aoust le
16. Fête de Saint Roch[2].

  [1] Cet anniversaire de l’entrée d’Henri IV dans Paris, le 22 mars
    1594, fut célébré jusqu’à la Révolution.

  [2] La veille même des grandes fêtes, le Palais étoit fermé. Louis XIV
    supprima ce supplément de vacances fériées: «L’on entre, dit
    l’_Almanach royal_ de 1702, la veille de toutes les festes, depuis
    l’ordonnance de 1667.»

La Cour vaque pareillement le jour des Cendres, et depuis le Mercredi de
la Semaine Sainte jusqu’au lendemain de la Quasimodo, si ce n’est le
Vendredi de l’Octave de Paques elle va à Notre-Dame.

La Chambre des Vacations vaque les 23 et 24. Septembre quoique non
Fetez, et encore en Octobre un jour de choix pour la Foire de Saint
Denis, et le 18. Fête de Saint Luc.

Quand le Dimanche ou l’une des Fêtes Mobiles, arrive un des jours
ci-dessus marquez, la Vacation de la Cour est remise au lendemain.

Le 15. Aoust passé on ne plaide plus à la grand’Chambre à huy ouvert.

Les Requêtes du Palais qui sont du Corps de Parlement et qui vaquent les
mêmes jours, ne commencent néanmoins leurs Vacations que le 15.
Septembre.




DOCTEURS ET LICENTIEZ EN DROIT.


_Professeurs des Ecoles._

M. de Loy, aux Ecolles, rue des Carmes[1].

  [1] Michel De Loy, de qui l’on a un éloge en latin de Pierre Hallé,
    lecteur en grec au Collége royal, puis professeur en droit canon,
    mort en 1689. De Loy étoit fils du professeur de l’Université pour
    lequel Corneille avoit fait des vers, le félicitant de son
    panégyrique de M. de Bellièvre prononcé, en 1658, au Collége de La
    Marche. (_V. Œuvres de Corneille_, édit. Marty-Laveaux, t. X, p.
    131.)

M. Baudin[2], même lieu[3].

  [2] Jacques Baudin, qui mourut cette année même 1692. Il avoit eu
    beaucoup de réputation comme professeur. _V._ à ce sujet les
    additions de Ferrière au livre de Taisand: _Vies des plus célèbres
    Jurisconsultes_, 1737, in-4º, p. 590, et les _Mémoires sur le
    Collége royal_, par l’abbé Goujet, t. III, p. 420.

  [3] C’est-à-dire aux Ecoles de Droit. Elles avoient leur principale
    entrée rebâtie monumentalement, en 1675, rue Saint-Jean de Beauvais,
    en face de la maison à l’enseigne de l’_Olivier_, rendue si célèbre
    par l’imprimerie des Etienne; mais elles perçoient par derrière
    jusqu’à la rue des Carmes, où se trouvoient les logements des plus
    anciens professeurs.

M. Cuiniez, même lieu[4].

  [4] Son vrai nom étoit Cugnet. Il avoit épousé une des filles de son
    collègue Baudin. Son éloge se trouve aussi dans les _Additions_ de
    Ferrière, p. 695.

M. Mongin, rue de Bièvre.

M. Colson, rue Saint Jean de Beauvais.

M. le Gendre, rue des Noyers[5].

  [5] Ces six professeurs enseignoient le droit romain, c’est-à-dire le
    droit civil, et le droit canonique.


_En Droit François[6]._

  [6] Cette chaire de droit françois n’existoit que depuis 1680.

M. de Launay, ruë des Massons[7].

  [7] François De Launay, qui mourut l’année suivante, 1693. Son éloge
    parut alors dans le _Journal des Savants_, t. XXXVIe.


_Docteurs agrégez._

M. Piolin, ruë des Assis.

M. du Ru, ruë Saint Jean de Beauvais.

M. Amiot, même ruë[8].

  [8] Il étoit, comme Cugnet, gendre de Baudin. On trouve aussi son
    éloge dans les _Additions_ de Ferrière au livre de Taisand, p. 595.

M. des Barrières, même ruë.

M. Hulin, même ruë.

M. Sachet, même ruë.

M. Bonnamour, ruë Galande.

M. l’Escuyer, ruë Pierre Sarrasin.

M. Pavoine, ruë Saint Jaques.

M. Basthide, ruë du Plâtre.

M. Porsely, ruë du Foüare.


_Licentiez Immatriculez du Parlement._

On peut recouvrer la Liste des Avocats Plaidans et Consultans au Palais,
chez Charles de Sercy, Libraire dans la grand Salle à la bonne Foy
couronnée.

Ceux qui sont dénommez en cette Liste sont gens généralement
reqammandables par leur condition et par leur éloquence par exemple pour
les Consultations, Mrs Billard, ruë de Savoye[9]. Sonnet, rue du
Battoir. Issaly, rue des Rats. Husson[10], ruë Bourtibourg. Le Verrier,
ruë du Jardinet. Raviere, ruë des Deux Portes. Chappé, rue de
l’Observance. Du Pré, ruë des Cordeliers. Sever[11], même ruë. De
Riparfond[12], rue de la Harpe. Braquet, Cloître Notre Dame, etc. Pour
les Plaidoïers Mrs Chardon[13], ruë des deux Portes. De Nivelle, ruë de
la Bucherie[14]. Robert de S. Martin, rue Haute-feuille. Baille, rue du
Cimetiere Saint André des Arts. Hérard, rue de Savoye. De Retz, près
Saint Jean en Grève. Du Mont[15], ruë du Jardinet, etc. Pour les
Matières Benéficiales Mrs Nouët[16], montagne Saint Geneviève.
Sachot[17], ruë de l’Eperon. Ferrand, rue Saint Loüis du Marais. Du
Chesne, ruë de Bièvre. Et pour les matières qui sont traitées au Trésor,
Fiefs, Aubaines et Confiscations, M. Mouffle, ruë des mauvaises paroles,
etc.

  [9] C’est ce terrible avocat Billard, qui fit tant de bruit pour
    empêcher les Comédiens, que le voisinage du collége Mazarin faisoit
    chasser du théâtre Guénegaud--aujourd’hui passage du Pont-Neuf--de
    venir s’installer dans la rue de Savoie. Louvois leur étoit
    favorable, car, ainsi qu’on l’apprend par une lettre de Racine à
    Boileau, il s’étoit même fait donner le plan du lieu «où ils
    vouloient bâtir dans la rue de Savoie»; mais Billard, avec ses cris,
    l’emporta, à la grande joie de son quartier, du reste: «Tous les
    Bourgeois, dit encore Racine, trouvent fort étrange qu’on vienne
    leur embarrasser leur rue. M. Billard surtout qui se trouveroit
    vis-à-vis de la porte du parterre, crie fort haut; et, quand on lui
    a voulu dire qu’il en auroit plus de commodité pour s’aller
    divertir, il a répondu fort tragiquement: «Je ne veux point me
    divertir.»--Il avoit de la réputation. Une de ses causes les plus
    brillantes avoit été, en 1675, celle d’une servante, épousée par le
    fils du riche marchand de la _Herse d’Or_, au faubourg
    Saint-Germain, dont on vouloit faire casser le mariage. (_Journal
    des Audiences_, t. III, p. 70.)

  [10] Martin Husson. Il figuroit déjà au tableau des avocats, en 1643.
    Le traité _de Advocato_ est de lui.

  [11] Nous le trouvons, vers ce temps-là, plaidant avec succès dans une
    affaire de succession. (_Journal des Audiences_, t. II, p. 79-80.)

  [12] Etienne Gabriau de Riparfond, inscrit, dès le 13 juin 1661, au
    tableau des avocats. Une de ses plus belles affaires fut, comme on
    peut le voir dans le _Journal des Audiences_ (t. III, p. 101), celle
    des religieuses de Sainte Catherine, qu’il gagna. Il mourut en 1724,
    léguant aux avocats du Parlement sa bibliothèque, qui fut pour la
    leur un premier fond. On peut consulter sur lui l’_Histoire des
    Avocats au Parlement_ de Fournel, t. II, p. 408; et _la Bibliothèque
    du Poitou_ par Dreux du Radier, t. IV, p. 335. La Conférence des
    avocats possède son portrait en robe rouge. C’est un don de Dupin
    aîné en 1831.

  [13] L’abbé Goujet (_Biblioth. franç._, t. II, p. 367) nous le donne
    comme ayant eu une grande réputation, mais qui s’effaça vite.

  [14] Louis de Nivelle, inscrit au tableau depuis le 2 décembre 1657:
    «Il peut, dit l’abbé Goujet (_id._, p. 369), passer pour très-bon
    avocat. Il est savant, il a du génie et du bon sens.» D’Aguesseau ne
    l’appeloit que le grand Nivelle. C’est lui qui avoit défendu la
    Brinvilliers. Ses plaidoyers n’ont pas été conservés, ce qui étoit
    un des regrets de l’abbé Goujet. (_Id._, p. 330.)

  [15] Jacques-François Dumont, avocat inscrit, depuis le 4 juillet
    1667. L’abbé de Villiers, dans une note de sa 3e Epître, livre Ier,
    le cite comme un des célèbres. Il vient de blâmer Lulli de ce qu’il
    fait chanter la tragédie au théâtre, et il ajoute:

        Si cet usage plaît, s’il est autorisé
        Chevalier ou _Dumont_ pourroit s’être avisé
        En plaidant les moyens que sa partie expose
        D’en mettre en airs les droits, et de chanter sa cause.

    Dans l’affaire Beausergent, qui fut célèbre en 1689, il avoit plaidé
    contre Beausergent. (Guyot de Pitaval, _Causes célèbres_, t. III, p.
    194-196.)--Quand il mourut en 1718, _le Mercure_ du mois de mai lui
    consacra un article, p. 187, où on lisoit qu’il fut «pendant
    cinquante ans l’aigle du Palais.»

  [16] Il ne plaidoit pas, il s’en faut, que les affaires
    ecclésiastiques. Nous le trouvons, en effet, le 18 février 1677,
    dans une cause dont l’espèce étoit au moins scabreuse. C’est celle
    du cas d’impuissance du marquis de Langey, de laquelle il résulta
    que défense fut faite aux Juges d’ordonner pour ces sortes
    d’affaires «la preuve par le Congrès.» Pageau plaida pour le
    marquis, Blondeau et Nouet pour la partie adverse. (_Journal des
    Audiences_, t. III, p. 195.) D’après une note de Brillon, dans son
    _Théophraste moderne_ (1701, in-12), c’est l’avocat Nouet qu’il y
    auroit peint sous le nom de Téocrine dans ce passage flatteur:
    «Téocrine n’a que sa chevelure naturelle, une robe très-simple,
    point de laquais, point de carrosse, mais beaucoup de talent pour sa
    profession.» D’Aguesseau cita Nouet comme un modèle dans sa
    mercuriale de rentrée, en 1699.

  [17] La protection de son frère l’abbé Sachot, grand directeur de
    dévotes, dont il est parlé dans les _Mémoires_ de l’abbé Legendre
    (p. 59-60), l’avoit poussé vers ces affaires ecclésiastiques. Comme
    Nouet, il ne s’y tenoit pas exclusivement. Il plaida par exemple,
    mais sans succès, pour la duchesse de Mazarin contre son mari, dans
    un procès dont nous reparlerons à la note suivante.

Quelques uns de ces celèbres sont particulièrement habituez au grand
Conseil, comme Mrs de Monchant, Cloître Saint Mederic. Vaillant, rue de
Savoye. Eurard, Cloître Saint Germain l’Auxerrois[18]. Laurent, ruë de
la Monnoye. Chaudet, rue Quinquempoix. Doremieux, rue Bailleul, etc. Ou
à la Cour des Aydes, comme Mrs Merlin, ruë de la Verrerie. De Tessé, rue
de la Colombe. Martinet[19], rue Hautefeuille, etc. Ou au Châtelet,
comme Mrs Maurice, ruë des Prouvaires. Guérin, rue S. Martin.
Gondault[20], rue de Glatigny. Polliac, ruë de la Bucherie. Barbier, rue
du Platre[21], etc.

  [18] Lisez Errard (Claude). Inscrit au tableau, depuis le 24 août
    1664. Il gagna, en 1691, la cause des trois frères aînés Le Boultz,
    que le père avoit réduits à leur légitime, pour avantager leur
    puîné; mais son triomphe fut l’affaire du duc et de la duchesse de
    Mazarin, dont nous venons de dire un mot. Il plaida pour le duc
    contre sa femme, l’intrigante Hortense Mancini, qu’il voulut qu’on
    déclarât à cause de sa conduite déchue et privée de sa dot. Il
    demanda aussi que provisoirement elle fût mise au moins dans un
    couvent, ce que lui accorda la Cour. On sait que Saint-Evremond lui
    répliqua par un _Memoire_ qui est dans ses _Œuvres_ (t. V, p. 355,
    et VI, p. 500). Les plaidoyers d’Errard furent recueillis en 1694.
    (_Journal des Savants_, 16 avril 1695.)

  [19] Nous ne savons rien de lui, sinon qu’il étoit bel esprit, et
    qu’il fit cette épigramme sur le petit Jacques Corbin qui avoit
    plaidé sa première cause à quatorze ans:

        Vidimus attonito puerum garrire senatu.
          Bis pueri, puerum qui stupuere senes.

  [20] Edme Condault et non Gondault, avocat depuis le 31 janvier 1659.

  [21] C’est le père de l’avocat Edmond-Jean-François Barbier, dont on a
    un si curieux _Journal_ sur la Régence et le règne de Louis XV. Il
    ne logeoit pas encore rue du Plâtre, mais rue Galande, quand son
    fils étoit né le 16 janvier 1689.




SECRETAIRES ET GREFFIERS DU CONSEIL, DES COURS SOUVERAINES, ET DES
JURISDICTIONS SUBALTERNES.


_Les Secretaires des Finances sont_

Pour le quartier de Janvier, M. Roüillet, rue de Grenelle à Saint
Germain des Prez.

Pour celui d’Avril, M. Coquille, ruë Sainte Croix de la Bretonnerie.

Pour celui de Juillet, M. Ranchin, rue des petits Champs.

Et pour celui d’Octobre, M. de Laistre, ruë Saint Honoré près la ruë des
Prouvaires.


_Les Secretaires et Greffiers du Conseil privé sont_

Pour le quartier de Janvier, M. Planton, rue Saint Honoré prés les
Feüillans.

Pour celui d’Avril, M. Dumas, rue Beaubourg.

Pour celui de Juillet, M. des Vieux, Cloître Saint Germain l’Auxerrois.

Et pour celui d’Octobre, M. Pecquot, rue des Blancs Manteaux.


_Les Commis au Greffe du Conseil privé sont_

Pour le quartier de Janvier, M. Langlié, rue du grand Chantier.

Pour celui d’Avril, M. Danirelle, rue Pastourelle.

Pour celui de Juillet, M. Akaquia[1], rue des deux écus.

  [1] Ce nom bizarre n’étoit que la traduction grecque de celui de
    «Sans-Malice.» C’est un médecin de François Ier, qui l’avoit le
    premier traduit ainsi, et ses descendants, dont étoit sans doute le
    commis au greffe, qui figure ici, l’avoient gardé sous cette forme.

Et pour celui d’Octobre, M. Chesnelon, rue Pastourelle.


_Les Greffiers gardes Sacs[2] du Conseil privé sont_

  [2] C’est-à-dire «porte-dossiers.» On mettoit alors les pièces de
    procédure en des sacs pendus à la ceinture.

Pour le quartier de Janvier, M. Sifflet.

Pour celui d’Avril, M. Denis.

Pour celui de Juillet, M. de la Nouë.

Et pour celui d’Octobre, M. Duc, tous quatre ruë Saint André.

Les Greffiers Conservateurs des Hipothèques ont leur Bureau ruë de la
Verrerie.




GREFFIERS DU PARLEMENT.


_A la grand’Chambre, sont_

Mrs du Tillet, Place Roiale; Decaiman, Cloître Notre Dame; et
Dongois[1], Cour du Palais.

  [1] C’est le neveu de Boileau, dont nous avons déjà parlé plus haut.


_A la Tournelle Criminelle._

Mrs Dravet, Cloître Notre Dame; de la Baune, ruë Thibaut Thodé; Amiot,
et Lancluse, rue de la Calandre.


_A la première Chambre des Enquêtes._

M. Mirebaut, à l’Hôtel des Ursins[2].

  [2] Démoli à la fin du XVIIIe siècle, et remplacé par trois rues: la
    rue Haute, la rue du Milieu, la rue Basse des Ursins. Il devoit son
    nom au prévôt des Marchands, Juvénal des Ursins, à qui la ville
    l’avoit donné. Depuis longtemps, à l’époque dont il est question
    ici, on l’avoit divisé en appartements, occupés presque tous par des
    gens du Palais: Magistrats, greffiers, avocats. Sur le tableau de
    ceux-ci, pour 1693, on en compte trois dans cet hôtel. On a su par
    Valincourt que Racine y logeoit, lorsqu’il fit _les Plaideurs_; il y
    avoit pu observer ses principaux types sur place.


_à la Deuxième._

M. Joüannet, Cloître Notre Dame.


_à la troisième._

M. Menet, ruë Cristine.


_à la quatrième._

M. le Roi, ruë Pavée, près l’Hôtel de Bourgogne[3].

  [3] L’hôtel de Bourgogne, occupé alors par le théâtre de la Comédie
    Italienne, s’étendoit de la rue Mauconseil, où se trouvoit sa
    principale entrée, jusqu’au derrière des maisons de la rue
    Pavée-Saint-Sauveur. Ce qui en reste, le curieux donjon de
    Jean-sans-peur, se voit encore dans la cour de l’une des maisons de
    cette rue.


_à la cinquième._

M. Masson, rue de la Calandre.


_à la première Chambre des Requestes du Palais._

Mrs Dupuis, rue Hautefueille, et Anet, rue Sainte Croix de la
Bretonnerie.


_à la deuxième._

M. Aubry, rue des Noyers.


_A la Cour des Aydes._

M. Olivier, Isle Notre Dame.


_Au grand Conseil._

M. le Normand, Greffier en Chef, ruë des Vieux Augustins.

M. Guichard, Greffier Plumitif, dans l’enclos du grand Conseil[4].

  [4] C’est-à-dire dans la cour de l’hôtel d’Aligre, rue Saint-Honoré,
    où nous avons vu, plus haut, que siégeoit le grand Conseil.

M. Presteville, Greffier garde Sacs, rue des Prouvaires.


_Aux Requestes de l’Hotel._

M. le Mazier, ruë de Bièvre[5].

  [5] Il étoit parent de la famille Vitart, dont il est tant parlé dans
    la correspondance de Racine, et, par elle, il se trouvoit allié à
    celui-ci. L’avocat Le Mazier, qui n’étoit pas sans causes, car
    mauvaises ou bonnes il les plaidoit toutes, pour n’en pas gagner
    une, étoit de ses parents. On ne le connoît plus que par les vers où
    Boileau s’est moqué de lui. (_V._ la Sat. Ire et l’Epître II.)


_A la Chambre des Comptes._

M. Richer, à la pointe Saint Eustache.


_A la Cour des Monnoyes._

M. Hérardin, à l’Hôtel de la Monnoye.


_A la Prevôté de l’Hotel._

M. Baubiere Dechars, ruë Platriere.


_Au Châtelet._

M. Josse, Greffier en Chef, vieille ruë du Temple.


_Secretaires du Chatelet._

Mrs Doyard, ruë de la Tixeranderie, de la Rene, rue Beaubourg, Audinot,
et Coligny, vieille rue du Temple.


_Au Parc Civil[6], et Prévoté._

  [6] C’est ce qu’au Parlement on appeloit «le parquet.»--«On dit,
    lisons-nous dans le _Dictionn. de Trévoux_, qu’une chose a été faite
    et adjugée au parc civil du Châtelet: pour dire à l’ordinaire, à
    l’issue de l’audience.»

Mrs Moreau, place du Chevalier du Guet, et de Castes, ruë Neuve Saint
Mederic.


_Pour les Déposts et Sentences sur Production de Parties._

Mrs Claude Tartel, rue des Assis, Charles Tartel, près l’Hotel de Ville,
et Tixeran, rue de Montmorancy.


_Pour l’Expédition des Sentences sans production._

Mrs Menessiers, Cloître des Bernardins, du Four, ruë Saint Honoré,
Tartel, rue des Assis, et Forbet, vieille rue du Temple.


_Pour les Deffauts aux Ordonnances._

Mrs Philipe Luce, rue Saint Martin, et Estienne Luce, rue Quinquempoix.


_Pour les Decrets._

M. François pour M. Favier sur le Quay de la Mégisserie.


_Pour les certifications des criées._

Mrs Magny, rue Hautefeüille, et Luce, ruë Quinquempoix.


_A la Chambre Civile._

Mrs Gaudion, vieille rue du Temple, Dupuis, ruë des Prouvaires, Nicolas
et Pierre Tauxier, rue de la Tixeranderie.


_Au Criminel._

Mrs Galliot, ruë Saint Thomas du Louvre, du Jardin, ruë de Bièvre,
Pariset, rue Saint Germain l’Auxerrois, et Lodet, ruë Pavée, prés
l’Hôtel de Bourgogne.


_Pour les Inthimations._

M. Garnier, ruë du Figuier.


_Pour les Affirmations de Voyages[7]._

  [7] Cet office avoit été créé par l’ordonnance de 1667, à l’effet de
    donner aux plaideurs venus de province acte de leurs voyages ainsi
    que du temps de leur séjour, et de leur permettre, s’ils gagnoient
    leur cause, de pouvoir faire taxer séjour et voyage.

M. Gaucher, ruë Trainée, près Saint Eustache.


_Pour le Greffe Criminel de Robe-courte._

M. Casson, ruë des Menetriers.


_Pour M. le Prevost de l’Isle._

M. le Marié, ruë des Anglois.


_Pour M. le Juge Auditeur._

M. Thiery, ruë Saint Martin.


_Pour la Geolle._

M. Vallon, ruë de la vieille Monnaye.


_Garde Scel._

Qui signe pour les Notaires interdits, et qui reçoit et scelle les
Oppositions aux Décrets, et les Immatricules[8] des Notaires et
Huissiers. M. Quinot, ruë Thibaut-Thodé.

  [8] On appeloit ainsi les actes enregistrés.


_Pour le Sceel des Sentences du Chatelet et des Consuls._

M. le Cour, ruë de la Tixeranderie.


_Pour le Sceel des Expeditions des Notaires._

M... ruë Geoffroy-Lasnier.


_Au Trésor._

M. Gassot, ruë des Marmouzets.


_A l’Hotel de Ville._

M. Mitantier, à la Grève.


_A l’Amirauté._

M. Charrier, ruë Saint Jacques.


_A la Connétablie et Maréchaussée._

M. Lebert, ruë Galande.


_A l’Election._

M. Metayer, ruë des Blancs Manteaux.


_Eaux et Forêts._

Mrs Broquet, ruë de la Calandre, et le Noble, ruë Saint Bon.


_Au Bailliage du Palais._

M. Godin, ruë de la Calandre.


_Aux Consuls._

Mrs Verrier père et fils, Cloître Saint Mederic.


_A la Massonnerie._

M. Le Roy, ruë des Marmouzets.


_Au Bailliage du Temple._

M. Gilbert, au petit marché du Marais[9].

  [9] Il existe encore rue de Bretagne, mais sous le nom de «Marché des
    Enfants rouges», qui lui vient du voisinage d’un ancien hospice
    d’enfants, fondé par François Ier et supprimé en 1772. Il communique
    avec la rue de Beauce par la ruelle des Oiseaux, près de laquelle
    Mlle de Scudéry vécut les dernières années de sa vie. Cette ruelle
    s’étoit d’abord appelée «petite rue Charlot.» (Sauval, t. II, p.
    658.)




CONTRAINTES JUDICIAIRES.


On trouve les Huissiers Audianciers et autres de toutes les Cours et
Jurisdictions, au lieu et à l’heure de chaque Audiance, pour l’execution
des Arrests, Sentences, Décrets et Ordonnances des Magistrats et Juges
ordinaires, pour raison de quoy on aura recours à l’article de la
scéance des Tribunaux.

Les Huissiers du Grand Conseil ont un Bureau au pied du grand degré.

Les Barrières des Huissiers et Sergens du Chatelet, sont au marché neuf,
au petit marché Saint Germain[1], à l’aile du pont Marie, à la pointe
Saint Eustache, au coin Saint Jacques de l’Hôpital, au cimetiere Saint
Jean, à la pointe Saint Honoré[2], devant l’Abbaye Saint Martin, à la
place Maubert, ruë du petit Pont, ruë des Ecrivains.

  [1] Il étoit tout près de l’enclos de la foire Saint-Germain.

  [2] C’est-à-dire au carrefour de la rue Croix-des-Petits-Champs, de la
    rue de Grenelle et de la rue du Coq, aujourd’hui rue de Marengo. Le
    poste ou barrière des huissiers et sergents du Châtelet lui avoit
    fait donner le nom de «Barrière des Sergents», qu’il garda longtemps
    après que le poste eût été supprimé. L’enseigne des «Deux Sergents»,
    qui ne vient que de disparoître, le rappeloit encore, mais avec une
    singulière variante: Au lieu de deux recors, on y voyoit deux
    sergents de l’ancienne garde impériale!--On trouve au t. 58, p. 179
    de la _Collection Delamarre_, à la Biblioth. Nat., de curieux
    renseignements sur les _Barrières des Sergents_, depuis 1551 jusqu’à
    1698.

Le Bureau des Huissiers à cheval[3] est sur le quay de la Mégisserie où
l’on peut recouvrer leur liste, et où l’on peut apprendre le temps de
leur départ pour chaque Province et Département.

  [3] Comme les huissiers au Parlement, dits «huissiers à la chaîne»,
    ils pouvoient instrumenter dans tout le royaume, et pour cela ils le
    prenoient de très-haut avec les autres, les simples huissiers à
    verge, _car_, dit le Marquis du _Joueur_ de Regnard:

        Car huissier à cheval, c’est presque chevalier.

    Un seul jour dans l’année, le lendemain de la Trinité, tous,
    huissiers à verge, huissiers priseurs, huissiers à cheval, se
    confondoient dans une même cavalcade, pour aller faire visite au
    prévôt de Paris, au premier président, au lieutenant civil, etc.
    Mercier s’en est moqué dans son Tableau de Paris, et Lemierre encore
    mieux au chant VIe de son poëme des _Fastes_:

        Voyez-vous s’avancer, couverts de noirs manteaux,
        Ces roides écuyers juchés sur leurs chevaux,
        Cavalcade peu faite aux marches régulières,
        Qui vient parodier nos brigades guerrières,
        Et tenant mal les rangs, plus mal les étriers,
        Saisit au moindre choc le crin de ses coursiers.

Les Six vingt Huissiers seuls reservez d’entre les Huissiers à Verge par
Edit du mois de Février 1691, pour la fonction de Priseurs et Vendeurs
de biens meubles en la Ville, Fauxbourgs et Banlieu de Paris, ont leur
bureau dans la Cour du Grand Chatelet, et sont compris dans la liste
suivante:

Pierre Blanchans, ruë Saint Denis proche Saint Leu.

Jacques Taconnet, rue de l’Arbre-secq.

Antoine Bruneau, ruë Saint Denis devant le Sepulchre.

Alexandre Vaubelin, ruë de la Boucherie.

Gilles la Hogue, rue Saint Martin.

Jean Divry, ruë de Bièvre.

Claude de Cay, place Maubert.

Thomas Beccasse, rue des Noyers.

Pierre le Gagneur, rue du Temple.

Louis Malbeste[4], ruë du Plâtre proche la ruë des Noyers.

  [4] Nous retrouvons ce nom grotesque porté du temps de Beaumarchais,
    par un avocat, qui sans doute descendoit de l’huissier nommé ici. On
    sait quel parti l’auteur de _Figaro_ en tira pour un des effets les
    plus comiques de ses _Mémoires_ contre Goezmann: «Il n’est rien,
    avons-nous dit dans la _Notice_, mise en tête de l’édition de ses
    _Œuvres_ (1876, gr. in-8, p. XXI), il n’est rien qui ne lui soit bon
    pour mettre les rieurs de son côté. Marin s’est-il moqué du nom du
    pauvre avocat Me Malbête, le seul que Beaumarchais ait trouvé pour
    signer son _Mémoire_, comme l’exige la loi; il lui retourne de la
    plus plaisante façon le nom dont il se moque: «le Gazetier de
    France, dit-il, se plaint de la fausseté des calomnies répandues
    dans un libelle signé Beaumarchais-Malbête, et il entreprend de se
    justifier par un petit manifeste signé Marin, qui n’est pas
    Malbête.»

Nicolas Fontaine, ruë Neuve Saint Mederic.

Jean Brunet, rue de la Tonnelerie.

Simon Monet, ruë Galande.

Pierre Vaillant, rue Saint Denis proche les Saints Innocens.

Guillaume Fournier, porte Saint Jacques.

Pierre Bertelot, rue des Boucheries, fauxbourg S. Germain.

Simon Mozac, _Fieffé_[5], rue vieille Monnoye.

  [5] On appeloit huissier _fieffé_ celui qui avoit son office à charge
    de redevance, ce qui le rendoit héréditaire.

Laurent de la Place, ruë Saint Antoine.

François le Tourneur, rue de Bretagne.

Michel Faguet, ruë Saint Pierre aux Bœufs.

Alexandre Arnoult, ruë Parcheminerie.

Antoine le Moine, rue Saint Martin.

Charles Pinard, rue de la Huchette.

Pierre Hargenvilliers, rue Galande.

Pierre de Noleson, ruë Saint Antoine, devant la ruë des Barres.

François Clozier, rue Tixeranderie.

Brice Fleury, _Fieffé_, ruë du Crucifix Saint Jacques.

Antoine Marais, rue S. Antoine.

Nicolas Gaspard Boucault, cloître Saint Martin.

Jacques le Roy, ruë Tixeranderie.

Philippes Menard, ruë des Lombars.

Nicolas Gasté, rue Saint Antoine prés les Jésuites.

Bonaventure Guilliot, rue Saint Martin devant la rue aux Ours.

Jean Manet, rue des vieilles Audriettes.

Benjamin le Maistre, rue Aubri-boucher.

Jacques Giroux, rue Darnetal.

Laurent Mazier, rue Montmartre.

Henry Charpentier, rue Aubri-boucher.

Jacques Duval, à la Ville-neuve.

Guillaume Dupré, ruë de Bery, au Marais.

Nicolas Bauldry, rue des Barres.

Maurice Poteron, rue Crucifix Saint Jacques.

Michel Lyon, ruë vieille Monnoye.

Jean Caron, rue des Barres.

Pierre Langlois, ruë Saint Louis dans Lisle.

Philippes Veron, rue du Four Saint Honoré.

Pierre Desvaux, rue aux Ours.

Pierre Pinchon, rue Saint Jacques à l’entrée.

Louis Jacquemarc, rue Quinquempoix.

Pierre de Bréquigny, ruë Thibaut Thodé.

Jean Loyseau, rue des Boucheries Saint Germain.

Gilles Fournier, rue Saint Germain, attenant la Gabelle.

Nicolas Taconnet, rue de l’Arbre Secq.

Pierre Menne, rue de la Vannerie.

Jean Guesdon, place Maubert.

Antoine Dainnal, rue de la Savonnerie.

Charles Jacob, rue des Petits Champs.

Nicolas Deon, _Fieffé_, rue Tixeranderie.

Mathieu Pelouard, derriere le Palais Royal.

Jean Prevost, ruë Galande.

Jean Arnoult, ruë Saint Louis, prés Saint Roch.

Jean Mouillefert, ruë S. Denis.

Louis Raoult, ruë des Barres.

Louis Colas, vieille ruë du Temple.

Gabriel Nicolas Beauval, devant S. André des Arts.

Charles Baignard, rue S. Antoine, prés la Barrière.

François Traffons, ruë Bourtibourg.

Pierre Chambon, _Fieffé_, ruë Pierre au Lard.

Jean Dudoigt, rue des Tournelles, prés la porte S. Antoine.

Michel Roger, cloître S. Opportune.

Thomas Mandoüyt, porte S. Michel.

Jean du Brecq, ruë de la Calande, prés le Palais.

Glaude de la Haye, rue Ste Marguerite, devant l’Abbaye S. Germain.

Jacques Gohier, ruë de la Tixeranderie.

Pierre Tauxier, ruë de la petite Truanderie.

Yves de Boucquainville, rue S. Antoine, près l’Hôtel de Sully.

Hubert le Moyne, rue S. Honoré.

Dominique Theventin, ruë S. Antoine, devant la ruë Geoffroy Lasnier.

Noel Thibault, ruë de la Verrerie.

Jacques Martin, rue Quinquempoix.

François du Rot, rue des Lombards.

Pierre Morin, ruë Bourtibourg.

Joseph Alexis le Doyen, rue Tixeranderie.

Estienne Trilliau, rue Beaubourg.

Nicolas Cabaille, rue Madame.

Nicolas Remy, rue S. Denis.

Jean Henneguy, rue de la Calandre.

Estienne Arondeau, _Fieffé_, rue S. Jacques.

Jean Huvellier, rue Dauphine.

Sébastien Huré, rue des Arcis.

Gilles de Bauve, rue S. Honoré.

Pierre René Patin, rue S. Martin.

Jean Sebert, devant le Fort l’Evesque.

Pierre Paillet, rue S. Honoré.

Jean Maisondieu, rue des Noyers.

Pierre Massé, _Fieffé_, rue des Boucheries Saint Germain.

Gilbert Mouillard, ruë de la vieille Orangerie.

Jean Edme Ravillonnet, rue S. Antoine.

Jacques Robert de Cercellier, rue du Roi de Sicile.

Jacques Barbarin, rue Coustellerie.

Claude Dépoigny, rue Saint Martin.

Jean Coucet, rue des Mauvaises Parolles.

Leonard de Champagne, rue de la Bouclerie.

Joseph François le Normand, Pont Notre Dame.

Noel Avenet, ruë aux Maires.

Jacques Rioult, Marché aux Poirés.

Nicolas Henrion, ruë Michel le Comte.

Jean Simon Mozac, rue des Lombards.

Charles Coignet, rue de la Licorne.

Charles Flattier, ruë S. Antoine, prés la ruë Percée.

Charles Cappé, ruë S. Louis Isle Notre Dame.

Pierre le Gros, place de Grève.

Jean Baptiste Destrehan, ruë S. Antoine.

Nicolas Duval, devant S. Pierre aux Bœufs.

Pierre Brisset, rue du Mouton.

Claude Ronjault, nommé par Sa Majesté, au lieu d’Estienne Marlet.

Les particuliers pourroient se pourvoir en tout temps à l’ordinaire
contre ceux d’entre les Huissiers à cheval et à verge du Châtelet qui
auroient malversé; mais on peut plus sommairement et sans frais en
porter plainte à M. le Lieutenant Civil, qui tient scéance à cet effet
le surlendemain de la Trinité depuis huit heures du matin jusqu’à midy,
et qui les fait appeller l’un après l’autre selon l’ordre de leur
reception, pour repondre aux plaintes qui sont faites contre eux, et sur
lesquelles mondit Sieur le Lieutenant Civil fait droit sur le champ,
sans que l’Officier puisse se dispenser de satisfaire à sa condamnation;
premierement parce qu’il est obligé sous paine d’amande, de repondre à
l’appel de l’Huissier. Secondement, parce qu’il est mis en arrêt jusqu’à
ce qu’il ait satisfait. On peut encore dans le courant de l’année rendre
plaintes des malversations des Huissiers à cheval et à verge aux
Officiers de leur Communauté, qui s’assemblent tous les Dimanches matin,
dans le Cloître Ste Croix de la Bretonnerie.




BUREAUX PUBLICS.


Le Bureau General de la Douane est à l’Hôtel Seguier, ruë de Grenelle,
dont la basse-cour où entrent les Roulliers est dans la ruë du Boulloy.

Le Bureau General des Aydes est dans la ruë des Barres, derriere S.
Gervais, à l’Hôtel de Charny[1].

  [1] Il s’appeloit d’abord _Hôtel des Barres_, comme la rue, à cause
    des _Moulins des barres du Temple_, qui étoient auprès sur la Seine.
    Le percement de la rue Louis-Philippe en emporta une partie, et le
    reste fut démoli vers le même temps. Le bureau des Aides ne quitta
    l’hôtel de Charny qu’un peu avant la Révolution. Il fut alors
    transféré rue de Choiseul dans un vaste bâtiment où nous avons vu
    l’administration de l’Enregistrement et des Domaines.

Le Bureau Général des Fermes du Tabac est ruë Betisy, à l’Hotel d’Anjou.

Le Bureau Général pour la Marque des Chapeaux est ruë neuve Saint
Mederic[2].

  [2] «Dans la rue Sainte-Croix de la Bretonnerie.» (Edit. 1691, p.
    7.)--Sans cette marque, les chapeaux de castor étoient considérés
    comme contrebande. Elle n’avoit été qu’un prétexte à l’établissement
    d’offices de marqueurs, achetés surtout par des chapeliers enrichis.
    (_Correspond. des Contrôl. génér._, nº 767.) En 1694, elle fut
    supprimée à Lyon, et remplacée par une augmentation des droits de
    douane sur les chapeaux. (_Id._, nº 1372.)

Les Bureaux des Papiers et Parchemins timbrez sont dans la Cour de la
Moignon[3], ruë Galande, ruë de Bussy, ruë S. Germain l’Auxerrois[4],
ruë des petits Champs, ruë de la Vannerie, et ruë des Barres, à l’Hotel
de Charny.

  [3] «Cour neuve du Palais.» (Edit. 1691, p. 7.)

  [4] «Rue des Fossés-Saint-Germain-l’Auxerrois.» _Id._--Les parchemins
    et papiers timbrés constituoient une sorte de ferme, dont à la fin
    du règne de Louis XIV le fameux Deschiens fut le principal traitant,
    ce qui lui valut cette épigramme citée par Jamet dans ses
    _Stromates_, t. II, p. 1797:

        On l’a toujours bien dit le papier souffre tout,
        Et, quoi que sa candeur marque son innocence,
        Le Roi lui fait porter les armes de la France,
        Et le donne à Deschiens qui le barbouille tout.

Le Bureau des petits Domaines pour les droits des places et eschoppes
des lieux publics, est ruë Saint Germain l’Auxerrois au coin de la rue
Thibaut Thodé.

Les Bureaux du Contrôle des Exploits, sont rue Galande[5], cour de la
Moignon, ruë de la Poterie, ruë de Bussy, ruë d’Orléans, ruë du petit
Lion, ruë Saint Antoine, ruë du Monceau Saint Gervais et dans l’enclos
du grand Châtelet.

  [5] A la suite dans l’édit. précédente, p. 7: «Cul de Sac de la foire
    Saint-Germain.»

Le Bureau de M. Bertin, Receveur Général des Parties Casuelles[6], est
rue neuve Saint Augustin.

  [6] On appeloit «parties casuelles» les droits de finance que devoit
    payer annuellement tout détenteur d’un office vénal non héréditaire,
    s’il vouloit le conserver à sa veuve et à ses enfants.--Nous
    retrouverons Bertin qui en étoit alors le trésorier, parmi «les
    fameux curieux.»

Le Bureau général des Chevaux de renvoy et de louage est à l’Hotel de
Sens[7], prés l’Ave Maria.

  [7] Nous en parlerons plus loin, à propos du coche de Lyon qui en
    partoit.

Le Bureau de la Compagnie des Indes Orientales est dans la rue Pavée,
prés[8] l’Hôtel de Bourgogne[9].

  [8] «Derrière», édit. 1691, p. 61.

  [9] La Compagnie des Indes Orientales avoit été créée par Colbert pour
    faire le commerce avec les côtes de l’Indoustan. Elle avoit le
    privilége exclusif des toiles fines des Indes, peintes ou blanches,
    mais toutes soumises à la _marque_, sous peine d’être saisies et
    brûlées comme marchandises de contrebande (ordonnance du 8 février
    1687). Ce commerce se faisoit souvent par échanges: pour les toiles
    des Indes importées, on exportoit nos draps du Languedoc.
    (_Correspond. administr. de Louis XIV_, t. III, p. 654 et 660.)

Celui des Indes Occidentales[10] est dans la rue Saint Martin, devant
Saint Julien des Menêtriers.

  [10] La Compagnie des Indes Occidentales commerçait avec l’Amérique,
    où nous possédions alors le Canada, l’Acadie, Terre-Neuve, la
    Louisiane. Son commerce se faisoit surtout par les navires de
    Saint-Malo, et exploitoit de préférence les peaux de castor et les
    matières d’or et d’argent. (_Correspond. des Contrôleurs généraux_,
    nº 665.)--C’étoit, comme l’autre compagnie, une création de Colbert,
    mais toutes deux, depuis sa mort, étoient bien déchues. (Isambert,
    _Anciennes lois françoises_, t. XVIII, p. 35, 38, et 211.)

Le Bureau du Voier du Roi est dans la rue de Grenelle, quartier Saint
Honoré.

Celui de la Manufacture des Buffles est ruë Neuve Saint Mederic, chez M.
Jabac[11].

  [11] Il s’agit des peaux de buffles préparées, dont on faisoit pour
    l’armée des juste-au-corps, des colletins, etc. Jabach, que nous
    retrouverons plus loin, avoit établi à Corbeil, pour leur
    préparation, la meilleure manufacture qu’il y en eût en France,
    aussi n’est-il pas étonnant qu’elle eût son bureau chez lui, à
    Paris: «Celle de Corbeil, lisons-nous dans le _Dict. univ. du
    Commerce_ de Savary, t. I, col. 1132, est la plus considérable, et
    les peaux qui s’y apprêtent sont réputées les meilleures. On en doit
    l’établissement au sieur Jabac, natif de Cologne, qui les avoit
    poussées à la dernière perfection.»

Celui de la Manufacture des Marroquins et Vaches rouges façon de Levant
est sur le Quay de l’Ecolle[12].

  [12] C’est sans doute «la manufacture de maroquin et de peau de
    chagrin», dont la comtesse de Beuvron avoit obtenu le brevet, vers
    le même temps. (_Corresp. administ. de Louis XIV_, t. III, introd.
    p. LV.)

Celui des Jurez Crieurs est rue Neuve Saint Médéric.

Celui des Vendeurs de foin[13] est sur le Quai des Ormes.

  [13] Leur vrai titre étoit «Juré peseur et compteur de la marchandise
    de foin», comme on le voit par une épitaphe que rapporte M. Cocheris
    dans son édit. de l’_Histoire du Diocèse de Paris_ de l’abbé Le
    Beuf, in-8, t. I, p. 238.

Les Commissionnaires Facteurs de toutes marchandises ont des Bureaux ruë
de la Mortellerie, sur le port de la Grève, sur le quay de l’Ecole, etc.

Les Jurez Mouleurs et Aides Mouleurs de Bois[14], ont aussi leurs
Bureaux par tout où l’on fait commerce de bois à bruler, quay de la
Grève, quay de la Tournelle, quay de l’Ecole, quay de la Grenouillière,
porte Saint Antoine, etc.

  [14] Ces sortes d’offices datoient du XIVe siècle. Il existe, en
    effet, une ordonnance de Charles VI, qui établit «quarante jurés
    compteurs et _moleurs_ de bois.» Leur fonction consistoit à faire
    mesurer dans un cercle de fer, appelé _mole_ ou _moule_, le bois à
    brûler, qui se vendoit sur les ports. Ce sont les charges dont on se
    moqua le plus, surtout lorsque, par expédient de finances, elles se
    multiplièrent sous Louis XIV: «--Vous aimez les titres, dit
    Colombine dans la farce des _Chinois_ jouée au théâtre Italien en
    1692, et si l’on n’y tient la main, vous vous mettrez de pair avec
    _les mouleurs de bois_.» (Acte IV, scène 2.)--Ils ne tardèrent pas à
    être supprimés en province, mais il fallut que les villes payassent
    leur suppression. (_Correspond. des Contrôl, génér._, nos 1564 et
    1573.) Ils durèrent plus longtemps à Paris. Au mois de juillet 1725,
    on parla même d’en créer de nouveaux. (_Journal de Math. Marais_, t.
    III, p. 208.)--C’est par délégation que la charge s’en exerçoit. On
    s’explique ainsi comment Philippe Caffiéri, père du grand artiste, à
    qui l’on doit les admirables bustes du théâtre Français, put être à
    la fois «sculpteur du Roy, et mouleur de bois», ainsi qu’on le voit
    sur son acte de mort, en date du 7 sept. 1716. (Jal, _Dict. crit._,
    p. 303.)

Les Jurez Mesureurs et Controlleurs de grains et farines, en ont à la
Halle et sur les quais de l’Ecole et de la Grève.

Le Bureau des Commissaires Controlleurs de la Buche, est devant le
pont-neuf du côté de la Samaritaine[15].

  [15] Pour tous ces «officiers sur les ports et quais» se trouve un
    curieux dossier dans la collection des papiers Delamarre, aux _mss._
    de la Biblioth. Nat., t. 153, fol. 13, etc.--Ceux qui avoient
    qualité de mouleurs et aides-mouleurs de bois, dont il est parlé
    dans la note précédente, exerçoient, ou plutôt faisoient exercer,
    principalement au quai de l’Ecole. C’est là, plus encore qu’à la
    Grenouillère--aujourd’hui le quai d’Orsay--qu’avoient lieu les
    grands arrivages de bois à brûler. Corbinelli du _Pédant joué_ de
    Cyrano ne va pas autre part pour acheter les meilleurs cotrets.

Les Jurez Controlleurs de Vins, Cidres et autres Boissons, ont leurs
Bureaux, rue Frementeau[16] et sur le Quay des Célestins.

  [16] C’est-à-dire Froidmanteau ou Fromenteau.

Il y a au même lieu un Bureau pour les déclarations des marchandises qui
doivent les droits à la Doüanne.

Les Jurez Courtiers de Vins ont leurs Bureaux sur le quay de la
Grève[17].

  [17] Ils faisoient l’essai des vins dans les caves mêmes de l’Hôtel de
    Ville.

Celui des nouveaux Officiers Gardes batteaux et Metteurs à bord, est sur
le même quay et pareillement celuy du Domaine et Barrage.

Celuy des droits du Poisson de mer frais, sec et salé, est sur le quay
des Celestins.

Au même lieu est le Bureau des droits qui se levent sur les Cendres,
Soudes et Gravelées.

Le Bureau des Marchands Bouchers est sur le port de la Grève devant la
place aux veaux[18].

  [18] C’est-à-dire sur la gauche de la Grève, vers la rue de la
    Tannerie, où s’étoit tenu en effet le Marché aux Veaux, jusqu’en
    1646, époque où il fut transféré quai des Ormes. Son ancien
    emplacement fut appelé «Vieille place aux Veaux.»




ADMINISTRATION DES HOSPITAUX


_Gouverneurs et Administrateurs de l’Hotel Dieu et des Incurables._

Monseigneur l’Archeveque de Paris, à l’Archeveché.

Monseigneur le Premier Président, Cour du Palais.

Monseigneur le Premier Président de la Chambre des Comptes, vieille ruë
du Temple.

Monseigneur le Premier Président de la Cour des Aydes devant les
Capucins du Marais.

Monseigneur le Procureur Général, rue Barbette.

M. de la Reynie, rue du Boulloy.

M. de Fourcy, rue de Jouy.

M. le Pelletier, vieille rue du Temple.

M. Chuppé, rue de l’Observance.

M. Acard, vieille rue du Temple[1].

  [1] Aux Archives de l’Assistance publique se trouvoit le procès-verbal
    de la prestation de serment, en la grand’Chambre du Parlement, des
    sieurs Accart, Choart, et Baussan, nommés, en 1673, gouverneurs de
    l’Hôtel-Dieu.

M. Guiloire, cul de sac Saint Dominique.

M. Champy, rue de la Harpe.

M. Petitpied, rue du Jour.

M. de Bragelonne, dans le Temple.

M. Goupy, rue Sainte Avoye.

M. Soufflot[2], rue des deux Ecus.

  [2] Il fut un des administrateurs de l’Hôtel-Dieu jusqu’en 1717. Il
    fit en 1707 un rapport, qui étoit aux Archives de l’Assistance
    publique, sur une rébellion au faubourg Saint-Germain «contre
    l’exempt et les archers préposez pour veiller aux fraudes de la
    boucherie de l’Hôtel-Dieu, pendant le caresme.» On sait que c’est la
    seule boucherie qui avoit à cette époque de l’année le droit
    d’ouvrir et de vendre. En 1717, comme l’un des doyens, il fut chargé
    de veiller à l’auto-da-fé des peintures licencieuses qui s’étoient
    trouvées dans le legs que M. de Callières avoit fait à l’Hôtel-Dieu
    de tous ses biens: «Sur ce qui a esté dit par M. d’Estrechy,
    lisoit-on dans une pièce des Archives, que parmy les tableaux de la
    succession de feu M. de Callières, il s’en est trouvé quatre
    représentant des nudités et des postures indécentes capables de
    blesser la pudeur et la modestie chrestienne s’ils estoient exposez
    en vente, la Compagnie a aresté qu’ils seront jettés au feu, en
    présence de Messieurs Soufflot et d’Estréchy.»

M. le Verrier, rue Percée.

M. Levêque de Vaugrineuse, rue Saint Martin.

M. Herblot, rue Saint Germain l’Auxerrois.

M. Marchand, rue Tictonne.

M. Destrichy[3], rue Bertin Poirée.

  [3] Lisez d’Estréchy. C’est le même qui est nommé dans la note
    précédente. En 1708, à l’époque d’une épidémie scorbutique à Paris,
    il fit une déclaration curieuse: «M. d’Etrechy a dit que si
    l’augmentation des malades venus à l’Hôtel-Dieu depuis quelques
    jours continue, il y en aura trois mil ou environ dans dimanche
    prochain.» (_Archives hospitalières_ par Léon Brièle, 1877, in-8, p.
    69.)

M. Clerambault, rue Jean Lointier.

M. Piquet, rue de la Tixeranderie.


_Receveur de l’Hotel-Dieu._

M. Perlan, ruë Saint Martin.


_Greffier de l’Hotel-Dieu._

M. Beaufort, Parvis Notre-Dame.


_Receveurs et Greffiers des Incurables._

M. Garilde, rue du Four S. Germain.

Le Bureau de l’Hotel Dieu se tient tous les Mercredis et les Vendredis,
depuis dix heures jusqu’à midi.

Il y a encore une autre scéance du même Bureau à l’Archeveché, tous les
Samedis aux mêmes heures.

Messieurs du Bureau prennent une sorte de vacance pendant les vacations
du Parlement, mais quelques uns ne laissent pas de s’assembler pour les
affaires urgentes une fois la semaine seulement, alternativement au
Bureau ordinaire et à l’Archeveché, le Vendredi au premier endroit et le
Samedi à l’autre, aux heures ci-devant marquées.


_Gouverneurs et Administrateurs de l’Hopital General._


CHEFS DE L’ADMINISTRATION.

Monseigneur l’Archevêque de Paris, Nosseigneurs les premiers Presidens
du Parlement, de la Chambre des Comptes et de la Cour des Aydes,
Monseigneur le Procureur Général, Monsieur de Fourcy et Monsieur de la
Reynie, aux adresses ci-devant marquées.


ADMINISTRATEURS ORDINAIRES.

M. Pajot, rue du Bac, aux Missions Etrangères.

M. le Vieux[4], cul de sac des Bourdonnois.

  [4] Quand les Hôpitaux et les Incurables firent banqueroute en 1689,
    il passa pour y avoir contribué par ses malversations. C’est sur
    cette banqueroute, d’où vint la ruine de tant de gens, qui avoient
    prêté aux hôpitaux leurs deniers à rentes viagères ou à _fond
    perdu_, que La Bruyère écrivit: «Le fonds perdu, autrefois si sûr,
    si religieux et si inviolable, est devenu avec le temps et par les
    soins de ceux qui en étoient chargés, un bien perdu.» _De quelques
    usages_, § 39.--Les _Clés_ disent qu’on chassa les administrateurs
    accusés de friponnerie. Le Vieux, quoiqu’elles le nomment, n’en
    étoit pas, puisque trois ans après nous le trouvons encore ici parmi
    les administrateurs de l’Hôpital général.

M. Meliand, rue Saint Loüis du Marais.

M. Pinette, à l’Oratoire du Fauxbourg Saint Michel.

M. le Caron, rue Bardubec.

M. Hourlier[5], rue des fossez saint Michel.

  [5] Nous le connaissons déjà comme bailli du Palais.--Le 14 août 1671,
    il prit part aux mesures adoptées pour donner des nourrices aux
    Enfants trouvés. Il émit alors une opinion intéressante sur la
    recherche des pères pour cette catégorie d’enfants: «Monsieur
    Hourlier, bailly du Palais, lisoit-on à cette date dans une pièce
    des _Archives hospitalières_, a dit qu’il avoit esté cy-devant rendu
    plusieurs sentences au Châtelet, portant condamnation contre
    plusieurs particuliers trouvés estre pères d’aulcuns enfans trouvez,
    lesquelles sentences n’ont point esté suivies d’exécution. A esté
    arresté qu’on fera ses efforts pour retrouver lesdictes sentences,
    et Monsieur le Procureur du Roy supplié d’en prendre soin.»

M. Blin, quay des Augustins.

M. Berthelot, près la place des Victoires[6].

  [6] C’est Berthelot l’aîné, que nous avons vu plus haut au chapitre
    des fermiers généraux des Monnoies. Devenu fort riche, il usoit bien
    de sa fortune, et s’étoit ainsi donné des droits à prendre place
    dans l’administration des Hospices. On lui dut en partie celui des
    Convalescents: «Il a esté dit, lisons-nous dans le _Récolement des
    archives hospitalières_ dressé par M. Brièle, que le prieuré de
    Saint-Julien estoit plus propre à cet hospice, et mesme y avoit esté
    destiné dès le commencement. On a dit aussi que M. Berthelot, qui a
    donné 60,000 livres et promis quarante autres mille livres, a
    témoigné n’avoir point d’attache pour le lieu.» (Janv. 1675.)

M. Petitpas, Parvis Notre Dame.

M. Husson, rue du Roy de Cicile.

M. Guilloire, cul de sac saint Dominique.

M. Rillart, près Saint Paul.

M. Petitpied, rue du Jour.

M. Briçonnet, près les Enfans Rouges.

M. de Bie, rue Bardubec.

M. le Bœuf, Isle Notre Dame.

M. le Febvre, près saint Sulpice.

M. Thieriac, près l’_Ave Maria_.

M. de Fremont[7], porte Gaillon.

  [7] Nous avons parlé de lui plus haut au chapitre des _Gardes du
    Trésor royal_.

M. Boucot[8], rue Hautefueille.

  [8] Il figure déjà plus haut parmi «les gardes des rôles des offices
    de France.»

M. David, cul de sac saint Sauveur.

M. Braquet, Cloitre Notre Dame.

M. Soubeiran, près l’Oratoire saint Honoré.

M. Gourdon[9], à l’Hotel de Guyse.

  [9] Il avoit prêté serment, en 1681, comme «receveur charitable de
    l’Hôpital général.»

M. Colin[10], Isle Notre Dame.

  [10] Il semble avoir été chargé des aumônes de Mme de Miramion pour
    les hospices: «Monsieur Colin, lisons-nous dans le _Récolement des
    archives hospitalières_, p. 138, a apporté 64 louis d’or, valant 903
    livres, que lui a donnés Madame de Miramion, procédés de la queste
    faicte à la Cour.» (1694, 28 avril.)

M. Badoulleau, rue des Prouvaires.

M. le Febvre, Cousture sainte Catherine.

M. Pirot, rue de Ventadour.




BANQUIERS POUR LES REMISES DE PLACES EN PLACES.


Messieurs le Couteux[1], ruë de la Tixanderie, pour Normandie, Bretagne
et païs étrangers.

  [1] Nom qui fut longtemps célèbre dans la banque. En 1773, nous
    retrouvons dans l’_Almanach d’indication_ de Roze de Chantoiseau:
    «Le Coulteux et Compagnie, rue Montorgueil, négociants en banque;
    une des plus anciennes maisons.» Roze disoit vrai, puisqu’alors
    cette maison existoit, nous en avons la preuve ici, depuis plus de
    quatre-vingts ans. Nous verrons tout à l’heure qu’elle remontoit
    encore bien plus haut. A l’époque de la Révolution, le chef de la
    famille, M. Le Coulteux de la Noraye, fut de la première
    municipalité de Paris, et son fils Le Coulteux de Canteleu, député à
    l’Assemblée constituante et au Conseil des Anciens, puis sénateur et
    pair de France. C’est lui qui fit bâtir, vers 1790, de la rue
    Montorgueil à la rue Montmartre, sur les terrains dépendant de sa
    maison de banque, toute une rue à maisons uniformes, à laquelle
    l’architecte Mandar, qui l’avoit construite, donna son nom. M. Le
    Coulteux en fut longtemps l’unique propriétaire. Voici ce que
    Berryer père, dans ses _Souvenirs_ (1837, in-8, t. II, p. 320), dit
    sur l’ancienneté des Le Coulteux: «C’étoit dans la banque de Paris
    une maison antique, une des plus anciennes de la bourgeoisie de
    Paris, dont l’existence remontoit sans interruption ni déviation en
    plus ni en moins, aux époques d’où dataient les Thibert, les
    Trubert, les Bouillerot, réputés les plus anciennes familles de la
    capitale.»

M. André Hebert, cul de sac de la rue Quinquempoix[2], pour les mêmes
lieux, et encore;

  [2] On l’appeloit aussi cul de sac de Venise, à cause du voisinage de
    la rue de ce nom, dans laquelle le comte de Horn, au plus fort de la
    crise du Système, assassina un agioteur dans le cabaret de l’_Epée
    de bois_. Ce sont les banquiers, logés alors en grand nombre rue de
    Venise et surtout rue Quincampoix--nous en trouverons un plus
    loin--qui avoient attiré de ce côté Law et tout son agio. Dancourt,
    en 1710, dans sa _Comédie des Comédiens_ (acte II, scène 9), fait
    lancer par Mezzetin un lardon contre ces banques: «Je connois,
    dit-il, un bonnetier de la rue Saint-Denis, et un banquier de la rue
    Quincampoix, qui, avec 10,000 francs, qui n’étoient pas à eux, ont
    trouvé moyen de se faire chacun cent mille écus qui ne leur
    appartiennent guère.»

Messieurs Hébert Frères, près saint Julien des Menetriers.

Et M. Petit, ruë du Four, quartier saint Honoré.

M. Michel Heuh, rue Mauconseil, aussi pour les Provinces de Normandie et
Bretagne, et encore pour tous les Etats d’Allemagne.

M. Pierre Heuh, rue saint Martin, pour les mêmes lieux.

M. Tourton, ruë de la Truanderie, aussi pour l’Allemagne et pour le
Lionnois.

M. Sorbiere, rue Quinquempoix, pour la même Province.

Et M. Michon, rue Aubry Boucher.

M. de Meuves, cul de sac de la rue des Bourdonnois, pour Allemagne,
Angleterre, Italie, Hollande, Lyonnois, Languedoc et Flandres conquise.

M. Rigioly[3], rue Quinquempoix, aussi pour l’Italie et pour le
Lyonnois.

  [3] C’étoit un de ses banquiers italiens, comme il y en avoit eu
    beaucoup aux époques précédentes dans ce quartier, où ils avoient
    même laissé leur nom aux rues des Lombards et de Venise. Sous Louis
    XVI, il en existoit encore. Nous trouvons dans l’_Almanach général
    des Marchands_ de 1778: Caccia, banquier, rue Saint-Martin,
    vis-à-vis la rue aux Ours; Giambone, rue Mauconseil; Boggiano, place
    des Victoires.

Messieurs Narcisses et Maçon, rue Thibaut Thodé, pour les mêmes lieux.

Et Messieurs Vallentin, rue

M. Helissant, rue saint Denis, pour Allemagne, Pologne, Angleterre,
Hollande, etc.

M. Moreau, rue Michel le Comte, pour Espagne, Bretagne, etc.

M. le Nostre, rue Troussevache, pour Anjou, Touraine, Poitou, etc.

M. Patu, rue de la Chanverrerie, pour Espagne.

M. Artus, rue Mauconseil, pour Angleterre, Ecosse, Irlande, Hollande,
Flandres conquise, etc.

M. Milochin, rue saint Denis, pour la Flandre Espagnole.

M. Herins, derriere saint Leu et saint Gilles, pour tous les Païs bas.

M. Foissin, rue saint Denis, pour Allemagne, Suède, Dannemarc, Hollande,
Italie, etc.

Messieurs les Agens de change s’assemblent tous les jours ouvrables vers
le midy à la place de change, joignant la conciergerie du Palais, pour
la négociation des Lettres et Billets de Change[4].

  [4] _L’Almanach royal_ de 1702, qui donne à peu près, p. 64, le même
    renseignement, ajoute: «Le public peut s’adresser à leur clerc, qui
    y demeure, pour faire avertir lesdits Messieurs des billets perdus,
    lettres de change, ou autres billets négociables.» Telle étoit alors
    la Bourse de Paris: une voûte près d’une prison, pour s’assembler
    une fois tous les huit jours; et un clerc, pour répondre à tout, le
    reste de la semaine. L’anglais Evelyn, qui visita le Palais en 1644,
    la trouva de bien mesquine apparence auprès de celle de Londres:
    «Les galeries, où l’on vend les menues marchandises, dit-il,
    n’approchent pas des nôtres, non plus que le lieu où se tiennent les
    négociants, qui n’est qu’une simple voûte basse.» (_V._ Extraits de
    son Voyage à la suite de celui de Lister, publié par la Société des
    bibliophiles, p. 230.)

Pour les Banquiers Expeditionnaires en Cour de Rome, voyez l’article des
affaires Ecclesiastiques.




ACADEMIES ET CONFÉRENCES PUBLIQUES[1].

  [1] «Il y a diverses Académies qui ont toutes leurs utilitez
    publiques. Si celles des Jeux n’avoient pas été défendues, on en
    feroit de quatre espèces. Mais comme on ne joue plus que dans des
    maisons particulières, et entre personnes connues, on reduira
    seulement à trois espèces celles qui subsistent à présent; sçavoir
    celles qui ont été établies pour perfectionner les Sciences, celles
    qui regardent l’Education de la Noblesse, et celles qui concernent
    les beaux arts.» Edit. 1691, p. 7-8.


Il y a maintenant à Paris deux Academies Royales, établies pour
perfectionner les sciences. La plus ancienne est l’Academie Françoise
dont le Cardinal de Richelieu a jetté les premiers fondemens et dont le
Roy est protecteur.

Elle est composée de quarante Academiciens, tous gens illustres par leur
qualité, par leur mérite, et par leur condition. Ils sont uniquement
appliquez à reduire la langue Françoise dans toute la pureté qu’on peut
desirer. Ils tiennent leurs assemblées trois fois la semaine[2] au vieux
Louvre[3], où ils distribuent tous les ans à la saint Louis des prix
considérables, à ceux qui ont le mieux travaillé sur une pièce proposée,
et sur un sujet à la gloire du Roy[4].

  [2] On ne s’étoit d’abord réuni qu’une fois par semaine, puis deux
    fois. Enfin, l’on alla jusqu’à trois fois en 1675, pour presser le
    travail du Dictionnaire, et, dès lors, ce fut la règle: «Depuis ce
    temps là, dit l’abbé d’Olivet, dans une note sur l’_Histoire de
    l’Académie_, par Pelisson, c’est l’usage que les trois jours
    ordinaires d’assemblée soient le lundi, le jeudi, et le samedi.»

  [3] «A la prière de Colbert, qui en étoit membre depuis cinq ans, le
    Roi accorda à l’Académie françoise au rez de chaussée du Louvre,
    près du pavillon des Cariatides... les Salles, qui, après la Fronde,
    avoient été celles du Conseil, et qui sont aujourd’hui dans le Musée
    de Sculpture les salles de Puget et de Coustou.» (_Hist. du Louvre_,
    p. 66, dans _Paris à travers les âges_[5].)

  [4] Ces deux prix étoient: celui d’éloquence, fondé par Balzac, qui ne
    fut distribué qu’à partir de 1671; et celui de poésie, dont Pelisson
    et trois autres académiciens firent les frais, et qu’ensuite
    l’Académie en corps prit à son compte, jusqu’à ce qu’un de ses
    membres, l’évêque de Noyon, M. de Clermont-Tonnerre, l’eût constitué
    à perpétuité.

  [5] «La salle, lisons-nous dans l’ouvrage que cite notre
    avant-dernière note, la salle qui étoit à la suite de celle des
    séances servoit pour le travail du _Dictionnaire_, dont le roi
    payoit toutes les écritures; et pour l’examen des pièces envoyées au
    concours des prix d’éloquence et de poésie que l’Académie
    distribuoit tous les ans à la Saint-Louis sous la forme de deux
    médailles d’or, de trois cents francs chacune. Ce jour là, comme la
    chapelle, d’ailleurs fort délaissée, que Le Mercier n’avoit pu
    achever au premier étage du pavillon des Cariatides de Sarrazin,
    étoit à la disposition de l’Académie françoise, dont les salles se
    trouvoient presque au-dessous, les Quarante y faisoient dire une
    messe en musique et prononcer le panégyrique du saint Roi.»

La deuxième, est l’Academie des Sciences qui s’applique à faire des
découvertes dans l’Anatomie, dans la Botanique, dans la Chimie, dans
l’Astronomie, dans la méchanique, et generalement dans toutes les
parties de la Philosophie et des Mathématiques.

Les Academiciens qui la composent s’assemblent tous les Mercredis et
Samedis à la Biblioteque du Roi qui est presentement rue Vivienne[6], et
qui sera bien-tot à la place de Vendôme[7].

  [6] «Où se doivent adresser ceux qui ont des découvertes ou des
    inventions nouvelles à proposer, dans le dessein d’être récompensez,
    ou seulement recommandables. Lorsqu’il s’agit de faits
    mathématiques, sur l’explication desquels on veut prévenir les
    Académiciens de cette Académie, on peut s’adresser à l’Observatoire
    royal, où ils ont chacun leur appartement.» Edit. 1691, p. 8.

  [7] Ordre avoit été donné pour la construction de la Bibliothèque à la
    Place Vendôme, le 19 mai 1691. On en trouve le texte dans les mss.
    de la _Collection Delamarre_, à la Biblioth. Nat., t. 131, fol. 81.
    Elle eût été construite au levant, dans la partie où fut bâti
    l’hôtel Bourvalais, aujourd’hui Ministère de la Justice, et elle eût
    absorbé, par derrière, une portion de l’espace occupé, depuis, par
    les hôtels de la rue Neuve des Capucines, ainsi qu’on en peut juger
    d’après les plans qui se trouvent au Cabinet des Estampes,
    _Topographie de Paris_, Place Vendôme.

Ceux d’entr’eux qui professent les Mathématiques, ont leurs appartements
à l’Observatoire Royal à l’extremité du Fauxbourg Saint Jacques.

Quoy-que la musique fasse partie des Mathematiques; elle a neanmoins son
Academie particulière, parcequ’elle seroit entierement inutile, si comme
les autres Arts liberaux, elle n’étoit soutenüe de la pratique[8]. Cette
Academie s’exerce au quartier de saint Roch[9] chez M. de Francine qui
en est Directeur[10] à la répétition des pièces de Theâtre qu’on nomme
Opéra, et qu’elle représente ensuite sur le Théâtre du Palais Roial, ce
qui peut être pratiqué par la Noblesse sans déroger.

  [8] «L’Académie royale de musique, qu’on nomme Opéra, est
    principalement occupée à représenter des tragédies en musique de la
    composition de M. Quinault...» Edit. 1691, p. 8. (_V._ plus loin au
    chap. _Passe-temps et Menus plaisirs_.)

  [9] Rue Saint-Nicaise. C’est ce qu’on appeloit «l’hôtel de l’Académie.
    » (_V._ notre _Hist. de la Butte Saint-Roch_, p. 182.)

  [10] Il avoit succédé à Lulli, dont il étoit le gendre.

La Societé Royale de Medecine est encore une espèce d’Academie[11] en
laquelle on passe des règles à la pratique, ce qui fait qu’elle est
composée de Philosophes, de Medecins, de Chirurgiens et d’Apoticaires
artistes. Elle tient des Conférences publiques tous les Dimanches après
Vepres, rue de Pincourt, Faubourg saint Antoine, chez Monsieur de Blegny
qui en est Directeur, qui a commencé cet établissement par ordre du Roy,
sous la protection de M. Daquin, premier Medecin de S. M. Il a deja
publié plusieurs volumes d’Observations et d’Experiences, et il
travaille sans relache à faire de nouvelles découvertes[12]. Cette
Societé a des membres en plusieurs Villes de Provinces, qui travaillent
utilement à la fin commune, qui est la perfection du plus important de
tous les Arts.

  [11] «... Est établie par ordre de la Cour, et... disciplinée sur le
    pied des Académies d’établissement royal. Elle a pour sujet toutes
    les sciences naturelles et les arts qui en dépendent.» Edit. 1691,
    p. 12.

  [12] «M. de Blegny... a l’avantage d’avoir pratiqué et enseigné
    successivement toutes les parties de la philosophie et de la
    médecine. Il a composé dix-huit volumes très-curieux sur les sujets
    particuliers qui en dépendent, et inventé diverses machines fort
    industrieuses, qui lui ont toujours attiré beaucoup d’auditeurs. Il
    s’est retiré depuis quelque temps à son jardin médicinal à l’entrée
    du faubourg Saint-Antoine, grande rue de Pincourt, où il tient une
    pension pour les malades, dont il sera parlé ci-après (_V._ plus
    bas, _Pension pour les malades_). Mais on ne laisse pas de le
    trouver presque tous les jours chez M. son fils, apothicaire du Roi,
    à l’entrée de la rue de Guénegaud, où il tient ses conférences en
    hiver, ne les ayant établies l’été à Pincourt, qu’à cause des
    plantes médicinales qu’il y fait élever pour la satisfaction et
    l’utilité des médecins, chirurgiens et artistes, qui sont sous sa
    direction, et qui s’y rendent les dimanches après le service divin,
    pour conférer à l’ordinaire et consulter sur les indispositions des
    malades, qui se présentent, et à qui l’on donne gratuitement les
    ordonnances et délibérations. Mais en hiver, la conférence de la rue
    Guénegaud se tient les jeudis non fêtez, et commence à trois heures
    de relevée.» Edit. 1691, p. 12.

Il en est tout de même de l’Academie d’Architecture, c’est un Art qui a
beaucoup de preceptes scientifiques, mais qui sont applicables à la
mechanique active. Elle est d’etablissement Royal et a eu feu M. Colbert
pour protecteur. Maintenant elle est sous la protection de M. de
Villacerf[13] et tient ses assemblées tous les Lundis de relevée, au
Palais Brion[14].

  [13] Edouard Colbert, marquis de Villacerf, cousin du ministre.

  [14] «Qui fait partie du Palais Royal, et qui a sa porte dans la rue
    de Richelieu.» Edit. 1691, p. 9. C’étoit un pavillon, dont une salle
    donnoit de plain-pied sur le jardin du Palais-Royal. Il devoit son
    nom au duc de Damville, qui n’étoit que comte de Brion quand le roi
    l’avoit fait bâtir, pour lui, en 1651. Il y logea plus tard Mme de
    La Vallière. C’est là que se fit, en plein air, la première
    exposition de peinture, en 1673. Le Théâtre françois en occupe à peu
    près l’emplacement. On verra en effet plus loin que le Palais Brion
    étoit «à l’entrée de la rue de Richelieu.»

Pour ce qui est des deux Academies établies pour la Peinture, pour la
Sculpture et pour la Dance, elles n’ont presque pour objet que
l’exercice. La premiere qui est pour les Peintres et pour les
Sculpteurs, se tient aussi au Palais Brion, à l’entrée de la rue de
Richelieu. Elle est composée d’un grand nombre de fort habiles Maitres
qui apportent un soin particulier à l’éducation de leurs élèves, et qui
leur fournissent continuellement pour le dessein, des modèles humains et
vivans placez en différens jours et en diverses postures. Ils trouvent
même cet avantage dans leurs études, que l’Academie fait distribuer des
prix considérables à ceux qui font plus de progrès dans un certain
espace de temps[15].

  [15] «Pour être compris dans la liste des disciples, qui doivent y
    avoir entrée, l’aspirant doit avoir pour professeur l’un des
    Académiciens, qui, pour justifier la protection qu’il lui accorde,
    lui donne un billet imprimé signé de lui, et adressant aux Officiers
    de l’Académie auxquels il le présente. Après quoy ce billet ayant
    été pareillement signé du Recteur qui est de quartier, et du
    Professeur qui est en mois, le disciple a la liberté de se rendre
    tous les jours à l’Académie, où il s’exerce avec tous les autres à
    dessigner des modèles humains et vivants, placez en différents jours
    et en diverses postures; ce qu’ils continuent pendant trois mois,
    laissant toujours leurs desseins à l’Académie, où ils sont ensuite
    examinez par les Officiers, qui distribuent une forte médaille d’or
    à celuy qui a le mieux réussi, une médaille moins pesante du même
    métail à celui qui approche le plus près de la force de ce premier,
    et une médaille d’argent à celui dont les desseins prévalent sur
    tous ceux des disciples auxquels l’Académie n’accorde aucun prix.
    Après cela, on divise la troupe en trois classes, relativement à la
    capacité des disciples. Ceux de la première entrent et se placent
    avant les deux autres classes, qui gardent entre elles le même
    ordre; mais avant que les entrées se renouvellent, on recommence
    aussi la cérémonie des billets et des presentations cy-devant
    expliquées. Outre les prix qui se distribuent, comme il vient d’être
    dit, il s’en distribue encore quatre autres à la Saint Louis, qui
    donnent encore plus d’émulation aux disciples; par cette raison que
    ceux qui les ont gagnez sont envoyez et entretenuz à Rome durant
    trois ans, aux dépens du Roi, même de couleurs et de pinceaux, en
    travaillant seulement quatre jours la semaine à faire des copies
    pour Sa Majesté: outre qu’étant revenus, ils sont préférés pour les
    beaux ouvrages, et reçus sans peine membres de l’Académie, ce qui
    leur donne de plein droit la liberté de travailler à Paris, et ce
    qui les met dans un degré de distinction très honorable. Les élèves
    des peintres et ceux des sculpteurs sont indifféremment admis à
    disputer les prix, lorsqu’ils ont été jugés de force suffisante; à
    cet effet, ceux qui aspirent à ce bénéfice, présentent chacun un
    esquisse de leur façon; et, afin que l’Académie soit assurée
    qu’aucune de ces esquisses n’a été supposée, les Professeurs font
    faire en leur présence un impromptu à chacun de ceux qui ont
    présenté de bonnes esquisses; et tous ceux de qui les impromptus
    sont d’une force relative à leurs esquisses, sont admis à travailler
    pour les prix qui sont au nombre de quatre, savoir: deux médailles
    d’or, et deux d’argent, qui sont distribuées aux quatre disciples
    qui ont travaillé avec plus de succès, entre lesquels le plus fort
    reçoit encore un laurier de la main du surintendant de ces
    Académies.» Edit. 1691, p. 9.

La deuxième qui est pour l’exercice de la Danse[16] tient Salle tous les
Jeudis pour eprouver ses eleves, ruë Bailleuil, chez M. de Beauchamp qui
en est Chancelier et Maître des Balets du Roy. Selon les statuts de
cette Academie, elle ne devroit estre composée que de treize
Académiciens; mais ce nombre a esté augmenté[17] par les grâces que le
Roy a bien voulu faire, à quelques uns de ceux qui ont eu l’honneur de
danser devant Sa Majesté avant d’y estre admis[18].

  [16] «L’Académie royale de danse, qui est établie par lettres patentes
    à l’instar de celles dont il vient d’être parlé, tenoit il n’y a
    guère ses assemblées au Palais des Tuileries, dans l’antichambre de
    Monseigneur, et les tient maintenant dans la salle de Monsieur
    Beauchamp, maître des ballets du Roi, et chancelier de l’Académie,
    en sa maison rue Bailleul, derrière l’hôtel d’Aligre.» _Id._, p.
    10.--Les lettres patentes «pour l’établissement de l’Académie royale
    de danse, en la ville de Paris», avoient été vérifiées au Parlement
    le 30 mars 1662.

  [17] «Et le sera probablement encore.» Edit. 1691, p. 10.

  [18] «Trois de ces maîtres se rendent tous les jeudis à l’Académie,
    pour exercer gratuitement les personnes de considération qui s’y
    trouvent, et les élèves des Académiciens, qui aspirent d’être admis
    à l’Académie, et qui ont, à cet effet, leurs protecteurs, par qui
    l’Académie est certifiée de leur capacité lors de leur réception,
    qui se fait toujours après la convocation de plusieurs personnes
    qualifiées, et des maîtres de l’Académie, en présence desquels ils
    font une expérience de chef-d’œuvre: après quoy, ils sont en plein
    droit d’enseigner la danse à Paris, et de jouir de divers privilèges
    que le Roi a eu la bonté d’accorder à cette Académie, où l’on est
    reçu seulement en payant une somme très modique, et en donnant une
    bourse de jetons d’argent qui sont distribués au nombre de deux à
    chacun des maîtres qui se trouvent à l’Académie les jours d’exercice
    et encore les premiers jeudis de chaque mois, afin de porter les
    Académiciens à se trouver à l’Assemblée générale qui se tient ce
    jour là à l’Académie pour délibérer sur les affaires communes, ainsi
    que le premier jour de mai.» _Id._, p. 10.


CONFÉRENCES.

Il y a un concours de scavans toutes les aprésdinées chez M. l’Abbé
Ménage, Cloitre Notre Dame[19], où l’on confère sur toutes sortes de
sujets[20].

  [19] Ménage, après la mort du cardinal de Retz, dont il étoit en
    quelque sorte devenu le secrétaire, avoit pris un logis au Cloître:
    «Il y tint régulièrement, dit La Monnoye dans la Notice en tête du
    _Menagiana_, t. I, tous les mercredis de chaque semaine, une
    assemblée, qu’il appeloit, à cause du jour, sa _Mercuriale_, où il
    eut la satisfaction de voir toujours un grand concours de gens de
    lettres, tant françois qu’étrangers.» La maison où il logeoit,
    existe encore rue Massillon, nº 4. C’est celle où La Harpe mourut.
    (_Rev. archéolog._, t. IV, 1re part., p. 144.)

  [20] «La conférence de M. de la Courtière, qui se tient rue Saint-Jean
    de Beauvais, a pour principal sujet la Philosophie, et pour
    accessoires les nouveautez de tous genres.» Edit. 1691, p. 12.

M. de Villevant, Maître des Requestes, ruë Hautefeüille, donne aussi
entrée chez lui toutes les aprésdinées aux Sçavans de considération, qui
tiennent une conférence curieuse sur tous les sujets qui se présentent.

M. d’Herbelot[21], rue de Condé, tient une autre conférence chez lui
tous les soirs après sept heures.

  [21] C’est l’orientaliste, professeur en langue syriaque, au collége
    Royal, secrétaire-interprète des langues orientales, auteur de la
    _Bibliothèque orientale_, qui fut publiée in-fol. en 1697, deux ans
    après sa mort.

Les Mardis de relevée, on tient une conférence curieuse chez M. le
Marquis d’Angeau, Chevalier des Ordres du Roi, Place Royale[22].

  [22] L’abbé de Dangeau, bien plus que son frère le Marquis, trop
    occupé à la Cour, tenoit cette conférence presque entièrement
    grammaticale, et qu’on appeloit la _Martiale_, parce qu’elle avoit
    lieu le mardi. Le poëte Lainez, qui la fréquenta quelque temps, se
    vengea de l’ennui qui l’y avoit gagné et des habitudes de purisme
    qu’il y avoit failli prendre, par cette épigramme:

        Je sens que je deviens puriste,
        J’aligne au cordeau chaque mot,
        Je suis les Dangeaux à la piste:
        Je pourrois bien n’être qu’un sot.

Les Jeudis de relevée, chez M. l’Abbé de la Roque, ruë de Guénégaud, sur
diverses matières scientifiques[23].

  [23] L’abbé Jean-Paul de la Roque, qui, depuis 1675, dirigeoit le
    _Journal des Savants_ à la place de Gallois, et depuis 1683, le
    _Journal de Médecine_, dont il étoit le fondateur. Ses conférences
    du jeudi, rue Guénegaud, ont été curieusement décrites par Le Maire
    dans son _Paris ancien et nouveau_, 1685, in-12.

Les Samedis aussi de relevée, chez M. le Chevalier Chassebras du Breau,
Carrefour saint Benoist, quartier S. Germain, sur l’Histoire et sur les
sciences[24].

  [24] «Enfin, celle de M. de Fontenay, qui se tient les samedis, rue
    Christine, a pour objet les Mathématiques.» Edit. 1691, p. 12.




BIBLIOTEQUES PARTICULIERES ET PUBLIQUES.


Les curieux peuvent avoir par faveur, quelques entrées dans les
Biblioteques suivantes: sçavoir;

A la Biblioteque du Roy qui est encore rue Vivienne; et qui sera
bien-tôt à la place de Vendosme[1], où l’on trouve encore une infinité
de Livres et de Manuscrits rares, tout ce qu’il y a eu de plus
considérable dans toutes les Langues orientales.

  [1] _V._ un peu plus haut, au chap. des _Académies_.

Au Cabinet des Livres du Chateau du Louvre[2].

  [2] On n’y conservoit guère alors que les livres à l’usage des rois,
    et ceux qui leur avoient été offerts ou dédiés. Le P. Jacob en a
    parlé dans son _Traité des Bibliothèques_, 1644, in-8, sans oublier
    le conseiller d’Etat Chaumont qui en étoit alors le bibliothécaire.

A la Bibliotèque de Monseigneur l’Archeveque de Rheims[3]; ruë Saint
Thomas du Louvre.

  [3] Maurice Le Tellier, qui, étant directeur de la Bibliothèque du
    Roi, s’étoit laissé gagner par l’amour des livres. Il en eut un
    grand nombre qui passèrent tous à la Bibliothèque des chanoines de
    Sainte-Geneviève, où, dit Baudelot de Dairval, «ils font un très bel
    ornement par leur condition.» _De l’utilité des Voyages_, t. II, p.
    418. Le catalogue en fut imprimé in-fol., à l’imprimerie Royale, en
    1693, sous ce titre: _Bibliotheca Telleriana_. Le sorboniste Ph.
    Dubois, bibliothécaire du prélat, l’avoit dressé. En 1700, Le
    Tellier avoit donné la plupart de ses _manuscrits_, 500 environ,
    françois, orientaux, latins surtout, à la Bibliothèque du Roi.

A celle de Monseigneur le Chancelier[4], rue S. Loüis du Marais.

  [4] Boucherat, dont la bibliothèque avoit en effet son prix, depuis
    surtout que M. M. de Brienne lui avoit donné, en 1685, une riche
    collection de copies faites sur le recueil de M. de Loménie, dont
    l’original étoit à la bibliothèque du Roi. Tous les livres de
    Boucherat portent sa devise: un coq avec un soleil, avec ces mots:
    _Sol reperit vigilem_.

A celle de Monsieur le Premier Président, Cour du Palais, qui est
remplie d’excellens Tableaux, de Médailles et de Monnoyes antiques et
modernes.

A celle de Monseigneur de Menars, Président à mortier, près la Porte de
Richelieu, où sont la plus grand part des plus curieux livres de M. de
Thou[5].

  [5] Nous avons parlé de cette bibliothèque, à propos de son possesseur
    M. de Ménars, au _chapitre_ des Présidents à mortier.

A celle de Monseigneur Talon[6], aussi President à mortier, rue Saint
Guillaume.

  [6] Nous ayons aussi parlé de lui, au _chapitre_ des Présidents à
    mortier. Sa bibliothèque, qu’il accrut beaucoup, lui venoit de son
    père, l’illustre Omer Talon. La jurisprudence, l’histoire, la
    philosophie, en étoient, comme on le pense bien, le fond principal.

A celle de Monseigneur l’Avocat Général de la Moignon, à l’Hotel
d’Angoulesme[7], où il y a un grand nombre de belles Médailles
antiques[8].

  [7] Sa bibliothèque avoit été formée par son père, le président de
    Lamoignon, qui avoit eu le célèbre Adrien Baillet pour
    bibliothécaire.

  [8] Il les devoit en partie à Tavernier, qui les lui avoit rapportées
    de ses voyages.

A celle de Monseigneur de la Moignon de Basville, Conseiller d’Etat[9],
rue      où sont les plus belles Médailles modernes.

  [9] Nous avons parlé de lui au _chapitre_ des Intendants. Il l’étoit
    du Languedoc.

A celle de M. de la Proutiere, rue Saint Dominique, où il y a des
Tableaux, des Bronzes, et des Médailles d’un choix particulier.

A celle de M. le Clerc de Lesseville, ruë Galande[10].

  [10] Frère de celui que nous avons vu plus haut parmi les présidents
    des Enquêtes.

A celle de M. Boucot, rue Hautefeuille[11].

  [11] Nous l’avons vu figurer plus haut parmi «les gardes des offices
    de France», et nous avons à ce sujet parlé de sa bibliothèque et de
    ses collections.

A celle de M. Rousseau, rue de la Calandre, où il y a un grand nombre
des plus rares estampes[12].

  [12] «Le cabinet de M. Rousseau, où l’on voit plus de quatre-vingts
    volumes, gros comme l’_Atlas_, lesquels contiennent tout ce qu’il y
    a de beau dans tous les Etats du monde. Tous les hommes illustres et
    tous les saints y sont représentés,--au moins ceux dont on a fait
    des estampes.--Néanmoins cette bibliothèque ne doit passer que pour
    un recueil.» (Le Gallois, _Traité des plus belles Biblioth. de
    l’Europe_, 1680, in-8, p. 130-131.)

A celle de M. Bultault[13], près la place des Victoires.

  [13] Louis Bulteau, qui mourut l’année suivante, 1693, chez les
    Bénédictins. Son frère Charles, en faveur duquel il s’étoit démis de
    sa charge de secrétaire du Roi, conserva la riche bibliothèque qu’il
    lui légua. Elle ne fut vendue qu’en 1711, un an après sa mort.
    Gabriel Martin en publia le catalogue: _Bibliotheca Bulteriana_, 2
    vol. in-12. A cette vente, la Bibliothèque du Roi n’acquit pas moins
    de 850 volumes.

A celle de M. l’Abbé de la Chambre[14], sur le quay de Nesle.

  [14] «Sa grande inclination, dit Vigneul-Marville, dans l’éloge qu’il
    a fait de cet académicien inconnu, étoit pour les livres Italiens et
    Espagnols.» (_Mélanges d’histoire et de littérature_, t. I, p. 97.)

A celle de M. Chassebras de Cramailles, rue du cimetiere saint André, où
il y a beaucoup de curiositez d’Italie et du Levant, d’Estampes, de
Monnoies, etc.

A celle de la Sorbonne, où il y a de rares manuscrits de Théologie[15].

  [15] Le Gallois, dans son _Traité_ cité tout-à-l’heure, nous la donne,
    p. 133, comme étant «sans contredit une des plus florissantes de
    l’Europe.» C’étoit en 1680, elle augmenta beaucoup, depuis. Au
    XVIIIe siècle, on n’y comptoit pas moins de 5,000 mss., et 60,000
    volumes. Ses principaux bienfaiteurs avoient été Richelieu et l’un
    de ses secrétaires, l’abbé Des Roches, que l’on connoît par l’Epître
    que lui dédia Boileau. En 1796, les manuscrits furent portés à la
    Bibliothèque Nationale, où on les réunit au fonds qui provenoit du
    cardinal de Richelieu.

A celle du Collége de Loüis le Grand, rue saint Jacques, composée en
partie de celle de M. Fouquet[16].

  [16] Suivant une note fort juste de l’abbé Goujet, écrite en marge de
    l’exemplaire du _De Bibliothecis parisiensibus_, de Dan. Maichel,
    1729, in-8, p. 94, que nous possédons, le Fouquet auquel les
    Jésuites devoient un fonds dont s’enrichit leur bibliothèque n’étoit
    pas Fouquet, le surintendant, mais Fouquet, marquis de la Varenne.
    Les livres acquis avec l’argent de son legs se distinguoient par un
    double Φ, sur le dos de la reliure.

A celle des Chanoines Reguliers de sainte Geneviève du Mont[17].

  [17] _V._ ce que nous avons dit plus haut, à propos de la bibliothèque
    de Le Tellier. Celle des Génovéfains se trouvoit, où nous l’avons
    vue encore, au dernier étage de cette partie de l’abbaye
    Sainte-Geneviève, qui étoit devenue une dépendance du collége Henri
    IV. En 1768, on la rendit publique trois fois par semaine, le lundi,
    le mercredi et le samedi, de deux heures à cinq. Elle est maintenant
    en de nouveaux bâtiments construits sur l’emplacement du collége
    Montaigne. _V._ plus bas.

A celle de l’Abbaïe saint Germain des Prez[18].

  [18] Elle étoit la plus riche après la Bibliothèque du Roi,
    principalement en manuscrits, dont un grand nombre lui vinrent au
    XVIIIe siècle de M. de Coislin, de l’abbé d’Estrées, de l’abbé
    Renaudot, etc. _V._ ce qu’en dit D. Bouillart dans son _Hist. de
    Saint-Germain des Prés_, 1724, in-fol.--Malgré l’incendie de 1792,
    et un vol en 1791, qui fit passer 120 de ses mss. en Russie, la
    Biblioth. Nat. n’en eut pas moins de 9,000 de cette seule
    provenance.

A celle du Chapitre de Notre Dame[19].

  [19] Elle étoit assez modeste, n’occupant que deux petites chambres
    dans la cathédrale même, et ne comptant au XVIIIe siècle que 5,000
    volumes au plus. Le principal fonds en étoit venu de Claude Joly,
    dont nous avons parlé au chapitre des _Affaires ecclésiastiques_. Il
    tenait de son grand-père, l’avocat Loisel, un certain nombre de mss.
    qui passèrent avec les siens et les autres du chapitre à la
    Bibliothèque du Roi, par une donation que firent les chanoines, le
    24 avril 1756.

A celle du Collége de Navarre, montagne sainte Geneviève[20].

  [20] Il est occupé aujourd’hui par l’Ecole Polytechnique. Sa
    bibliothèque, dont le premier fonds venoit de Jeanne de Navarre,
    fondatrice du collége, avoit pour principale richesse la plus grande
    partie des livres de l’illustre curieux du temps de Louis XIII, le
    provençal Peiresc, et de nombreux volumes sur peau vélin, avec
    initiales en miniature. De ses nombreux _mss._ il n’en arriva que
    124 à la Bibliothèque Nationale pendant la Révolution.

A celle du Collége de Boissy[21], rue du Cimetière saint André.

  [21] Nous ne savons rien sur la bibliothèque de ce collége fondé en
    1354 par Guill. de Boissy, qui lui donna son nom. Il étoit en 1692
    en complète décadence, dont il ne se releva que l’an d’après. Sa
    bibliothèque toutefois étoit, à ce qu’il paroît, restée assez riche.

A celle des Augustins Réformez de saint Germain des Prez[22].

  [22] L’école des Beaux-Arts, rue Bonaparte, a pris la place de leur
    couvent. La bibliothèque n’en devint importante que lorsque le
    président de la Cour des Monnoies, Gilbert Mauguin, lui eut légué
    ses 12,000 volumes de théologie et de jurisprudence, en 1674. Elle
    s’augmenta encore, en 1728, de ceux du copiste Jean Pontal. On y
    remarquoit 14 volumes in-fol. d’_Antiphonaires_, tous écrits, notés
    et enluminés, au XVIIe siècle, par le P. Trochereau, un des moines
    du couvent.

A celle des Augustins Déchaussez, rue des Victoires[23].

  [23] Ce sont les petits Pères, de la rue Notre-Dame des Victoires,
    dont il ne reste que l’église, une caserne des gardes de Paris,
    ayant, depuis 1850, pris la place du couvent. On y comptoit, vers le
    milieu du XVIIIe siècle, environ 30,000 volumes. Auprès de la
    bibliothèque étoient un cabinet de peinture, et un autre d’histoire
    naturelle et d’antiquités.

A celle des Célestins, près l’Arsenal[24].

  [24] On y comptoit environ 20,000 volumes, non compris les manuscrits,
    dont les plus précieux venoient de la bibliothèque que le frère de
    Charles VI, Louis d’Orléans, conservoit dans son hôtel de _Pute y
    musse_, voisin du couvent. Un des deux seuls exemplaires de
    l’édition xylographique du _Speculum humanæ salvationis_, que l’on
    connut au XVIIIe siècle, s’y trouvoit aussi.

A celle des Cordeliers, près l’Eglise saint Cosme[25].

  [25] Brûlée en 1580, cette bibliothèque redevint peu à peu plus
    importante qu’elle ne l’avoit été. L’incendie y avoit détruit 9,000
    volumes; en 1680, elle en avoit 12,000, mais l’on n’y trouvoit plus
    la plupart des beaux manuscrits donnés par Catherine de Médicis, ni
    ceux des auteurs latins, dont les Alde et les Estienne s’étoient
    servis pour leurs éditions. Les 163 qui en sont venus à la
    Bibliothèque Nationale sont la plupart sans grande valeur.

A celle des Jacobins du Grand Couvent, rue saint Jacques[26].

  [26] Elle n’étoit pas alors bien riche, les dons du chanoine lyonnois
    Tricaud, et du duc d’Orléans, fils du Régent, ne l’ayant augmentée
    qu’au siècle suivant. Les livres du prince, qui, au nombre de 6,800
    volumes, formoient plus d’un tiers de la bibliothèque, s’y voyoient
    dans une salle à part, nommée _Bibliotheca Aureliana_. Il n’est venu
    des Jacobins à la Bibliothèque Nationale que 60 mss. environ des
    XIIIe et XIVe siècles.

A celle des Jacobins Reformez, rue saint Honoré[27].

  [27] «Somptueuse en édifices, écrivoit sous Louis XIII le P. Jacob,
    mais de beaucoup moindre qualité en livres.» Elle s’enrichit plus
    tard. Un des religieux du couvent lui légua, en 1649, toute la
    bibliothèque de son père, médecin en Allemagne. Le sorboniste Picque
    lui laissa, en 1699, les manuscrits arabes de son cabinet, qui
    devaient passer en 1795 à la Bibliothèque Nationale, et auxquels se
    joignirent ceux que le P. J. Goar avoit rapportés de Grèce. Sous
    Louis XV, sans compter les manuscrits, il y avoit chez les Jacobins
    de la rue Saint-Honoré 26,000 volumes. En 1748, le P. Bérenger avoit
    dressé le catalogue des livres et manuscrits en 7 vol. in-fol. On
    l’appeloit quelquefois la Bibliothèque de M. le Dauphin, parce qu’à
    la naissance de Louis XIV, les Jacobins la lui avoient dédiée. Une
    partie de la correspondance du cardinal de Noailles, aujourd’hui à
    la Bibliothèque Nationale, s’y trouvoit.

A celle des Chanoines Réguliers de sainte Croix de la Bretonnerie[28].

  [28] Nous ne savons rien sur cette bibliothèque d’un chapitre
    d’ailleurs peu important.

A celle du Prieuré de saint Martin des Champs[29].

  [29] On n’y trouvoit guère que 5 ou 6,000 volumes, mais beaucoup de
    manuscrits, dont 112 sont aujourd’hui à la Bibliothèque Nationale;
    et, comme dans tous les prieurés de Bénédictins, un grand nombre de
    chartes et diplômes. Dom Chameaux, qui en étoit le conservateur,
    sous Louis XV, en évaluoit le chiffre à 80,000. Ils avoient été
    rassemblés par Dom Pernot dans la première moitié du XVIIIe siècle.

A celle des Minimes de la place Roïale[30].

  [30] Un des religieux du couvent, le P. Joseph Renaud, avoit créé le
    principal fonds de cette bibliothèque, en lui léguant la sienne. Le
    savant Jean de Launoy en fit autant. C’est avec ces ressources que
    les PP. Niceron et Mersenne composèrent leurs ouvrages si pleins de
    recherches. Au XVIIIe siècle, la bibliothèque des Minimes, au lieu
    de 8,000 volumes qu’elle possédoit sous Louis XIV, en comptoit
    20,000; presque tous reliés en veau fauve, avec un soleil d’or sur
    les plats, portant au centre le mot _caritas_, et en exergue
    l’inscription: _Conventus parisiensis Minimorum_.--L’_Herbarium
    vivum_, ms. en 15 vol. in-fol., du P. Prumier, contenant la
    description de toutes les plantes qu’il avoit étudiées de 1675 à
    1704, tant en Italie qu’en Amérique, étoit une des curiosités de la
    bibliothèque des Minimes. Ce beau recueil lui fut enlevé, par ordre,
    pour celle du roi, en 1768.

Outre les Biblioteques particulières, il y en a quelques unes à l’usage
du public, dans lesquelles on donne entrée à tous venans aux jours et
heures ci-après marquées; sçavoir,

Celle du Collége Mazarini qui est ouverte les Lundis et Samedis du matin
et de relevée[31].

  [31] «On commence aussi à donner entrée les lundis et jeudis en celle
    du collége Mazarini.» Edit. 1691, p. 11.--Elle avoit été ouverte
    pour la première fois, en octobre 1688, dans le pavillon du collége
    Mazarin, aujourd’hui palais de l’Institut, où elle est encore, sous
    le nom de Bibliothèque Mazarine. Le premier bibliothécaire fut
    Ludovic Picques, à la suite d’une élection faite par la Société de
    Sorbonne, qui seule avoit droit de nommer à cette place. Elle avoit
    été, comme on sait, formée pour Mazarin, par G. Naudé, qui en parle
    beaucoup dans son _Mascurat_. Un siècle après eux, elle avoit
    presque doublé. On n’y comptoit que 27,000 vol. à la mort du
    cardinal; en 1751, lorsque Desmarais en fit le catalogue, il n’y en
    avoit pas moins de 45,000.

Celle de l’Abbaïe saint Victor où sont les Livres de feu M. Bouchet de
Bournonville, qui est ouverte les Lundis, Mercredis et Samedis, le matin
depuis sept jusqu’à onze heures, et l’aprés-dinée depuis deux jusqu’à
cinq[32].

  [32] «Où l’on peut consulter les auteurs d’autant plus utilement
    qu’elle est des plus complètes, et qu’on y met entre les mains des
    curieux tous les livres qu’ils demandent.» Edit. 1691, p. 11.--C’est
    la bibliothèque dont Rabelais a dressé un si burlesque catalogue. Au
    XVIIe siècle, elle s’étoit assez sérieusement enrichie pour que l’on
    ne s’en moquât plus. M. de Bournonville, conseiller de
    grand’Chambre, dont il est parlé ici, lui avoit, en 1690,
    non-seulement légué tous ses livres, mais aussi une rente pour en
    acheter d’autres, à condition qu’elle serait publique trois jours
    par semaine, le matin et l’après-dîner. On voit ici qu’il y fut fait
    droit. Plus tard vint le don de M. de Tralage, neveu de La Reynie,
    qui possédoit une collection inappréciable de cartes et plans, dont
    le plus précieux étoit celui de Paris par Du Cerceau, qui prit, en
    passant par la bibliothèque de l’abbaye, le nom de plan de
    Saint-Victor. Ce legs de M. de Tralage, fait en 1698, fut suivi en
    1703 de celui du président Cousin, qui donna tous ses livres aux
    Victorins. Leur bibliothèque dut être alors agrandie de plus du
    double. Les 3,000 manuscrits suffisoient pour remplir l’ancienne. La
    Bibliothèque Nationale, depuis 1796, en possède 1265, dont un tiers
    de mss. latins. Dans le nombre est le très-curieux catalogue de la
    Bibliothèque Saint-Victor par Claude de Grandrue.

Et celle du Jardin Medicinal de Pincourt, qui est ouverte seulement les
Dimanches après Vepres, en faveur des Medecins, des Chirurgiens et des
Apoticaires artistes; qui confèrent en même temps sur les Nouvelles
Découvertes qui se font dans les Sciences Naturelles et dans les Arts
qui en dépendent.




COLLÈGES ET LEÇONS PUBLIQUES[1].

  [1] «Il y a d’ailleurs dans l’étendue de l’Université divers colléges
    où la jeunesse est instruite à très-peu de frais, et où il y a même
    des bourses fondées pour l’entretien d’un certain nombre de pauvres
    étudiants.» Edit. 1691, p. 11.


Les Collèges où il y a exercices ordinaires des Humanitez, de la
Rhétorique et de la Philosophie, sont,

Celuy de Loüis le Grand et celuy du Plessis Sorbonne[2], rue saint
Jacques. Celuy des Quatre Nations sur le quay de Nesle[3], celuy de
Navarre[4], celuy de la Marche[5], et celuy de Montaigu[6] à la montagne
sainte Genevieve; celuy d’Harcourt[7] et celuy de Lizieux, rue de la
Harpe[8]; ceux de Beauvais[9] et de Presles[10], rue saint Jean de
Beauvais, celuy du Cardinal le Moine[11], rue saint Victor, et celuy des
Grassins[12], rue des Amandiers[13].

  [2] Geoffroi Du Plessis, secrétaire de Philippe-le-Long, l’avoit fondé
    en 1316. Réuni à la Sorbonne en 1647, il prit le double nom qu’il a
    ici. Les facultés de Théologie, des Sciences et Lettres l’occupèrent
    sous l’Empire et la Restauration jusqu’à ce qu’on y eût mis l’Ecole
    normale.

  [3] C’est le collége Mazarini, dont il a été parlé plus haut:
    «Messieurs de Sorbonne, ajoute l’édit. de 1691, p. 11, qui ne
    tiennent point chez eux de petites classes, ont la direction de ce
    collége, où ils font enseigner gratis toutes les humanités, au désir
    de la fondation du feu cardinal Mazarin. Les RR. PP. Jésuites en
    font de même au collége de Louis-le-Grand, rue Saint-Jacques.»

  [4] Fondé en 1364, avec un legs de la reine Jeanne de Navarre, femme
    de Philippe-le-Bel, il fut rebâti et agrandi plus tard avec le prix
    de la vente de la tour de Nesle, qui appartenoit aux rois de
    Navarre. Depuis l’Empire, il est occupé par l’Ecole polytechnique.
    La chapelle en est curieuse. (_Rev. archéolog._, t. I, p. 192-200.)

  [5] Il datoit de 1420. Guillaume de La Marche l’avoit fondé pour des
    écoliers de sa pauvre province. Supprimé à la Révolution, il devint
    une pension célèbre du quartier Latin, la pension Vattier. Les
    bâtiments en ont disparu, avec une partie de la rue de la
    Montagne-Sainte-Geneviève, où ils se trouvoient sous le nº 37.

  [6] Un des plus pauvres et des plus austères colléges de Paris.
    Aycelin de Montaigu l’avoit fondé en 1314, Erasme y étudia. La
    maigre pitance, à laquelle on y étoit soumis, l’avoit fait appeler
    _Collége des Haricots_, nom qui resta à la prison militaire, qu’on y
    installa, en 1792. (_V._ notre _Paris Démoli_.) Ses bâtiments, qui
    faisoient l’angle de la rue des Sept-Voies et de la place du
    Panthéon, furent démolis en 1845, pour faire place à ceux de la
    nouvelle bibliothèque Sainte-Geneviève.

  [7] Un chanoine de Paris, Raoul d’Harcourt, l’avoit fondé en 1220. Ses
    bâtiments, reconstruits en 1675, ont été emportés en partie par le
    boulevard Saint-Michel. Ce qui reste est occupé par le lycée
    Saint-Louis.

  [8] Il y a ici une erreur. Si le collége d’Harcourt fut rue de la
    Harpe, le collége de Lisieux en revanche n’y fut jamais. L’évêque
    de Lisieux, Gui d’Harcourt, le fonda en 1336, rue des
    Prêtres-Saint-Séverin; il passa ensuite rue Saint-Etienne des Grès,
    et n’en fut déplacé qu’en 1764, pour occuper, rue Saint-Jean de
    Beauvais, les bâtiments du collége de Dormans.

  [9] C’est celui dont nous venons de parler, le collége de
    Dormans-Beauvais, qui devoit son nom à son fondateur, l’évêque de
    Beauvais, Jean de Dormans. Il datoit de 1370. Supprimé à la
    Révolution, Carnot y établit la première école mutuelle d’essai.

  [10] Raoul de Presles l’avoit fondé en 1313 pour les pauvres écoliers
    du diocèse de Soissons, d’où lui vint son premier nom de collége de
    Soissons. Ramus y professoit; c’est là qu’il fut tué à la
    Saint-Barthélemy.

  [11] Il devoit son nom au cardinal Jean Lemoine, qui l’avoit fondé en
    1302. Calvin y étudia, et Lhomond y fut professeur. Il n’en existe
    plus rien que le nom d’une petite rue bâtie sur les chantiers qui en
    avoient pris la place.

  [12] Il ne datoit que de 1569. Le sénonois P. Grassin, de qui lui
    venoit son nom, l’avoit fondé pour des écoliers nés à Sens.
    Chamfort, qui s’appeloit alors Nicolas, en fut le dernier élève
    distingué.

  [13] «Celui de Cambrai et celui de fondation royale, près Saint-Jean
    de Latran,... celui des Trésoriers, près de la Sorbonne.» Edit.
    1691, p. 11.

Il y a encore des Communautez Religieuses qui ont des Maisons
Collègiales dans l’étendue de l’Université, où les nouveaux Profez sont
instruits aux Humanitez, Rhétorique, Philosophie, etc., à sçavoir: les
Grands Augustins devant le Pont neuf[14], les Grands Cordeliers, près
saint Cosme[15], les Grands Jacobins, rue saint Jacques[16], les
Bernardins, au quartier saint Victor[17]; les Carmes, à la place
Maubert[18], les Prémontrez, rue Hautefueille[19]; les Religieux de
l’Ordre de Grammont, rue du Batoir[20], et ceux de l’Ordre de Cluny,
place de Sorbonne[21].

  [14] Ils ont donné leur nom au quai. De leur église, construite en
    1368, on fit, sous le premier empire, le marché à la Volaille, qui
    garda le nom de _la Vallée_, parce qu’on l’y transféroit de _la
    Vallée de Misère_, située près du Châtelet. Ce qui restoit, sur le
    quai, de l’église devenue marché, vient de disparoître. Il subsiste
    encore quelque chose des bâtiments, au nº 5 de la rue du Pont de
    Lodi, dont le percement, en 1797, coupa en deux le terrain occupé
    par le couvent.

  [15] Ils avoient donné leur nom à la rue, qui prit, en 1790, celui de
    _rue de l’Ecole de Médecine_. Leur église y subsiste encore. C’est
    le _Musée Dupuytren_. Pendant la Révolution, ce fut le _Club des
    Cordeliers_, d’où Camille Desmoulins, qui en faisoit partie, datoit
    son journal, _le Vieux Cordelier_.

  [16] Nous en avons parlé un peu plus haut, à propos de leur
    Bibliothèque.

  [17] Dans la rue à laquelle ils avoient fait donner leur nom, et qui
    prit, en 1806, celui de rue de Pontoise, parce qu’elle est voisine
    du Marché aux Veaux, que Pontoise approvisionne.

  [18] Ils n’étoient pas sur la place même, mais auprès, dans la rue,
    qui leur devoit son nom. Leur église, qui datoit du XIVe siècle, fut
    démolie en 1814, pour faire place au _marché Maubert_. Ces carmes ne
    sont pas à confondre avec ceux de la rue de Vaugirard, _les Carmes
    déchaussés_, à qui l’on doit l’eau de Mélisse, et dont l’église
    existe encore.

  [19] Ils s’y étoient établis, dès 1252, dans une des maisons que
    Pierre Sarrazin, qui donna son nom à une des rues voisines, y
    possédoit. Leur chapelle, située au coin de la rue Hautefeuille, à
    gauche de la rue de l’Ecole de Médecine, fut démolie et rebâtie en
    1618. C’est aujourd’hui un café.

  [20] Ils n’étoient pas rue du Battoir, mais dans le voisinage, rue
    Mignon, où, depuis 1603, ils occupoient, par suite d’un échange avec
    leur prieuré du bois de Vincennes, le collége fondé en 1343, par le
    maître des Comptes, Jean Mignon.

  [21] Le collége de Cluny se trouvoit en effet au coin de cette place
    et de la rue des Grès. Sa fondation par Yves de Vergy, abbé de
    Cluny, datoit de 1269. Quelques restes du cloître subsistent encore.
    David y avoit son atelier en 1806.

Outre les exercices ordinaires de l’Université, on professe la Théologie
au Collège de Sorbonne[22], et à celuy de Navarre.

  [22] Les écoles de théologie fondées par Richelieu n’étoient pas à la
    Sorbonne même, mais sur la place, au nº 2. Elles furent supprimées à
    la Révolution.

La Jurisprudence aux Ecolles de Droit, rue saint Jean de Beauvais[23].

  [23] _V._ plus haut.

La Médecine, au Collège des Medecins, rue de la Bucherie[24].

  [24] Les écoles de médecine et de chirurgie étoient déjà rue de la
    Bûcherie en 1472. Les bâtiments en furent reconstruits en 1676, à
    l’exception d’un portail du XIVe siècle qui existoit encore, il y a
    quelques années. En 1744, on avoit refait l’amphithéâtre, dont le
    dôme se voit toujours dans la maison qui porte le nº 13, au coin de
    la rue de l’hôtel Colbert. Ce n’est qu’en 1774 que ces écoles furent
    transférées, où nous les voyons, dans l’ancien collége de Bourgogne
    reconstruit exprès, et qu’on avoit acheté aux Bénédictins, qui
    justement y avoient établi une école de chirurgie.

Les Mathematiques, et les Langues Arabe, Grecque, et Hebraique, au
College Royal, Place de Cambray.

Les autres Collèges dont les revenus ne servent maintenant qu’à
l’entretien des Bourciers, sont pour les Provinces du Maine et d’Anjou,
celui de Bayeux[25]; pour ceux du Diocese de Narbonne[26], celui de ce
nom; pour la Bourgogne, celui du même nom[27]; pour le Diocèse d’Arras,
encore celui du même nom[28]; pour la Touraine, celui de Tours[29]; pour
le Diocèse de Vienne et de Bourbonnois, celui du cardinal Bertrand[30];
pour le Limosin, celui de saint Michel[31]; pour Theroüenne, celuy de
Boncourt[32]; pour le Diocèse de Bayeux, celui de M. Gervais[33]; pour
le Diocèse de Rheims, celuy du même nom[34]; pour le Diocèse de Séez,
celui de ce nom[35]; pour ceux de Paris et de Beauvais, celui de sainte
Barbe[36]; pour ceux de la famille de feu M. Fortet, et à leur deffaut,
pour Paris et saint Flour, celui de Fortet[37]; pour ceux de la Famille
de Godefroy de Boissy, celui du même nom[38]; tous lesquels sont dans
l’enclos de l’Université.

  [25] Il avoit été fondé par Guillaume Bonnet, évêque de Bayeux.
    L’inscription, que l’on put lire jusqu’à sa démolition, il y a
    vingt-cinq ans, au-dessus de la porte gothique, rue de la Harpe, nº
    107: _Collegium Bajocence, fund. anno 1308_, dispensoit de chercher
    la date de la fondation. On l’avoit réuni à l’Université en 1763.

  [26] Autre fondation épiscopale. On la devoit à Bernard de Fages,
    archevêque de Narbonne, en 1317. Ce collége se trouvoit rue de la
    Harpe, presqu’en face de la rue de l’Ecole de Médecine; rebâti en
    1760, et réuni trois ans après à l’Université, il étoit, depuis la
    Révolution, un hôtel garni, lorsqu’on le démolit vers le même temps
    que celui de Bayeux.

  [27] «Rue des Cordeliers.» Edit. 1691, p. 11.--La comtesse Jeanne de
    Bourgogne l’avoit fondé, en 1331, pour vingt pauvres écoliers de sa
    province. Nous avons dit, dans une des notes précédentes, comment il
    devint l’Ecole de Médecine.

  [28] Il devoit son nom à l’abbé de Saint-Waast, d’_Arras_, Nicolas Le
    Candrelier, son fondateur en 1327. Il fut réuni, en 1763, à celui de
    Louis-le-Grand. Il avoit été transféré de la rue Chartière dans la
    rue des Murs, qui en prit le nom de rue d’Arras, qu’elle porte
    encore.

  [29] Il étoit au nº 7 de la rue Serpente où, de 1330 à 1333,
    l’archevêque de Tours, Etienne de Bourgueil, l’avoit fondé. Les
    bâtiments reconstruits en 1730 existent encore.

  [30] On l’appeloit aussi collége d’Autun. Il se trouvoit au nº 22 de
    la rue Saint-André des Arts, où l’évêque d’Autun, cardinal Pierre
    Bertrand, l’avoit fondé en 1341. Lorsqu’en 1764, on l’eut réuni au
    collége Louis-le-Grand, l’école gratuite de dessin y fut établie
    pendant quelques années. Il fut démoli sous le premier empire.

  [31] L’évêque de Paris, Guillaume de Chanac, l’avoit fondé rue de
    Bièvre, au XIVe siècle, sous l’invocation de saint Michel. On
    l’appeloit quelquefois collége de Chanac. Comme limousin, l’abbé
    Dubois y avoit étudié.

  [32] Fondé rue Bordet, en 1357, par le sieur de Bécoud, dont on fit de
    Bécourt, de Beaucourt, puis de Boncourt. Huit pauvres écoliers, en
    logique ou philosophie, venus de Thérouanne, pays de P. Bécoud, en
    furent, d’abord, les seuls élèves. Il fut réuni, en 1638, ainsi que
    celui de Tournay, au collége de Navarre, qu’il joignoit par une
    espèce de pont qui traversoit la petite rue Clopin. Son nom et ses
    priviléges lui furent laissés. Voilà pourquoi ici nous le voyons
    encore réservé aux écoliers de la ville de Thérouanne, qui
    malheureusement ne pouvoit guère lui en envoyer, depuis qu’en 1552
    Charles-Quint l’avoit complètement détruite. Lorsque l’Ecole
    polytechnique fut fondée au collége de Navarre, on en mit les
    bureaux au collége de Boncourt, qui, depuis lors, a été entièrement
    démoli.

  [33] _Gervais_ Chrétien, chanoine de Bayeux et médecin de Charles V,
    l’avoit fondé en 1370. On l’appeloit aussi collége de _Notre-Dame de
    Bayeux_, à cause du canonicat de son fondateur, et des élèves que
    Bayeux y envoyoit. Il étoit situé rue du Foin-Saint-Jacques, réunie
    aujourd’hui à la rue des Noyers. On en fit, à la Révolution, une
    caserne d’infanterie.

  [34] «Derrière Saint-Hilaire.» Edit. 1691, p. 11.--Ce collége étoit
    rue des Sept-Voies. Il avoit été fondé, en 1409, en exécution d’une
    clause du testament de Guy de Roye, archevêque de Reims. Il n’en
    reste plus rien, depuis longtemps.

  [35] La fondation en étoit due aussi à une disposition testamentaire.
    Grégoire Langlois, évêque de Séez, mort en 1404, avoit légué
    l’argent nécessaire, qui n’eut son emploi qu’en 1427. Ce collége
    n’avoit que huit boursiers, dont quatre du diocèse de Séez. Un don
    de Jean Aubert, en 1634, permit d’en augmenter le nombre. P.
    Lallemand, évêque de Séez, fit rebâtir ce collége presque
    entièrement, en 1730. Quand on le supprima, il devint l’hôtel garni,
    dit _de Nassau_. Il fut emporté, en 1854, par la rue des Ecoles,
    avec le collége de Narbonne, comme lui, rue de la Harpe.

  [36] Il avoit été fondé, en 1460, par Geoffroi Lenormant, professeur
    de grammaire au collége de Navarre, dans l’hôtel de la rue des
    Cholets et de la rue des Chiens ou Saint-Symphorien, qui avoit
    appartenu à P. de Châlon. Sainte Barbe, à laquelle il fut dédié,
    étoit, dit M. J. Quicherat, «la vierge savante qui passa de la plus
    tendre jeunesse dans l’éternité... après avoir vaincu dans la
    discussion les plus habiles défenseurs du paganisme grec.» (_Hist.
    du collége Sainte-Barbe_, t. I, p. 9-10.)--Ce collége ne
    s’administra lui-même, et ne fut réellement fondé, que lorsque
    Robert Dugast, qui l’avoit dirigé, lui eut, en 1557, fait don de
    l’hôtel de Châlon où il étoit établi depuis un siècle. Il y créa
    aussi sept bourses: trois grandes, pour les diocèses d’Autun, de
    Rouen, d’Evreux et de Paris; et quatre petites pour les paroisses
    qu’il avoit administrées: celle de Saint-Hilaire à Paris, celle de
    Saint-Nicolas-des-Alleux-le-Roi, et celle de la Neuville d’Aumont.
    C’est pour ces dernières, situées dans le Beauvaisis, que nous
    voyons ici que des boursiers du diocèse de Beauvais étoient admis à
    Sainte-Barbe, à la fin de 1798, le collége Sainte-Barbe devint
    l’institution de Lanneau, mais reprit plus tard son nom, qu’il a
    gardé.

  [37] Ce collége de Fortet, situé rue des Sept-Voies, devoit son nom au
    chanoine de Paris, Pierre Fortet, dont une disposition
    testamentaire, exécutée en 1397, avoit laissé l’argent disponible
    pour cette fondation. Comme il étoit d’Aurillac, quatre bourses
    étoient destinées à des enfants de cette ville ou du diocèse de
    Saint-Flour, mais pris de préférence dans sa famille. Quatre autres
    bourses étoient réservées pour Paris.

  [38] _V._ ce que nous avons dit plus haut de ce collége de Boissy,
    situé rue du Cimetière-Saint-André, à propos de sa bibliothèque.

On enseigne d’ailleurs publiquement et gratuitement par ordre et aux
dépens du Roi, au Jardin Royal des plantes, Fauxbourg saint Victor, la
Chirurgie, l’Anatomie, la Chimie et la Botanique. Le public est averti
de l’ouverture des Leçons par des Affiches, au commencement de l’hiver
pour les Dissections Anatomiques, et pour les Opérations Chirurgicales,
et au commencement de l’Eté pour la Démonstration des Plantes et pour
les Préparations Chimiques[39].

  [39] «Aux Ecoles de Médecine rue de la Bûcherie, on fait aussi chaque
    année des dissections anatomiques et des opérations chirurgicales,
    mais à prix d’argent.» Edit. 1691, p. 13.

Aux Ecoles de Chirurgie, rue des Cordeliers, on fait aussi annuellement
et gratuitement tous les Hivers des Démonstrations Chirurgicales
Anatomiques, suivant la fondation de feu M. Biennaisse[40].

  [40] «Le public est averti des unes et des autres par des affiches.»
    _Ibid._--Ces écoles de la rue des Cordeliers, auprès de l’église
    dédiée à saint Côme, patron des chirurgiens, étoient plus
    exclusivement chirurgicales que celles de la rue de la Bûcherie,
    dont il a été parlé plus haut. Elles avoient eu pour origine la
    confrérie de Saint-Côme et Saint-Damien fondée, dit-on, par saint
    Louis. C’est par son testament que M. Jean Bienaise, mort le 21
    décembre 1681, après avoir été un des bons praticiens de son temps,
    avoit laissé six cents livres de rente pour deux professeurs chargés
    de faire les démonstrations d’anatomie et de chirurgie, dont il est
    ici question.




MATHÉMATIQUES.


Les Professeurs ès Mathématiques qui sont de l’Académie Royale des
Sciences et qui ont des appartemens à l’Observatoire Royal, pour les
Observations Astronomiques, sont Mrs Cassüni[1], de la Hire[2],
Couplet[3], Sédillot[4] et Cusset[5].

  [1] Jean Dominique, le premier et le plus célèbre de la dynastie des
    Cassini, né en 1625 à Nice, mort en 1712 à Paris. (_V._ son Eloge
    dans les _Œuvres_ de Fontenelle, t. V, p. 322.) Ses principales
    découvertes en astronomie s’y trouvent analysées.

  [2] Philippe de La Hire, de l’Académie des sciences, comme Cassini, et
    professeur de mathématiques et d’astronomie au collége de France. Il
    mourut en 1719 à soixante-dix-neuf ans. Fontenelle a fait aussi son
    éloge, t. VI, p. 1.

  [3] Claude-Antoine Couplet, qui fut plutôt ingénieur-mécanicien
    qu’astronome. Aussi n’étoit-il logé à l’Observatoire que comme garde
    du cabinet des machines. Il mourut le 22 juillet 1722, à
    quatre-vingt-un an. (_V._ son éloge dans Fontenelle, t. VI, p. 159.)

  [4] Il n’est guère connu que par la part qu’il prit, en 1718, au
    voyage du second des Cassini, pour la prolongation de la mesure du
    méridien jusqu’à Dunkerque.

  [5] Lisez Casset. Il devint secrétaire de Bouchu, intendant du
    Dauphiné, mais ne cessa pas de s’occuper de science. On a de lui,
    dans les _Mémoires de l’Académie_ de 1703, une lettre curieuse à La
    Hire sur la montagne soi-disant inaccessible du Dauphiné.

M. de la Hire est encore de l’Académie d’Architecture qui se tient au
Palais Brion[6], où il fait des leçons publiques d’Architecture, par
conséquent sur la Coupe des pierres. M. Rolle[7] qui est aussi de
l’Académie Royale des Sciences, et qui est profond sur l’Algèbre,
demeure rue

  [6] _V._ plus haut ce que nous avons dit de cette dépendance du
    Palais-Royal, où siégea, en effet, l’Académie d’architecture avant
    d’être installée au Louvre.

  [7] Il étoit d’Ambert en Auvergne. L’algèbre, comme on le dit ici, fut
    sa science préférée; il n’eut pas à le regretter. Elle le mena droit
    à l’Académie des sciences, et la solution d’un problème posé par
    Ozanam lui valut une gratification de Colbert, que l’abbé Gallois,
    secrétaire des ministres, dont Rolle avoit accepté la collaboration,
    fit bientôt changer en pension durable. Il mourut en 1719, à
    soixante-sept ans. Fontenelle a écrit son éloge. (_V._ ses _Œuvres_,
    t. VI, p. 74.)

M. Sauveur[8], rue      et      rue      sont Professeurs Royaux au
Collége de Cambray[9].

  [8] Un des plus illustres savants de son temps, pour les mathématiques
    et la physique. Né en 1652 à La Flèche, il mourut, en 1716, à Paris.
    (_V._ son _Eloge_ parmi ceux que Fontenelle a faits des membres de
    l’Académie des sciences, t. V, p. 466.)

  [9] C’est le collége de France, souvent appelé comme il l’est ici,
    parce qu’il avoit été établi dans l’ancien collége de Cambray, qui
    lui-même avoit donné son nom à la place où il s’ouvroit. Sauveur
    professoit au collége de France depuis 1686.

Mrs Hébert, Professeur au Collége de Maitre Gervais, rue du Foin[10], et
Varignon[11] au Collége Mazarini[12], sont encore d’une très
particuliere distinction.

  [10] Nous n’avons rien trouvé sur ce professeur. Peut-être au lieu
    d’Hébert faut-il voir là Hubert, qui professa ensuite à Caen, où il
    resta en relation avec Varignon. (_V. Histoire de l’Académie des
    sciences_, année 1719, p. 39.)

  [11] Pierre Varignon, né à Caen en 1654, mort à Paris en 1722, grand
    ami de l’abbé de Saint-Pierre et de Fontenelle, auquel il légua tous
    ses papiers, et qui a fait son éloge, t. VI, p. 182.

  [12] En même temps qu’on le nommoit, en 1688, de l’Académie des
    sciences, il étoit fait professeur de mathématiques au collége
    Mazarin, et il le resta toute sa vie. C’est après avoir fait sa
    classe, le 22 décembre 1722, qu’il mourut. Il avoit aussi une chaire
    au collége de France.

Les Professeurs qui enseignent chez eux et en Ville toutes les parties
des Mathématiques, sont Mrs Ozanam, rue de Seine[13], Lieutault, rue des
fossez Saint Germain, de Boissiere, rue des Boucheries Saint Germain, et
de Blegny le jeune, près la Madelaine.

  [13] Jacques Ozanam, né en 1640, dans le pays de Dombes, mort à Paris
    le 3 avril 1717. Il fut reçu à l’Académie des sciences en 1701. Ses
    _Récréations mathématiques et physiques_, dont la 1re édition est de
    1699, in-8º, sont un des premiers ouvrages de physique amusante que
    l’on ait publiés. Fontenelle, t. V, p. 557, a écrit l’éloge
    d’Ozanam.

Entre les fameux Ouvriers pour les Instrumens Mathématiques, sont Mrs le
Bas, aux Galleries du Louvre[14], Chapotot[15] et Buterfield[16], sur le
Quay de l’Horloge[17].

  [14] Jean Lebas, qui avoit succédé à son père Philippe Lebas, mort en
    1677. Le logement que celui-ci avoit occupé depuis le 26 janvier
    1670, «avec les autres artisans de réputation dans la galerie du
    Louvre, destinée à cet effet», ainsi qu’il étoit dit dans son
    brevet, avoit été conservé à son fils. Un ouvrier du même métier,
    nommé Ferrier, y avoit devancé Philippe Lebas. (_Registres du
    Secrétariat_, pour 1670, ms. de la Bibl. Nat. Suppl. fr., nº 2771.)

  [15] Ozanam a parlé de lui dans ses _Récréations mathématiques_...
    1696, in-8, t. II, p. 277: «Le sieur Chapotot, dit-il, ingénieur du
    Roi, et fabricateur des instruments de mathématiques à Paris, dont
    l’habitude est de renchérir sur les plus belles inventions.»

  [16] C’étoit un mécanicien allemand,--Lister dit anglais,--qui s’étoit
    établi à Paris depuis quinze ou vingt ans, et que plusieurs
    mémoires: _Niveau d’une nouvelle construction_, 1677, in-12;
    _Adomètre nouveau_, 1681, in-12, etc., avoient déjà fait
    avantageusement connoître. Il y mourut en 1724. On lui doit de
    grands quarts de cercle qui ont beaucoup contribué à sa célébrité.
    Ses boussoles-cadrans, qu’il faisoit d’ordinaire en argent,
    s’appeloient, de son nom, des _Butterfield_.

  [17] Ce quai n’a pas changé d’industries, comme on voit; et déjà sous
    Louis XIV--Chapotot, d’après notre avant-dernière note, en est la
    preuve--les fabricants d’instruments de mathématiques y prenoient le
    titre «d’ingénieur.»--Quelques années après la publication de ce
    _Livre commode_, un fabricant, nommé Lefèvre, s’y distinguoit à côté
    de Chapotot et de Butterfield. L’abbé Bordelon, dans ses _Diversités
    curieuses_, 1699, in-12, t. II, p. 57, a parlé de lui, à propos d’un
    «cadran équinoxial, universel, qui s’oriente, dit-il, sans aiguille
    aimantée, pour voir l’heure au soleil, et tracer les lignes horaires
    sur toutes sortes de plans... Ce cadran, ajoute-t-il, nouvellement
    inventé, est fait par le sieur Le Fèvre, très-habile pour les
    instruments de mathématiques. Il demeure à Paris, aux deux globes,
    sur le quay de l’Horloge, dit des Morfondus.»

On trouve des Cartes de Geographie très curieuses chez M. Samson[18],
aux Galleries du Louvre, et chez Mademoiselle du Val[19], sur le Quay de
l’Horloge.

  [18] Adrien Sanson, fils de Nicolas, mort en 1667, géographe du Roi,
    comme lui. Il ayoit eu un frère aîné, tué le 27 août 1648, dans
    l’une des premières émeutes de la Fronde. Adrien Sanson mourut le 16
    mai 1703.

  [19] Son père P. Du Val étoit «géographe ordinaire du Roi.» Elle
    vendoit ses livres, entre autres un _Traité de géographie_, revu et
    augmenté, quand Du Val fut mort, par le P. Placide, augustin
    déchaussé, qui étoit aussi «géographe du Roi.» Ce Traité devint la
    base du volume classique, connu sous le titre de _Géographie de
    Crozat_, qu’il devoit à la fille du riche financier Crozat, pour
    laquelle on en avoit accepté la dédicace, avec permission de mettre
    son portrait au frontispice. Nous possédons un des rares exemplaires
    où il se trouve. L’édition est de 1704, in-12. La boutique de Mlle
    Du Val n’étoit plus alors au quai de l’Horloge. On lit, en effet,
    sur le titre: «Chez Mademoiselle Du Val, fille de l’auteur, rue
    Saint-Jacques, au Dauphin d’or, vis-à-vis la rue de la
    Parcheminerie.»




MEDECINE ORDINAIRE.


Ce qu’on doit entendre par Medecine ordinaire, est celle qui est
légitimement pratiquée par gens graduez, qui se rapportent assez dans
les principes et dans les maximes essentielles, pour se rendre
reciproquement compte de leur conduite lors des Consultations.

M. le Premier Medecin du Roy[1], a son appartement au Jardin Roial des
Plantes, où il loge quand il est à Paris[2].

  [1] Depuis le 11 avril 1672, ce premier médecin du Roi étoit Daquin,
    dont les appointements cumulés ne s’élevoient pas à moins de 37,000
    livres, suivant l’_Etat de France_ de 1692, p. 235.

  [2] Il y étoit surintendant des démonstrations des plantes, de la
    chimie et de la chirurgie, et touchoit à cet effet 3,000 livres, qui
    se confondoient avec les 37,000 de ses appointements généraux.

Il y a quelques Medecins de Sa Majesté servant par quartier[3], qui
pratiquent à Paris avec beaucoup de réputation, par exemple:

  [3] C’est-à-dire par trimestre. Ils étoient huit: deux par quartier,
    ayant chacun 1,200 livres de gages sans compter, dit l’_Etat de
    France_, «273 livres 15 sous de livrées, chacun pour sa bouche à
    cour.»

Messieurs Lallier[4], rue des Prouvaires, Du Gué[5], près saint Paul,
Fresquière[6], rue sainte Avoye, etc.

  [4] Il étoit de service chez le Roi pendant le quartier d’avril. Il
    étoit aussi, selon l’_Etat de France_, médecin de la Bastille.

  [5] Il servoit en cour, pendant le quartier d’octobre.

  [6] Jean-Baptiste de Fresquières, qui étoit de service pendant le
    trimestre de janvier.

Messieurs du Chesne[7], rue de la Sourdière, et Armand[8], près saint
Gervais, sont encore des Médecins des Maisons Roiales qui ont beaucoup
d’employ à Paris.

  [7] Il étoit médecin du duc de Bourgogne.

  [8] Son nom étoit Souard, mais on ne le connoissoit guère que sous son
    prénom d’Armand. Il étoit non pas médecin, mais chirurgien, et comme
    tel attaché à la maison de Madame, duchesse d’Orléans.

M. Mayeux, Doyen en charge de la Faculté de Medecine de Paris, demeure
ruë de Bièvre.

M. Legier, censeur de la même Faculté, demeure ruë de Grenelle, quartier
saint Honoré.

Messieurs le Moine, rue des Poulies, et le Rat, rue du Four S. Germain,
sont Professeurs en Chirurgie, et Messieurs Daval, rue du Monceau Saint
Gervais, et de la Carlière, rue du Batoir, en Botanique et Pharmacie.

On peut recouvrer la Liste des Docteurs de cette Faculté chez le
Concierge de leur Collège rue de Bucherie, qui ne comprend que des gens
d’une profonde érudition, entre lesquels il y en a un grand nombre qui
sont fort renommez dans le public: par exemple, Messieurs Morin[9], rue
Cristine, Theüard, rue Roiale, Thuillier[10], rue de Grenelle,
Finot[11], rue de la Monnoye, Mathon, à la Pierre au Lait, etc.

  [9] Ils étoient deux que Lister, dans la relation de son voyage à
    Paris, dit être «des gens fort instruits.» L’un, né à Toulon, étoit
    naturaliste. L’autre, celui qui figure ici, né au Mans, étoit
    médecin. Ils arrivèrent presque en même temps à l’Académie des
    sciences. Louis Morin, le médecin, qui étoit aussi grand botaniste,
    mourut le 1er mars 1715 ayant près de quatre-vingts ans. Fontenelle
    a écrit son _Eloge_. (_V._ le t. V de ses _Œuvres_, p. 380.)

  [10] Il étoit docteur-régent de la Faculté de médecine de Paris. Son
    fils Adrien eut le même titre, et fut de plus de l’Académie des
    sciences. (_V._ Fontenelle, t. V, p. 54.)

  [11] C’est le même que Lister appelle Minot, et dont il dit qu’il
    étoit «au prince de Conti, et qu’il l’avoit autrefois connu à
    Montpellier.»

Messieurs Dodard, à l’Hôtel de Conty[12], et Bourdelot[13], rue sainte
Croix de la Bretonnerie, ont chacun un parfait assortiment de tous les
Livres de Philosophie et de Medecine.

  [12] Denis Dodart, de l’Académie des sciences, né en 1634 à Paris, où
    il mourut en 1707. On lui doit, entre autres ouvrages, la _Statica
    medicina gallica_. C’est comme conseiller-médecin du prince qu’il
    logeoit à l’hôtel de Conti. Fontenelle a écrit son _Eloge_, t. V, p.
    190.

  [13] Pierre-Bonnet Bourdelot, premier médecin de la duchesse de
    Bourgogne, qui le gardoit près d’elle à Versailles. Lister vante son
    savoir, surtout pour l’histoire de la science qu’il pratiquoit, ce
    qui confirme ce qu’on lit ici à propos de sa riche bibliothèque: «Je
    citerai encore, dit-il, M. Bourdelot, médecin de la duchesse de
    Bourgogne, qui est bien pensionné et logé à Versailles. C’est un
    savant homme qui connoît parfaitement l’histoire de la médecine.»

M. de Blegny, Medecin du Roy, préposé à la recherche et vérification des
Nouvelles Découvertes de Medecine, demeure au Jardin Medicinal de
Pincourt, fauxbourg saint Antoine, et tient Bureau rue de Guenegaud tous
les jours de relevée. Celui là est fort renommé pour les Decentes, pour
les maux vénériens, pour les maladies des femmes et des enfants, pour
les hidropisies, pour les Rheumatysmes inveterez, et généralement pour
les maladies extraordinaires.

M. Agnan ci-devant l’un des deux Capucins qui travailloient au vieux
Louvre[14], et qui a pris ses Degrez en la Faculté de Padoue, a quelques
expériences pour les maladies croniques, il demeure rue et près les
Incurables.

  [14] Ces capucins du Louvre, comme on les appeloit, et dont Mme de
    Sévigné, entre autres remèdes, estimoit tant l’eau d’émeraude (édit.
    Hachette, t. VII, p. 411, 414), avoient été deux: le P. Agnan nommé
    ici, et le P. Rousseau qui étoit mort à cette époque. Le nom par
    lequel on les désignoit leur étoit venu de ce que le roi, sur la
    recommandation de Condé émerveillé de leurs remèdes, leur avoit
    donné un appartement et un laboratoire au Louvre, où, pendant près
    de deux ans, ils eurent tout le loisir de travailler. Le frère du P.
    Rousseau publia en 1697, in-12, un volume devenu rare: «_Secrets et
    remèdes éprouvez, dont les préparations ont été faites au Louvre, de
    l’ordre du Roy_, par deffunt M. l’abbé Rousseau, cy-devant capucin
    et médecin de Sa Majesté.» Le P. Agnan est nommé dans
    l’avertissement, comme «confrère et co-inventeur de notre illustre
    deffunt.» Il est resté de Rousseau, dans le _Codex_, une sorte
    d’hydromel fermenté et opiacé connu sous le nom de vin ou «gouttes
    de Rousseau.» (_V. Le Vieux-Neuf_, 2e édit., t. II, p. 388.)--Le
    curieux et rare volume publié en 1693, l’_Ancienne médecine à la
    mode_, est du capucin Aignan, qui du reste l’a signé.

M. Elvetius, Médecin Hollandois, qui donne une poudre émétique contre
les cours de ventre et dissenteries, demeure rue Serpente[15].

  [15] «Le médecin Hollandais, renommé pour quelques remèdes
    spécifiques, demeure rue Gille Cœur.» Edit. 1691, p. 15.--Le remède,
    auquel Helvétius dut sa réputation et sa fortune, étoit
    l’_Ipécacuhana_ récemment importé du Brésil, et que lui avoit fait
    connoître un droguiste de Paris. Reçu docteur en médecine, et
    naturalisé françois, il obtint, le 19 juillet 1688, permission de
    débiter son remède, pendant quatre années, après épreuves faites à
    l’Hôtel-Dieu par Daquin, premier médecin. (Biblioth. Nat., _mss.
    Clairambault_, t. 556, p. 798.) Le roi le lui acheta ensuite une
    très-forte somme. Il trouva plus tard un fébrifuge excellent, et ne
    commença qu’alors à ne plus passer pour un empirique: «Helvétius,
    écrit Racine à son fils, le 24 sept. 1691, est en réputation même
    pour les fièvres, et il va partout comme les autres médecins.» On
    peut lire sur lui quelques pages curieuses dans l’_Elite des
    Bons-Mots_, 1731, in-12, t. I, p. 469.--Son fils fut le riche
    financier philosophe, auteur du livre _De l’Esprit_.

La veuve Nion, Libraire, dont l’adresse est à la première page[16], vend
la Biblioteque universelle des secrets de Medecine recherchez et
publiez, par ordre de M. le premier Médecin de Sa Majesté[17], le
Recueil des Journaux de Médecine, le Traité Medicinal du Thé, du Caffé
et du Chocolat[18], les Observations astronomiques et Medicinales qu’on
doit à l’invention des lunettes d’aproche, et plusieurs autres Livres
curieux à l’usage des Medicins.

  [16] La veuve Nyon, dont la librairie, devenue exclusivement
    classique, existe encore à la même place sur le quai Conti, alors
    appelé quai de Nesle, avoit eu pour mari Denis Nyon, fils de
    Guillaume Nyon, reçu libraire en 1580. Après elle, son fils Jean-Luc
    dirigea sa librairie, et quand il fut mort, sa femme, autre veuve
    Nyon, en garda la direction jusqu’à ce qu’elle mourut en 1747. Elle
    s’appeloit Marie-Anne Didot, étoit fille de Denis Didot, marchand de
    Paris, et avoit pour frère François Didot, qui, reçu en 1713, fut
    dans sa boutique du quai des Augustins, _à la Bible d’or_, le
    premier libraire de la longue et illustre dynastie des Didot.

  [17] L’édit. de l’année précédente donnoit plus de détails sur ce
    point: «On a, depuis peu, y est-il dit, par ordre de M. le premier
    médecin du Roi, fait un recueil général de tous les remèdes secrets,
    tant de ceux qui avoient déjà été publiés que de ceux qui estoient
    réservez en manuscrits dans les bibliothèques curieuses, ou qui
    avoient esté communiquez par divers particuliers aux médecins de la
    Société royale. Ce recueil, qui est compris en deux gros volumes
    in-8º, se vend six livres, chez la veuve Nion, devant l’abreuvoir
    Guénegaud, où l’on trouve encore tous les autres de M. de Blegny qui
    en est auteur.» Il nous a dit, en effet, tout-à-l’heure, qu’il étoit
    «préposé à la recherche et vérification des nouvelles découvertes de
    médecine.»

  [18] Blegny, qui tout-à-l’heure fera de si belles réclames à ses
    remèdes, annonce ici discrètement un de ses livres, publié cinq ans
    auparavant, et dont voici le titre exact: _Le bon usage du thé, du
    café et du chocolat, pour la préservation et la guérison des
    maladies_. Lyon, 1687, in-12. L’ouvrage qui suit doit aussi être de
    lui, mais nous ne pouvons l’assurer.

Pour la Société Roiale de Medecine, voiez l’article des Rapports et
Verifications d’Experts.

L’Histoire de la Medecine et des Medecins nouvellement publiée par M.
Bernier[19], auteur de l’Histoire de Blois, se vend chez Simon
Langrögne, rue saint Victor. Les premières parties de ce Livre estant
comme un extrait du Dictionnaire Historique de Morery[20], on le lit
avec plaisir, jusqu’à l’endroit où l’Auteur a donné de fortes atteintes
à l’honneur de gens vertueux et recommandables[21], dont apparemment il
a voulu se distinguer.

  [19] Ce sont les _Essais de médecine_ de Jean Bernier, auxquels il ne
    donna le titre d’_Histoire chronologique de la Médecine_, qu’à la
    seconde édition, en 1695. La première étoit de 1689. Il avoit fait,
    comme on le dit ici, une _Histoire de Blois_, sa ville natale.

  [20] Dans le chapitre IV de la 1re partie de son livre, Bernier fait,
    en effet, l’histoire chronologique de la médecine et des médecins,
    et n’y reproduit guère que ce qu’on en lisoit dans Moréri.

  [21] Les gens «vertueux et recommandables», dont parle ici Blegny,
    sont lui-même et ses pareils, les charlatans, que Bernier malmène
    d’importance dans son XIIIe chapitre: _Des charlatans prétendus
    médecins, et des médecins charlatans_. «Quant à nos empiriques, y
    dit-il par exemple, ce ne sont ordinairement... que des
    banqueroutiers, des gens ruinez ou saisis, des fugitifs, des
    téméraires: au moins des gens sans étude, sans principes, sans
    caractère.» Parmi tous ces gens, pour se reconnoître, Blegny n’avoit
    que l’embarras du choix, et son imprudence fut de vouloir se venger
    de l’attaque par l’ironique riposte qu’on lit ici, et qui lui valut
    de plus directes représailles. Dans l’_Anti-Menagiana_, publié en
    1693, Bernier, qui ne l’avoit pas nommé dans ses _Essais_, le nomme
    sans pitié, et cela dès sa préface, p. 16, où, parlant de son
    almanach et des ennuis qu’il lui avoit attirés, il dit: «l’auteur en
    est Blegny, le bastillé et le bastillable.» Ailleurs, p. 118, il y
    revient dans une attaque contre Ménage et ses assemblées du cloître
    Notre-Dame, «qui, dit-il, ne sont plus guères célèbres que dans
    l’_Almanach des adresses_ d’Abraham Du Pradel.» Plus loin, p.
    230-231, autre attaque encore contre l’homme et son livre. Blegny,
    comme on voit, n’avoit gagné à se défendre que des horions nouveaux.

La Medecine pratique d’Ettemuler imprimée à Lyon en latin et en
françois[22], se trouve chez presque tous les Libraires de la rue Saint
Jacques.

  [22] Ce sont les _Institutions de médecine_ de Michel Ettmüller, mort
    en 1683.




MEDECINE EMPIRIQUE.


Cette espèce de Medecine est celle qui est pratiquée par des
particuliers, dont l’étude n’a pas esté assez réglée pour parvenir aux
degrez, et qui se fondent principalement sur les épreuves de quelques
Receptes medicinales.

Il n’y a presque à présent que des Ecclésiastiques et des Religieux qui
pratiquent à Paris cette sorte de Medecine[1]; par exemple, M. l’Abbé
Guiton qui étoit n’agueres Religieux Cordelier, et qui demeure à présent
à l’Arsenal.

  [1] C’est, mais très-brutalement, ce que dit aussi Bernier dans son
    chapitre cité tout-à-l’heure. Les empiriques sont pour lui la
    plupart «des moines ignorants, et las de la robe,... des pieds
    déchaux, qui ne savent où donner de la tête.»

M. l’Abbé Fayolles, qui demeure rue Mazarini.

M. le Curé d’Evry, Village de Brie[2], qui donne avec permission une
boisson sudorifique, par la chaleur de la quelle il tache de consommer
les causes des maladies.

  [2] Evry-les-Châteaux, canton de Brie-Comte-Robert, département de
    Seine-et-Marne.

Un autre Ecclésiastique, qu’on nomme M. le Prieur, et qui demeure ruë de
la Raquette, Fauxbourg saint Antoine, est fort recherché pour un
apéritif qu’il dit propre à déboucher les plus facheuses opilations dans
les deux sexes[3].

  [3] Il est traité plus cavalièrement dans l’édit. précéd., p. 18:
    «Assez près du jardin médicinal de Pincourt dans la rue de la
    Raquette, il y a un prieur qui s’entremet de médecine, et qui se dit
    très-habile.» Rue de la Raquette, c’est, comme on sait, rue de la
    Roquette.--Bernier, p. 296 de ses _Essais_, semble faire allusion à
    ce remède du prieur: «Je n’ai garde, dit-il, de donner ici à
    connoître ceux qui ont débité et fait valoir aux simples: qui des
    remèdes pour les dents;... qui... des stipiques à divers usages, des
    _apéritifs_...»

Le Frère Ange, Capucin[4], qui distribue un Opiatte et un Sirop
mesentirique et epatique, est resident au Fauxbourg saint Jacques.

  [4] «Renommé pour la cure des maladies chroniques... au couvent du
    faubourg Saint-Jacques,... a un laboratoire assez curieux.» Édit.
    1691, p. 18.

Le Frère Pierre, des Jacobins du Fauxbourg saint Germain, fait des
recherches dans la Chimie.




OPERATIONS CHIRURGICALES.


Monsieur le premier Chirurgien du Roy, a son appartement au vieux
Louvre, où il loge quand il est à Paris.

M. de Tertre, son Lieutenant pour la Ville, Prevoté et Vicomte de
Paris[1], renommé pour la saignée et pour la grande Chirurgie[2],
demeure rue du Jardinet, à l’ancien Hotel de Roüen.

  [1] François Du Tertre, que l’_Etat de France_ pour 1692, t. I, p.
    240, qualifie «lieutenant des chirurgiens de Paris», retenu par le
    Roi pour «l’employer où il pourra en avoir affaire. Il a cinq mille
    et tant de livres d’appointements.» Les chirurgiens du Roi qui
    étoient au nombre de neuf, un premier ordinaire, et huit ordinaires
    servant par quartier, pouvoient, d’après une déclaration de Louis
    XIII, «tenir ou faire tenir boutique, enseigne de chirurgien, où
    seront les armes du Roy, exclusivement à tous autres barbiers
    chirurgiens.»

  [2] Il prenoit le titre de premier chirurgien du Roi et du Parlement.

Les Prévots, Jurez et Gardes de la Communauté des Chirurgiens Jurez de
Paris, sont Messieurs David, rue de l’Arbre sec: Cuqüel, rue Galande,
Caubouë, rue Montorgueil: et Gigot, rue saint André.

La Liste générale des maîtres de cette Communauté se peut recouvrer aux
Ecoles de Chirurgie près l’Eglise de saint Côme. L’exactitude du chef
d’œuvre[3] et des exercices qui s’y font en tout temps, doit faire
presumer que cette liste n’est composée que d’habiles gens; et en effet
il y en a peu qui ne se soient rendus recommandables par quelques
endroits: par exemple, pour les grandes Opérations, Messieurs Petit à
l’Hôtel Dieu[4]. Bessière, près la Trinité[5]. Triboulleau, rue des
Juifs. Roberdeau, rue saint André. Haustome, rue de la Truanderie, etc.

  [3] On sait que c’est ainsi que s’appeloit dans toutes les
    corporations l’épreuve décisive pour être reçu maître. Pour la
    communauté des chirurgiens, ce devoit être une opération faite avec
    succès.

  [4] On a de lui un _Traité des maladies des os_, et un certain nombre
    de mémoires parmi ceux de l’Académie des sciences.

  [5] «M. Bessière, chirurgien fameux pour les playes et pour les
    grandes opérations, demeure rue d’Arnetal (Grenétat), près la
    Trinité.» Edit. 1691, p. 18.--Jacques Bessier--c’est son vrai
    nom--fut, en effet, célèbre. C’est un des quatre chirurgiens
    auxquels le roi accorda des lettres de noblesse, il les obtint en
    1712. Julien Clément, qu’on trouvera tout-à-l’heure, en avoit eu de
    semblables l’année précédente.

Pour les Consultations M. Morel, rue du Bac, près les Convalescens[6].

  [6] «M. Morel, premier chirurgien de la Charité, recherché pour les
    consultations chirurgicales...» Edit. 1691, p. 18.--L’hôpital des
    convalescents, près duquel il demeuroit, se trouvoit rue du Bac, à
    la hauteur du nº 98, qui le remplace. Il avoit été fondé, en 1642,
    par Mme de Bullion, femme du surintendant des finances, pour les
    convalescents de la Charité. Tous y étoient admis, à l’exception des
    soldats, des laquais et des prêtres.

Pour la Saignée Messieurs Gillet, rue d’Orléans. Passerat, rue Neuve des
Petits Champs. Canto, rue des Boucheries saint Germain. Gervais, rue
saint Antoine. Meurisse, rue saint Jacques, etc.

Pour la reduction des os rompus et demis, M. Michault, rue Hautefeuille,
etc.

Pour les accouchemens, Mrs Mauriceau, rue neuve de Richelieu. Clément,
rue et devant le petit S. Antoine[7]. Portail et Bonnamy, rue saint
Martin. Desforges, près saint Eustache. De Frades, rue Comtesse
d’Artois, etc.

  [7] «M. Mauriceau, chirurgien-accoucheur, auteur d’un traité des
    maladies des femmes, qui se vend chez d’Houry, rue Saint-Jacques,
    demeure dans la rue des Petits-Champs.--Monsieur Clément, qui a eu
    l’honneur d’accoucher Madame la dauphine, demeure devant le petit
    Saint-Antoine.» Edit. 1691, p. 18.--Mauriceau, qui fut si célèbre
    pour les accouchements, et dont le _Traité des femmes grosses_,
    qu’il publia en 1681, et qu’il traduisit lui-même en latin, resta
    classique en chirurgie jusqu’à nos jours, avoit en effet demeuré rue
    Neuve-des-Petits-Champs avant d’aller rue de Richelieu. Il y
    logeoit, quand son _Traité_, qu’il vendoit lui-même, parut. On lit
    sur le titre: «Chez l’auteur, au milieu de la rue des Petits-Champs,
    _au bon Médecin_.» Cet accoucheur avec enseigne ne doit pas
    surprendre. C’étoit l’usage, que les sages-femmes continuent encore.
    La plupart des chirurgiens tenoient d’ailleurs boutique, et une
    enseigne leur étoit nécessaire. On lit dans les _Œuvres_ de Santeul,
    1698, in-12, 2e part., p. 178, un distique qu’il avoit fait pour une
    de ces enseignes: _Sur un tableau de la charité de Saint Louis_, y
    est-il dit, _à la boutique d’un chirurgien, proche Saint Martial_:

        Ne medicas adhibere manus dubitaveris œgro,
            Admonet hæc pietas regia, te que docet.

Pour l’Anatomie Messieurs Chevalier, rue de la Pelleterie, et Dalibourg,
rue Neuve de Richelieu.

M. Tolet Opérateur du Roy pour l’opération de la Pierre qu’on nomme
_Lithotomie_, demeure rue Jacob près la Charité[8].

  [8] «M. Tolet, qui a été longtemps chirurgien de la Charité, où il a
    pratiqué cette opération (de la pierre), et qui est auteur d’un
    livre qui en traite particulièrement, demeure rue Jacob, près le
    portail de cet hôpital.» Edit. 1691, p. 18.

Messieurs Collot père et fils, fameux pour la même opération, demeurent
rue de Seine quartier saint Germain.

M. Gervais, rue Mazarini au coin de la rue de Guénegaud, a un
particulier talent pour penser les loupes, les signes et les porreaux.

M. Girard Chirurgien Opérateur qui s’attache particulierement à la
Catharacte, et qui fait son sejour ordinaire à Chalons en Champagne
vient à Paris tous les ans au Printemps, et loge rue de la Huchette à
l’enseigne des Capillaires de Montpellier[9].

  [9] Enseigne toute pharmaceutique. Il sera parlé plus bas, p. 169, n.
    2, du sirop que faisoit Blégny avec «les capillaires de
    Montpellier.»

M. Quarante qui a succédé au feu Sieur Carmeline[10] son oncle pour les
maladies et pour les opérations de Dens, demeure sur le quay de la
Megisserie devant le Pont neuf.

  [10] Ce Carmeline, l’arracheur de dents, avoit été célèbre dès le
    temps de la Fronde. Il est souvent parlé de lui dans _les
    Mazarinades_. Sa boutique étoit sur le Pont-Neuf, au rez-de-chaussée
    de l’un des deux pavillons de la place Dauphine, où, suivant _le
    Chevræana_ il s’étoit donné pour ingénieuse devise ce vers un peu
    arrangé du VIe livre de l’_Œnéide_:

        _Uno_ avulso non deficit alter.

    Son neveu, que Blégny nous présente ici, ne le fit pas oublier.
    L’arracheur de dents par excellence fut toujours Carmeline. Ecoutez
    Racine dans une lettre à son fils, du 4 octobre de cette même année
    1692: «Si vous aviez bien lu la vie de Cicéron par Plutarque, vous
    auriez vu qu’il mourut en fort brave homme, et qu’apparemment il
    n’auroit pas fait autant de lamentations que vous si M. Carmeline
    lui eût nettoyé les dents.» En 1696, on ne nomme encore que
    Carmeline; de son neveu et successeur Quarante pas un mot: «C’est,
    dit Arlequin, à la scène première du premier acte d’_Arlequin
    Misanthrope_ joué cette année-là, c’est une beauté surannée, qui
    oublie qu’elle n’a pas une dent dans la bouche sur laquelle
    Carmeline n’ait une hypothèque spéciale.»

Les Sieurs du Moulin, à la Croix du Tiroir, Surin et Coupart au Pont
Marie, s’exercent aux mêmes opérations.

Les Sieurs Langlois[11], rue Montmartre; de Rere et Cuvillier, à la
Croix du Tiroir, sont occupez à la reduction des os fracturez et
disloquez.

  [11] Pierre Langlois, docteur de la faculté de Montpellier, qui
    soutint, de concert avec François Prieur, de la faculté de Reims,
    une lutte fort vive, en 1695, contre «les doyens et docteurs de la
    Faculté de Médecine de Paris», qui ne vouloient pas les reconnoître,
    et refusoient de consulter avec eux. Après un an de guerre de
    mémoires et _factum_, le roi donna raison aux deux docteurs
    provinciaux. Ce dédain des médecins de Paris étoit depuis longtemps
    de tradition chez eux. Furetière n’avoit-il pas dit, en 1664, dans
    sa IVe satire: _le Médecin pédant_:

                  ... Il traite d’écolier
        L’homme le plus savant, s’il vient de Montpellier.

Mademoiselle de Blegny directrice honoraire et perpetuelle de la
Communauté des Jurées Sages Femmes de Paris, qui pratique seulement pour
les personnes de la première qualité et pour celles qui luy sont
confiées, demeure chez M. son Fils Apoticaire du Roy, ruë de Guenegaud,
première porte à droite[12].

  [12] Cet article est différent, moins long, mais plus curieux dans
    l’édition précédente, p. 19. Blégny n’ose pas y nommer sa femme: «la
    Directrice en chef honoraire et perpétuelle des jurées sages-femmes
    de Paris, dit-il, demeure au Jardin médicinal de Pincourt, où les
    dames de province peuvent faire leur couche à un écu par jour.»

Les Directrices agentes de la Communauté, sont Mesdames Langlois, rue
Dauphine, Soret, rue Transnonnain, Cuvilliers, place Baudoyer, et
Regnault, rue du Crucifix saint Jacques de la Boucherie.

Pour les Jurez Chirurgiens et les Jurées Sages-Femmes du Châtelet, voyez
l’article des Rapports et Verifications d’Experts.

On est renvoyé au même endroit pour le Traité des Rapports de Chirurgie.

Le Livre des Accouchemens de M. Mauriceau[13] et celuy des Décentes de
M. de Blegny, se vendent chez Laurent d’Houry, rue saint Jacques[14].

  [13] _V._ plus haut, p. 159-160, sur Mauriceau et son livre.

  [14] Il avoit été reçu libraire à la place de Jean d’Houry, son père,
    en 1678.

Le Traité des Maux Vénériens[15] du même Auteur, se trouve chez Estienne
Michallet, rue saint Jacques, et chez la veuve Nion, quay de Nesle[16].

  [15] Les remèdes contre ces maladies étoient les plus exploités, et
    cela pour de honteuses raisons que Lister nous explique au chapitre
    XI et dernier de son _Voyage à Paris_ en 1698: «Ces traitements
    secrets, dit-il, ont mis en pratique de misérables petites espèces
    de toute sorte, et leur ont donné lieu d’insulter les familles,
    sitôt qu’elles ont été au fait de leurs malheurs... Tout le monde
    ici s’en mêle, et veut avoir son spécifique contre cette maladie:
    Apothicaires, barbiers, femmes, moines...»

  [16] Dans l’édit. de 1691, p. 19-20, Blégny donne bien mieux qu’ici la
    liste de ses livres: «Chez la veuve Nion... l’on trouve tous les
    autres livres de M. de Blegny, à sçavoir: le _Recueil des nouvelles
    découvertes de médecine_, en quatre volumes in-douze, qui se vendent
    huit livres--il n’a été parlé plus haut que de l’édit. en deux
    volumes in-8, sans indication de prix;--le _Remède anglois_, publié
    par ordre du Roy, qui se vend vingt sols; l’_Art de guérir les
    maladies vénériennes_, en trois volumes in-12, qui se vendent quatre
    livres dix sols; l’_Art de guérir les descentes_, qui se vend une
    livre dix sols; la _Doctrine des rapports de chirurgie fondée sur
    les maximes d’usage et sur la disposition des nouvelles
    ordonnances_, qui se vend une livre cinq sols; le _Bon usage du thé,
    du caffé et du chocolat, pour la préservation et pour la guérison
    des maladies_, qui se vend une livre dix sols; les _Observations qui
    ont esté faites dans les astres depuis l’invention des lunettes
    d’approche avec les utilitez qu’on en peut tirer pour la pratique de
    la médecine_, qui se vend une livre cinq sols, et quelques autres.»

On trouve un grand nombre d’autres Livres de Chirurgie chez les mêmes
Libraires.




MATIERES MEDÉCINALES SIMPLES ET COMPOSÉES.


Les Marchands Epiciers qui s’attachent particulièrement à la Droguerie
medecinale[1], sont pour la plu-part dans la rue des Lombards: par
exemple, Messieurs Tranchepain, Vilain et Michon.

  [1] Les épiciers, sous prétexte de drogueries, s’étoient faits de
    véritables apothicaires, mais cela n’alla pas sans procès. Il y en
    eut un notamment fort grave entre ces rivaux de la pilule et des
    drogues, en 1633. Gui Patin en a parlé. (_V._ ses _Lettres_, anc.
    édit., t. I, p. 38, et II, p. 134.) A Paris, l’affaire s’arrangea;
    mais un siècle après, elle se ralluma en province, à Chartres, où le
    démêlé entre les épiciers et les apothicaires fit très-grand bruit
    en 1758. On en trouvera quelques détails dans l’_Année littéraire_
    de Fréron, 1758, t. VIII, p. 256. Pendant que les apothicaires de
    province contestoient aux droguistes la vente des remèdes, les
    droguistes de Paris faisoient la même querelle aux religieux carmes
    ou jésuites qui s’étoient mis avec eux en concurrence: «les
    jésuites, écrit Voltaire à Thiriot le 15 septembre 1768, eurent, il
    y a quelques années, un procès avec les droguistes de Paris, pour je
    ne sais quel élixir qu’ils vendoient fort cher, après avoir vendu de
    la grâce suffisante qui ne suffisoit point, tandis que les
    jansénistes vendoient de la grâce efficace sans efficacité. Ce monde
    est une grande foire, où chaque Polichinelle cherche à s’attirer la
    foule; chacun enchérit sur son voisin.»

Il y a néanmoins de ces Droguistes en quelques autres endroits de la
Ville: par exemple, Messieurs Andry, rue de la vieille Bouclerie[2],
Brousset, rue neuve saint Mederic[3]; Moulin, rue des trois Maures;
Boileau, rue des Lavandières[4], etc.

  [2] Son fils, qui se faisoit appeler Andry de Boisregard, publia, en
    1738, un volume sous ce titre: _Cléon à Eudoxe, touchant la
    prééminence de la médecine sur la chirurgie_.

  [3] «Au coin de la rue Macon.» Edit. 1691, p. 32.

  [4] «Quartier Sainte-Opportune.» _Ibid._

Les uns et les autres vendent en gros et en détail, généralement tout ce
qui peut faire le sujet des opérations de la Pharmacie et de la Chimie,
à l’exception de quelques métaux dont il sera parlé dans un chapitre à
part; de la plûpart des herbes qui sont vendues dans les Halles et
Marchez par les Herboristes, et des fleurs qu’on trouve dans leurs temps
le matin, rue aux Fers près saint Innocent, ou chez les Fleuristes ou
Bouquetières.

Les Maitres et Gardes en Charge de l’Apoticairerie, sont Messieurs
Clément à l’Hôtel de Soissons; Gaillard, rue saint Honoré près saint
Roch, et Martel, rue saint Avoye.

Et ceux de l’Epicerie et Droguerie sont Messieurs Harland, rue saint
Jacques de la Boucherie; Boudet, rue saint Martin; et Chabouillé, rue de
la Cordonnerie.

Les Apoticaires et les Epiciers qui ne composent ensemble qu’un même
corps, ont leur Bureau au petit cloître sainte Opportune.

Il y a plusieurs Apoticaires de cette Communauté qui se piquent d’avoir
chez eux un grand assortiment de préparations Chimiques et
Pharmaceutiques: par exemple,

Messieurs Geoffroy, ruë Bourtibourg[5], et Bolduc[6], rue des Boucheries
saint Germain, qui opère au Jardin Royal des Plantes.

  [5] Mathieu-François Geoffroy, qui avoit été échevin en 1785. Il se
    tenoit chez lui des assemblées de savants, dont Fontenelle, dans
    l’éloge qu’il écrivit de son fils, a fait ressortir toute
    l’importance (t. VI, p. 487): «M. Cassini, dit-il, y apportoit ses
    planisphères, le P. Sébastien ses machines, M. Joblot ses pierres
    d’aimant, M. Du Vemey y faisoit ses dissections, et M. Homberg des
    opérations de chymie... Ces conférences parurent si bien entendues
    et si utiles, ajoute-t-il, qu’elles furent le modèle et l’époque de
    l’établissement des expériences de physique dans les colléges.»
    Lister, au chapitre XI de son _Voyage à Paris_, a décrit ainsi
    l’apothicairerie de Geoffroy: «Elle est, dit-il, dans la rue
    Bourgthibourg: l’entrée de la basse-cour est par une porte cochère
    avec des niches, où sont de grands vases de cuivre. Quand vous êtes
    entré, vous trouvez des salles ornées d’énormes vases et de mortiers
    de bronze, qui sont là autant pour la parade que pour l’usage. Les
    drogues et les préparations sont en des armoires rangées autour de
    ces pièces. Sur les derrières sont des laboratoires très-propres et
    parfaitement montés.» Lister parle ensuite du fils de Geoffroy,
    qu’il avoit vu en Angleterre, où il étoit allé avec le comte de
    Tallard. Il le considère comme un jeune homme de la plus belle
    espérance, ce qu’il ne démentit pas. Il arriva, comme médecin, à
    l’Académie des sciences, et, nous l’avons dit, Fontenelle fit son
    éloge.

  [6] Saint-Simon, dont il étoit l’apothicaire, en faisoit le plus grand
    cas: «C’étoit, dit-il (_Mémoires_, édit. Hachette, in-18, t. VI, p.
    238), un excellent apothicaire du Roy, qui, après son père, avoit
    toujours été et étoit encore le nôtre avec un grand attachement, et
    qui en savoit pour le moins autant que les meilleurs médecins, comme
    nous l’avons expérimenté, et avec cela beaucoup d’esprit et
    d’honneur, de discrétion et de sagesse.»

M. Bourdelin Apoticaire de l’Academie Royale des Sciences, a
pareillement une Apoticairerie fort complette dans sa maison rue de
Seine à saint Germain des Prez[7].

  [7] Claude Bourdelin, né à Villefranche, près de Lyon, en 1621, mort à
    Paris en 1699. Il fut, comme chimiste, de l’Académie des sciences,
    dès sa fondation en 1666. Fontenelle, qui a écrit son éloge (t. VI,
    p. 48-50), dit «qu’il fit voir à l’Académie près de deux mille
    analyses de toutes sortes de corps.» Il le vante aussi, comme
    apothicaire, «pour l’exacte et fidelle préparation des remèdes,
    qu’il distribuoit, dit-il, à tout le monde, à un prix égal et
    très-modique.»

Il en est de même de M. Habert Syndic en Charge des Apoticaires des
Maisons Royales, qui fait souvent des Cours publics de Chimie en son
Laboratoire, nie du Four à saint Germain des Prez.

M. Rouviere Apoticaire ordinaire du Roy et des Camps et Armées de Sa
Majesté[8], qui n’est pas moins curieux dans sa profession et qui a fait
deux préparations publiques de la Theriaque d’Andromachus[9] avec un
applaudissement général, vend d’ailleurs une Eau vulnéraire qui est d’un
très grand effet dans les playes d’arquebusade, ruë saint Honoré près
saint Roch[10], où il a une boutique d’une propreté extraordinaire.

  [8] Il fit un cours public de chimie, en 1706, au Jardin des
    Apothicaires, rue de l’Arbalète, près de la rue Mouffetard. On lui
    dut plusieurs découvertes. Il étoit, d’après l’_Etat de France_ de
    1692, p. 354, non-seulement apothicaire «des camps, hôpitaux et
    armées», mais aussi du Dauphin. Il se faisoit appeler Henry de
    Rouvière.

  [9] On attribuoit, d’après Galien (_De antidotis_, lib. I), la
    composition très-compliquée de la _Thériaque_, dont le nom venoit de
    la morsure des bêtes venimeuses, _thêra_, qu’elle guérissoit, au
    médecin de Néron, Andromachus. C’étoit une espèce d’opiat ou
    d’électuaire liquide composé de drogues choisies, dont on finit par
    faire une sorte de panacée. A Venise, les magistrats présidoient à
    sa composition. Aussi est-ce de là que venoit, on le verra plus
    loin, celle qui inspiroit le plus de confiance. A Paris, comme il
    est dit ici, la préparation s’en faisoit chaque année publiquement,
    et il en fut ainsi jusqu’à la Révolution. (_V._ les _Mémoires
    secrets_, t. XXVI, p. 246.) Le célèbre Moïse Charas commença sa
    réputation par un ouvrage sur le fameux remède: _Thériaque
    d’Andromaque, avec des raisonnements et observations nécessaires sur
    l’élection, la préparation et le mélange des ingrédients_, Paris,
    1668, in-8.

  [10] Il avoit, comme confrère et voisin, sur la même paroisse, «un
    apothicaire-épicier», Claude-François Péaget, dont il tint sur les
    fonts, le 27 décembre 1685, la fille Marie-Charlotte, qui devint la
    femme de Crébillon le tragique, et la mère de l’auteur du _Sopha_.
    (Jal, _Dict. critique_, p. 455.)

M. Lemory[11] célèbre par son livre[12] et par ses Cours de Chimie[13],
qui a esté gratifié d’un Privilège du Roy, en faveur de sa
conversion[14], continue ses exercices, et la distribution de ses
préparations Chimiques, et du sel policrete de M. Seignette, chez luy au
bas de la rue saint Jacques[15] où il vend son Livre, qu’on trouve
d’ailleurs chez Estienne Michalet près la fontaine saint Severin.

  [11] Lisez Lémery. Il s’agit, en effet, du rouennais Nicolas Lémery,
    qui fut de l’Académie des sciences, de 1699 à 1715, époque de sa
    mort, et, quoique simple apothicaire, y jeta le plus vif éclat.
    Parmi ses remèdes, qui furent très à la mode, et qui l’enrichirent,
    se trouvoit le _magistère de Bismuth_, qui, tout seul, eût suffi à
    sa fortune. Ce n’est pourtant, comme dit Fontenelle (t. V, p. 393),
    «que ce qu’on appelle du blanc d’Espagne»; mais il n’y avoit que lui
    qui en eût alors le secret à Paris.

  [12] C’est son _Cours de chimie_ publié en 1675, et dont le succès fut
    tel que, suivant Fontenelle, «il se vendit comme un ouvrage de
    galanterie ou de satire.»

  [13] La chimie, science alors nouvelle et par conséquent à la mode,
    lui attira l’affluence la plus choisie: «Il en ouvrit, dit
    Fontenelle, des cours publics dans la rue Galande, où il se logea.
    Son laboratoire étoit moins une chambre qu’une cave et presque un
    antre magique éclairé de la seule lueur des fourneaux; cependant
    l’affluence du monde y étoit si grande, qu’à peine avoit-il de la
    place pour ses opérations.»

  [14] Il étoit de la religion, et la Révocation de l’édit de Nantes
    l’avoit d’autant plus atteint, que tout protestant y avoit perdu le
    droit de s’occuper de la médecine et de ce qui en dépendoit. Lémery
    qui, deux ans auparavant, avoit séjourné en Angleterre, songea
    d’abord à y retourner avec tous les siens, mais il se décida enfin
    pour la conversion, dont on parle ici. Dans les premiers mois de
    1686, c’étoit chose faite.

  [15] Au coin de la rue Galande. _V._ l’avant-dernière note.

M. de Blegny fils Apoticaire ordinaire du Roy sur le quay de Nesle au
coin de la rue de Guenegaud, tient aussi un assortiment complet de
toutes les compositions, extraits, eaux distillées, sels, et Magisteres
de la Pharmacie Galenique, et de la Chimie, tant de la préparation de
Paris, que de celle de Montpellier, de Provence, d’Italie, etc., aussi
bien que les Baumes verts, noirs, et blancs du Pérou, de Judée, etc.[16]

  [16] «L’eau générale contre les vapeurs de l’un et l’autre sexe, la
    crème de perles qui oste les boutons et rougeurs du visage,
    l’opiatte de corail qui entretient la beauté et la bonté des dents;
    la véritable eau de la reyne d’Hongrie et le vrai sirop de
    capillaires de Montpellier, le chocolat dégraissé, la thériaque de
    Venise, le baume apoplectique d’Angleterre, le baume blanc, le baume
    vert et le baume du Pérou; la pommade qui amortit les héméroïdes, la
    poudre de vipère et les vipères mêmes, la pommade contre les
    dartres, les parfums de toutes espèces, les essences de romarin, de
    sauge, de rhue, d’anis, de fenouille, et autres essences fortes
    venant de Montpellier, la fleur de thé, l’eau impériale et toutes
    autres eaux distillées, l’emplastre contre les loupes et ganglions,
    le sirop de caffé, la panacée mercurielle, la poudre sternutatoire,
    l’huile de palme.» Edit. 1691, p. 19.

C’est le seul artiste à qui les descendans du Signor Hieronimo de
Ferranti Inventeur de l’Orvietan[17], ayent communiqué le secret
original[18].

  [17] C’est un électuaire qui avoit été apporté, en 1647, par le
    charlatan d’Orvietto, dont le nom se trouve ici, et qui fut surtout
    connu par son surnom _Orvietano_, qui devint bientôt celui de son
    remède. On le croyoit bon surtout contre les poisons et contre les
    maléfices. C’est pour cela que le Sganarelle de l’_Amour médecin_
    veut en faire prendre à sa fille.

  [18] «L’orviétan original d’Italie, dont la dispensation luy a été
    communiquée par le seignor Hieronimo Cei, dernier héritier du
    secret.» Edit. 1691, p. 19.

Il dispense aussi tous les Remedes achetez et publiez par ordre du Roy.

Une conserve et une liqueur pour la guérison des phtisiques et des
poulmoniques[19].

  [19] «La conserve balsamique qui guérit presque tous les poulmoniques
    en six semaines.» _Id._, p. 17.

Une tizanne filtrée pour purger doucement et agréablement la bile, la
pituite et généralement toutes les superfluitez.

Une Eau vulnéraire qui guérit le Scorbut et les Ulcères de la gorge, les
Cancers, les Ecroüelles ulcérées, la Teigne et les Ulcères malins et
variqueux des jambes et d’ailleurs[20].

  [20] Dans l’édit. précédente, p, 17, c’est à «l’emplâtre
    philosophique» que sont attribuées toutes ces vertus.

Une Eau anodine qui appaise avec une promptitude surprenante la douleur
des dents, toutes les espèces de Coliques, les Véroliques[21], les
Rhumatismes, les Douleurs causées par le mercure, la Sciatique, et les
Gouttes des mains et des pieds.

  [21] C’étoit la grande clientèle de l’époque. Ceux qui prétendoient la
    guérir, faisoient courir par de petits Savoyards, selon Palaprat
    dans la préface de sa comédie des _Empiriques_ jouée en 1697, des
    billets imprimés du genre de celui-ci: «M. Mercurini, napolitain,
    guérit sûrement, promptement, agréablement, et sans obliger à garder
    la maison, toutes sortes de maladies secrètes... M. Mercurini voit
    les hommes. Madame Mercurini voit les femmes.» Il nous semble bien
    que ce sont M. et Mme Blégny, d’autant mieux que l’on trouvera plus
    loin un spécifique de leur façon, «qui guérit promptement, sûrement»
    lesdites maladies. On a vu, d’ailleurs, plus haut, p. 13, que le
    remède de Blégny étoit le mercure, ce qui justifieroit le nom de
    Mercurini que lui donne Palaprat.

Une Liqueur de jouvence[22] qui rectifie les constitutions vicieuses,
qui désopile les viscères obstruez, qui corrige les deffauts de la
digestion, qui guérit radicalement le vertige, la migraine et les
vapeurs, qui regle les excrétions, en un mot qui rajeunit comme une
espèce de fontaine de jouvence.

  [22] Il y a dans le chap. XIII de la 1re partie des _Essais de
    médecine_ de Bernier, quelques lignes contre «une eau de Jouvence»,
    qui pourroit bien être cette liqueur de Blégny.

Une Eau dissenterique d’une vertu infiniment audessus de la Racine
emétique, puis que sans faire vomir ni causer la moindre incommodité,
elle arrête infailliblement en une ou deux prises toutes sortes de cours
de ventre, de flux de sang et de dyssenteries.

Un Spécifique infaillible pour prévenir et pour guérir promptement,
seurement et infailliblement les Maladies Vénériennes.

Des grains et des liqueurs balsamiques pour la guérison des gonorrhées,
des pertes blanches, de l’impuissance venerienne, de l’incontinence
d’urine[23], etc.

  [23] «Des grains balsamiques qui préviennent et qui rectifient toutes
    espèces de pourriture intérieure, qui consolident les ulcères des
    reins, des urètres, de la vessie et du canal urinaire, qui arrêtent
    les gonorrhées habituelles, qui fortifient tous les nerfs, qui
    réparent l’impuissance de Venus, qui épuisent les pertes blanches,
    et qui contribuent très-efficacement à la guérison des descentes et
    des paralisies.» Edit. 1691, p. 16-17.--Cet article y est précédé de
    celui-ci: «les grains dépuratifs, qui dépurent la masse du sang, qui
    desobtruent les viscères et les vaisseaux sanguinaires, qui règlent
    toutes les fonctions naturelles, qui amortissent les levains et qui
    abaissent les vapeurs, enfin qui corrigent tous les vices habituels
    d’une mauvaise constitution.»

Une Epreuve végétale[24] qui guérit à jamais la douleur et la carie des
Dents.

  [24] «Une essence végétale...» _Id._, p. 17. On y lit à la suite de
    cet article: «l’eau rouge de la reine d’Hongrie, qui appaise les
    douleurs de la goutte et des rhumatismes en fortifiant toutes les
    parties... le sirop de vanille, qui a une propriété singulière
    contre la toux et contre les fluxions de poitrine. L’antidote
    universel qui survient (subvient) à toutes les maladies des pauvres
    gens et de leurs bestiaux. Le sirop de thé fébrifuge qui arrête sans
    retour, en très-peu de prises, toutes les espèces de fièvres
    intermittentes. Le Trésor d’Esculape, qui contient dans un
    très-petit volume une excellente panacée et divers autres remèdes
    expérimentez, pour survenir (subvenir) à toutes les occasions
    pressantes et subites.»

Une Eau hysterique qui abaisse les vapeurs des femmes et qui les delivre
sur le champ des plus violentes suffocations et de la plupart des
mauvais travaux.

Les Eaux d’Ange[25], de Cordoüe, d’Amarante, de fleurs d’Oranges, de
Thim, et généralement les Eaux odoriférantes et medecinales qui servent
aux cassolettes philosophiques, pour parfumer et des-infecter les
chambres, et pour guérir les maladies de sympathie[26].

  [25] On l’appeloit ainsi, parce que c’étoit l’eau de senteur par
    excellence, l’eau des Anges. On la faisoit avec de l’iris de
    Florence, du benjoin, du storax, du sental citrin, etc., sur
    lesquels on versoit des eaux de rose et de fleurs d’orange
    distillées.

  [26] Cet article est beaucoup plus curieux dans l’édit. de 1691, p.
    17, surtout pour les «cassolettes philosophiques.» Blégny, comme on
    va voir, ne les appelle alors que «cassolettes royales.» Il parle
    d’abord d’une sorte d’appareil pour le café et le chocolat, dont
    l’invention rappelle singulièrement celle de nos «caléfacteurs», et
    devoit être d’une grande commodité pour les gens qui aimoient comme
    certain gourmet de Regnard à porter «cuisine en poche.» Voici ces
    deux articles: «les caffetières et chocolatières portatives, qui
    n’occupent à peine qu’une seule poche, et ne laissent pas de
    contenir tout ce qu’il faut de thé, de caffé, de chocolat et de
    sucre pour faire trois prises de chaque boisson, la lampe, le
    fourneau, l’esprit de vin, le fusil, les gobelets, les soucoupes,
    les cuillères, etc.--Les cassolettes royales, par lesquelles on
    réduit très-agréablement et très-utilement en vapeur les eaux
    d’Ange, de Roses, de Cordoue, de fleurs d’Orange et d’Amaranthe,
    pour parfumer et désinfecter les chambres sans fumée et à très-peu
    de frais, au moyen d’une lampe à esprit de vin, au-dessus de
    laquelle on place sur deux petites consoles de cuivre, un globule de
    cristal ayant un bec alongé, par lequel ces liqueurs sont attirées
    au-dedans du globule dès qu’on lui a fait ressentir quelque chaleur
    que ce soit, et par lequel aussi elles sont ensuite exhalées en
    vapeur presque imperceptibles, par la flamme de la lampe, qui les
    fait bouillir jusqu’à leur entière consommation sans casser le
    globule, ce qui est d’un effet fort plaisant, mais principalement
    pour les malades, à qui l’on peut faire respirer par ce moyen un air
    chargé de liqueurs médicamenteuses qui conviennent à leurs
    indispositions.»

Plusieurs Remèdes infaillibles pour guerir très promptement les
Decentes, sans opération, sans rien prendre par la bouche, et
quelquefois sans bandage[27] ou sans retraite[28].

  [27] _V._ sur les bandages ou _brayers_, depuis le moyen-âge jusqu’au
    XVIIe siècle, le _Vieux-Neuf_, 2e édit., t. I, p. 134, et plus haut
    p. 13.

  [28] «A cause de quoy il a pareillement établi la manufacture royale
    des bandages à vis et à ressort qui arrêtent les descentes que les
    bandages ordinaires ne peuvent arrêter, et qui contribuent beaucoup
    par cet assujétissement à la guérison de ces maladies.» Edit. 1691,
    p. 16.

Une Eau diûrétique pour la dissolution et l’expulsion des glaires, du
gravier et de la pierre des reins et de la vessie, et un grand nombre
d’autres spécifiques expérimentez pour les maladies des yeux, la
sourdité, les bourdonnemens d’oreilles, les ulcères du nez, les loupes,
les signes, les porreaux, etc.

Une Eau et un Sel fébrifuges, qui guérissent les fièvres sans retour en
très peu de prises.

Tous ces Remèdes sont distribuez dans des bouteilles et boëttes
cachetées[29], sur lesquelles on fait coller l’imprimé qui enseigne
leurs vertus et leurs usages[30].

  [29] Ces boîtes étoient toujours très-soignées, aussi disoit-on
    proverbialement: propre comme une boîte d’apothicaire. C’est ce
    qu’au temps de Rabelais on appeloit des _Silènes_: «Silenes
    estoyent, dit-il (Liv. I, prologue), petites boytes, telles que
    voyons de présent ès bouticques des apothecaires, paintes au dessus
    de figures joyeuses et frivoles, comme des harpyes, satires, oysons
    bridez, lièvres cornuz, canes bastées... et aultres telles
    painctures contrefaictes à plaisir pour exciter le monde à rire...
    mais au dedans, l’on reservoit ces fines drogues, comme baulme,
    ambre gris, amomon, muscq, zivette...» _Silènes_ passoient aussi
    pour boîtes à secret. Erasme se servit du mot dans ce sens,
    lorsqu’il fit, en 1527, son petit livre les _Silènes d’Alcibiade_.
    (V. le _Bulletin du bibliophile_, 1857, p. 152.)

  [30] On ne fait pas autrement aujourd’hui pour les boîtes de pâte de
    Regnault, et autres.

Une personne solvable qui connoit la vertu de ces Remedes, s’oblige
quand on le veut d’en payer la valeur en l’acquit des malades en cas
qu’ils ne guérissent pas, pourvu qu’ils conviennent de les payer au
double pour une parfaite guérison.

Le Sieur Fillesac, rue de la Bucherie joignant les Ecoles de Medecine,
vend toutes sortes d’Eaux minérales artificielles[31].

  [31] «On trouve d’ailleurs des eaux de Forge, rue de la Truanderie, au
    bureau du Messager de Forge.» Edit. de 1691, p. 19.--Les eaux
    minérales artificielles sont vivement moquées par Bernier dans ses
    _Essais de médecine_, 1re part, chap. XIII. On les fait, dit-il,
    avec beaucoup d’eau pure et un peu de vitriol--nous dirions
    aujourd’hui d’acide sulphurique;--or, les limonades gazeuses ne se
    font pas aujourd’hui autrement. Les eaux minérales de Fillesac
    n’étoient donc qu’une sorte de limonade gazeuse. On trouve un
    curieux prospectus imprimé de sa drogue en bouteille dans les _Mss._
    de la collection Delamarre, nº 21, 738, _ad finem_. Un certain
    Barbereau, que La Bruyère a désigné par B. B. dans son chapitre _des
    Jugements_, § 21, lui fit concurrence. Dès 1670, il étoit connu.
    Nous trouvons aux _Mss._ de la Bibl. nat., dans un des registres du
    Secrétariat, une permission, en date du 12 avril 1670, donnée «au
    sieur Barbereau, médecin ordinaire du Roy, de vendre et debiter les
    remèdes de son invention.»

Les Eaux distilées, le Cristal minéral, la Crême de tartre, le Sel
policreste ordinaire, et généralement les Drogueries Chimiques se
vendent en gros chez le Sieur Courtier au cul de sac des petits
Carreaux.

Les huiles d’amandes douces, de noix, de semences froides, de pavôts, et
autres tirées sans feu, sont extraites et vendues aux Apoticaires et
Droguistes par un Epicier qui demeure rue Montmartre près l’égout, et
par un autre qui demeure au carrefour saint Benoist, quartier saint
Germain.

Les essences fortes et les huiles grasses de Provence et de Montpellier
sont commercées par le Sieur Verchant devant saint Honoré, et par les
Provenceaux du cul de sac saint Germain l’Auxerrois[32].

  [32] Ce cul-de-sac existe encore presque en face du chevet de
    Saint-Germain-l’Auxerrois, rue de l’Arbre-Sec. Après avoir quatre ou
    cinq fois changé de nom depuis le XIIIe siècle, il prit, pour ne
    plus le quitter, celui de _Cul-de-sac des Provençaux_, qu’il doit
    aux marchands d’huiles et d’essences de Provence, que nous trouvons
    ici, et dont il sera reparlé.

L’Esprit de vin est commercé en gros à la devise Royale, sur le quay de
Nesle; chez le Sieur Butet, devant saint Roch; et chez la veuve des
Barres, rue S. André.

Les Eaux de vie sont aussi commercées en gros par ledit sieur Butet, et
encore par les Sieurs Hazon, rue saint Martin[33], et Frotin, rue des
Canettes.

  [33] La famille Hazon étoit d’Orléans, dont les eaux-de-vie furent si
    longtemps célèbres. C’est le père de celui que nous trouvons ici,
    qui avoit osé répondre à Colbert l’interrogeant, lui et les
    négociants de Paris et des villes voisines «sur le moyen de rétablir
    le commerce:--Je vous dirai franchement, Monseigneur, que, lorsque
    vous êtes venu au Ministère, vous avez trouvé le chariot renversé,
    et que, depuis que vous y êtes, vous ne l’avez relevé que pour le
    renverser de l’autre côté.» Le ministre fit grise mine, ce qui
    empêcha non-seulement Hazon d’achever, mais les autres de rien dire.
    (Amelot de la Houssaye, _Mémoires histor._, t. II, p. 365.)

Le Sieur Guyon Apoticaire Epicier à la place Maubert, et un autre au
cimetiere saint Jean, font venir des vipères en vie de Poitiers[34].

  [34] La vipère entroit pour une grande part dans les préparations de
    la polypharmacie du XVIIe siècle, surtout dans celles qui devoient
    combattre la blessure même faite par la morsure des vipères. C’étoit
    de l’homœopathie par anticipation. Il entroit aussi des trochiques
    de vipères dans la composition de la thériaque. L’apothicaire
    Charas, dont nous avons parlé, p. 167, et qui fut si célèbre, avoit,
    pour cela, donné à sa boutique de la rue des Boucheries, au coin de
    celle du Cœur-Volant, des _Vipères d’or_ pour enseigne. Cette
    apothicairerie fameuse, dont le titulaire étoit encore un Charas en
    1777, n’a cessé d’exister qu’au commencement de ce siècle.

M. Alary Apoticaire[35] privilegié du Roy, qui (par l’infidelité de ses
Commis) s’est trouvé mal des Bureaux qu’il avoit établi dans les
Provinces, pour la distribution de ses tablettes fébrifuges[36], et de
son Sirop purgatif de la bile, ne laisse pas d’en continuer la
distribution chez luy au bout du pont saint Michel devant le quay des
Augustins à l’enseigne du Page du Roy.

  [35] «De Grou en Provence.» Edit. de 1691, p. 18.--Son fils, l’abbé
    Alary, fut de l’Académie française, et président du club
    philosophique, qui se tenoit chez lui, à l’entre-sol de l’hôtel du
    président Hénault, place Vendôme, d’où lui étoit venu le nom de
    _Club de l’entre-sol_. L’abbé de Longuerue l’avoit stylé à
    l’érudition: «Il se mit, dit le marquis d’Argenson, dans ses
    _Mémoires_ (édit. Jannet, t. I, p. 65), il se mit à dicter à l’abbé
    Alary, qui n’étoit alors qu’un petit garçon, fils de son
    apothicaire, trop heureux d’écrire sous lui.»

  [36] «A cinq sols la prise.» Edit. 1691, p. 18.

Ledit Sieur Alary se propose de publier bien tot un spécifique pour les
fièvres continues, pour la pleuresie, etc., qui agira avec une
promptitude extraordinaire[37].

  [37] L’édit. de 1691, p. 32, donne un article que celle-ci ne
    reproduit pas: «le sieur Soubiron, apoticaire, rue de la
    Vieille-Monnoie, et le sieur Andry, apoticaire-épicier, au carrefour
    de l’Ecole, vendent des drogues et compositions pour les maladies
    des chevaux.»

On vend rue saint Denis à l’enseigne de la Providence près la rue des
Précheurs, une pomade qui répare tous les deffauts de la peau du visage,
et qui donne une fort grande fraicheur au teint.




PENSION POUR LES MALADES.


Cette pension est une nouvelle commodité qu’on a procurée au public
depuis deux ans. Ceux qui sçavent ce que les Officiers, les Provinciaux
et les Etrangers souffrent, depensent et risquent dans les Auberges de
Paris, lorsqu’ils y tombent malades, en comprendront facilement
l’utilité, sur tout lors qu’ils apprendront que cette Pension est placée
à Pincourt[1], c’est à dire dans une grande et belle rue qui étoit
n’aguère un hameau, qui fait maintenant partie des Fauxbourgs de
Paris[2], et qui se trouve entre la porte saint Louis[3] et la porte
saint Antoine[4].

  [1] C’est-à-dire Popincourt, qui devoit son nom, qu’il a repris tout
    entier, à la maison qu’y possédoit M. Jean de Popincourt, premier
    président du Parlement, de 1403 à 1413.

  [2] C’est vers la fin du règne de Louis XIII qu’il avoit été réuni au
    faubourg Saint-Antoine.

  [3] Elle se trouvoit au bout de la rue du Pont-aux-Choux. (_Registres
    de l’Hôtel de Ville pendant la Fronde_, t. I, p. 48.)

  [4] Il y eut toujours de ce côté des maisons de santé. C’est au nº 70,
    rue de Charonne, par exemple, que se trouvoit, à la fin du dernier
    siècle, celle du docteur Belhomme, où tant de prévenus du tribunal
    révolutionnaire firent leur temps de prison, et dans laquelle mourut
    Ramponneau, le fameux pitre, le 4 avril 1802. C’est aussi d’une de
    ces maisons, celle du docteur Dubuisson, près de la barrière du
    Trône, que partit le général Malet, avec ses complices, pour faire
    son incroyable coup d’Etat contre l’Empire.

La maison qu’on a fait bâtir à cet effet, est au milieu de cette ruë, à
l’opposite du cours planté sur le rempart[5] dont elle n’est separée que
par de vastes marais bien cultivez, ce qui forme le plus bel aspect du
monde. Outre la face et les deux ailes du principal corps de logis, il y
a encore au bout d’un grand jardin au dessus d’une haute terrasse en
parterre, un pavillon de Belveder, d’où l’on découvre de tous costez des
vignobles, des plaines, des collines, des jardins et des maisons de
plaisance[6].

  [5] C’est le Cours de la porte Saint-Antoine, qui faisoit alors grande
    concurrence au Cours la Reine, et qui commença la réputation des
    promenades du Rempart ou du Boulevard.

  [6] Cette maison, qui avoit pris de l’endroit où elle se trouvoit, le
    nom de Pincourt, existait encore en 1715, et sembloit même en pleine
    prospérité. Liger en parloit alors ainsi dans le _Voyageur fidèle_,
    p. 241-242: «c’est une maison établie pour les étrangers qui tombent
    malades, et où on les traite moyennant une pension, et à bien
    meilleur prix que dans les auberges. Cette maison est située entre
    la porte de Saint-Louis et la porte Saint-Antoine, dans une grande
    rue où il y avoit autrefois un hameau, et composée de deux ailes,
    qui accompagnent le principal corps de logis. Au bout d’un grand
    jardin, et au-dessus d’une grande terrasse, s’élève un pavillon en
    belvédère, d’où l’on découvre différents objets lointains, qui
    forment une perspective fort agréable.--C’est aussi dans cette
    maison que plusieurs personnes bons bourgeois domiciliez même à
    Paris, vont pour se faire traiter lorsqu’ils sont malades; ceux qui
    sont convalescents seulement choisissent ce séjour agréable pour y
    prendre l’air et de nouvelles forces. Il y a même des dames qui vont
    y faire leurs couches pour jouir d’un plus grand repos et y trouver
    plutôt qu’ailleurs les secours qui, pour lors, sont nécessaires.--Il
    n’y a point de maladies qu’on n’y traite, exceptés les maux
    vénériens. A cela près, on y reçoit tous ceux qui veulent y aller,
    de quelque condition qu’ils soient. Il y a aussi, pour cela, des
    pensions plus ou moins fortes, et proportionnées aux moyens des
    malades qui s’y font porter. On y est même traité à forfait si on le
    souhaite, et le médecin soir et matin n’y manque point.»

Cette belle situation et le bon air de Pincourt, n’en sont pas les seuls
agrémens; les Lumières de celuy par qui elle est dirigée, la
Bibliotèque, le Laboratoire, les Plantes medecinales et les autres
commoditez qui s’y trouvent, la diverse situation et la propreté des
appartemens, la Liberale economie qu’on y observe et l’exactitude du
service, y font trouver goût aux personnes mêmes qui sont domiciliées à
Paris, et qui ne sont au plus qu’à demi malades, puis que beaucoup de
convalescens et de valetudinaires y vont prendre le Lait, les Eaux
minéralles, les Bains, les Etuves, etc.

Il arrive même bien souvent que des Dames de Paris aussi bien que celles
de Provinces y vont faire leurs couches, pour y être plus éloignées du
monde et du bruit, et pour être plus seures du secours qu’elles
desirent, y ayant un Accoucheur et une Sage femme d’une expérience
consommée.

C’est au même lieu que les Gouteux, les Paralitiques; et ceux qui
souffrent des Rhumatismes opiniatres ou des douleurs causées par le
mercure, trouvent le secours dont il sera parlé à l’article suivant.

On dit qu’on y pratique des moyens infaillibles pour rectifier les
constitutions vicieuses et guerir radicalement toutes les indispositions
habituelles qui en dependent, Asthme, Phtisie, Poulmonie, Migraine,
Vapeur, Epilepsie, Hidropisies, Hemorrhoïdes, Vieux Ulcères, Cancers,
Varices, etc.

On sçait même qu’il y a des lieux destinez pour les maniaques et
géneralement pour les personnes qui doivent être privées de la liberté.

Les personnes atteintes de Maux vénériens n’y sont pas reçues, mais
elles sont traitées sous la même direction dans une autre maison du
voisinage.

A cela près telle que puisse être la condition des gens et la nature des
maladies chacun y peut être reçu. Il y a des lieux où les personnes
indigentes sont traitées à vingt et trente sols par jour selon le regime
qu’elles doivent observer. Il y en a d’autres où les gens de service
sont placés à quarante sols[7]; enfin il y a des chambres particulières
et des ordinaires distinguez pour les personnes de considération à
trois, à quatre, à cinq et à six livres par jour selon la dépense qu’ils
doivent faire, et les peines qu’ils doivent exiger.

  [7] «Les malades qui s’y font traiter, y trouvent cet avantage, qu’ils
    y sont agréablement logez, exactement traitez et libéralement
    nourris pour un écu par jour, et même pour quarante sols lorsqu’il
    s’agit de fièvres, de pleurésies, et généralement des maladies qui
    demandent un régime exact, ce qui est d’une commodité particulière
    pour les gens d’auberge et de service.» Edit. 1691, p. 16.

Soit que la pension soit grosse ou modique, toute la dépense s’y trouve
comprise sans en rien excepter, Traitement, Remedes, Logement,
Nourriture, Service, Feu, Lumière, etc.

On y trouve même cette commodité quand on le souhaite, qu’on y est
traité à forfait pour une somme dont on convient, au de là de la quelle
on ne paye rien de plus, si opiniâtre et si longue que puisse être la
maladie.

En tel temps et à telle heure qu’on y puisse arriver, on y est reçu, et
on y trouve une chambre prete en payant par avance la pension de huit
jours; et on est même assuré d’y trouver le Medecin tous les matins au
moins jusqu’à dix heures, et tous les soirs depuis six heures jusqu’au
temps du coucher.

Au surplus, quoy que les Edifices et les jardins de cette maison ayent
une considérable etendue, le progrez de cet établissement fait prendre
des mesures pour les accroître de beaucoup.




BAINS ET ETUVES.


Les Barbiers Baigneurs[1] qui tiennent des Bains, des Etuves et des
dépilatoires pour la propreté du corps humain, sont Messieurs du Pont et
Mercier, ruë de Richelieu[2], Jordanis, ruë d’Orléans; du Bois, rue
saint André; du Perron, vieille ruë du Temple; de la Cour, ruë des
Marmouzets, etc.

  [1] Les baigneurs,--et cela depuis longtemps déjà (_Anc. poésies_, t.
    II, p. 284, et XIII, p. 204)--non-seulement tenoient des bains, mais
    des chambres garnies, ce qui les astreignoit à faire les mêmes
    déclarations que les maîtres des auberges. (_Correspond. administr.
    de Louis XIV_, t. II, p. 737.) Bussy se permettoit d’y loger
    quelquefois, au grand scandale de Mme de Sévigné (Edit. Hachette, t.
    I, p. 392). Elle connoissoit la mauvaise réputation de ces gîtes. Le
    plus fameux étoit celui qu’avoit tenu Prud’homme, et que La Vienne,
    à qui Louis XIV, qu’il avoit soigné, fit une grosse fortune, reprit
    après lui, pour ne pas le rendre plus honnête. (_V. Hist. amoureuse
    des Gaules_, édit. elzévirienne, t. III, p. 235.) Prud’homme avoit
    été baigneur dès 1643. Un acte du 19 septembre de cette année-là le
    désigne ainsi avec son adresse: «Mr Prud’homme, maître des estuves
    et faiseur de poil (barbier), rue Neuve-Montmartre.»

  [2] Il y avoit encore, en 1755, deux baigneurs en renom, rue de
    Richelieu: Gagne et L’Etourneau. (_Journal du Citoyen_, p. 186.)

Les Dames sont baignées chez M. du Bois par Mademoiselle son Epouse[3].

  [3] Il ne faut pas oublier ici que dans les métiers et la bourgeoisie,
    les femmes mariées ne se faisoient encore appeler que Mademoiselle.
    Le chevalier Denisart ne devoit faire que plus tard sa satire sur
    les _Bourgeoises qui se font appeler Madame_.

Il y a encore des Etuves de l’ancien usage, ruë de Marivaux[4] et ruë du
cimetiere saint Nicolas des Champs, où les gens de mediocre condition
vont chercher quelque secours pour les Rhumatismes.

  [4] Près de Saint-Jacques-la-Boucherie. Une impasse qui s’y trouvoit,
    entre les nos 21 et 23, s’appeloit encore, avant les démolitions qui
    l’ont fait disparoître avec la rue, _Cul-de-sac des Etuves_.

Ces douleurs, celles de la Sciatique, celles qui sont causées par le
Mercure qui a été donné en panacée, en Sublimez et en precipitez: celles
de la Goutte des pieds et des mains, les Paralisies universelles et
particulières, les Tumeurs froides et beaucoup d’autres maladies, sont
infailliblement gueries par l’usage des Bagnoires et Etuves vaporeuses
de nouvelle invention qui se tiennent au jardin medecinal de Pincourt,
entre la porte saint Louis et la porte saint Antoine.

C’est une sorte de machine en laquelle on est baigné sans être dans
l’eau, et en laquelle on suë aussi abondament que l’on veut sans être à
sec, ce qui fait que son usage ne cause, ni la constipation du ventre et
la faiblesse de poitrine comme les bains ordinaires, ni les
évanouissemens, la chaleur intérieure, et la difficulté de respirer, qui
sont les suites ordinaires des Etuves echauffées par le feu de bois ou
d’esprit de vin.

Les Malades y sont couchez sur un lit suspendu où ils reçoivent une
vapeur nouvelle, anodine et fortifiante, d’un effet infiniment plus
prompt et plus assuré que la bouë de Barbotan, et que les Bains de
Bourbon et de Barrège, pendant qu’ils ont la tête hors la machine
commodement placée sur un oreiller, et qu’ils respirent un air
rafraichissant, parlent, chantent et boivent à leur gré.

Ceux à qui le Medecin qui les a inventées, ne les ordonne qu’une fois
par jour, ne payent qu’un écu neuf toute dépense comprise, Logement,
Nourriture, Service, Feu, Lumière, Drogues, etc., mais ceux à qui elles
conviennent soir et matin, payent un ecu et demi.

Ce qu’il y a de commode en cela pour les personnes delicates, est que la
chaleur de ces Etuves peut être donnée à tel degré que l’on veut, en
sorte qu’on ne luy donne quelquefois que la force des fomentations.

Comme le Medecin peut regler le choix des herbes dont on fait les
décoctions vaporeuses, selon la juste indication de chaque maladie, il
peut en la composant diversement, produire autant de différens effets,
qu’il y a de distinctions à faire dans les maladies qui viennent d’être
déduites, et dans les tempérammens des personnes qui en sont atteintes;
outre qu’en plusieurs occasions, il donne certains vehicules intérieurs
qui ont les plus justes proprietez, dans les cas mêmes les plus
extraordinaires.

Au surplus, qui voudra sçavoir la disposition, les agrémens et les
Commoditez du Jardin Médecinal, aura recours à l’article.





IMPRESSIONS ET COMMERCE DE LIBRAIRIE.


La Chambre syndicale des Imprimeurs et Marchands Libraires de Paris est
ruë et joignant l’Eglise des Mathurins, où sont examinez les Livres qui
viennent de dehors les Mardis et Vendredis de relevée, après que de la
Douanne où ils doivent être deposez en arrivant, ils ont été retirez sur
le billet du Syndic ou d’un Adjoint pour être apportez à la Chambre.

Le Sieur Auboüin à présent Syndic[1] en Charge demeure sur le quay des
Augustins au coin de la rue Gist le cœur, où il vend les Œuvres de M.
l’abbé de Fenélon, et celles de M. l’abbé Fleury.

  [1] Pierre Auboüin, libraire depuis 1666, fut adjoint de communauté,
    puis syndic. «Il se fait remarquer, dit La Caille, tant par sa
    capacité dans les langues... que par la connoissance et le bon choix
    qu’il sait faire des livres.» _Hist. de l’Imprimerie_, 1689, in-4º
    p. 289.--Il avoit été chargé, comme syndic, en 1680, de la saisie
    faite à Villejuif de 1,500 exemplaires du _dictionnaire_ de
    Richelet, que le libraire Widerold avoit envoyés clandestinement de
    Genève. Bernard, confrère d’Auboüin, qui l’avoit aidé pour cette
    saisie, suivie immédiatement de la destruction des exemplaires, «fut
    poignardé le lendemain dans la foule, en sortant de la bénédiction
    de Saint-Benoist, qui étoit sa paroisse.» (_Lettre de Papillon à
    Leclerc_, dans la correspondance _inédite_ du président Bouhier, t.
    X, p. 104.)

Les Nouvelles Ordonnances du Roy, la Conférence de ces mêmes Ordonnances
avec les anciennes[2], les Reglemens de Police, le Dictionnaire
historique de Morery, les Œuvres de M. Boileau, et diverses autres
pièces importantes s’impriment et se vendent chez le Sieur Denis Thierry
Libraire rue saint Jacques[3].

  [2] L’édit. de 1691, p. 34, ajoute, à propos de la vente des édits et
    déclarations: «On les trouve encore au Palais chez les sieurs de
    Luyne, Barbin, Loison et Guignard: de même que chez le Sr Auboüyn,
    quai des Augustins, et chez la veuve Pépingué, rue de la Harpe.»

  [3] Il étoit libraire depuis 1652, et étoit devenu l’un des plus
    considérés. Il avoit donné, avec Barbin, l’édition du _Molière_ de
    1675, détruite presque entièrement par un incendie du collége
    Montaigu, où il avoit ses magasins. Boileau, dont il étoit le
    libraire, l’a nommé dans son _Epître X_.

Les Livres de Messieurs de Port Royal se vendent même ruë chez les
sieurs Desprez[4], Josset[5], Roulland et Pralard.

  [4] «Guillaume Desprez, rue Saint-Jacques, à l’Image Saint-Prosper,
    vend une grande partie des livres de Port-Royal concernant la
    Religion.» Edit. 1691, p. 4.--C’est le fils de Guillaume Desprez,
    qui avoit imprimé les œuvres de Pascal et des religieux de
    Port-Royal, et dont il continuoit le commerce dans le même esprit.
    Son père étoit mort en 1669, d’une chute de voiture, en se rendant à
    Port-Royal, où il fut enterré.

  [5] Il étoit fort instruit et avoit une collection de médailles rares.
    _V._ l’abbé de Vallemont, _Réponse à M. Baudelot_, 1706, in-12, p.
    79.

Les Opéra, et généralement les Livres de Musique, s’impriment et se
vendent seulement chez le Sieur Ballard rue S. Jean de Beauvais[6].

  [6] Dès 1551, un Robert Ballard étoit imprimeur du Roy pour la
    musique. Son fils Pierre lui succéda avec un privilége exclusif qui
    le mettoit à l’abri de toute concurrence pour ce genre d’impression.
    Puis vint un second Robert Ballard, son fils, avec le même monopole,
    et ensuite Christophe Ballard, qui figure ici, et qui avoit été reçu
    imprimeur-libraire le 17 juin 1666. Jusqu’à la Révolution, le même
    privilége fut maintenu dans cette famille, avec ce qu’il avoit
    d’absolu. Notre ami J.-B. Weckerlin, auteur d’une excellente notice
    sur les Ballard, retrouva, il y a quelques années, un reste de leurs
    caractères, rue Jean-Jacques Rousseau, à l’imprimerie de Mourgues,
    qui a succédé à la leur.

A l’exception du Livre de M. de la Quintinie[7] qui se vend chez le
Sieur Barbin sur le Perron de la sainte Chapelle[8]. Tous les autres
Livres de Jardinages se vendent chez le Sieur Charles de Sercy dans la
grand’Salle du Palais, où l’on trouve d’ailleurs un nouveau Cuisinier
Royal et bourgeois, et une Instruction pour les Confitures, les Liqueurs
et les Fruits; outre plusieurs livres de Droit, Civil et Canon sur les
Matières Beneficiales et autres[9].

  [7] Il en sera parlé dans une des notes suivantes.

  [8] Claude Barbin, si célèbre par ce qu’ont dit de lui Molière et
    surtout Boileau. Les livres qu’il publioit donnent ainsi son
    adresse: «Claude Barbin, sur le second perron de la
    Sainte-Chapelle.» Il avoit logé auparavant, vers 1664: «vis-à-vis de
    la Sainte-Chapelle, au signe de la Croix.»

  [9] Ce mélange singulier de livres de droit et d’ouvrages sur la
    cuisine et les confitures, formoit, en effet, le fond de la boutique
    de Sercy. La Caille, _Hist. de l’Imprimerie_, p. 296, n’insiste que
    sur sa vente des livres de droit. Il avoit aussi publié des romans
    et des poésies licencieuses, ce qui empêcha Nicole de consentir à
    travailler pour lui. _V._ sa _Vie_, par l’abbé Goujet, p. 6.

Le même Sieur Barbin vend les Œuvres de Varillas, celles de saint
Euremont, etc.[10].

  [10] «Et beaucoup de livres galants.» Edit. de 1691, p. 34.--C’est ce
    qu’on appeloit des _barbinades_. Le Saint-Evremond étoit surtout en
    grande faveur chez Barbin. Il auroit voulu que chaque auteur lui en
    fît: «le libraire Barbin, dit Voisenon, si célèbre dans le _Lutrin_
    de Despréaux, alla un jour chez un auteur qui écrivoit assez bien:
    Eh Monsieur, lui dit-il, faites-moi du saint Evremond, je vous
    donnerai trente pistoles. Vous m’en avez déjà donné dont j’ai été
    content.» _Œuvres_, t. IV, p. 75.--Dans l’édition de 1691, p. 34,
    Blégny ajoutoit, à propos de Barbin: «On trouve encore chez lui les
    jardinages de feu M. de La Quintinye», c’est-à-dire les
    _Instructions pour les jardins fruitiers et potagers_, 1690, 2 vol.
    in-4º; puis, à la suite: «le sieur Charles de Sercy, au Palais, a un
    grand assortiment de livres de jardinages.»

Les Sieurs de Luyne, Loizon et Traboüillet ont au Palais un grand
assortiment de Comedies[11], d’Historiens et de Poètes[12].

  [11] Pierre Trabouillet avoit publié «en compagnie» de Thierry,
    Deluynes et Barbin, le théâtre de Corneille et ceux de Molière et de
    Racine. Son adresse est ainsi donnée sur les livres qu’il publioit:
    «Pierre Trabouillet, dans la galerie des Prisonniers, à la Fortune.»

  [12] Voici l’adresse de Deluynes et celle de Loyson nommés ici avec
    Trabouillet: «Guillaume de Luynes, libraire-juré au Palais, dans la
    salle des Merciers, sous la montée de la Cour des Aydes.»--«Estienne
    Loyson, au Palais, à l’entrée de la galerie des Prisonniers, au nom
    de Jésus.»

On trouve un grand assortiment de Livres étrangers chez les Sieurs
Boudot, de la Caille[13] et Hortemels[14], rue saint Jacques.

  [13] Dans l’édit. précédente, p. 34: «Martin» est nommé à la place de
    La Caille, mais celui-ci a quelques lignes plus bas sa mention
    spéciale: «le sieur de La Caille, rue Saint-Jacques à la Prudence, a
    composé et imprimé l’histoire de l’Imprimerie et Librairie.» C’est
    l’ouvrage que nous avons déjà cité plusieurs fois. Il est devenu
    rare.

  [14] Il étoit venu de Hollande, et après avoir épousé la fille du
    libraire huguenot Antoine Cellier, il avoit lui-même été reçu de la
    communauté le 18 septembre 1686.

Même ruë, chez le Sieur Léonard[15], on trouve tous les Reglemens de la
Cour des Monnoyes.

  [15] Voici son adresse complète: «Frédéric Léonard, rue Saint-Jacques,
    à l’Escu de Venise.» Il avoit succédé à l’un des derniers Estienne,
    en 1662, comme imprimeur ordinaire du Roi, et s’étoit fait, à ce
    titre, éditeur de la collection latine _ad usum Delphini_. On trouve
    des vers en son honneur dans les _Œuvres_ de Santeul (1698, 2e
    partie, p. 122). Il publioit volontiers les livres diplomatiques:
    «Vous avez, écrit le 12 mars 1691 le bénédictin Michel Germain à
    Magliabecchi, donné la puce à l’oreille de M. Léonard, libraire de
    Paris, qui imprime en plusieurs volumes la même chose que vous
    marquez qu’on fait en Allemagne touchant les traités de paix et
    autres semblables négociations.» Un livre politique, l’_Histoire de
    Venise_, par Amelot de la Houssaye, qu’il s’avisa de publier ainsi,
    lui coûta cher: le livre fut saisi, et l’auteur mis à la Bastille.
    (_Mss._ Delamarre, à la Biblioth. nat., nº 21,743, fol. 120.)

Et chez le Sieur Coignard, toutes les pièces concernant l’Academie
Françoise[16], l’Histoire de France de Cordemoy, l’Architecture de
Vitruve, celle de Scamosy, etc.

  [16] J.-B. Coignard, qui avoit succédé à Damien Foucault comme
    imprimeur ordinaire du roi, et avoit été choisi, en 1687, pour
    remplacer feu Pierre Le Petit dans la charge d’imprimeur de
    l’Académie françoise, dont il acheva d’imprimer le Dictionnaire.

Celle de Vignolle nouvellement commentée, se trouve chez le Sieur
Langlois[17], et celle de Bullet chez le Sieur Michallet, rue saint
Jacques.

  [17] Nicolas Langlois, dit _Chartres_, comme son père François auquel
    il avoit succédé, et dont on a un si curieux portrait, en joueur de
    musette, peint par Van-Dyck. En souvenir de ses nombreux voyages à
    l’étranger, notamment en Angleterre, François Langlois avoit pris
    l’enseigne des _Colonnes d’Hercule_, avec la devise: _nec plus
    ultra_, que garda son fils, et que conserva aussi Mariette, qui leur
    succéda dans cette boutique. Comme lui, les Langlois avoient vendu
    surtout des estampes et des livres d’architecture. On a, de Mariette
    même, la gravure d’un portrait de François Langlois, peint par
    Vignon. Le privilége de son fils, pour la vente des estampes, datoit
    de 1675. (_V. collect. Delamarre_, nº 21,731, p. 53.)

Le même Michallet aussi bien que les Sieurs Muguet, ruë de la Harpe,
Léonard, Desprez, Langlois et Coignard, rue saint Jacques, vendent les
Edits et Déclarations du Roy[18].

  [18] Dans l’édit. précédente (p. 34), Thierry est nommé à la place de
    Desprez, et les autres sont désignés avec leur prénom: François
    Muguet, Frédéric Léonard, Estienne Michallet et Jean-Baptiste
    Coignard. A la suite: «le dit sieur Muguet imprime aussi,
    d’ailleurs, tout ce qui concerne l’archevêché.»

Ledit Sieur Michallet[19] a d’ailleurs imprimé presque tous les Livres
de Mathematiques, de Messieurs de l’Academie des Sciences.

  [19] «Estienne Michallet, premier imprimeur du Roy, rue Saint-Jacques,
    à l’Image Saint-Paul.» Ainsi est donnée son adresse en tête du livre
    le plus célèbre qu’il ait publié, _les Caractères_ de La Bruyère,
    dont en onze ans, de 1688 à 1699, il donna dix éditions. Le produit,
    d’après l’intention formelle de l’auteur, qui n’y prétendit rien,
    fut, comme on sait, pour la dot de la fille de Michallet, qu’un
    fermier général épousa. (_V._ notre _Comédie de Jean de La Bruyère_,
    t. II, _passim_.)

On trouve aussi plusieurs Livres de Mathématiques chez le Sieur
Jombert[20], sur le quay des Augustins.

  [20] Pierre Jombert, dont on trouve le _Catalogue_ dans la collection
    Delamarre (nº 21,739, fol. 40), et qu’il ne faut pas confondre avec
    Jean Jombert, mort en 1681, premier éditeur du _Glossaire_ de Du
    Cange, et du _De re diplomaticâ_ de Mabillon.

On trouve un grand assortiment de Livres de Medecine chez le Sieur
d’Houry, ruë saint Jacques[21], et chez la veuve Nion, quay de Nesle,
qui vend d’ailleurs toutes les Œuvres de M. de Blegny. _La Mithologie
Phisique_ de M. Duncan[22]. _Les Discours Philosophiques_ de
Cordemoy[23]. L’_Arithmétique des Ingénieurs_ de La Londe[24]. _Les
Specifiques_ de M. Boyle[25], etc.

  [21] «Laurent d’Houry, rue saint-Jacques, devant la fontaine
    Saint-Séverin.» Telle est son adresse d’après le titre des livres
    qu’il a publiés. Nous avons déjà parlé de lui plus haut.

  [22] Ce doit être quelque résumé de l’_histoire de l’Animal ou la
    connaissance du corps animé par la mécanique et la chimie_, ouvrage
    du montalbanais Duncan (1682, in-8), dans lequel il démontre que la
    vie, exposée comme elle l’est, avec la fragilité de ses ressorts, à
    l’imminence d’incessants dangers, est un miracle continuel aussi
    étonnant que tous les prodiges de la «mythologie.»

  [23] «La philosophie» de Cordemoy (édit. précéd., p. 34).--Ce sont les
    six discours de cet académicien, mort alors depuis huit ans, sur la
    distinction de l’âme et du corps.

  [24] Ouvrage très-rare aujourd’hui du caenais La Londe, dont le fils,
    ingénieur aussi, avant de devenir archéologue, fit de curieuses
    études sur le cours de l’Orne, qu’il vouloit rendre navigable
    jusqu’à la mer.

  [25] Ces «spécifiques» sont une traduction du livre que Boyle avoit
    publié en 1688, à Londres: _Receipt sent to a friend in America_
    (recettes envoyées à un ami en Amérique).

Les Livres et les Feüilles de Classes se vendent chez la veuve Thiboult
et le Sieur Esclassant[26], place de Cambray, à l’exception de ceux des
RR. PP. Jésuites, qui se vendent chez la veuve Besnard, ruë saint
Jacques.

  [26] «Le sieur Desclassan et la veuve Thibault (_sic_) en compagnie.»
    Edit. 1691, p. 34.--Thiboult est le vrai nom.--Expresse défense
    étoit faite aux libraires, qui vendoient les livres pour les
    classes, d’en racheter aux écoliers. (Collection Delamarre, nº
    21,730, fol. 117.)

Même ruë chez le Sieur Cusson, on trouve le Journal des Sçavans[27].

  [27] Jean Cusson, qui, après avoir été avocat au Parlement, avoit
    succédé à son père comme libraire, en 1659. C’est six ans après, le
    5 janvier 1665, qu’il publia, sous la direction de Denis de Salo, le
    premier numéro du _Journal des Savants_. La périodicité, qui en
    étoit alors hebdomadaire, fut brusquement interrompue à la fin du
    troisième mois, à cause des opinions trop peu ultramontaines du
    rédacteur, et elle ne reprit, le 4 janvier de l’année suivante, qu’à
    la condition qu’il seroit remplacé par une créature de Colbert,
    l’abbé Gallois. La publication, dès lors, n’en fut plus troublée
    jusqu’à la Révolution.

Pour les Brefs, les Breviaires, les Diurnaux, les Missels, les Rituels,
les Graduels, les Antiphoniers, les Offices, etc., voyez l’article des
affaires Ecclésiastiques, et pour l’Almanach Spirituel, voyez l’article
des Exercices de Pieté.

Les plus belles Heures se trouvent rue saint Jacques chez les Sieurs
Angot[28], Josset, Foucault et Hérissant[29]; au Palais dans la
grand’Salle chez les Sieurs le Gras[30] et Poirier; et sur le Pont au
Change chez les Sieurs Poirion et Vaugon.

  [28] Charles Angot, qui, étant syndic en 1686, eut une grande part au
    règlement qui rendit la communauté des relieurs distincte de celle
    des libraires, dont l’Université n’avoit jamais permis jusque-là
    qu’elle fût séparée.

  [29] Les livres d’heures les plus magnifiques, les plus richement
    dorés se vendoient en effet chez lui. On les considéra comme objet
    de luxe, quand la misère de la fin du règne fit prendre par Louis
    XIV des mesures somptuaires. Hérissant fut inquiété. (_V._ sa
    déclaration dans la _collection Delamarre_, nº 21,627, fol. 288.)

  [30] Jacques Legras, petit-fils de Henry Legras, qui avoit publié, en
    1640, les _Antiquités et Annales de Paris_, in-fol., par Malingre.
    Sa réception comme libraire datoit du 10 septembre 1683. On trouve
    dans la _collection Delamarre_, nº 21,563, f. 289-305, un curieux
    traité fait avec lui.

On en trouve d’ailleurs sur le quay de Gesvres et ruë Neuve Nôtre Dame.

La Liste des Prédicateurs de l’Avant et du Carême, s’imprime chez le
Sieur Chevillon ruë saint Jacques.

Le Mercure[31] et les autres Livres de l’Histoire du Temps, se vendent
chez le Sieur Guèroult au Palais dans la galerie neuve[32].

  [31] Le _Mercure galant_, qui, puisqu’il avoit commencé à paroître le
    1re janvier 1672, en étoit alors à sa vingtième année. Visé, qui
    l’avoit créé, le dirigeoit toujours; il en garda même la direction
    pendant plus de dix-huit ans encore. Il ne l’abandonna, presque
    mourant, qu’au mois de mai 1710. Durant ces trente-huit années, il
    n’avoit pas publié moins de quatre cent quatre-vingt-trois volumes.

  [32] «Les gazettes se trouvent au Palais et sur le quay des
    Augustins.» Edit. 1691, p. 35. On les y vendoit au numéro, comme
    aujourd’hui les journaux dans les kiosques: «M. de Torcy m’a appris,
    écrit Racine à son fils aîné, le 6 février 1698, que vous étiez dans
    la _Gazette de Hollande_: si je l’avois su, je l’aurois fait acheter
    pour la lire à vos petites sœurs, qui vous croiroient devenu un
    homme d’importance.» Une lettre _inédite_ de Dom Calmet, du 4
    septembre 1714, nous donne de curieux détails sur la vente, et aussi
    sur le louage des différents journaux françois et étrangers à Paris:
    «Je me suis informé, dit-il, de la commission des journaux des
    Savants et des Gazettes pour M. Olivier. Le journal des Savants se
    vend 6 sols, et les deux gazettes de Hollande, avec les suppléments,
    30 sols. Le tout coûtera 40 sols rendu à la poste tous les samedis.
    Si vous souhaitez avoir une des deux gazettes à la poste le
    mercredi, il vous en coûtera un sol davantage, parce que ces gens se
    privent par là du petit gain qu’ils tirent de la lecture qu’ils
    laissent faire dans leur boutique de cette gazette pendant deux
    jours.» En 1655, selon Loret, t. II, p. 127, la _Gazette de France_
    se vendoit 4 sols et demi.

Les Almanachs ordinaires imprimez à Troyes, se vendent à Parisien gros
et en détail chez le Sieur Raflé, ruë du Petit-Pont, et chez la veuve
Oudot[33], ruë de la vieille Bouclerie.

  [33] C’est elle qui imprima et vendit tant de petits livrets
    populaires: légendes, romans, contes, chansons. Elle avoit une autre
    librairie à Troyes, rue du Temple, d’où s’écouloit surtout cette
    littérature d’almanachs et de bibliothèque bleue. Son fils Jean
    Oudot lui succéda sous la Régence.

Les Livres de Bibliotèque et genéralement les vieux Livres et Manuscrits
rares, se peuvent recouvrer chez les Sieurs Villery[34] et Moette[35],
rue de la vieille Bouclerie, Seneuze, ruë de la Harpe, Clouzier et
Emery, David et plusieurs autres, sur le quay des Augustins et place de
Sorbonne[36].

  [34] Il donnoit ainsi son adresse: «Jacques Villery, rue de la
    Vieille-Bouclerie, _à l’Estoille_.»

  [35] Thomas Moette, libraire depuis 1659: «Il se fait distinguer, dit
    La Caille qui avoue l’avoir souvent consulté, par la grande
    connaissance qu’il a dans les livres.»

  [36] «Et quai de la Tournelle.» Edit. 1691, p. 34.

Les Sieurs le Vasseur[37], Barnache[38] et Nion[39], fameux Relieurs et
Doreurs, qui sont employez à la Bibliotèque du Roy, demeurent prés saint
Hilaire[40].

  [37] Eloy Le Vasseur, qui fut, suivant La Caille, le plus célèbre
    relieur de ce temps-là.

  [38] Ou Bernache, qui, malgré l’édit de 1686, continuoit à cumuler le
    métier de relieur et celui de libraire.

  [39] Denis Nyon, qui fut, après l’édit de 1686, un des premiers gardes
    de la nouvelle corporation des relieurs-doreurs.

  [40] Ce fut jusqu’à nos jours le quartier des relieurs.

Au même endroit, les beaux caractères d’Imprimerie se font chez les
Sieurs Cottin[41] et Sanlecque[42].

  [41] Philippe Cottin, qui étoit libraire en même temps que fondeur, et
    donnoit ainsi son adresse: «P. Cottin, fondeur de caractères
    d’imprimerie et libraire, rue Saint-Jacques, à l’entrée de la rue du
    Foin, _à la Minerve_.»

  [42] Jean Sanlecque. C’est chez son père Jacques, que Philippe Cottin,
    qui précède, avoit appris l’art de graver, de frapper les matrices
    et de fondre les caractères.--Le P. Sanlecque, chanoine régulier de
    Sainte-Geneviève, à qui l’on doit de bonnes satires, étoit son
    grand-oncle.

Le Sieur de la Caille le jeune a le secret de faire une matière fort
propre aux Fondeurs de caractères d’Imprimerie, qui ne finit point et ne
déchet que de très peu.


_Livres qui ont été imprimez pendant le courant de l’année 1691._

Pour le Sieur Michallet outre ceux dont il a été parlé,

Une nouvelle édition des Ordonnances pour la Marine, in-4º.

La septième édition de la Chimie de Lemery[43], in-8º.

  [43] La première édition étoit de 1675.

La sixième édition des Caractères ou Mœurs de ce siècle[44], in-12.

  [44] Cette édition du livre de La Bruyère, quoique publiée, comme il
    est dit ici, en 1691, porte sur son titre la date de l’année
    suivante.

_Du Hamel Theologia speculatrix et practica_, in-8º, 7 vol.[45]

  [45] C’est la première édition de ce livre célèbre de l’avocat
    Duhamel, de l’Académie des Sciences.

_Manuduxio ad praxim executionis Litterarum S. Pœnitent_. 12.

Dictionnaire Mathématique avec explications et figures, in-4º[46].

  [46] _Dictionnaire de Mathématiques_ par Ozanam, qui parut, en effet,
    cette année-là.

La Connoissance des temps, Calendrier et Ephemerides du Soleil et de la
Lune, in-12.

L’Art d’evaluer toutes sortes de Toisez, in-12.

Traité du légitime Usage des Medicamens selon les Modernes, in-12[47].

  [47] Ouvrage de Daniel Tauvri, qui, en 1691, quand il le publia,
    n’avoit que vingt-et-un ans.

Constitutions de l’Abbaye de la Trape, in-12[48].

  [48] Par l’abbé de la Trappe lui-même, M. de Rancé. En 1701, un an
    après sa mort, on y ajouta les _Règlements_ qui firent un second
    volume.

L’Ortografe dans sa pureté[49].

  [49] Le vrai titre de ce livre très-rare est: _Traité de l’Ortographe
    françoise_, ou _l’Ortographe en sa pureté_. L’auteur s’appeloit De
    Soule. Quoique ce soit, selon l’abbé Goujet, un volume très-inutile,
    il eut, en 1692, une seconde édition un peu moins rare que la
    première.

La Conquête de la Nouvelle Espagne avec figures, in-4º[50].

  [50] Le vrai titre est: _Histoire de la Conqueste du Mexique_ ou de
    _la Nouvelle Espagne_, par Fernand Cortez, traduit de l’espagnol
    d’Antonio de Solis, par l’auteur du _Triumvirat_, c’est-à-dire par
    Citri de la Guette.

Le Desordre du Jeu.

Pour les Sieurs Auboüyn, Emery et Clouzier.

Histoire des Monnoyes de France par M. le Blanc, avec figures,
in-4º[51].

  [51] C’est une seconde édition. La première est de 1690.

Histoire Ecclésiastique de M. l’Abbé Fleury, 2 vol. in-4º[52].

  [52] Ce sont les deux premiers volumes de cet ouvrage célèbre, qui en
    eut vingt, quoique l’auteur ne l’ait poussé que jusqu’à l’année
    1414.

Institution du Droit Ecclésiastique, 2 vol. in-12[53].

  [53] Autre ouvrage de l’abbé Fleury. Le vrai titre est: _Institution
    au droit ecclésiastique_.

Relation de divers voyages de Hongrie, avec figures, in-4º[54].

  [54] La révolte du hongrois Tékeli donnoit alors à tous les livres sur
    son pays un à-propos que les libraires s’empressoient d’exploiter.
    Celui-ci fut du nombre. Il est peu connu.

Pratique de la Guerre, par Mattus[55], avec fig., in-8º. Nouvelle
édition du Maréchal de Soleisel, in-4º[56].

  [55] Lisez Malthus. Voici le titre détaillé de son livre, qui parut
    pour la première fois, en 1650, chez Clouzier, un des trois
    libraires indiqués ici, et dont une seconde édition in-8 avoit paru
    en 1681: _Pratique de la guerre, contenant l’usage de l’artillerie,
    bombes et mortiers, feux artificiels et pétards, sappes et mines,
    ponts et pontons, tranchées et travaux, avec l’ordre des assauts aux
    brèches, ensemble un traité des feux de joye_, par François Malthus.

  [56] La première édition étoit de 1664.

Le Manege ou l’Art de monter à cheval, du même Autheur, avec figures,
in-4º[57].

  [57] C’est, avec additions, une traduction du livre du manège, ou
    _Méthode nouvelle pour dresser les chevaux_, dont une première
    traduct. avoit paru in-fol. en 1691, par le duc de New-Castle.

Nouvelle édition de l’Ecole des Arpenteurs, in-12[58].

  [58] Par Philippe de la Hire, de l’Académie des Sciences, dont il a
    été parlé plus haut.

_Huetii Concordantia Rationis et Fidei_, in-4º[59].

  [59] Un des principaux ouvrages de Daniel Huet: _Quæstiones Alnetanæ
    de concordia rationis et fidei_. C’est à Caen, sa ville natale,
    qu’il l’avoit fait imprimer.

Pour le Sieur Muguet.

Abrégé de l’Histoire universelle, 2 vol. in-12[60].

  [60] Première édition de l’ouvrage de Claude Delisle, qui, plus tard,
    fut porté à sept volumes: _Introduction à l’histoire générale et
    politique de l’Univers_, ou _Abrégé de l’histoire universelle_.

_Acta primorum martyrum_[61].

  [61] C’est le recueil in-fol. de Ruinart, qui fut plus tard traduit en
    françois par Drouet de Maupertuy, en deux vol. in-8.

Commentaire sur la Regle de saint Benoist en François et en Latin,
in-4º.

La Mort de Dom Muce.

Traité de la verité et du mensonge du R. P. Thomassin, in-8º.

La Méthode d’etudier les langues, du même Auteur, 2. vol.[62]

  [62] _Méthode d’enseigner chrétiennement la grammaire ou les langues,
    par rapport à l’Ecriture Sainte._ 2 vol. in-8.

Pour le Sieur Seneuze.

Arlequin Comedien aux champs Elisée[63].

  [63] Comédie en trois actes, en prose, par l’abbé Bordelon, qui ne fut
    jamais jouée, et ne pouvoit l’être, pas plus que sa _Lotterie de
    Scapin_, qu’il publia deux ans après, à la suite de _Molière aux
    Champs-Elysées_, un des livrets les plus rares sur Molière.

Remarques ou Reflexions Critiques, Morales et Historiques de M. l’Abbé
Bordelon, in-12[64].

  [64] L’abbé publia deux ans après, à Lyon, chez Briasson, un volume
    faisant suite à celui-ci: _Nouvelles remarques_ ou _Réflexions
    critiques_, etc. En tête se trouve un beau portrait gravé, d’après
    De Troye, par Drevet. C’est celui de M. François Brunet, dont nous
    avons vu plus haut les parents, et qui, après Mme de Sévigné, habita
    l’hôtel Carnavalet.

Caractères naturels des hommes en forme de dialogues, par le même
Auteur, in-12[65].

  [65] L’édition hollandoise, qui parut l’année suivante chez Louis et
    Henry Van-Dole, à La Haye, a pour titre: _Les Caractères naturels
    des hommes en cent dialogues_, par M. Bordelon. Ce livre, qui
    s’étoit donné le titre mis à la mode par La Bruyère, est dédié au
    comte de Carné.

Le veritable Pénitent, 2 vol. in-12[66].

  [66] Par le bon prêtre parisien Jean Girard de Villethierry.

Dissertation sur la prison de saint Jean, in-12.

Idée de l’Amitié, par M. de Bellegarde, in-12.

Reflexions sur ce qui peut plaire ou deplaire dans le commerce de la
vie, 2 vol. in-12[67].

  [67] Comme le précédent, cet ouvrage est de l’abbé Morvan de
    Bellegarde. Il fait partie de l’édition de ses œuvres qui fut
    publiée en Hollande, et forme 14 petits volumes.

La Morale des Ecclésiastiques, in-12.

Pour le Sieur de la Caille, ruë saint Jacques aux trois Cailles.

Mémoires pour l’Université de Paris, par M. Cuvilliers, in-4º.

Le 4. tome des Devises du P. Menetrier, in-8º[68].

  [68] Il s’agit de _La Science et l’art des devises..._ par le P.
    Menestrier, qui se publioient sans doute en fascicules. Nous ne
    connaissons, en effet, de lui aucun ouvrage qui ait quatre volumes.

Les Fables d’Esope moralisées, avec figures, in-12[69].

  [69] Première édition du petit livre de Le Noble: _Esprit d’Esope_, ou
    _nouvelle traduction de ses fables, en vers, avec une lettre morale
    sur chacune_. La seconde édition est de 1695.

Pour le Sieur Remy, rue saint Jacques.

Avis salutaires sur l’education des enfants, in-12.

Pour le Sieur Villette, ruë saint Jacques à la Croix d’or.

La Vie des Princes d’Orange pour servir à l’Histoire d’Hollande, in-8º.

Les Poësies de Madame des Houllieres, in-8º[70].

  [70] A la suite venoient les poésies de sa fille Thérèse, ce qui
    formoit un volume en deux parties. En 1694, après la mort de Mme Des
    Houillères, le même libraire Villette en publia une seconde édition.

L’Histoire d’Angleterre, 4 vol. in-12.

Pour le Sieur Hortemels.

Remarques sur la Bibliotèque des Auteurs Ecclésiastiques, par M. du Pin,
in-8º[71].

  [71] Ce sont des remarques d’Ellies Dupin sur son propre recueil:
    _Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques_, qui avoit commencé de
    paroître en 1686. Elles forment trois volumes.

Nouveaux Essais de Morale, in-12[72].

  [72] _Nouveaux Essais de morale sur le luxe et les modes_, par Jean
    Frain du Tremblay, qui ne se nomma pas sur le titre.

La Vie de M. Descartes[73].

  [73] Ce sont les deux volumes in-4º d’Adrien Baillet sur Descartes,
    qui parurent, en effet, en 1691.

Les Pseaumes en forme de Prières, in-12[74].

  [74] Cette «paraphrase», comme dit le titre, est du curé de
    Saint-Lambert, François Paris, et du curé de Chevreuse, Vincent
    Loger. La première édition avoit paru en 1690.

Prières formées sur la Morale de l’ancien et nouveau Testament,
in-12[75].

  [75] Autre ouvrage du même François Paris, curé de Saint-Lambert.

Dissertation sur la Goutte, in-12[76].

  [76] Ouvrage de l’oratorien Michel Mauduit, dont la première édition
    avoit paru en 1688. Une _Réfutation_ en avoit été publiée par le
    même libraire Hortemels, en 1690.

Traité des Opérations Chirurgicales, par M. de la Chariere, in-12.

Homelies sur les Commandemens de Dieu, le Symbole et l’Oraison
Dominicale, 4 vol. in-12[77].

  [77] Première partie des _Homélies_ de l’abbé de Monmorel, qui, peu
    d’années après, arrivèrent à former dix volumes. Il devint alors
    aumônier de la duchesse de Bourgogne.

Pour les Sieurs Couterot et Guerin en compagnie.

Sermons de M. Fromentieres, Evêque d’Aire, 6 vol. in-8º[78].

  [78] M. de Fromentière, évêque d’Aire, étoit mort en 1684, en
    ordonnant que rien de ses sermons ne fût imprimé. On n’en publia pas
    moins les six volumes indiqués ici, et qui se composent: les trois
    premiers de _Sermons pour les fêtes_, deux autres de _Sermons pour
    le Carême_, et le dernier d’_Œuvres diverses_.

Discours moraux pour la Chaire, 10 vol. in-12[79].

  [79] Ouvrage de l’avocat Jean Richard, qui, bien que laïque et marié,
    passa toute sa vie à écrire des sermons, que de vrais prêtres se
    chargeoient de prononcer. Quand il mourut, ses _Discours moraux pour
    la chaire_ n’avoient pas seulement dix, mais douze volumes. C’est
    lui qui avoit été l’éditeur de l’ouvrage précédent, _les Sermons_ de
    l’évêque d’Aire.

Manière de prêcher selon l’esprit de l’Evangile, in-12[80].

  [80] Par le capucin de Paris, Albert. Couterot, son éditeur, republia
    ce livre en 1701.

La Main qui conduit au Ciel, du Cardinal Bona, in-12[81].

  [81] Ce traité, un des plus célèbres du mystique Bona, est le même
    dont l’abbé Le Duc fit une nouvelle traduction avec cet autre titre:
    _le Chemin du Ciel_, 1738, in-12.

Conférences morales sur la Religion, 2 vol. in-8º.

L’Eglise Protestante détruite par elle-même, in-12.

Pour le Sieur Pepie, rue saint Jacques à saint Basile.

Suite des Instructions Monastiques, in-12.

Satires de Juvénal, par M. de Silvecane, 2 vol. in-12[82].

  [82] C’est une des plus anciennes et non des meilleures traductions
    rimées du satirique latin. En voici le vrai titre: _Traduction des
    satyres de Juvénal en vers françois, avec des remarques et le latin
    à côté_, par Pierre de Silvecane.

Traité des Fièvres, par M. d’Hesse, in-12[83].

  [83] Traduction du hollandois en françois du _Traité des fièvres_ de
    Corneille Boutekoe.

Pensées Chrétiennes, par M. l’Abbé de Choisy, in-12[84].

  [84] Un des nombreux écrits religieux que l’abbé de Choisy publia
    après sa conversion, sans grande conviction encore et surtout sans
    grand savoir. N’a-t-il pas dit, après la publication de son
    principal ouvrage en ce genre: «J’ai écrit l’histoire
    ecclésiastique, il ne me reste plus qu’à l’apprendre.»

Grammaire Italienne, in-12.

Pour le Sieur Roulland fils, ruë saint Jacques.

Analise des Epîtres de saint Paul, etc., 2 vol. in-12.

Explication des Prières de la Messe, par M. de Meaux, in-12[85].

  [85] Il n’est pas besoin de dire que M. de Meaux, c’est Bossuet.

Pratique judiciaire sur les Censives, in-12.

Pour le Sieur Robustel, rue saint Jacques.

Histoire des Empereurs, par M. Tillemont, 2 vol. in-4º[86].

  [86] Ce célèbre ouvrage, quand l’auteur mourut en 1698, avoit six
    volumes.

Traité des Etudes Monastiques, par le P. Mabillon, in-4º[87].

  [87] L’ouvrage a deux volumes. Il fut écrit pour réfuter l’opinion de
    l’abbé de la Trappe, qui prétendoit que les moines ne peuvent ni ne
    doivent étudier.

Pour la veuve Coignard et son Fils en compagnie.

Les Offices de Cicéron et autres Œuvres, traduits du Latin de Grotius
avec des nottes, in-8º[88].

  [88] Cette traduction est de Goibaud Du Bois, de l’Académie françoise.

Les Loix Civiles dans leur ordre naturel, 2 vol. in-4º[89].

  [89] Ce sont les deux premiers volumes du grand ouvrage de Domat. Un
    troisième compléta bientôt cette partie des lois civiles.

Maniere de fortifier selon la métode de M. de Vauban, in-12.

Traitez de Metaphisique, d’histoire et de politique de feu M. de
Cordemoy, in-12[90].

  [90] Recueil des petits traités, de Cordemoy, déjà publiés à part,
    tels que: le _Discours physique de la parole_, d’où Molière tira
    tout le comique de la scène du professeur de philosophie au premier
    acte du «Bourgeois gentilhomme»; la _Lettre sur le système de
    Descartes_, etc., etc.

La Geographie ancienne, moderne et historique, 2 vol. in-4º.

_Nota._ Que dans le courant de la présente année 1692, on imprimera chez
ledit Sieur Cognard fils, Imprimeur du Roy et de l’Academie Françoise,
le Dictionnaire de ladite Academie[91]:

  [91] Le privilége d’impression du _Dictionnaire de l’Académie_ avoit
    alors déjà huit ans de date. Il est, en effet, de 1674. (_Collect.
    Delamarre_, nº 21,739, fol. 79.) La première édition parut, non en
    1692, mais en 1694, chez Coignard, en 2 vol. in-fol.

Pour le Sieur Auroy, rue saint Jacques.

Etablissement de la Foy dans la nouvelle France, 2 vol. in-12[92].

  [92] Le titre complet porte par le P. Le C... C’est le Père Ch. Le
    Clercq, récollet.

Nouvelle Relation de la Gaspesie.

_Barhei Compendium Theologiæ._

Pour le Sieur Boudot.

Homelies Theologiques et morales de M. Palafox, traduites par M. Amelot
de la Houssaye, in-12[93].

  [93] Ces homélies, traduites de l’espagnol, ont pour texte principal
    la Passion.

Lettres de M. l’Abbé le Grand à M. Burnet, in-12.

Deffense de l’Antiquité des Temps, par le R. P. Dom Paul Perron[94].

  [94] C’est une défense de son propre ouvrage, l’_Antiquité des Temps
    rétablie_, publiée en 1687, et que les PP. Martiany et Le Quien
    avoient fort attaquée.




MUSIQUE.


_Grand Maitre de la Musique de la Chapelle du Roy._

Monseigneur l’Archeveque de Rheims[1], ruë saint Thomas du Louvre.

  [1] Charles-Maurice Le Tellier, dont il a déjà été parlé. Il avoit,
    comme «maître de la Chapelle-Musique», 1,200 liv. de gages, plus
    3,000 «pour sa bouche à cour.» _Etat de France_, 1692, p. 39.


_Sur-Intendans de la Musique de la Chambre de Sa Majesté._

M. de la Lande qui est d’ailleurs Maître de la Musique de la
Chapelle[2], et M. Boisset qui est Maître de la Musique de la Chambre,
en Cour[3].

  [2] Michel-Richard de Lalande, d’abord violon, claveciniste et
    organiste, compositeur de motets, de pastorales et de ballets, puis
    surintendant de la musique du Roi, charge dans laquelle il mourut,
    en 1726, à quatre-vingt-trois ans. Il avoit été fait, le 9 janvier
    1689, surintendant de la musique de la Chambre, ce qui étoit un
    acheminement à la surintendance générale.

  [3] Jean Boësset, sieur de Haut, fils de Boësset, qui avoit été de la
    musique de Louis XIII, et de qui l’on a quelques jolis airs de
    chansons, entre autres celui des couplets de Lingendes, qui furent
    si célèbres:

        Si c’est un crime de l’aimer...

    Boësset étoit maître de musique des pages de la Chambre, aux gages
    de 1,140 liv.


_Autres Maîtres de la Musique de la Chapelle, de la Chambre et des
Plaisirs de Sa Majesté._

Messieurs Lambert, ruë sainte Anne[4], Goupille[5], ruë      Minoret[6],
rue      Colasse, rue Traversine[7], et Moreau, rue sainte Croix de la
Bretonnerie[8].

  [4] Michel Lambert, si recherché, en 1666, à l’époque de la satire du
    _Repas_ de Boileau, et qui n’avoit pas alors moins de
    quatre-vingt-deux ans. Lulli avoit épousé sa fille, et lui avoit
    donné dans sa maison, qui existe encore aux coins des rues
    Sainte-Anne et des Petits-Champs, l’appartement où nous le voyons
    logé, et où il mourut au mois de juin 1696. (_V._ notre _Histoire de
    la Butte des Moulins_.)

  [5] Lisez Coupillet. Il faisoit, comme prêtre, pendant le semestre de
    janvier, les fonctions ecclésiastiques de maître de musique, et
    avoit soin, durant le même temps, «de la nourriture, éducation,
    conduite et entretien des pages de musique.»

  [6] Guillaume Minoret. Il avoit, pendant le semestre de juillet, les
    mêmes fonctions que Coupillet pendant celui de janvier. Ses motets
    sur un certain nombre de psaumes sont très-estimés. Le Cerf de la
    Vieuville, dans son livre, _Comparaison de la musique italienne et
    de la musique françoise_, 1706, in-8, 3e partie, le met, ainsi que
    Coupillet, sur le même rang, pour la composition, que Collasse et
    Lalande.

  [7] Pascal Collasse, un des meilleurs élèves et héritiers de Lulli.
    Après avoir collaboré avec son maître, il fit seul plusieurs opéras,
    dont celui de _Thétis et Pelée_ est le plus célèbre.

  [8] Jean-Baptiste Moreau, à qui Madame de Maintenon fit écrire, pour
    Saint-Cyr, la musique des chœurs d’_Esther_ et d’_Athalie_. Il fit
    aussi les airs de quelques chansons de Lainez, son ami de cabaret.


_Maîtres pour l’Orgue et pour le Clavecin._

Messieurs le Begue[9], rue Simon le Franc, Taumelin, rue de la
Verrerie[10], Couprin, prés saint Gervais[11], Dandrieux, ruë saint
Loüis du Palais[12], Nivert, prés saint Sulpice[13], Danglebert, rue
sainte Anne[14], Martin, rue de l’Echelle, le Roux [15], rue     ,
Buterne, prés saint Paul[16], Montalan, rue du Cimetiere saint
André[17], Ossu l’ainé, rue saint Denis[18], Ossu le cadet, Cloître
saint Jacques de l’Hôpital, Garnier, rue Traversine, La Lande, Cour du
Palais.

  [9] Nicolas Le Bègue, un des quatre organistes de la Chapelle reçus en
    1678. Son quartier étoit celui d’octobre. Il touchoit l’orgue à
    Saint-Merry, et l’on a de lui trois livres de pièces pour cet
    instrument. Il mourut très-vieux en 1700. Ses ouvrages se vendoient
    tout près de chez lui, dans la même rue. L’édit. de 1691, p. 62,
    dit, en effet: «le livre d’orgues de M. Le Bègue se vend chez M.
    Noël, rue Simon-le-Franc.»

  [10] Jacques Tomelin, organiste de la Chapelle, comme Le Bègue. Il
    exerçoit pendant le quartier de janvier.

  [11] François Couperin, le second des trois frères qui fondèrent la
    renommée de cette dynastie de clavecinistes célèbres. Nous le voyons
    ici logé près de Saint-Gervais, parce que de 1669 à 1698, il y
    toucha l’orgue. Il mourut à soixante-dix ans, en 1701, écrasé par
    une voiture. L’année précédente, Montéclair lui avoit dédié sa
    _Méthode facile de musique_.

  [12] On ne le connoît que par son fils, Jean-François Dandrieu, qui,
    de 1720 à 1740, se distingua sur l’orgue et le clavecin.

  [13] Guill.-Gabriel Nivers, un des quatre organistes de la Chapelle.
    Il avoit été maître de musique de la Reine.

  [14] Jean-Baptiste d’Anglebert. Il étoit de la musique de la Chambre
    pour le clavecin, ce qui lui rapportoit 600 liv. de gages, 900 de
    nourriture, 213 de monture, «et 270 pour la nourriture de son
    Porte-épinette.» _Etat de France_, 1692, p. 223.

  [15] Il étoit aussi compositeur. V. _Le faux Satyrique_, 1706, in-8,
    p. 11, où il est traité de «fameux maître de musique.»

  [16] Jean Buterne, un des quatre organistes de la Chapelle-Musique.

  [17] «Messieurs Le Règne--c’est celui qui est désigné plus haut sous
    son vrai nom le Bègue--rue Simon-le-Franc, et de Montalan, rue du
    Cimetière-Saint-André, sont renommez pour toucher et enseigner le
    clavecin.» Edit. 1691, p. 60.--Claude Rachel de Montalant, après
    avoir enlevé de son couvent, où sans doute il donnoit des leçons, la
    fille de Molière, étoit, vers 1686, devenu son mari. Une note de
    Titon du Tillet (_Parnasse françois_, 1732, in-fol., p. 318) que
    nous avons citée le premier dans le _Roman de Molière_, 1862, in-18,
    p. 129, ne laisse sur ce point très-curieux aucun doute: «Elle
    épousa, dit-il, M. de Montaland, gentilhomme, qui a été quelque
    temps organiste de Saint-André des Arts.» Il l’étoit sans doute
    encore en 1691, ce qui expliqueroit pourquoi il logeoit tout près de
    cette église. Titon le traite de gentilhomme parce qu’il se faisoit
    appeler: Claude Rachel, écuyer, sieur de Montalant.

  [18] Lisez Houssu. Nous avons su son nom par le curieux procès que
    «les maîtres à danser et joueurs d’instruments tant hauts que bas»
    firent aux clavecinistes, en 1693, pour les empêcher d’enseigner à
    toucher le clavecin avant de s’être fait recevoir de leur
    communauté. Les clavecinistes, représentés par plusieurs de ceux qui
    figurent ici, dont on a vu les noms plus haut, ou qu’on trouvera
    nommés plus loin: Médéric Corneil, Nicolas Gigault, Jean-Baptiste de
    La Brune, Marin de la Guerre, Jean Mérault, Antoine Houssu, Nicolas
    Le Bègue, Guillaume-Gabriel Nivers, Jean Buterne, François Couprin,
    appelèrent d’une première sentence rendue contre eux par le prévôt
    de Paris, et obtinrent, le 7 mars 1695, un arrêt de la Grand’Chambre
    qui leur donna raison, et leur rendit l’entière liberté d’enseigner.


_Autres Maîtres pour le Clavecin._

Messieurs le Moine, ruë saint Honoré[19], Pitay, ruë sainte Croix de la
Bretonnerie, Eudet et de la Cerisaye, ruë sainte Croix de la Cité,
Bouton, rue Pavée, Mérault et Alexandre, rue saint Denis, Bernier, rue
Tictonne[20], Hardy et Landrin, Cloitre sainte Opportune, Cointereau,
place Maubert, Saffin, rue des Noyers, Boucher, rue des Assis[21],
Corneille, Cloître Notre Dame, de Bordeaux, rue saint Jacques, Raison,
rue saint Estienne, Gigot et Delian, rue saint Martin, la Brune, rue des
Moineaux, Fouquet, ruë Coquillière, de la Guerre[22] et Jacquet, Isle
Notre Dame, etc.

  [19] Il étoit de la musique de la Chambre pour le théorbe.

  [20] Nicolas Bernier, dont le succès fut si grand, surtout sous la
    Régence, pour ses motets, la musique de ses cantates et ses airs à
    boire. Il est fait de lui le plus grand éloge dans le poëme de J. de
    Serré, _la Musique_, dont la première édition date de 1714.

  [21] Lisez des Arcis.

  [22] Son vrai nom étoit Jacquet, le seul que prit son frère nommé ici
    avec lui. Jacquet de la Guerre étoit organiste à Saint-Séverin. Sa
    fille, Mlle Elisabeth La Guerre, se distingua sur le clavecin et fit
    la musique de l’opéra de _Céphale et Procris_, en 1694. Elle mourut
    en 1727.


_Maitresses pour le même Instrument._

Mesdames Oves, rue saint Denis, et Louis, rue de la Monnoye.

Et encore Mesdemoiselles Rebours et le Tellier, fauxbourg saint
Germain[23].

  [23] «Mademoiselle Le Tellier, qui demeure au cul-de-sac de la rue
    Beaubourg.» Edit. 1691, p. 60.

                   *       *       *       *       *

M. du Clos, rue Bétizy, accorde en perfection le Clavecin.

Messieurs Denis, sur le Quay neuf, Richard, ruë du Paon[24], Rosée, rue
de Cléry, Créteil, rue Poupée, Dathene, rue saint Antoine[25], Voudry,
rue saint Jacques, Boudet, rue saint Martin, Thierry, rue sainte
Marguerite, du Catel et l’Esclop, rue Omer[26], Clico, rue Philippot, et
le Febvre, rue Aubry Boucher, fabriquent, rajustent et accordent les
Orgues et les Clavecins.

  [24] «Près Saint-Nicolas du Chardonnet.» Edit. 1691, p. 60.

  [25] «Le sieur Dathene, qui fait des clavecins, demeure rue et devant
    le petit Saint-Antoine.» _Id._, p. 64. «Le sieur Créteil, faiseur
    d’orgues, demeure dans la rue Poupée.» _Ibid._

  [26] Lisez rue au Maire.


_Maitres pour la Violle._

Messieurs de sainte Colombe[27], rue...; Marais, ruë Bertin Poirée[28],
Theobal, rue de Richelieu[29], des Fontaines[30], rue de Grenelle saint
Honoré, de Machy, rue des fossez saint Germain, Garnier, prés le Palais
Royal, Bellier, rue de Mommorency, Fourcroy le fils, rue vieille du
Temple, etc.

  [27] Il n’est plus connu que parce qu’il fut le maître de celui qui
    vient ici après lui.

  [28] «Monsieur Marais touche la viole par excellence, et donne des
    leçons chez luy, rue Quincampoix.» Edit. 1691, p. 48.--Marin Marais,
    élève de Sainte-Colombe, et le plus habile joueur de viole de son
    temps, il a beaucoup écrit pour cet instrument, et, de plus, l’on a
    de lui plusieurs partitions pour l’Opéra, où il avoit commencé à
    être simple batteur de mesures. La plus célèbre est celle
    d’_Alcione_, dont la Tempête fut un des morceaux les plus à effet de
    ce temps-là. Elle est décrite dans le poëme de _la Musique_ cité
    plus haut.

  [29] Théobaldo Gaddi, qui, attiré de Florence à Paris par son
    admiration pour Lulli, fut mis par celui-ci dans l’orchestre de
    l’Opéra, où il joua pendant près de cinquante ans de la basse de
    viole. Il avoit fait, en 1691, la musique de la pastorale héroïque
    de _Coronis_.

  [30] «Le même Des Fontaines montre d’ailleurs à toucher le clavecin et
    la basse de viole.» Edit. 1691, p. 48.

Mademoiselle Mengey, rue saint Honoré, prés la rue des Poullies, fait
aussi profession de toucher et de montrer à toucher la Violle.


_Maîtres pour le Theorbe[31]._

  [31] C’étoit une espèce de grand luth, qui lui-même étoit une sorte de
    guitare.

Messieurs du Pré, rue des Escoufles, et de la Barre en Cour, qui sont de
la Chambre du Roy[32], et encore Messieurs Pinet[33], rue      le Moyne,
Cloître saint Jacques de l’Hôpital, Aubin, rue de l’Escharpe, Poussilac,
prés les Jacobins saint Jacques, Lavaux, rue      Hurel, Quay de la
Mégisserie.

  [32] Du Pré n’étoit qu’en survivance, en 1692, à la chambre du Roi
    pour le théorbe. Pierre Chabançeau de La Barre, beaucoup plus
    célèbre, jouoit de la grosse-basse ou du théorbe à la
    Chapelle-Musique. Il étoit valet de chambre de la Dauphine.

  [33] Lisez Pinel. Il jouoit du théorbe à la chambre du Roi, mais y
    avoit, auparavant, chanté les hautes tailles.


_Maîtres pour la basse de Violon._

Messieurs Marchands père et fils, et Converset, rue des Poulies[34],
Boudet, rue saint Antoine, Reffiet, rue des vieux Augustins[35], la Rue,
prés saint Mederic.

  [34] «Rue Bétizy, Gillet, place du Palais-Royal.» Edit. 1691, p.
    48.--A la chambre du Roi, les deux Marchand: Jean Noël, le père, et
    Jean-Baptiste, le fils, jouoient non la basse, mais le dessus de
    violon.

  [35] Urbain Reffiet. Il étoit un des vingt-cinq violons ordinaires,
    dont Dumanoir étoit le roi.


_Maîtres pour le dessus de Violon._

Messieurs Favre, rue saint Honoré, le Peintre, à Versailles[36], Thoüin,
rue de la Verrerie[37], Verdier, rue du Chantre, Baptiste, Cloitre saint
Honoré, du Bois, rue des fossez saint Germain, de l’Isle, rue saint
Honoré, Charpentier, rue de la Harpe, du Chesne, rue Aubry Boucher,
Jobert, rue saint Antoine, Marchand, rue de Berry, etc.

  [36] Augustin-Jean Le Peintre. Il étoit aussi des vingt-cinq violons,
    et, de plus, un des violons du Cabinet, où il jouoit les dessus,
    avec 600 liv. de gages. Il étoit en outre attaché, comme violon, à
    la maison du Dauphin, ce qui lui valoit 600 liv. sur la cassette du
    prince, 400 sur le trésor royal, «et quelques autres
    gratifications», dit l’_Etat de France_. On comprend qu’avec le
    cumul de ces gages et ce que pouvoient lui rapporter ses leçons, il
    ait pu faire dire à Richelet, au mot _violon_ de son dictionnaire:
    «Le Peintre, l’un des meilleurs joueurs de violon de Paris, gagne
    plus que Corneille, l’un des plus excellents de nos plus fameux
    poëtes françois.»

  [37] L’édition précédente l’appelle à tort Thonin.


_Maîtres pour la Guitarre._

Messieurs de Vizé, à Luxembourg[38], Cheron, rue Dauphine[39], Medard,
prés saint Nicolas des Champs, le Tellier, rue du Foin, Galet,
cul-de-sac saint Sulpice, du Gesne, rue des Prouvaires, Poussilot[40],
prés les Jacobins saint Jacques, etc.

  [38] C’est-à-dire au palais du Luxembourg. Vizé fut très-célèbre en
    son temps. Palaparat, dans la préface du _Grondeur_, parlant d’un
    joueur de flûte fameux, dit qu’il tire de la flûte allemande «des
    sons plus doux...»

        Que ceux que De Vizé tire de sa guitarre.

  [39] Nous le trouverons plus loin parmi les faiseurs d’instruments.

  [40] Lisez Poussillac, comme plus haut.

Le Sieur Alexandre Roboam fait des Guitarres par excellence[41].

  [41] Il demeurait rue des Arcis.


_Maîtres pour le Luth._

Messieurs Mouton, rue saint Antoine, et du Buc, ruë[42].

  [42] L’édition de 1691, p. 61, nomme, avec lui, «Gallot et Jacqueson.»
    Mouton étoit, de beaucoup, le plus célèbre. On a de lui, d’après de
    Troyes, un très-beau portrait gravé par Edelinck. Mariette en parle
    ainsi dans une note de l’_Abecedario_, t. II, p. 219, que nous
    reproduisons avec toute sa singularité: «Jean Mouton, célèbre
    joueur, jouant de la guitare--est-ce un luth? est-ce une guitare?
    C’est un luth--à demy corps, d’après Fr. De Troyes; d’après un des
    plus beaux tableaux qu’ait peints M. de Troyes. Il a été peint en
    1690, Mouton étant, pour lors, âgé de 64 ans. J’ai vu, ajoute
    Mariette, ce tableau en 1755, et j’ose dire que le plus beau tableau
    de Van Dyck ne me paroît pas supérieur.» Edelinck grava ce beau
    portrait pour remercier Mouton d’avoir enseigné le luth à sa fille
    sans vouloir être payé. (_Mém. inéd. sur la vie et les ouvrages des
    membres de l’Acad. de peinture_, t. II, p. 55.)


_Maîtres pour le Jeu et pour la Fabrique des Instruments à Vent, Flûtes,
Flageolets, Hautbois, Bassons, Musettes, etc._

Messieurs Colin Hotteterre[43], ruë d’Orléans; Jean Hotteterre, rue des
fossez S. Germain; Fillebert, rue S. Antoine[44]; des Costeaux,
Fauxbourg saint Antoine[45]; Filidot en Cour[46]; du Mont, rue de
Tournon; Rousselet, rue des Assis; Dupuis, carrefour de l’Ecole[47]; le
Breton et Fremont, rue de l’Arbre sec; Héron, prés le cadran saint
Honoré; du Buc, rue de Richelieu; Roset, rue neuve saint Eustache[48],
etc.

  [43] Colin étoit un diminutif de Nicolas, son vrai prénom. Il étoit
    basson à la Chapelle-Musique. Lui, et son fils Jean, qui le suit
    ici, et un autre, dont nous ne savons pas le prénom, excelloient
    surtout comme _facteurs_: «le père, lisons-nous dans un _Traité de
    la Musette_, etc. (Lyon, 1682, pet. in-fol., p. 38), est un homme
    unique pour la construction de toutes sortes d’instruments de bois,
    d’ivoire, d’ébeine, comme sont les musettes, flageolets, hautbois;
    et mesme pour faire des accords parfaits de tous ces instruments.
    Ses fils ne luy cèdent en rien pour la pratique de cet art.»

  [44] Philibert Rebillé. Très-renommé comme flûtiste et acteur de
    société. Palaprat dit de lui dans une note de son théâtre (t. I, p.
    183): «fameux joueur de flûte allemande, qui a mérité d’être chanté
    sur la lyre de M. De La Mothe, _Ode de la Flûte_.» La flûte
    allemande étoit ce qu’on appelle aujourd’hui «flûte traversière.»
    L’autre étoit la clarinette. Philibert eut de très-grands succès à
    la Cour, comme on le voit par les _Poésies_ de Lainez, son ami, et
    de très-vifs aussi, trop vifs même dans la bourgeoisie. Une certaine
    Mme Brunet, qui s’étoit affolée de lui, empoisonna son mari, et
    l’épousa en secondes noces. Les révélations de La Voisin, qui lui
    avoit fourni le poison, la firent prendre, condamner et exécuter.
    Philibert, dont le roi ne mit pas en doute l’innocence, fut sauvé.
    Il y a, dans les _Caractères_, une allusion à cette affaire.
    Philibert y est nommé Dracon. (_Comédie de Jean de La Bruyère_, t.
    I, p. 212-214.)

  [45] Il étoit joueur de flûte, comme Philibert, dont il fut l’ami
    dévoué. Il avoit beaucoup connu Molière, et en parloit
    très-curieusement. Sa passion pour les fleurs fut célèbre. C’est
    pour la mieux satisfaire qu’il s’étoit logé au faubourg
    Saint-Antoine, où, comme nous le verrons, se trouvoient les grands
    «floristes.» C’est lui, suivant Math. Marais, qui aurait posé pour
    le curieux de fleurs des _Caractères_.

  [46] André-Danican Philidor, et non Filidot. Il jouoit de la basse à
    la Chapelle-Musique et dans la chambre du Roi. Veuf de Marguerite
    Monginot, il eut, de son second mariage avec Elisabeth Le Roy, un
    fils qui devint célèbre comme compositeur, mais surtout comme joueur
    d’échecs.

  [47] Nous le retrouverons, avec les quatre autres qui suivent, parmi
    les fabricants d’instruments.

  [48] «Le sieur Rozet est renommé pour les instruments de musique de la
    garde-robe du Roy. Il demeure rue Neuve-Saint-Eustache.» Edit. 1691,
    p. 49.

Plusieurs d’entre les Maîtres de tous les Instrumens ci-dessus,
travaillent par excellence à la composition de la Musique, outre
lesquels entre les habiles Compositeurs de Paris, on compte d’ailleurs
Messieurs Oudot à la place Royale; Mignon[49], cloître Notre Dame[50];
l’Alloüette, prés saint Germain de l’Auxerrois[51]; Charpentier, rue
Dauphine[52]; Bertet, Isle Notre Dame; Chaperon, cour du Palais; Martin,
rue des saints Pères; Terrier, prés les Innocens, etc.[53].

  [49] Il étoit maître de la musique de Notre-Dame, et, comme on le voit
    ici, logeoit auprès. Il étoit aussi, à son temps perdu, grand
    amateur de bouts rimés. C’est lui qui, en 1682, avoit proposé un
    prix à quiconque rempliroit le mieux à la louange du roi les rimes
    de _pan_, _guenuche_, etc., qui pendant une saison entière
    occupèrent toutes les sociétés. (_Menagiana_, t. I, p. 35.)

  [50] «Colasse, rue Sainte-Anne, Lorenzani...» Edit. 1691, p. 62.--Ce
    dernier est nommé dans les _Caractères_, au § 29 du chapitre de _la
    Mode_: «on sait que Lorenzani fait de beaux motets.» Il en publia
    quelques-uns, en 1693, chez Ballard. Lulli s’étoit opposé de tous
    ses efforts à sa célébrité. Sénecé, qui l’appelle Lorenzain, parle
    ainsi de cette jalousie du Florentin dans le libelle qu’il fit
    contre lui, _Lettre de Clément Marot_, etc.: «Je t’atteste encore,
    célèbre Lorenzain, à qui un mérite connu de toute l’Europe n’a servi
    qu’à blesser les yeux du jaloux Lulli...»

  [51] Jean-François Lalouette, qui passe pour avoir travaillé aux
    opéras de Lulli, son maître, mais qui fut surtout célèbre
    pour ses motets. Il étoit maître de musique de l’église
    Saint-Germain-l’Auxerrois, près de laquelle nous le voyons logé ici.

  [52] Marc-Antoine Charpentier, que son logement place Dauphine mettoit
    à proximité de la Sainte-Chapelle, où il étoit maître de musique. Il
    enseigna la composition au Régent, et fit avec lui l’opéra de
    _Philomèle_, qui ne fut ni joué, ni imprimé.

  [53] A la suite de ces «habiles compositeurs de musique», on lit dans
    l’édit. précédente, p. 62: «le sieur Jolly, rue des Rosiers, près la
    vieille rue du Temple, l’enseigne avec une grande facilité.»


_Maîtres pour l’Art de Chanter[54]._

  [54] Ils étoient, depuis quelques années, en grande faveur.
    «--Fais-toi plutôt maître à chanter, dit Colombine. On te donnera
    deux louis d’or par mois, et tu trouveras peut-être quelque écolière
    à qui tu ne déplairas pas: car voilà la grippe des femmes
    d’aujourd’hui... On est de tous les bons repas; jamais de promenade
    sans le maître à chanter.» (Regnard, _La descente de Mezzetin aux
    Enfers_, acte I, scène 1re.)

Massieurs Dambruy, rue Betizy, du Buisson, rue Dauphine, du Bousset, rue
des Fontaines, Hallé, rue des Marais saint Germain, du Parc, rue de la
Savaterie: Saint Germain, près la Madelaine, Chevalier, rue     ; la
Pommeraye, prés saint Leu de saint Gilles: de Lair, rue saint Honoré:
Gillier, rue de Berry[55]: Bonnamy, rue Tictonne, etc.

  [55] C’est le père de Gillier qui fit tous les divertissements de
    musique à la Comédie et aux Italiens pour les pièces de Dancourt,
    Regnard, etc.

Messieurs Hallin frères sont renommez pour le Jeu de la Trompette et des
Timbales qu’on trouve de la meilleure Fabrique chez le Sieur Crestien,
rue de la Ferronnerie, à la Ville de Vernon.

Les Cordes de Rome pour les Instrumens, se vendent en gros rue saint
Denis aux trois Maillets, et en détail chez tous les faiseurs
d’Instrumens, entre lesquels le Sieur Offlard[56], rue de Bussy, et les
Sieurs Cheron[57], rue Dauphine et rue de la vieille Bouclerie en ont un
grand assortiment.

  [56] Il faut, je crois, lire «Offland.» Nous trouvons, en effet, un
    Jean Offland parmi «les maistres faiseurs d’instruments de musique»,
    dans un compte du commencement du siècle. (_Bulletin archéolog._, t.
    II, p. 542.)

  [57] «Luttier.» Edit. precéd., p. 112. Ces deux Chéron étoient sans
    doute frères. L’édit. précédente n’indique que celui de la rue
    Dauphine, qui figure déjà plus haut parmi les maîtres de guitare. Un
    Nicolas Chéron, comme nous le voyons par un acte de baptême, étoit
    déjà «faiseur d’instruments de musique», en 1658. Peut-être étoit-ce
    le père de celui-ci.

Il y a une fabrique pour l’Orgue et pour le Manicordium[58], rue saint
Julien des Ménetriers[59].

  [58] Sorte de petite épinette à sons amortis par du drap étendu sur
    les cordes. On l’appeloit aussi _épinette sourde_.

  [59] «Les musettes et les autres instruments à vent, se vendent chez
    les sieurs Dupuis, carrefour de l’Ecole, Le Breton et Froment, rue
    de l’Arbre-Sec, Héron, près le cadran Saint-Honoré, et Du Buc, rue
    de Richelieu.» Edit. 1691, p. 49.--La musette étoit alors à la mode.
    Nous avons vu, dans une note précédente, comment Van-Dyck peignit le
    libraire Langlois jouant de cet instrument. La vielle le remplaça.
    Sous Louis XV, tout le monde en jouoit. _V._ aux _Mss._ de la
    Biblioth. Nat. les _Stromates_ de Jamet, t. II, p. 2050.




FAMEUX CURIEUX DES OUVRAGES MAGNIFIQUES[1].

  [1] Le Roux de Lincy a publié cette liste, avec quelques notes
    insuffisantes, dans la _Gazette des Beaux-Arts_ du 15 février 1859,
    p. 224.--Nous n’avons pas besoin de dire ce qu’on entendoit alors
    par «curieux», _les Caractères_ de La Bruyère nous l’ont assez
    appris. Nous ajouterons toutefois que, sous Louis XIII, le mot avec
    ce sens n’étoit pas encore employé. On disoit des «grippés.» Dans
    une curieuse pièce _Ms._ du _Supplément françois_, à la Biblioth.
    Nat., nº 12, 491, p. 268, intitulée les _Francs grippez_, nous
    trouvons: _le grippé des fleurs_, _le grippé des médailles_, etc. Il
    y eut aussi alors un ballet, _les Grippez à la mode_. (_V._ le
    catal. Soleinne, t. III, p. 85.)


Monsieur le Duc d’Aumont, rue de Jouy[2].

  [2] C’est le père de celui qui, à la fin du règne, fut ambassadeur en
    Angleterre. Il avoit eu d’abord son cabinet de tableaux--c’est ce
    qu’il collectionnoit--rue Vivien, ou Vivienne. La liste des curieux,
    publiée par Spon dans _Les Recherches des antiquités et curiosités
    de la ville de Lyon_, 1673, in-8, p. 212-218, que nous aurons
    souvent à citer, d’après la reproduction qu’en a faite la _Revue
    universelle des Arts_, t. XV, p. 259, lui donne cette adresse, il
    s’installa ensuite dans l’hôtel de sa famille rue de Jouy, dont nous
    avons déjà parlé. Il y joignit à son goût pour les tableaux, celui
    de l’Antiquité. «Monsieur le duc d’Aumont, écrivoit, en 1686,
    Bourdelot d’Airval au t. II de son livre de l’_Utilité des Voyages_,
    a bien fait voir qu’il se connoissoit en tout dans les conférences
    qu’il a tenues chez lui, touchant l’histoire ancienne: il a
    découvert depuis peu deux portraits en agathe de quelques-uns des
    tyrans du temps de Gallien.»

M. le Duc de Saint Simon, rue de Taranne[3].

  [3] Claude de Saint-Simon, père de l’auteur des _Mémoires_. Il ne
    mourut que l’année suivante. Il avoit des tableaux. Son fils
    (_Mém._, édit. in-18, t. I, p. 34) parle entre autres de celui de
    Pomone et Vertumne, un des plus beaux de Carrache, que lui avoit
    donné le duc de Montmorency avant de monter à l’échafaud.

M. le Duc de Richelieu, place Royale[4].

  [4] Père du maréchal duc de Richelieu. Il avoit une fort belle galerie
    de tableaux, avec de nombreux et remarquables Rubens: «On en trouve
    dans cet hôtel, dit G. Brice, 3e édit., t. I, p. 330, un plus grand
    nombre qu’en nul endroit de Paris.» De Piles les a décrits dans ses
    _Dissertations sur les ouvrages des plus fameux peintres_. La
    description du plus beau de tous, _la Chute des mauvais Anges_, est
    de M. de Richelieu lui-même.

M. le Chevalier de Lorraine, au Palais Royal[5].

  [5] Le chevalier de Lorraine, dont on sait la faveur équivoque près de
    Monsieur, avoit dans son appartement, l’un des plus beaux du
    Palais-Royal, un cabinet sur le jardin, tout rempli de tableaux
    rares, des italiens surtout, tels que l’Albane. On y trouvoit aussi
    quelques Poussin.

M. le Marquis d’Hauterive[6], au Cherche Midy.

  [6] Suivant la liste de Spon, ce marquis, souvent nommé par Dangeau,
    avoit aussi le goût des tableaux.

M. le Marquis de Rieux, rue de Seine.

M. le Comte de Flamarin[7], prés saint Roch.

  [7] Grossolle de Flamarens. Il paroît avoir eu surtout le goût des
    livres. On en rencontre à ses armes: _d’or, au lion de gueules,
    naissant d’une rivière d’argent, chef d’azur chargé de trois étoiles
    d’or_.

M. le Comte de Bartolet, rue de Tournon.

M. le Marquis de Rhodes[8], prés la porte saint Honoré.

  [8] Grand maître des cérémonies, charge qu’il vendit, au grand blâme
    de tous, car on l’étoit de père en fils, depuis longtemps, dans sa
    famille.

M. le Baron de Breteuil[9], rue de Paradis.

  [9] Ce baron qui ne l’étoit pas, selon Saint-Simon, est le même qui
    mena avec la présidente Ferrand le scandaleux roman dont nous avons
    parlé. Nous ignorons quels étoient ses goûts de curieux.

M. le Comte de Morstein, sur le Quay des Théatins[10].

  [10] M. de Morstein, ancien grand trésorier de Pologne, avoit son
    hôtel, qui devint ensuite celui du maréchal d’Estrées, au coin de la
    rue des Saints-Pères et du quai des Théatins, aujourd’hui quai
    Voltaire. C’étoit un grand curieux en toutes choses. Ses jardins à
    Montrouge étoient magnifiques. Rigaud l’avoit peint avec sa fille,
    puis séparément.

M. le Comte de Renes, rue saint Dominique, quartier S. Germain.

M. le Commandeur d’Hautefeuille, rue du Bac[11].

  [11] Étienne-Texier d’Hautefeuille, grand prieur d’Aquitaine et
    ambassadeur extraordinaire de la religion de Malthe en France. Il
    mourut le 3 mai 1703, laissant, suivant Saint-Simon (t. IV, p. 453),
    tous ses tableaux à son Ordre. Ils étoient d’un grand prix, car au
    dire de Mariette (_Abecedario_, t. II, p. 345), «il étoit très-grand
    curieux, et avoit de très-belles choses.» Il habitoit dans le haut
    de la rue du Bac une des maisons neuves bâties par l’administration
    des Incurables.

M. le Commandeur de Gaults, derrière saint Roch[12].

  [12] Sur la liste de Spon, son nom est écrit Gotz, et son adresse est
    donnée au bout de la rue des Petits-Champs. Son cabinet, y est-il
    dit, comprenoit tableaux, médailles modernes, curiosités de toutes
    sortes.

M. le Chevalier de Simonville[13], rue sainte Croix de la Bretonnerie.

  [13] Lisez de Sémonville. Nous ne savons rien sur ses collections.

M. le Chevalier de Nogent[14], rue d’Anjou au Marais.

  [14] Un des favoris préférés de Louvois, qui lui donna une maison
    charmante à Meudon, où il réunit les plus précieuses de ses
    curiosités. Il mourut très-âgé, en 1708.

Messieurs les Présidens Lambert et Bretonvilliers, Isle Notre Dame[15].

  [15] Nous n’avons pas à insister sur la magnificence des hôtels
    Lambert et Bretonvilliers, elle est connue: tableaux rares, meubles
    du plus grand prix se trouvoient partout dans l’un et dans l’autre.
    On peut s’en faire une idée par ce qu’en a dit G. Brice, 3e édit.,
    t. II, p. 388-394.

M. le Président Dorieux, prés les Enfans Rouges[16].

  [16] Il étoit fils de Nicolas Dorieu, mort intendant de Limoges en
    1686, qui lui avoit légué une bibliothèque qu’il compléta, et dont
    le prix venoit surtout des documents imprimés et manuscrits qu’elle
    contenoit sur l’histoire de la noblesse de France. Ses livres
    portoient sur les plats: _un écusson d’azur à la bande d’or chargée
    de 3 molettes de gueules dans le sens de la bande_.

M. le Président de la Proutiere, rue saint Dominique[17].

  [17] François Gourreau de la Proustière. Il aimoit les livres. Nous en
    avons vu passer dans les ventes quelques-uns à ses armes: _d’or à
    l’aigle à deux têtes, éployée de sable, becquée et membrée de
    gueules_.

M. Jolly, Conseiller en la Cour, rue saint Antoine[18].

  [18] Il figure déjà, avec la même adresse, dans la liste de Spon, en
    1673. Il y est donné comme amateur de tableaux modernes.

M. de Caumartin, rue sainte Avoye[19].

  [19] Le Fèvre de Caumartin, que nous ayons déjà vu parmi les
    intendants des finances. Il aimoit, lui aussi, les tableaux
    modernes, surtout ceux de Rigaud, qui lui fit deux fois son
    portrait, et peignit aussi celui de sa femme.

M. Mendat, rue saint Loüis du Marais[20].

  [20] Conseiller à la Grand’Chambre, père du maître des requêtes,
    Galiot de Mandat, baron de Nully, dont les goûts nous sont plus
    connus que les siens: il étoit bibliophile. L’écusson des livres de
    sa bibliothèque, dont la vente se fit en 1755, avec _Catalogue_
    dressé par David l’aîné, porte: _d’azur au lion couronné d’or, au
    chef d’argent chargé d’une hure de sanglier de sable, accostée de
    deux roses de gueules_.

M. Jabac, rue Neuve saint Mederic[21].

  [21] Evérard Jabach, banquier de Cologne, établi en France, où il
    devint directeur de la compagnie des Indes orientales, et l’un des
    maîtres de la curiosité. Il a déjà été parlé de lui, p. 109, note
    11. Ses acquisitions à Londres, après la mort de Charles Ier, furent
    considérables selon Mariette. Il eut dès lors, tant comme peintures
    et dessins, que comme marbres et bronzes, le plus riche cabinet de
    Paris. La gêne vint par la prodigalité. Jabach dut vendre à Mazarin
    l’admirable série de ses Corrège, qui, plus tard, passèrent au Roi,
    et sont maintenant au Louvre. Puis, la ruine à peu près complète
    ayant suivi, il fallut céder la collection entière: 101 tableaux et
    5,542 dessins. Le roi offrit 200,000 livres, et, au mois de mars
    1671, marché fut conclu. Jabach garda quelques dessins, dont il ne
    put s’empêcher de faire le fonds d’une collection nouvelle que
    vendit son petit-fils. Il avoit aussi conservé quelques tableaux,
    entre autres celui où Lebrun, qui s’y étoit peint lui-même, l’avoit
    représenté avec sa femme et ses enfants. Il fut vendu à Cologne, en
    février 1787.--L’hôtel de Jabach, rue Neuve-Saint-Merry, existe
    encore en partie ainsi que le passage qui le fait communiquer avec
    la rue Saint-Martin. Bullet en avoit été le principal architecte. Au
    XVIIIe siècle, les membres de l’Académie de Saint-Luc y firent leurs
    expositions jusqu’en 1777. C’est ce qui faisoit appeler par Diderot
    «Jabach» ces tableaux d’ordre inférieur. Un fameux magasin de
    tabatières s’établit aussitôt après à l’hôtel Jabach.

M. de la Saldiere, rue du gros Chenet[22].

  [22] Ne seroit-ce pas, comme nous l’avons dit dans la COMÉDIE DE LA
    BRUYÈRE, le bibliophile Guyon de Sardière qui pouvoit alors
    commencer sa riche collection? Si ce n’est lui, nous ne savons qui
    c’est.

M. le Doyen de saint Germain l’Auxerrois[23].

  [23] Il avoit entre autres belles peintures son portrait peint par
    Rigaud, et aimoit aussi beaucoup les antiques. C’étoit un
    D’Argenson.

Mrs Belluchot et le Riche, rue des Massons[24].

  [24] François Belluchot, secrétaire du Roi, et Antoine Le Riche,
    secrétaire du Roi aussi, avoient leurs cabinets dans la même maison:
    Belluchot y collectionnoit avec un grand goût des tableaux de
    maîtres--il en avoit un surtout du Guide qui étoit admirable.--Le
    Riche faisoit, lui, collection de livres choisis et d’estampes, dont
    il avoit beaucoup de «très-belles et très-curieuses», dit G. Brice
    (3e édit., t. II, p. 175).

M. de Furetière, rue du Roy de Cicile[25].

  [25] Ce n’est pas l’auteur du _Dictionnaire_, mort alors depuis quatre
    ans, mais son frère Nicolas Furetière, avocat au Parlement, qui
    avoit comme lui le goût des curiosités, et peut-être avoit hérité
    des siennes. Dans sa liste de 1672, Spon n’avoit pas oublié
    Furetière, le lexicographe, l’auteur du _Roman Bourgeois_, il nous
    l’avoit donné comme étant curieux de livres rares, d’estampes, de
    bronzes, etc. Son frère, que nous voyons logé rue du Roi-Sicile,
    pouvoit y demeurer alors. Le 9 janvier 1691, il avoit fait baptiser
    une de ses filles à Saint-Gervais, qui est la paroisse de cette rue.
    Il mourut le 9 décembre 1697, à l’île Saint-Louis. M. Ferd. de
    Lasteyrie a retrouvé son inventaire après décès. Cent cinquante
    tableaux y figurent avec «une infinité de petits bronzes, de
    médailles, d’objets en pierre dure, etc.» Il avait donc qualité pour
    compter parmi les Curieux. V. _Bull. de la Soc. de l’hist. de
    Paris_, t. IV, p. 146-150.

M. de Creil, rue de Montmorency[26].

  [26] Il figure dans la liste de Spon. On y apprend qu’il
    collectionnoit: tableaux anciens et modernes, porcelaines, statues
    de bronze, médailles antiques et modernes. Il en brocantoit aussi:
    «Il y a longtemps, écrit Baudelot d’Airval, en 1686, dans l’_Utilité
    des Voyages_, que M. de Creil règne dans le commerce des choses
    précieuses... il s’en défait aussi avec toute la complaisance
    possible, lorsque les curieux connussent le prix de l’antiquité, et
    n’estiment pas les choses médiocrement.»--Parmi ses tableaux
    modernes, se trouvoit un baptême du Christ que Le Sueur avoit peint
    pour lui.

Mrs Bertin[27] et de la Touanne, porte Gaillon.

  [27] Trésorier des parties casuelles, «qui, lisons-nous dans les
    _Annales de la Cour et de Paris_, pour 1697-1698, t. I, p. 148, est
    un des hommes de Paris les plus curieux pour les meubles.» Il avoit
    surtout de merveilleux tapis, acquis par lui de la succession du
    conseiller Pussort. Le Roi les vit, les désira, et ils lui furent
    cédés. _Ibid._

M. Despond, aux Incurables.

Mrs Quenel[28] et de Montigny, à sainte Magloire.

  [28] Frère du fameux P. Quesnel et comme lui de l’Oratoire, dont la
    maison de Saint-Magloire, où il logeoit, étoit une dépendance. «Il
    étoit, dit Mariette (_Abecedario_, t. II, p. 230), un peu peintre et
    un peu brocanteur.» Il avoit acquis de Dacquin, évêque de Séez,
    grand nombre de dessins, dont plusieurs excellents de Jules Romain.
    Il possédoit aussi les débris de la collection des dessins de
    Vasari. Il céda le tout à Crozat. _Id._, p. 46.

M. l’Abbé Vetery, rue des bons Enfans, où il donne entrée aux Curieux
tous les matins.

M. de Blois, rue du Jardinet[29].

  [29] Ancien secrétaire de notre ambassade près du Sultan. Sa
    collection se composoit, suivant Spon, de tableaux, médailles,
    couteaux de Turquie, etc.

Mrs Gedouin et Bergeron, rue de la Couture sainte Catherine.

M. de Chantelou, prés le Trône du Fauxbourg S. Antoine[30].

  [30] Paul Fréart de Chanteloup, conseiller et maître d’hôtel du Roi,
    si célèbre par sa correspondance avec Poussin, de qui, entre autres
    œuvres, il possédoit la série des Sept-Sacrements, qui passèrent de
    son cabinet dans la galerie du Palais-Royal, et qui sont aujourd’hui
    en Angleterre. L’hôtel de M. de Chanteloup, près du Trône, étoit
    l’ancienne maison de Reuilly qui a donné son nom à une rue de ce
    quartier.

M. Rappes, rue de la Harpe[31].

  [31] Officier de chancellerie, grand amateur de tableaux. Il possédoit
    celui d’Hercule et Omphale par François Perrier.

M. Paillot, prés les Capucins du Marais[32].

  [32] Il aimoit aussi et collectionnoit les tableaux. Son portrait est
    un des premiers que peignit Hiacynthe Rigaud.

M. de Nassé, rue de Cléry.

M. l’Abbé Dannecourt, rue de Grenelle.

M. Franctot, Quay d’Alençon dans l’Isle.

M. Berthelot de Mareuil, rue Platriere.

Mrs Bordalou[33] et Rigault, rue de la Sourdière.

  [33] Mariette, qui parle plusieurs fois de lui dans son _Abecedario_,
    l’appelle M. Bourdaloue, et place son nom parmi «les célèbres de la
    curiosité.» Il possédoit de belles estampes du Parmesan, et il avoit
    été très-curieux des dessins de La Fage, que, suivant Mariette, il
    payoit un louis par jour pour lui en faire. On a son portrait gravé
    par Pitau d’après Largillière. Crozat acheta beaucoup à sa vente.

M. Robert, prés les petits Pères[34].

  [34] C’est sans doute le docteur en Sorbonne Robert, qui étoit grand
    ami de Le Brun.

M. l’Abbé de Rouilliere, rue des Rosiers saint Germain.

M. de Renne-Moulin, près l’Estrapade.

M. le Chevalier du Guet, vieille rue du Temple.

M. l’Abbé Noüé, rue Neuve des Petits Champs.

M. Gamarre, rue du Sepulcre[35].

  [35] Spon, en 1673, le loge rue Taranne. Il étoit lieutenant des
    chasses, et avoit une galerie de tableaux anciens et modernes.

M. de Briancourt, rue saint André.

M. de Chaufourneau, prés les Petits Capucins.

M. de Treville[36], prés la Sorbonne.

  [36] Henry-Joseph de Peyre, comte de Tréville, l’_Arsène_ de La
    Bruyère. Il avoit une riche bibliothèque, très-fournie surtout en
    livres grecs.

Mrs Moreau[37] et de la Gardette, rue saint Nicaise.

  [37] Auditeur des Comptes. Baudelot d’Airval dit de lui: «M. Moreau
    aime les livres, les manuscrits, les médailles, et sait en faire un
    choix fort judicieux.»

M. l’Abbé d’Apremont, rue de l’Université.

Mrs Aincelin[38], d’Apoigny[39] et de saint Maurice[40], rue Bardubec.

  [38] Lisez Hesselin, fils du fameux Hesselin de l’Ile-Saint-Louis,
    qui, entre autres livres rares, avoit possédé un si curieux volume
    sur les ballets.

  [39] Nous avons déjà parlé de lui au chap. des fermiers généraux des
    Aydes. Nous ignorons quels étoient ses goûts de curieux.

  [40] Il avoit, entre autres charges, celle d’intendant des
    Inscriptions. (_Archives de l’Art françois_, t. III, p. 237.)

M. Lhuillier[41]; rue des Jeusneurs.

  [41] Fermier général, qui fut de la grande entreprise de la place
    Vendôme, où il fit construire avec son collègue Villemarec l’hôtel
    qui appartint ensuite à Bourvalais, et qui est aujourd’hui le
    Ministère de la Justice.

M. de Cormery, prés saint Roch[42].

  [42] Amateur de peinture, plus curieux que sincère. Van Fallens, par
    exemple, lui peignoit des copies qu’il faisoit volontiers passer
    pour des originaux de maîtres. (Mariette, _Abecedario_, t. II, p.
    246.) Rigaud fit son portrait et celui de sa femme.

M. Caillet, à l’Hotel de Condé.

M. Marion, à l’Hotel de Bellingant.

M. Hedeline, Doyen de saint Honoré[43].

  [43] Il figure sur la liste de Spon parmi les amateurs de tableaux.

M. l’Abbé de la Roucherie, rue S. Thomas, quartier S. Michel.

M. Imbert, prés les Chartreux[44].

  [44] Elève de Le Brun et de Vandermeulen, et maître de Parrocel. Il
    fréquentoit les Chartreux, près desquels il loge ici, et il finit,
    en 1703, par entrer dans leur Ordre.

Mrs le Febvre[45] et le Ferron[46], rue Mauconseil.

  [45] Grand audiencier. Rigaud avoit peint son portrait et celui de sa
    femme.

  [46] Président au Parlement. Il avoit habité d’abord un hôtel de la
    rue Barre-du-Bec, où Laurent de La Hire lui avoit peint une galerie.

M. Leviez, rue saint Sauveur.

M. l’Abbé Bizot[47], rue saint Jean de Beauvais.

  [47] Baudelot d’Airval, dans son _Utilité des Voyages_, au chapitre
    des «Cabinets de France», parle ainsi de lui: «Monsieur l’abbé Bisot
    (_sic_) a des talents pour la curiosité qui sont incompréhensibles:
    on peut dire qu’il en est une source inépuisable, et que personne ne
    connoît mieux les médailles modernes que lui.»

M. de Gagniere, à l’Hotel de Guise[48].

  [48] François-Roger de Gaignières, le plus célèbre des curieux de son
    temps. Il avoit eu le gouvernement des ville, château et principauté
    de Joinville, par Mme de Guise qui se l’étoit attaché, et qui le
    logeoit dans son hôtel de la rue du Chaume avec ses collections.
    Elles comprenoient: documents de tous genres, lettres originales,
    copies, dessins, estampes, le tout choisi avec une remarquable
    intelligence. Il en fit cession au roi le 19 février 1711, moyennant
    4,000 liv. comptant, une pension viagère de même somme, et 20,000
    liv. à payer après sa mort aux personnes qu’il désigneroit. C’étoit
    donné, aussi ne vit-on là qu’un don de la part de Gaignières. Le 17
    mars suivant, Coulanges lui écrivoit: «Votre cabinet mérite bien
    l’immortalité, et, pour y parvenir, vous ne pouviez mieux faire que
    de le joindre à celui de Sa Majesté. Je souhaite fort que tant que
    vous vivrez elle vous donne largement des marques bien effectives de
    la reconnoissance qu’elle en doit avoir. Le présent le mérite bien.»
    Cette acquisition fut la dernière qui fut faite sous Louis XIV pour
    la bibliothèque du Roi. Elle en est restée un des fonds les plus
    importants.--Gaignières se mêloit quelquefois de dessiner. On peut
    voir au Cabinet des Estampes, _Topographie du Loiret_
    (arrondissement d’Orléans) une mauvaise gravure de M. de Caumartin,
    faite d’après un dessin de lui, signé. C’est une vue du château de
    Cléreau, près de Sully-la-Chapelle, dans une contrée qu’il devoit
    connoître. Il étoit, en effet, croyons-nous, et nous pourrions le
    prouver, originaire de Jargeau. N’oublions pas de dire que, suivant
    G. Brice (t. I, p. 366), il joignoit au goût des dessins et des
    estampes celui des médailles, et aussi celui des portraits
    contemporains et autres. C’étoit un des plus à la mode, comme on le
    voit par cette fin d’un couplet de Coulanges dans son _Recueil de
    chansons choisies_, 1696, in-8, p. 35:

        Venez tous dans mon cabinet,
          Chacun, pour sa parure,
            Aura sa bordure,
        Avec son cloud à crochet.

    --_V._ sur le cabinet de Gaignières, de très-curieux détails dans le
    _Voyage_ de Lister, chap. IV.

M. de la Ravoire, rue d’Anjou[49].

  [49] Lisez Neret de La Ravoye. Il étoit receveur général de La
    Rochelle. Nous ne savons rien sur ses collections. V. sur lui et sa
    fille une note du chap. sur les _Receveurs généraux_, p. 35-36.

M. de Silly, rue saint Loüis au Marais[50].

  [50] Vipart de Silly, parvenu bas-normand, dont Saint-Simon a raconté
    la singulière et ambitieuse fortune (t. III, p. 93-96). Il s’étoit
    donné tous les goûts des gens à la mode: Rigaud, par exemple, avoit
    fait son portrait.

M. Malot, rue Neuve saint Eustache[51].

  [51] Nous croyons qu’il faut lire Malet et non Malot. Ce seroit alors
    le conseiller au Parlement Louis Malet, mort en 1698, laissant une
    belle bibliothèque, dont les livres portoient sur les plats un
    écusson _d’azur, au phénix d’or, sur son immortalité de même,
    regardant un soleil aussi d’or posé au premier canton_. (Guigard,
    _Armorial du Bibliophile_, t. I, p. 87-88.)

M. Galot, prés le Chevalier du Guet.

M. Dupuis, rue des Tournelles[52].

  [52] Il collectionnoit surtout les marbres. Une des premières copies
    du buste de Louis XV enfant, faite par l’auteur même, Coysevox, fut
    pour lui.

M. de la Planche, rue de la Planche[53].

  [53] Raphaël de la Planche, fils de René de la Planche, contrôleur et
    trésorier général des Bâtiments du Roi. Il fut, avec Alexandre
    Comans, directeur d’une manufacture de tapisseries, au coin de la
    rue de la Chaise et de la rue de Varenne, qui lui dut ainsi jusqu’à
    la rue du Bac son premier nom de rue de La Planche, il fut ensuite
    un des administrateurs des Gobelins.

M. Lavocat, prés l’Hotel d’Angoulesme.

M. le Doyen de la sainte Chapelle.

M. Chassebras de Cramailles, rue du Cimetière S. André[54].

  [54] Frère de Chassebras de Bréau, qui, on l’a vu plus haut, p. 129,
    tenoit des conférences au quartier Saint-Benoit. Il étoit, lui,
    grand amateur de livres. V. _Catalogue des livres composant la
    bibliothèque_ de feu J.-B. Chassebras, ancien docteur de Sorbonne.
    Paris, 1693, in-8.

Mrs Moulle, Bonnet et Bourdelot[55], rue sainte Croix de la Bretonnerie.

  [55] Il a été parlé plus haut de lui et de ses livres au chap.
    _Médecine ordinaire_, p. 152.

M. Aubert, rue de la Tixeranderie.

M. Hubert, rue du Temple.

Mrs Guilloire, rue Bourlabé[56].

  [56] Ancien médecin de la grande Mademoiselle. Nous l’avons déjà
    trouvé parmi les administrateurs des hôpitaux.

M. du Vivier, à l’Arsenal[57].

  [57] Lister qui, dans son _Voyage à Paris_, l’appelle à tort De
    Vivier, fait de sa collection une description dont Germain Brice (3e
    édit., t. I, p. 376) confirme les détails: «J’ai visité, dit Lister,
    l’appartement de M. de Vivier à l’Arsenal: il consiste en sept ou
    huit pièces au rez-de-chaussée donnant sur le grand jardin. Elles
    sont petites, mais meublées avec la plus grande recherche; elles
    sont ornées de porcelaine de Chine la plus variée et la mieux
    choisie que j’aie jamais vu, sans excepter les pagodes et les
    peintures du même pays. J’y ai aussi remarqué des bureaux et des
    corps de bibliothèques aussi riches qu’élégants, et quelques
    tableaux des meilleurs maîtres.»

M. du Plessy, rue de Jouy[58].

  [58] Sur la liste de Spon, en 1673, il figure comme amateur de
    médailles antiques. Il logeoit alors rue Saint-Martin.

M. Croissade, rue Coquilliere[59].

  [59] Lisez Crosade. Il étoit premier commis de Penautier, receveur
    général du clergé. Il possédoit entre autres tableaux celui de
    François Perrier, _Alexandre et le médecin Philippe_.

M. du Vaux[60], rue Tictonne.

  [60] Lisez De Vaux ou Des Vaux, car Mariette l’appelle indifféremment
    de l’une ou l’autre manière. Il avoit de beaux tableaux, notamment
    une vierge du Pesarèse qu’il céda à Pasquier, autre amateur. Sa
    collection d’émaux par Petitot étoit célèbre; il possédoit aussi de
    très-précieuses médailles.

M. de la Forest[61], rue du Colombier.

  [61] C’est, croyons-nous, le peintre J.-B. Forest, un des meilleurs
    élèves de Mole pour le paysage, et dont Largillière devint le
    gendre. Si ce n’est lui, c’est peut-être Forest, «fameux marchand de
    tableaux», dont parle le marquis de Châtre, et chez lequel le
    bourreau de Paris, qui étoit grand amateur, alloit monter sa
    collection composée surtout de peintures analogues à son métier:
    tortures, supplices, etc. (_Nouveaux entretiens des Jeux d’esprit_,
    1709, in-12, p. 218-224.)

M. Brangeon, quay des Balcons[62].

  [62] C’est le nom qu’on donnoit vulgairement au quai de Béthune,
    Ile-Saint-Louis.

Mrs Desvieux[63] et de la Haye, quay de l’Ecole[64].

  [63] C’est lui qui, étant devenu l’un des directeurs de la compagnie
    des Indes sous la Régence, décida Nattier, qui faisoit alors son
    portrait, à vendre, pour des actions, à Law ses dessins de la
    galerie du Luxembourg; ce qui le ruina.

  [64] Lisez Le Hay. Il étoit ingénieur du Roi, et avoit épousé la
    célèbre Mlle Sophie Chéron, poëte, musicienne et artiste en tous
    genres: peinture, gravure, etc.

M. le Vasseur[65], rue Grenier saint Lazare.

  [65] L’abbé François Le Vasseur, ami de l’historiographe de l’Académie
    de peinture, Guillet de Saint-Georges.

Mrs de la Touche et du Frayer, Cloître saint Honoré.

M. le Febvre, rue Beautreillis[66].

  [66] Grand amateur de fleurs, qui en faisoit des échanges avec le
    voyageur antiquaire Vaillant, aussi engoué que lui de cette passion.

M. Poirée, prés saint Sauveur[67].

  [67] Dans la liste de Spon, il est désigné ainsi: «M. Poiret, à
    Saint-Sauveur, tableaux, estampes et livres.»

M. Biet, prés saint Jean en Grève.

M. Rivet, rue saint Honoré.

M. Mandin, rue des Victoires.

M. de Pile[68], prés les Minimes.

  [68] Roger de Piles, qui, d’assez mauvais peintre, devint meilleur
    historien de la peinture. Nous avons cité plus haut un de ses
    ouvrages. Il voyagea beaucoup, soit à la suite de M. Amelot tour à
    tour ambassadeur à Venise et en Portugal, soit avec son fils. Il
    rapporta de Portugal et d’Espagne une curieuse collection de
    dessins; et de Hollande, où il fut retenu en prison pour avoir trop
    mêlé la politique aux arts, des manuscrits de Rubens et des dessins
    de Rembrandt.

M. de Sainfroy[69], rue de l’Egout.

  [69] Lisez Sainte-Foi. Il étoit maître des requêtes.

M. Varlet[70], rue saint Antoine, prés les Jésuites.

  [70] Peut-être faut-il lire Vallet et non Varlet. Ce seroit le graveur
    au burin Vallet, qui fut de l’Académie de peinture.

M. de Lonpré, carrefour saint Benoist[71].

  [71] C’est le même que nous retrouverons plus loin parmi les
    académistes. Il étoit grand amateur des médailles de l’empire, dont
    il possédoit toute la série moins une. Il paroît hors de doute que
    c’est lui qui figure dans les _Caractères_ sous le nom de Diognête,
    «l’homme aux médailles.» V. _La Comédie de La Bruyère_, 2e édit., t.
    I, p. XXXIV-XXXVI.

Mrs de la Guerre et Chaperon[72], Cour du Palais.

  [72] Nous les avons déjà rencontrés tous deux, p. 208, 214, parmi les
    musiciens, l’un, comme maître de clavecin, l’autre, comme
    compositeur. Peut-être collectionnoient-ils des instruments de
    musique, comme faisoit Dovin, dont a parlé M. Bonnaffé dans son
    charmant petit livre _Les Collectionneurs de l’ancienne France_, p.
    60, et qui devroit figurer ici.

M. Tirard[73], rue du Bout du Monde.

  [73] Il faut, croyons-nous, lire Tissard. Ce seroit alors l’amateur
    dont Rigaud fit le portrait en 1688.

Mrs Orangé et de Chambrault, Cloitre saint Germain l’Auxerrois.

M. de Beauchamp, ruë Bailleul[74].

  [74] C’est le fameux maître à danser, que nous retrouverons plus loin
    au chapitre des nobles exercices, et dont il a déjà été question, p.
    126, note 1. G. Brice parle ainsi (3e édit., t. I, p. 268-269) de
    son cabinet qu’il avoit, en 1701, transféré de la rue Bailleul dans
    une maison neuve faisant le coin à gauche des rues Saint-Honoré et
    des Petits-Champs: «on trouvera dans ce cabinet des choses d’une
    excellente beauté; mais les tableaux en sont la principale partie,
    qui sont la plupart des plus fameux maîtres d’Italie. On y
    remarquera aussi quantité de porcelaines anciennes, très-rares, à
    présent, des cabinets de vernix (_sic_) du Japon, des bronzes et
    d’autres choses curieuses disposées avec beaucoup de jugement et de
    connoissance.»

M. l’Abbé du Plessy, prés le Puits d’Amours[75].

  [75] C’étoit plutôt un brocanteur qu’un amateur, car nous le
    trouverons tout-à-l’heure parmi ceux «qui se plaisent à troquer les
    tableaux.»

M. Dron, prés saint Thomas du Louvre[76].

  [76] L’abbé François Dron. Il logeoit près de l’église, dont il étoit
    chanoine: «Il a, dit G. Brice (3e édit., t. II, p. 86), un cabinet
    de médailles de moyen bronze, dont la suite est des plus étendues
    que l’on puisse voir, et dont le choix est admirable. Les sçavants
    sont charmés de la quantité et de la diversité des _revers_
    singuliers que l’on y remarque, et il seroit bien difficile de rien
    voir ailleurs de mieux conservé et de plus entier. Il a aussi
    quelques tableaux de prix dans son cabinet.» Il mourut le 22 avril
    1702. L’abbé Goujet possédoit de lui 2 vol. in-4º de lettres
    originales et manuscrites, de 1687 à 1690, traitant de numismatique,
    «avec les empreintes dessinées de quantité de médailles.» Elles
    étoient adressées à Thoynard, Vaillant, Morelle, Nicaise, etc. _V._
    le _Catal._ ms. de l’abbé Goujet à la Bibliothèque.

M. Bonart, rue Hautefeuille.

M. de Chatigny, rue Neuve des Petits Champs.

M. Fracansani, rue du Petit Lion[77].

  [77] Michel-Ange Fracanzani. Il jouoit le personnage de Polichinelle à
    la Comédie Italienne, près de laquelle--étant logé, comme nous le
    voyons ici, rue du Petit-Lion-Saint-Sauveur--il demeuroit. Son père,
    assez proche parent de Salvator Rosa, et peintre lui-même de l’école
    de Ribera, l’avoit suivi de Naples à Paris, où ils collectionnoient
    ensemble livres d’art, estampes, dessins. Les études de Le Sueur
    pour sa galerie des Chartreux, qui sont maintenant au Louvre,
    viennent de la collection de Fracanzani: «Il étoit bon curieux, dit
    Mariette à son nom dans l’_Abecedario_; il se mêloit de dessiner, et
    même de génie, mais d’un goût lourd et fort mauvais.»

M. de Blegny, rue de Guenegaud.

Le R. P. Dom Placide, Bibliotequaire de saint Germain des Prez[78].

  [78] Dom David-Placide Porcheron, qui mourut à 42 ans, le 14 février
    1694. Il étoit très-entendu en numismatique, histoire et surtout
    géographie, comme le prouve son célèbre ouvrage sur l’_Anonyme de
    Ravennes_.

Le R. P. Dom Estienne, aux Blancs Manteaux.

Le R. P. Auchereau, aux Celestins[79].

  [79] «J’ai vu, dit Lister (chap. V), le cabinet ou la cellule du R. P.
    Hochereau, qui a une collection très-choisie de tableaux originaux
    de plusieurs des meilleurs maîtres.» Il avoit entre autres le
    Repentir de saint Pierre, peint par Rembrandt, en 1634, et gravé
    aussitôt par Van Vliet.

_Au surplus, voyez à la Préface un avis important touchant la
Curiosité._




DAMES CURIEUSES.


Madame la Duchesse de Lude, prés saint Eustache[1].

  [1] Marguerite-Louise-Suzanne de Béthune Sully, qui, veuve du comte de
    Guiche, avoit épousé Henri de Daillon, duc de Lude, veuf lui-même de
    Rénée-Eléonore de Bouillé. Elle étoit magnifique en meubles et en
    argenterie, mais elle sacrifia tout, quand vinrent les désastres.
    Toute son argenterie, ses meubles d’orfévrerie passèrent à la
    Monnoie, et elle se contenta pour ses galeries, ce qu’admira fort
    Mme de Sévigné, de meubles de bois et de glaces. L’hôtel qu’elle
    habitoit, près Saint-Eustache, au coin des rues Montmartre et
    Tiquetonne, devint plus tard l’hôtel Béthune-Charost. Il existe
    encore en partie.

Madame la Duchesse d’Orvalle, rue saint Dominique[2], quartier saint
Germain.

  [2] Anne d’Harville, femme de François de Béthune, duc d’Orval ou
    d’Erval, troisième fils du duc de Sully.

Madame la Maréchalle de Humiere, à l’Arsenal[3].

  [3] Louise-Antoinette-Thérèse de la Châtre, femme du maréchal, duc
    d’Humière. «Il étoit, dit Saint-Simon, magnifique en tout.» Il
    collectionnoit des estampes, dont quelques-unes lui sont dédiées. Sa
    femme partageoit ses goûts.

Madame la Duchesse de Sully, devant saint Paul[4].

  [4] Marie-Antoinette Servien, duchesse de Sully, très-magnifique,
    très-dépensière. Elle mourut pauvre, quoique sa dot eût été de
    800,000 livres. Elle habitoit presque devant Saint-Paul, rue
    Saint-Antoine, l’hôtel bâti par Sully, et qui existe encore à peu
    près intact.

Madame d’Estrées, rue des trois Pavillons[5].

  [5] Marie-Marguerite Morin, duchesse d’Estrées, tenoit de son père,
    qu’on appeloit Morin le Juif: «brocanteuse, dit Saint-Simon, se
    connoissoit aux choses et aux prix, avoit le goût excellent, et ne
    se refusoit rien.»

Madame la Princesse de Meklebourg[6], près saint Roch.

  [6] Angélique-Isabelle de Montmorency-Boutteville, duchesse de
    Mecklembourg-Schwerin. Saint-Simon nous la représente comme
    «très-avare et très-entasseuse.»

Madame la Duchesse de Porsmeuch, rue[7]

  [7] Louise-Renée de Penacoët de Kéroual. Le roi d’Angleterre, Charles
    II, dont elle avoit longtemps été la maîtresse, l’avoit faite
    baronne de Petersfield, comtesse de Farsam, duchesse d’Aubigny et de
    Portsmouth. Revenue en France, lorsqu’il fut mort, elle s’étoit
    logée sur le quai des Théâtins, auprès de la rue des Saints-Pères,
    dans un hôtel où elle avoit entassé tout ce qu’elle avoit pu prendre
    des magnifiques collections de Charles II. Liger, dans le _Voyageur
    fidèle_, p. 136, vante sa galerie de tableaux.

Madame la Duchesse de Bouillon, sur le quay Malaquet[8].

  [8] Marie-Anne Mancini, duchesse de Bouillon, une des nièces de
    Mazarin, la protectrice de La Fontaine. Son hôtel existe encore en
    partie au nº 19 du quai Malaquais. Il avoit été bâti par le
    financier La Bazinière, mais elle l’avoit beaucoup transformé et
    embelli. En juillet 1696, elle y faisoit encore travailler. «Les
    dedans, écrit Liger (p. 135), sont plus curieux que les dehors par
    les tableaux et autres meubles et bijoux qui en sont la richesse et
    l’ornement.» Suivant Saint-Simon, la duchesse étoit surtout
    magnifique en pierreries.

Madame la Présidente du Tillet, rue de la Planche[9].

  [9] Fille aînée du président Bailleul, mariée au président Girard du
    Tillet. Elle avoit, dans sa jeunesse, fait beaucoup parler d’elle.
    _V._ la _Carte du pays de Braquerie_, dans l’_Histoire amoureuse des
    Gaules_, édit. elzévir., t. I, p. 11.

Madame de Coulange[10], dans le Temple[11].

  [10] Marie-Angélique Du Gué Bagnols, femme du marquis de Coulanges, le
    chansonnier, parent et ami de Mme de Sévigné. Le mari et la femme
    étoient l’un et l’autre de fins collectionneurs. Coulanges aima
    d’abord les tableaux: «le cabinet de M. de Coulanges, écrit Mme de
    Sévigné à sa fille, le 10 nov. 1673, est trois fois plus beau qu’il
    n’étoit; vos petits tableaux sont dans leur lustre, et placés
    dignement.» Il aimoit surtout les portraits. On l’a vu par une fin
    de couplet citée plus haut. Il donnoit aussi dans les faïences, mais
    les richesses qu’il vit entassées à l’hôtel de Guise lui firent
    prendre des goûts plus coûteux: il passa aux cornalines, aux
    cristaux, aux agathes. C’est encore une des chansons de son
    _Recueil_ (p. 151) qui nous l’apprend. Sa femme recherchoit les
    raretés curieuses. Mme de Sévigné (t. X, p. 182) nous a raconté son
    ravissement lorsqu’elle retrouva le miroir de toilette de la reine
    Marguerite.

  [11] Les Coulanges avoient, à la fin de 1690, quitté la rue du
    Parc-Royal pour venir habiter un des petits hôtels de l’enclos du
    Temple.

Madame la Marquise de Richelieu, Isle Notre Dame[12].

  [12] Fille d’Hortense Mancini et du duc de Mazarin, et par conséquent
    nièce de la duchesse de Bouillon, dont nous avons parlé
    tout-à-l’heure. Le marquis de Richelieu, petit-neveu du cardinal,
    l’avoit enlevée, en 1682, du couvent de Sainte-Marie de Chaillot, et
    l’avoit emmenée à Londres, où il l’avoit épousée. Ils habitoient
    dans l’île Saint-Louis, sur le quai d’Anjou, l’hôtel où avoit logé
    Lauzun, et qui devint plus tard celui des Pimodan. _V._ nos
    _Chroniques et légendes des rues de Paris_, p. 118-119.

Madame de Boufflers, ruë de Bourbon[13].

  [13] Catherine-Charlotte de Grammont, maréchale de Boufflers. Le mari
    avoit une belle bibliothèque, avec tous les livres à ses armes. Nous
    ne savons quelles étoient, comme curieuse, les préférences de sa
    femme.

Madame la Marquise de Quintin, même ruë[14].

  [14] Suzanne de Montgommery, comtesse--et non marquise--de Quintin.
    Saint-Simon, qui lui tenoit d’assez près par sa femme, a fait d’elle
    et de ses entours, «la meilleure compagnie de la Cour», un bien
    curieux tableau (t. I, p. 326-327).

Madame de Chavigny, à l’Hotel saint Paul[15].

  [15] C’étoit une Phélypeaux de Vilesavin, qui avoit épousé le marquis
    de Chavigny. On la citoit depuis longtemps comme célèbre curieuse.
    L’abbé de Marolles, parlant dans ses _Mémoires_ de son cabinet et de
    celui de Mme d’Aiguillon, dit: «Ils souffrent peu de comparaison
    pour la magnificence des cristaux, des lapis, des agates, des onyces
    (onyx), des calcédoines, des coraux, des turquoises, des aigues
    marines, des amétystes, des escarboucles, des topazes, des grenats,
    des saphyrs, des perles et des autres pierres de grand prix qui y
    sont mises en œuvre dans l’argent et dans l’or, pour y former des
    vases, des statues, des obélisques, des escrins, des miroirs, des
    globes, des coffres, des chandeliers suspendus et autres choses
    semblables.»

Madame la Marquise de Mallet, rue saint Loüis du Marais[16].

  [16] Rigaud fit son portrait, ainsi que celui de son mari, en 1686.
    C’est tout ce que nous savons sur elle.

Madame d’Allouy, ruë du Bac[17].

  [17] Bénigne de Meaux de Fouilloux, marquise d’Alluye, et non
    d’Allouy. Grande joueuse, suivant Saint-Simon, et grande confidente
    de galanteries, quand l’âge l’empêcha de s’en occuper autrement.

Madame de Monchal, près Bellechasse[18].

  [18] Il y avoit, dans la famille des Montchal, une fort belle
    bibliothèque formée par les soins de Pierre de Montchal, conseiller
    au grand Conseil, mort en 1652. Peut-être est-ce à ce titre que sa
    bru figure ici parmi les curieuses.

Mademoiselle de Cutigny, rue des Rosiers saint Germain.

Madame de Maillier, rue saint Anastaze.

Madame la Présidente le Lievre, rue de Brac.

Madame la Marquise de Polignac, près la Charité[19].

  [19] Marie-Armande de Rambures, marquise de Polignac, tante de l’abbé
    de Polignac qui devint cardinal, et fit l’_Anti-Lucrèce_.

Madame de Sauvebœuf, rue de Grenelle, quartier S. Germain.

Madame de Verderonne, rue S. Antoine, à l’Hotel de Beauvais[20].

  [20] Nous ne savons rien ni sur elle ni sur son mari Etienne-Claude de
    L’Aubespine, marquis de Verdronne. Nous ignorons aussi pourquoi elle
    logeoit à l’hôtel de Beauvais, occupé encore à ce moment-là par le
    fils de la favorite d’Anne d’Autriche, qui l’avoit fait construire,
    le baron de Beauvais.

Madame de Chevry[21] et Mademoiselle de Clapisson[22], prés les Enfans
Rouges.

  [21] Petite nièce de Fénelon, qui avoit épousé tard le vieux Chevry,
    l’aveugle. Elle tenoit bureau d’esprit, dévot et quiétiste, «qui ne
    laissoit pas, dit Saint-Simon, d’être compté dans Paris.»

  [22] Précieuse de la société de Mlle de Scudéry, qui logeoit tout près
    d’elle. Les Clapisson étoient une famille de la bonne bourgeoisie
    parisienne, (_V. Archives hospitalières_, Hôtel-Dieu, 1re part., p.
    107.)

Madame de Lamec[23], rue saint Antoine.

  [23] Lisez de Lamet. C’étoit la sœur du curé de Saint-Eustache. Rigaud
    fit son portrait en 1696.




COMMERCE DE CURIOSITEZ ET DE BIJOUTERIES.


Les Marchands tenans boutique, Acheteurs, Vendeurs et Troqueurs de
Tableaux, Meubles de la Chine[1], Porcelaines[2], Cristaux, Coquillages,
et autres Curiositez et Bijouteries, sont Messieurs d’Hostel[3], à
l’entrée du quay de la Mégisserie, Malaferre[4] et Varenne[5], quay de
l’Orloge; la Fresnaye[6] et Laisgu[7], rue saint Honoré; Quesnel, rue
des Bourdonnois[8]; Protais, rue des Assis; Fagnany, quay de l’Ecole[9];
Antheaume, derriere l’Hotel de Bourgogne; Naneau[10], au Palais, etc.

  [1] Il n’y en avoit pas de plus à la mode. Sénecé, dans ses
    _Epigrammes et autres pièces_ (1717, in-12, p. 272-274), nous parle
    de ce goût pour les meubles et les porcelaines de Chine, le
    «lachinage», comme on disoit en langage de marchands (_voy._ plus
    bas p. 239). Limojon de Saint-Disdier, dans son curieux livre, le
    _Voyage du Parnasse_ (1716, in-12, p. 174) nous fait voir le cabinet
    d’un curieux tout lambrissé de laque: «c’est, dit-il, une pièce
    ovalle, revêtue du haut jusqu’en bas de morceaux de lacq (_sic_) de
    la Chine, d’une grandeur et d’une beauté surprenantes.»

  [2] On ne les vouloit que de la Chine:--«Rappelez-vous, dit Lisette,
    dans la _Maison de campagne_ de Dancourt (acte I, sc. 5), celle qui
    en riant vous cassa toutes ces porcelaines de Hollande, parce
    qu’elle disoit qu’il n’en falloit avoir que de Chine.» Une
    déclaration royale du 2 juillet 1709 défendit l’importation des
    porcelaines, faïences et poteries étrangères.

  [3] Lisez Dautel ou Dotel. Il est continuellement cité dans les pièces
    du temps. Le Sage, par exemple, le nomme dans _Turcaret_, et Regnard
    dans l’_Homme à bonnes fortunes_, scène des _Curiosités_.--«Est-il
    curieux? dit Brocantin.--Bon, répond Arlequin, c’est le Dotel du
    pays. Il troque de nippes à tout moment, et je vous réponds qu’avant
    qu’il soit deux jours il aura troqué sa femme.» Le financier du
    _Voyage du Parnasse_ se vante, p. 205, d’avoir acheté chez lui «une
    belle jatte de la vieille porcelaine verte du Japon», _V._ aussi le
    _Théophraste moderne_, p. 422; l’_Ambigu d’Auteuil_, p. 16-17;
    Gacon, le _Poëte sans fard_, p. 41.

  [4] Il n’étoit pas moins célèbre que Dautel. L’abbé de Villiers le
    nomme avec lui dans ses _Poésies_, p. 149, et seul dans son poëme de
    l’_Amitié_, p. 48:

        Voulez-vous voir chez vous vos salons inutiles,
        Montrer aux curieux mille ornements fragiles,
        En antiques tourner et le bronze et le fer,
        Et dans un cabinet mettre tout Malafer...

    Il collectionnoit pour son propre compte, et possédoit notamment,
    sans vouloir le vendre ni le troquer, le _Saturne coupant les ailes
    de l’Amour_, par Nicolas Perrier. Il voyoit beaucoup artistes et
    poëtes. La veuve Laurent l’avoit comme habitué dans son café du coin
    des rues Dauphine et Christine; il fut ainsi mêlé à l’affaire des
    couplets de Rousseau. Il avoit écrit une histoire des peintres, dont
    nous ne connoissons qu’une notice, celle de Santerre, publiée par le
    _Mercure_, sept. 1718, p. 69.

  [5] Spon, en 1673, l’avoit mis non parmi les marchands de curiosités,
    mais parmi les curieux: «M. Varenne, dit-il, près la Monnoie,
    tableaux et diverses curiosités.»

  [6] Il est, aussi bien que Dautel, nommé dans plusieurs pièces du
    temps, comme brocanteur célèbre, et peut-être aussi un peu comme
    prêteur sur gages. (_V._ Dancourt, la _Foire Saint-Germain_, sc.
    XII, et la _Femme d’intrigue_, acte V, sc. IX.) Ses deux fils
    Eléonor et Pierre lui succédèrent au Palais, l’un à l’enseigne _de
    la Croix d’or_; l’autre à celle du _Dauphin_.--On trouve, dans les
    _Mss._ Delamarre, nº 21, 627, p. 170, le procès-verbal d’une visite
    faite chez La Fresnaye, après l’édit contre les dorures, décrété en
    1669 et renouvelé en 1687 et 1689.

  [7] «Près les pères de l’Oratoire.» Edit. de 1691, p. 24.--Il est
    nommé par l’abbé Bordelon dans son _Livre à la Mode_, 1696, in-12,
    p. 33. Marianne demande en quoi consistent les façons du bel air:

        Est-ce à rouler les yeux pour se faire plus belle,
        A façonner sa bouche, et passer tout le jour
        Dans ces soins fatigants de prendre un air de Cour?...
        A hausser sa fontange en coquette éventée
        Et renchérir d’abord sur la mode inventée?
        A vouloir affecter par un soin assidu
        Pour ses marchands: Le Gras, La Fresnaye et l’Egu?

  [8] Dans l’édit. de 1691, il est à la suite des autres, sans
    indication d’adresse, mais avec un détail qui manque ici: «Ils
    vendent pareillement des coquillages, mais le sieur Quenel est celui
    d’entre eux qui s’y attache le plus.»

  [9] «A la descente de la Samaritaine.» Edit. de 1691.--Nous avons
    beaucoup parlé de cet intrigant du brocantage dans notre _Histoire
    du Pont-Neuf_, t. II, p. 277-281. On nous permettra d’y renvoyer.
    Nous rappellerons seulement ici les altérations qu’il fit subir aux
    planches de Callot, dont il possédoit un grand nombre, que son fils
    mit en recueil (_Mercure_, mars 1723, p. 561), et sa fameuse loterie
    qui ne fut qu’un immense vol organisé. Dancourt en fit une pièce, où
    il l’appela Sbrigani, et les Italiens, dans leur comédie les _Bains
    de la porte Saint-Bernard_, allèrent encore plus loin: ils le
    nommèrent «el signor Furbagnani.» On lit dans le _Théophraste
    moderne_, à propos de cette loterie: «lui-même y a plus gagné sans
    avoir de billets que tous ceux qui ont eu des lots.» Il gagna
    beaucoup aussi avec ses tabatières à scandales, où toutes les
    aventures scabreuses du moment étoient satiriquement représentées.
    Il en est parlé dans le _Retour de la foire de Bezons_, et mieux
    encore dans les _Souhaits_ joués en 1693: «MOMUS. Qui est-ce qui
    porte cet épicier à éventer la honte de son lit, et à solliciter une
    place sur les tabatières de Fagnany? La Folie.»

  [10] Nous trouvons pour Nanot (_sic_) dans la _Collect. Delamarre_, nº
    21, 627, p. 170, un procès-verbal de visite, comme celui qui fut
    dressé chez La Fresnaye.

Mademoiselle de Tournon, qui tient aussi boutique sur le Pont au Change,
fait le même trafic.

Il y a d’ailleurs en chambres hautes plusieurs Vendeurs et Troqueurs de
Curiositez; comme Messieurs Raclot, rue de Harlay; Poignan, rue de
Mommorancy; Roussel, cul de sac de la ruë Beaubourg; Paris, près la
Jussienne[11]; des Dieux, rue des Assis au petit Broc, etc.

  [11] L’édit. de 1691, p. 24, le place dans un art. non reproduit ici:
    «M. l’abbé Du Plessis, près le puits d’Amour, le sieur Dalançon, rue
    Chapon, et le sieur Paris, près la Jussienne, se plaisent à troquer
    des tableaux.»

Mesdames Noel, rue de Grenelle saint Honoré, et Tonnetti, quay de la
Mégisserie, ont aussi chez elles beaucoup de Curiositez dont elles font
trafic.

M. Dorigny, rue Quinquempoix, M. Laittier et Mademoiselle le Brun, à
l’aport de Paris, ont aussi ordinairement de belles pièces de
Porcelaines et de Lachinage[12].

  [12] V. sur ce mot une des notes précédentes, p. 236.

M. l’Argilliere, rue sainte Avoye, fait commerce de bons Tableaux[13].

  [13] Nicolas de Largillière, le fameux peintre de portraits. Il ne
    quitta la rue Sainte-Avoye que peu de temps avant sa mort, en 1746,
    à quatre-vingt-dix ans. C’étoit, comme on sait, la partie de la rue
    du Temple actuelle qui s’étendoit de la rue Croix-de-la-Bretonnerie
    à celle des Vieilles-Haudriettes. Il logeoit en face de la fontaine
    placée entre les nos 40 et 42. _V._ G. Brice, 3e édit., t. I, p.
    255.

Autant en font Messieurs Guillemart, prés saint Yves, et Muguet, au
milieu de la ruë Bourlabé.

M. de Cauroy, ruë Briboucher, tient magasin de Bijouteries et Coffres
d’Angleterre[14], de Porcelaines, de Pagottes[15], de terre cizelées et
de Meubles de la Chine[16].

  [14] Ces «articles» anglais furent longtemps à la mode. Le 30 juillet
    1743, un privilége de dix ans fut accordé à Claude-Imbert Gérin, qui
    s’établit rue de Charenton, pour fabriquer «toutes sortes de
    fayences, à l’imitation de celles d’Angleterre.»

  [15] Pour «pagodes.» C’étoit une des chinoiseries les plus
    recherchées. Au siècle suivant, Gersaint, le fameux marchand de
    curiosités, en avoit fait son enseigne. Voici le texte de l’adresse
    que M. de Caylus avoit gravée pour lui, en 1740: «à LA PAGODE,
    _Gersaint, marchand jouaillier sur le Pont-Notre-Dame, vend toute
    sorte de clainquaillerie nouvelle et de goût, bijoux, glaces,
    tableaux de cabinet, pagodes, vernis et porcelaines au Japon,
    coquillages et autres morceaux d’histoire naturelle, cailloux,
    agathes, et généralement toutes marchandises curieuses et
    étrangères_.

  [16] Cet art. est un peu différent dans l’édit. de 1691, p. 24. Après
    une liste à peu près pareille à celle qui commence ce chapitre, mais
    moins longue, on y lit: «Ces marchands vendent des porcelaines, des
    meubles de la Chine et des terres cizelées en détail, mais on en
    trouve en gros chez M. Du Cauroy, à la ville d’Anvers, rue
    Briboucher», c’est-à-dire, comme on sait, rue Aubry-le-Boucher.

M. de la Cousture, Cloitre S. Nicolas du Louvre, a un particulier talent
pour damasquiner sur l’acier[17] en Figures et Ornemens de la Chine.

  [17] Cet art de damasquiner n’étoit pas nouveau chez nous, mais il
    avoit été singulièrement perfectionné par un des maîtres de La
    Cousture, nommé ici, le fourbisseur parisien Cursinet, mort vers
    1670. «Il a fait, dit Félibien, _Des principes d’architecture_,
    1676, in-4º, p. 455, des ouvrages incomparables en cette sorte de
    travail, tant pour le dessin, que pour la belle manière d’appliquer
    son or, et cizeler de relief par dessus.»

Le Sieur Salé Peintre, rue de la Ferronnerie, dit avoir trouvé un secret
d’Optique qui fait voir dans un Tableau toutes autres Figures que celles
qui y sont peintes, et même au gré des Spectateurs.

Le Sieur l’Arche Fondeur et Cizeleur en Bronze, qui est fort renommé
pour les Figures de Cabinet, demeure rue des Ciseaux, prés l’Abbaye
saint Germain; il donne une couleur de bronze antique aux figures
modernes[18].

  [18] Il se servoit de _purpurine_, ou bronze moulu, qui s’appliquoit
    soit à l’huile soit au vernis.

Les Sieurs Vilaine, rue Neuve saint Mederic, et la Pierre, quay des
Orfèvres, ont un particulier talent pour bien nettoyer les Tableaux.

Le Sieur Pouilly[19], rue Dauphine, a trouvé un secret pour augmenter de
beaucoup la vertu de l’Aymant et un Microscope qui grossit
extraordinairement les objets[20].

  [19] «Faiseur d’instruments mathématiques... vend un calandrier de
    cabinet propre et curieux.» Edit. de 1691.

  [20] Ces derniers détails manquent dans l’édit. de 1691, p. 24, mais
    après l’article se lit celui-ci, qui n’a pas reparu ici: «On trouve
    des estampes de toutes sortes chez le portier de l’Académie des
    peintres, rue de Richelieu.»

Les Tableaux Cilindriques[21] se vendent chez le Sieur Amielle, près
saint Hilaire.

  [21] Il eût mieux valu dire «miroirs cylindriques.» _V._ à leur sujet,
    le _Diction. des Arts et Métiers_ de l’abbé Jaubert, 1773, in-12, t.
    II, p. 612.

Il y a un Pere Theatin qui en fait pour luy et pour ses amis d’une
beauté extraordinaire[22], aussi bien que des Figures de toutes espèces
pour la Lanterne magique[23].

  [22] Les religieux s’occupoient volontiers d’optique; le P.
    Jean-François Niceron, auteur du _Thaumaturgus opticus_, 1646,
    in-fol., avoit fait chez les Minimes de la place Royale, qui étoient
    un couvent de son ordre, des tableaux changeants d’une habileté et
    d’un effet surprenants.

  [23] Ce n’étoit pas encore devenu un amusement enfantin et vulgaire.
    On s’en divertissoit dans le monde, comme à cette soirée de l’hôtel
    de Liancourt, où le spectacle fut une lanterne magique, avec deux
    vielles pour orchestre. _V._ Loret, _Muse historique_, 13 mai 1656.

Le Sieur Hubin Emailleur, rue saint Denis, devant la ruë aux Ours, fait
et vend des Baromettres, des Thermomettres et des Hidromettres d’une
propreté particulière[24].

  [24] Il étoit célèbre depuis déjà longtemps. En 1673, Spon le plaçoit
    sur la liste de ses curieux: «M. Ubin, dit-il, émailleur, rue
    Saint-Denys, vis-à-vis la rue aux Ours: thermomètres, baromètres,
    larmes d’Hollande, et autres curiosités.» Suivant Huet, qui lui fit
    faire un anémomètre, qu’il avoit lui-même inventé, et qui le traite
    «d’excellent ouvrier», il étoit anglois. (_Huetiana_, p. 56.) C’est
    lui qui, avant Réaumur, construisit les thermomètres les plus
    parfaits: «les curieux en conservent encore dans leurs cabinets»,
    écrivoit, en 1773, l’abbé Jaubert (t. III, p. 143). Il excelloit
    aussi pour les yeux de verre: «chez Hubins, le fabricant d’yeux de
    verre, dit Lister à la fin du chap. V de son _Voyage à Paris_ en
    1698, j’en vis de pleins tiroirs, de toutes couleurs, de façon à
    appareiller n’importe quels yeux: et il faut qu’il en soit ainsi,
    car la moindre différence seroit intolérable.» L’édit. de 1691, p.
    31, n’oublie pas ce talent de Hubin pour les yeux artificiels, et
    elle lui donne pour concurrent Le Quin, rue Dauphine, que nous
    retrouverons plus loin.--Hubin était grand ami de Papin, dont, en
    1674, il avait présenté à l’Académie des sciences l’ouvrage
    important, _Nouvelles expériences du vuide_.

Le Sieur Do aussi Emailleur, rue du Harlay, aux armes de France, en vend
de plus simples et à meilleur marché[25].

  [25] On lit, à la suite, dans l’édit. de 1691, p. 31: «le sieur
    Roault, autre émailleur, rue Saint-Denis, fait en émail toutes
    sortes de figures humaines, et autres représentations. Il vend aussi
    des aigrettes d’émail, qui, avec une grande beauté, ont cette
    propriété de ne pas prendre la poussière.» Son fils lui succéda, et
    ses émaux furent encore plus célèbres que les siens. _V._ l’_Année
    littéraire_, 1755, t. VIII, p. 49, 50; et 1758, t. VII, p. 138.
    Piron en possédoit, dont il étoit très-fier.

Le Sieur Langlois père, et le Sieur Langlois fils ainé[26], qui imitent
et qui raccommodent en perfection les Meubles de la Chine, demeurent
grande rue du fauxbourg saint Antoine, prés l’Hôtel de Bel air[27].

  [26] En outre d’un article à peu près pareil à celui-ci dans l’édit.
    précédente, p. 24, Langlois, père et fils, en ont un, p. 35, qui
    manque ici, et qui complète l’autre: «les sieurs Langlois, père et
    fils, font des cabinets et paravents, façon de la Chine, d’une
    beauté singulière; ils demeurent l’un et l’autre, grande rue du
    Faubourg Saint-Antoine, près la rue de Charonne.»

  [27] «Le sieur Paty, même faubourg, près l’enseigne du Tambourg, fait
    de moindres ouvrages, façon de la Chine.» Edit. 1691, p. 24.

Le Sieur Langlois le cadet qui excelle pour les Figures et Ornemens de
la Chine, demeure rue de la Tixeranderie, chez M. Perducat
Chirurgien[28].

  [28] Son adresse, dans l’édit. précéd., p. 35, est: «au Cloître
    Sainte-Catherine de la Couture.»

Le Sieur Taboureux qui demeure sur le Quay de la Megisserie[29], prés le
Fort l’Evêque, imite fort bien les Coffres et Ferrures d’Angleterre[30].

  [29] «Au milieu du quai de la Mégisserie.» Edit. de 1691.

  [30] Avant cet article se trouve celui-ci dans l’édit. de 1691, p. 24:
    «le sieur Des Essarts, au haut des fossez de Condé, imite le La
    Chinage en creux et en relief.»

Les Sieurs Thierry, rue du petit Heuleu à l’Etoile; de Monceau à la
Bastille, et Darmé, chez un Cordonnier, rue de la vieille Draperie, font
des Tablettes de poche d’une grande propreté.

Les Cassolettes philosophiques[31] à feu d’Esprit de vin et Globule de
Cristal qui attire les Liqueurs à la façon de l’Eolipile[32], se vendent
sur le quay de Nesle, à l’Apoticairerie royale[33], et servent non
seulement à des-infecter et parfumer les chambres agréablement sans
fumée et presque sans frais[34], mais encore à guérir plusieurs maladies
par des vapeurs medecinales.

  [31] Il en a été parlé plus haut, p. 172-173.

  [32] L’esprit de vin chauffoit le globe comme un éolipyle, et la
    chaleur en chassoit les parfums, dont on vouloit parfumer les
    chambres. Ces cassolettes s’appeloient philosophiques, comme tout ce
    qui tenoit alors un peu à la chimie.

  [33] C’est-à-dire chez Blegny.

  [34] On les allumoit derrière les pilastres et les meubles des
    chambres ou des salles, pour qu’elles en fussent embaumées. _V._
    l’_Art de bien traiter_. Paris, 1674, in-12, chap. _de la Salle à
    manger_.




COMMERCE DES OUVRAGES D’OR, D’ARGENT, DE PIERRERIES, DE PERLES, ETC.


La Chapelle aux Orphevres, où les Maitres et Gardes de l’Orphevrerie ont
leur bureau, et où ils font les Mardis et Vendredis l’essai de tous les
Ouvrages d’or et d’argent, est dans la ruë des Lavandieres[1].

  [1] Le bureau étoit rue des Lavandières-Sainte-Opportune, mais la
    chapelle se trouvoit dans la rue des Orfèvres, qui alloit de la rue
    Saint-Germain-l’Auxerrois à la rue Jean-Lantier. Elle avoit été
    dédiée par la corporation, en 1399, à saint Eloi.

C’est au même lieu qu’est le Bureau des Controlleurs de la marque pour
l’or et pour l’argent[2].

  [2] Tous les ouvrages sans marque--nous dirions sans contrôle--étoient
    saisis. Il y eut, par arrêt du 4 août 1693, une exécution de ce
    genre contre les orfèvres Bastier, Prévost, Turmelle, Ladoireau et
    Gauché.

Les Maîtres et Gardes en charge de l’Orfevrerie sont, Messieurs
Bretault, place Dauphine, Bulot, rue saint Louis du Palais, Juillet,
quay de l’Orloge, de Ronel, Grenier et l’Evesque, quay des Orphévres[3].

  [3] On voit que la plupart des orfèvres étoient groupés dans la place
    Dauphine ou sur les quais et les rues qui l’entourent. Cette réunion
    de riches boutiques, sur un même point, avoit obligé, au siècle
    dernier, de placer tout près, au terre-plain du Pont-Neuf, un corps
    de garde du Guet, dont une sentinelle se tenoit toute la nuit au
    coin du quai des Orfèvres.

M. de Launay, Orphevre du Roy, demeure devant les Galleries du
Louvre[4].

  [4] Il étoit, en effet, «un des illustres qui sont logez sous la
    grande gallerie», comme dit G. Brice. «De Launay, orfèvre,
    ajoute-t-il (t. I, p. 75), conduit ordinairement les ouvrages
    magnifiques que le roi fait faire.» Tout l’ameublement de
    Versailles, «en meubles d’orfèvrerie», tels que les bancs d’argent
    massif, qui se trouvoient devant chaque fenêtre de la galerie des
    glaces, avoit été fait sous sa direction. Quand arrivèrent les lois
    somptuaires dont nous avons parlé, il n’en fut pas pour cela plus
    épargné. Le commissaire Delamarre fit chez lui une visite le 4 mars
    1687, et il lui fallut déclarer tout ce qu’il avoit d’ouvrages d’or
    et d’argent, achevés ou à finir. _V._ les papiers Delamarre à la
    Biblioth. Nat., nº 21, 627, fol. 102 et suiv. On apprend par le
    procès-verbal qu’il étoit défendu aux orfèvres de vendre des
    soufflets et des grils d’argent, mais qu’en revanche ils avoient le
    droit de mise en vente pour les boîtes à poudre, boîtes à
    savonnettes, sonnettes, écritoires, bassinoires et pots de chambre
    en argent!

M. de Villers qui travaille aussi pour Sa Majesté aux ouvrages
d’Orphevrerie, demeure aux Gobelins[5].

  [5] Les Gobelins n’étoient pas alors qu’une manufacture de
    tapisseries, mais une sorte d’école d’arts et métiers sous la
    direction de Le Brun, puis de Mignard, avec ateliers de bijouterie,
    d’ébénisterie, de marqueterie, de peinture, de gravure, etc. Il
    n’est donc pas étonnant que nous y trouvions l’orfèvre De Villiers,
    en 1692. Trois ans après, le malheur des temps fit fermer la plupart
    de ces ateliers.

M. de Montarsis qui a soin des Ouvrages de pierreries de Sa Majesté,
demeure devant la place du Carrousel[6].

  [6] C’étoit encore un des illustres des galeries. Voici son nom
    complet: Pierre Le Tessier de Montarsy. Il se qualifioit «joaillier
    ordinaire du Roi», puis, quand son père, qui étoit «garde des
    pierreries de la Couronne», fut mort, il prit le même titre, mais en
    le partageant avec le président Du Metz. C’est lui qui, en 1697, fut
    chargé de constater à la Sainte-Chapelle, sur le reliquaire de la
    couronne d’épines, la soustraction que Henri III y avoit fait faire
    de plusieurs rubis des plus précieux. (Morand, _Hist. de la
    Sainte-Chapelle_, p. 199-200.) Montarsy, avant de figurer ici au
    premier rang des joailliers, auroit pu être classé parmi les
    curieux: «Il a, dit G. Brice, une très-belle galerie remplie de
    tableaux des plus grands maîtres, de bronzes, de bijoux précieux, de
    porcelaines rares, de vases de cristal de roche, et de mille
    curiositez d’un goût exquis et d’un prix très-considérable. Ces
    belles choses sont dans sa maison, située à l’extrémité du
    cul-de-sac de Saint-Thomas du Louvre.» C’est chez lui qu’on se
    fournissoit des boîtes à portrait du Roi: «Je m’adresse à vous, lui
    écrit Phélypeaux, le 10 oct. 1694, ne sachant si M. Du Metz est à
    Paris, pour vous dire de m’envoyer le plutôt qu’il se pourra une
    boëtte à portrait de huit cents ou mille escus. Il faut que le
    portrait du Roy soit d’émail, en relief, de la façon du Suédois, en
    cas que vous en ayez un prêt.» Jal, à qui nous devons de connoître
    cette lettre, se demande quel peut-être ce peintre suédois. C’est,
    sans aucun doute, Kleintgel ou Klingstet, qui étoit déjà célèbre
    alors à Paris pour ses miniatures.

Messieurs Bins[7] et Guyon distinguez pour mettre toutes sortes de
Pierreries en œuvre, demeurent aux Galleries du Louvre.

  [7] «Bain, émailleur, dit G. Brice (t. I, p. 76), presque le seul en
    France qui entende à présent le travail des émaux clairs.» Il avoit
    un logement aux galeries du Louvre, depuis le 14 sept. 1671. (_Arch.
    de l’Art françois_, t. I, p. 220.)

Messieurs le Lorrain, à l’aport de Paris, du Grenier, quay de Nesle,
Pierre, quay de la Megisserie, et Legare[8], rue de Harlay, sont encore
renommez pour le même fait.

  [8] Lisez Légaré. Il étoit fils de Gilles Légaré, qui avoit publié, en
    1663, un très-curieux volume sur son art: _Livre des ouvrages
    d’orfèvrerie, fait par Gilles Légaré, orfèvre du Roy, rue de la
    Vieille-Draperie, devant le Palais au Barillet, proche Saint-Pierre
    des Arcis_.

Messieurs Alvarez, rue Thibault aux dez[9], Catilon, quay de l’Orloge,
et Poirier, prés la Croix du Tiroir, font grand commerce de Pierreries.

  [9] Nous avons déjà parlé de lui, quand nous l’avons vu passer comme
    trésorier payeur des Cent Suisses. Nous ajouterons à ce que nous
    avons dit, que--ce qui n’étonnera pas--il prêtoit sur gages: «Elle
    sortit dès huit heures du matin, lisons-nous dans _La France devenue
    Italienne_, pamphlet galant de 1686, et fut mettre des pierreries et
    de la vaisselle d’argent en gage chez Alvarès, fameux joaillier,
    pour quatre mille pistoles.» Il brocantoit de joyaux et d’antiques
    même à l’étranger, en se disant agent du Roi. _V._ dans _la
    Correspondance inédite de Mabillon et de Montfaucon avec l’Italie_,
    t. I, p. 220-227, deux lettres écrites en février 1686 par Michel
    Germain à Claude Bretagne.

Messieurs Loir[10], quay des Orphèvres, et Jacob, rue de Gesvres, sont
des Orphèvres renommez pour la fabrique des Ornemens d’Eglise.

  [10] Alexis Loyr, fils d’un orfèvre, qui avoit eu sa célébrité,
    «surtout, suivant Mariette, pour les grands ouvrages.» Il fut
    lui-même très-habile dans l’art de son père. De plus, il gravoit, et
    l’Académie le reçut comme graveur et orfèvre, en 1678. Il mourut à
    soixante-treize ans, en 1713. Son frère, Nicolas Loyr, fut un
    peintre de talent, qui l’aida pour ses dessins. On a d’eux à la
    Biblioth. Nat., un recueil contenant «dessins de brasiers, dont les
    ornements peuvent servir aux cuvettes; nouveaux dessins de
    guéridons, éventails, écrans, etc.»

Messieurs Vaudine, rue du Harlay, Bel, place du College Mazarini,
Blanque, rue Dauphine, et les frères Sehut, même rue, ont un particulier
talent pour les petits Ouvrages et Bijouterie d’or.

Messieurs Berthe, rue des deux Ecus[11], et Rondé, rue Bertin Poirée,
trafiquent de Barres, Lingots et Grenailles d’or et d’argent.

  [11] Dans l’édit. précédente, p. 23, il est qualifié «orfevre», et son
    adresse est donnée ainsi: «joignant l’hôtel de la Monnoye.»

Les Garnitures et Joyaux de fausses Perles et Pierreries, se vendent
chez plusieurs Marchands et Ouvriers etablis aux environs du Temple[12].

  [12] On les appeloit «diamants du Temple.» _Dict. des Arts_, 1732,
    in-fol., I, 334.

Les fausses Perles de nouvelle invention argentées par dedans, qui
ressemblent fort aux naturelles[13], se vendent chez les Sieurs
Gregoire, rue du petit Lion, Huvé et Desireux, rue saint Denis.

  [13] Il s’agit, sans nul doute, des perles faites avec cette «essence
    d’ablettes», dont le hasard fit découvrir le secret au bijoutier
    Jaquin, en 1684. Il s’associa, pour l’exploiter, avec un nommé
    Breton, et tous deux le perfectionnèrent si bien que, suivant le
    _Mercure galant_ (août 1686, p. 230), ces perles, «façon de fines»,
    trompoient tous les jours les joailliers eux-mêmes. Les Jaquin
    faisoient encore ce commerce à la fin du règne de Louis XV. Hubin
    avoit appris à Lister comment elles se fabriquoient: «la pâte,
    dit-il, dont on les étame à l’intérieur, se fait uniquement
    d’écailles d’ablettes, sans autre mélange... un collier de ces
    perles revient à deux ou trois pistoles.»




PREMIERES INSTRUCTIONS DE LA JEUNESSE[1].

  [1] Cette partie forme, dans l’édit. de 1691, le chapitre XXXVIII:
    _Des maîtres ès arts, et autres tenant pensionnaires, pour les
    Leçons et pour les Répétitions du Latin, du Grec, de la Philosophie,
    et des Mathématiques_. Il commence par ces quelques lignes qui ne se
    retrouvent pas ici: «Entre ces maîtres, les uns sont principalement
    appliquez à répéter les enfants qui vont au collége, qui ne sont
    chez eux pour la plupart qu’à demi pension.»


Il y a dans chacun des quartiers de la Ville et Fauxbourg de Paris un
Maître et une Maîtresse de petites Ecoles instituez par M. le Chantre de
Paris, pour apprendre aux enfans de l’un et de l’autre sexe, le
Cathecisme, et les Prieres chretiennes, la lecture des Livres latins et
françois, et les principes de la Grammaire[2], de l’Ecriture et de
l’Aritmetique[3].

  [2] Fleury, _Traité des Etudes_, 1687, in-12, ch. 22, vouloit que l’on
    commençât par _la grammaire_.

  [3] _V._ ce que nous avons dit de ces écoles dans une note du chap.
    1er: _Affaires ecclésiastiques_.

Outre ces Maîtres, il y a encore une Communauté de Maîtres Expers et
Jurez Ecrivains, qui enseignent aux jeunes gens qui ont déjà passé par
les petites Ecoles, la perfection de l’Ecriture, de l’Ortographe et de
l’Aritmetique[4]. Il n’y a aucun de ces Maîtres qui n’ecrivent par
excellence tous les differens caracteres d’Ecritures. On les distingue
des Maîtres des petites Ecoles par leurs enseignes où il y a le titre
d’Expert ou de Jurez Ecrivain[5].

  [4] Fleury, au chap. 20-23 du _Traité_ que nous venons de citer,
    vouloit qu’on apprît aux enfants, non-seulement l’arithmétique, mais
    le commerce, la banque, le change, la manière de tenir leurs
    comptes, de fournir et recevoir quittances, faire des contrats et
    des transactions.

  [5] Nicolas Lesgret, né à Reims, étoit le maître à écrire des pages de
    la grande Ecurie. Il prenoit le titre de «maître écrivain juré.»
    _Etat de France_, 1692, t. I, p. 329. Il devint «secrétaire de la
    chambre du roi.» On a de lui: _Le livre d’exemplaires, composé de
    toutes sortes de lettres_, Paris, 1694, in-fol.; _Le nouveau livre
    d’écriture italienne et bâtarde_, Paris, Mariette, in-4º oblong.

M. des Planches, à present Sindic en charge de leur Communauté, demeure
ruë et devant le petit saint Antoine, où l’on peut recouvrer leur liste
lorsqu’il s’agit de consultation sur les ecritures et signatures
suspectes, qu’ils sont seuls en droit de vérifier, comme on le verra
dans l’article des Rapports et Verifications d’Experts.

Il y a d’ailleurs dans l’Université et aux extremitez des Fauxbourgs,
des Maîtres ès Arts et autres tenans pensionnaires pour les leçons et
pour les répétitions du Latin, du Grec, de la Philosophie et des
Mathématiques.

Il y a par exemple à cet effet, aux environs du College Mazarini,
Messieurs Souplet, quay de Nesle[6]; le Page, ruë de Nevers; Roger, ruë
des Petits Augustins; Galande, ruë Mazarini; Boucher et Henrion, près le
passage de la rue de Seine.

  [6] Dans l’édit. de 1691, p. 58, son adresse est «rue Mazarini», ainsi
    que celle de Garande, appelé ici Galande. On y trouve aussi indiqué
    «le sieur Picard, rue Guénegaud, devant l’abrevoir (sic)», qui
    manque ici.

Au quartier de l’ancienne Université, Messieurs Fleury, ruë saint
Estienne des Grecs; Cosson et Blin, ruë Chartiere; Macet, cloître saint
Benoist; Laisné, Cluet, Busselin, Hacland, Guyart, Chastel le jeune et
Morice[7], ruë saint Jacques.

  [7] A la place de celui-ci, on trouve Guillard, dans l’édit. de 1691,
    p. 58.

Sur les fossez saint Michel[8] jusqu’à l’Estrapade, Messieurs
Landemaine, l’Elubois, Martin, des Fevres, du Tal, le Prieur, des
Rohes[9], Valot, Parisot et Martin.

  [8] «Saint Jacques et saint Marcel.» Edit. 1691.

  [9] Sans doute «Des Roches.» Il manque dans l’autre édition.

Au Fauxbourg saint Antoine[10], Messieurs du Catel l’ainé, près la
Raquette; du Catel le jeune[11], ruë de Reuilly; Desdurcet[12], rue de
Charonne; Castelet, rue de Charenton; Roger[13] et Thomas, grande ruë du
Fauxbourg; Mogey le jeune à Pincourt; Mogey l’ainé, Faucon,
Desquinemare, Dupuis, Deschamps, Bussy[14] et Guibert à Picquepuce[15].

  [10] Dans l’édit. de 1691, on lit, pour commencer cet article,
    quelques lignes non reproduites ici: «les Maîtres, dont les
    pensionnaires ne vont pas au collège, et qui leur donnent la plupart
    toutes les instructions nécessaires jusqu’en philosophie, sont au
    faubourg Saint-Antoine...»

  [11] «Et Mauger», dit l’édit. de 1691.

  [12] «Des Urset», dans l’édit. de 1691.

  [13] L’édit. précédente dit «Roger», et ne nomme pas celui qui suit.

  [14] Edit. 1691: «De Bassy.»

  [15] On voit que ce quartier de Picpus étoit rempli de maisons
    d’éducation. Le hollandois Vanden Ende, qui fut pendu comme complice
    de la conspiration du chevalier de Rohan, en tenoit une de ce côté.
    Elles y étoient encore nombreuses au siècle dernier. Le _Journal du
    Citoyen_ (1755, in-8, p. 163-165) n’en indique pas moins de neuf
    dans les rues de Montreuil, de Reuilly, Picpus et Charonne.

Et en divers autres quartiers de Paris, sont Messieurs Davesne, rue
Pavée[16]; Harivel[17], rue de la Cossonnerie; le Roy, rue Quinquempoix;
Mauger, près la Croix du Tiroir; Fleury, près le Palais Royal;
Regnard[18], rue de Bourbon; Clément, rue Jean de l’Espine; Milot, porte
saint Denis; Bilheult, près le Temple, et du Chesne, à Chaillot[19].

  [16] Il y a sur lui une note bien curieuse dans le t. Ier du
    _Catalogue_ ms. de l’abbé Goujet: «Je l’ai connu dans mon enfance,
    dit l’abbé, il tenoit école et pension rue Gilles-Cœur, paroisse de
    Saint-André-des-Arts. C’est chez lui que j’ai appris à lire, à
    écrire, les premiers principes de la religion et les éléments du
    latin. C’étoit un très-bon maître, et à qui j’ai eu beaucoup
    d’obligation. Ma famille ne vouloit pas me mettre à l’étude, et il
    commença à m’instruire secrètement, me donnant chaque jour plusieurs
    heures de son temps, et ce fut lui enfin qui détermina mon père à me
    laisser livrer à l’étude.»

  [17] «Anivel.» Edit. 1691.

  [18] «Au faubourg Saint-Germain.» _Id._

  [19] L’édit. de 1691 donne presque tous ces noms, et y ajoute: «Binet,
    rue des Gravilliers.»

M. de Blegny[20], maitre Expert et Juré-Ecrivain, auteur de l’Ortografe
Françoise[21], demeurant à l’entrée de la rue saint André, devant le
pont saint Michel, vient de donner au public un nouveau livre de sa
composition[22], qui comprend tout ce qui concerne la premiere education
des enfans: les Regles et les Exemples de la plus parfaite ecriture, et
de la plus exacte ortografe, et de la plus claire Arithmetique; les
Elements de la morale et les formules des lettres, des billets et des
actes qui se font sous signatures privées dans le commerce plus
ordinaire de la vie civile[23].

  [20] Etienne de Blegny, parent sans nul doute de
    l’apothicaire-faiseur, dont nous publions le livre.

  [21] Nous ne connaissons pas ce traité de l’orthographe par Blegny,
    mais en revanche nous pouvons citer ses _Nouveaux exemplaires
    d’écriture d’une beauté singulière escrits par Estienne Blegny, et
    gravés par Berey_, recueil de 40 planches in-8º. Claude-Auguste
    Berey étoit le plus fameux graveur d’écriture de son temps. Il fut
    le créateur de la _coulée_, comme Barbedor son devancier avoit été
    le créateur de la _ronde_. On a de Berey: _Nouveau livre d’écriture
    financière_, Paris, 1694, in-4º oblong; _L’écriture italienne
    bâtarde_, 1700; _Nouveaux exemplaires d’écriture de finance_, in-4º
    obl.

  [22] En voici le titre: _les Eléments_ ou _première Instruction de la
    jeunesse_.

  [23] Il se trouve, en effet, dans le livre d’Etienne Blegny, un
    chapitre qui a pour titre: _Formulaire de petits actes_.

Pour le surplus de l’education de la jeunesse, voyez l’article des
Collèges, celuy des nobles exercices, et celuy des Mathématiques.




NOBLES EXERCICES POUR LA BELLE EDUCATION[1].

  [1] Dans l’édit. précéd., ce qui suit se trouvoit, avec des détails
    différents, au «chapitre IV, _des Académies_:... Les Académies de la
    deuxième espèce, où l’on instruit la noblesse dans les Sciences et
    dans les Arts qui regardent la discipline militaire, et dans tous
    les exercices de la danse, sont au nombre de cinq; sçavoir: celle de
    M. Coulon, rue Férou, près Saint-Sulpice; celle de M. de Long-pré au
    carrefour Saint-Benoist; celle de M. Bernardi rue de Condé, et celle
    de Monsieur de Roquefort, dans la rue de l’Université», p. 8.


Toutes les Academies de Manège ont esté reduites à deux, et reglées de
telle sorte que les pensionnaires y sont distribuez en nombre egal;
l’une est au Carrefour saint Benoist[2], où il y a pour Ecuyers,
Messieurs de Lonpré[3], Bernardy[4], et      et l’autre qui est dans la
ruë des Canettes, a aussi pour Ecuyers, Mrs Vandeüil, Roquefort, et
d’Auricour.

  [2] La cour du Dragon fut construite à la place de cette académie et
    de son manége.

  [3] Nous l’avons trouvé tout-à-l’heure parmi les curieux de médailles.
    Il avoit été fait écuyer du Roi, le 14 février 1670. _V. Registre du
    Secrétariat_, pour 1670, Biblioth. Nat., f. franç., nº 6652, fol. 96
    vº.

  [4] Il étoit de Lucques, comme Arnolphini, autre grand «académiste» de
    ce temps-là. Avant de venir au carrefour Saint-Benoît et de s’y
    associer avec Longpré, Bernardi avoit eu une académie de manége rue
    de Vaugirard, près du Luxembourg, où on lui avoit permis d’élever
    tous les ans un fort pour exercer ses élèves aux manœuvres des
    sièges. Soleysel, auteur du _Parfait maréchal_, dont nous avons
    parlé plus haut, avoit professé dans son manége.

C’est dans ces deux Academies, que les jeunes gens sont exercez dans les
Sciences et dans les Arts qui conviennent à la Noblesse; c’est-à-dire,
aux Mathématiques et aux exercices des Armes, du Cheval et de la
Danse[5].

  [5] Un contemporain, Le Bret, nous dit dans ses _lettres diverses_, p.
    127, que tout bon gentilhomme devoit rester deux ans chez Bernardi,
    et y gagner au moins «un prix à la course de bagues.»

Messieurs le Perche père, rue de la Harpe[6]; Liancourt, rue des
Boucheries saint Germain, de Brie, rue de Bussy, et du Fay, rue du
Chantre, sont les Maîtres en fait d’Armes preposez dans les deux
Academies, pour enseigner l’usage de l’Epée.

  [6] C’étoit un honneur de prendre de ses leçons. Brillon, dans ses
    _Portraits sérieux, galants et critiques_, 1696, in-12, p. 270, dit
    de l’homme du bel air qu’il appelle Aristarque: «grand homme
    d’exercice, vous lui entendrez répéter qu’il est un des forts
    écoliers de Le Perche, et que dans l’Académie de Longpré on ne parle
    que de lui.»

M. de Beaufort, près la porte saint Honoré, montre dans l’une et dans
l’autre, l’exercice de la Pique, du Mousquet et des Evolutions
militaires.

Et Mrs Favier[7] et Du Four, rue Dauphine, y montrent à danser.

  [7] C’est celui dont La Bruyère a dit à l’art. 29 du chapitre _de la
    Mode_, en souvenir des leçons qu’il donnoit à M. Le Duc, son élève:
    «On sait que Favier est beau danseur.» Mme de Sévigné a aussi parlé
    de lui, t. IX, p. 133. Il étoit attaché à l’Opéra.

Il y a d’ailleurs en differens quartiers des Maîtres en Fait d’Armes,
qui tiennent salle chez eux, et qui sont dans l’approbation publique;
par exemple, Messieurs de saint André, quay des Augustins, Chardon, rue
de Bussy: Minoux, rue des mauvais Garçons: le Perche fils, rue Mazarine:
Pillait père, rue Dauphine: Pillart fils, rue des Cordiers: du Bois,
près le Jeu de de Metz[8], etc.

  [8] Un des jeux de paume de la rue Mazarine.--On voit que, sauf deux,
    tous ces maîtres d’armes demeuroient dans le quartier de
    l’Université. En 1721, il en étoit encore de même. J. de Braye, qui
    fit paroître alors l’_Art de tirer les armes_, dit qu’il y avoit
    dans Paris plus de dix mille bretteurs, et presque tous dans le
    quartier latin. Ils n’affluoient pas moins, en 1695, dans le
    faubourg Saint-Germain. Le procureur du Roi, Robert, dans une lettre
    du 11 juillet à l’agent Desgranges, lui dit, à propos d’une
    arrestation qu’il devoit mais ne put faire près de l’abbaye: «En un
    moment, il s’est attroupé en cet endroit beaucoup de gens d’épée et
    de bretteurs dont ce quartier est rempli, et il étoit impossible
    d’emmener le prisonnier sans rendre un petit combat et faire tuer
    beaucoup de monde.» (P. Clément, _la Police sous Louis XIV_, p.
    442.)

M. Liencourt a donné au public un excellent traité de la Pratique des
Armes.

Il y a pareillement encore pour les hautes armes, M. Rousseau, qui est
ordinairement en Cour[9]: M. Colombon, devant la grande porte du Palais:
et M. Chevry, rue des Boucheries saint Germain.

  [9] Il étoit maître d’armes des pages de la grande et de la petite
    écurie, et il le devint ensuite du duc de Bourgogne. Son fils et son
    petit-fils, qui avoit épousé une sœur de Mme Campan, furent maîtres
    d’armes des enfants de France. Le dernier ne put échapper à la
    Terreur: «Il fut pris et guillotiné, dit Mme Lebrun. On m’a dit que
    le jugement rendu, un juge avoit eu l’atrocité de lui crier: pare
    celle-ci, Rousseau.» (_Souvenirs_, 1re édit., t. I, p. 182.) Amédée
    de Beauplan étoit son fils.

Plusieurs maîtres de Dance dispersés en differens endroits, sont
d’ailleurs d’une habilité distinguée; par exemple, M. de Beauchamp,
Maître des Ballets du Roy, et le premier homme de l’Europe pour la
composition[10], rue Bailleul: M. Reynal l’aîné, maître à danser des
Enfans de France[11], ordinairement en Cour: et Messieurs d’Olivet et
Favier cadet, rue du petit Lion: Favre l’aîné, rue de Richelieu: Favre
le cadet, rue Platriere: Lestang et Pecourt ainé[12] et cadet, rue
Traversine: du Mirail, rue de Seine: Bouteville, rue des mauvais
Garçons: des Hayes, devant la Comédie Françoise: Germain l’ainé, rue
saint André: Germain le cadet, rue de Bussy: Pestor au Marché Neuf, etc.

  [10] G. Brice se contente de dire qu’il est «des plus renommés de sa
    profession, par les beaux ballets qu’il a composés, et par les
    élèves habiles qu’il a formés, qui sont à présent admirés de tout le
    monde, principalement sur le théâtre de l’Opéra, où on les voit
    exécuter des danses merveilleuses.» Il a été parlé plus haut, p.
    230, de son cabinet de curieux.

  [11] Son nom est écrit Rénal dans l’_Etat de France_ de 1702, t. II,
    p. 30, où il figure comme maître à danser du duc de Bourgogne et de
    son frère le duc de Berry.

  [12] Louis Pécourt, maître à danser des pages de la Chambre. Lui et
    Lestang étoient les maîtres à grands succès, et qui gagnoient le
    plus. Richelet, à ce propos, a dans son recueil _Les plus belles
    lettres françoises_, 4e édit., t. I, p. 379, une note bien curieuse,
    et encore plus amère: «M. le duc d’Enghien, dit-il, dansoit
    proprement, et de son temps la danse commençoit à être quelque
    chose. Cependant ce n’étoit rien en comparaison de ce qu’elle est.
    Elle enchante et aussi pour plaire, ou pour faire fortune, il faut
    comme Pécourt ou L’Etang danser ou être maître à danser.» Regnard,
    dans sa farce du Théâtre Italien, _le Divorce_, jouée en 1688, parle
    aussi du succès des leçons de ces danseurs et du prix qu’ils y
    mettoient: «COLOMBINE. Un demi louis d’or pour une leçon! on ne
    donnoit autrefois aux meilleurs maîtres qu’un écu par mois.
    ARLEQUIN. Il est vrai, mais dans ce temps là les maîtres à danser
    n’étoient pas obligés d’être dorés dessus et dessous comme à
    présent, et une paire de galoches étoit la voiture qui les menoit
    par toute la ville.»

Outre ce qu’on a veu dans l’article des Mathematiques touchant les
maîtres qui professent et qui enseignent toutes les dépendances, il y a
d’ailleurs entre les fameux, Messieurs Goret, Terranneau, Walter, etc.,
dont on n’a pû recouvrer les adresses.

M. Chartrain qui est également sçavant et illustre, et qui demeure rue
du Four saint Germain, enseigne l’Histoire, la Geographie, le Blazon,
etc.

Autant en fait M. l’Abbé Brice, Auteur de la Description de la Ville de
Paris[13], qui demeure rue du Sepulcre.

  [13] Nous avons parlé de lui dans une de nos premières notes, p. 6, et
    quant à sa _Description de Paris_, nous l’avons assez souvent citée
    pour ne pas avoir à y revenir ici. Elle en étoit encore à ce moment
    à sa première édition, publiée en 1684, 2 vol. in-12.

M. Veneroni[14], Secretaire Interprète du Roy, ordinairement nommé dans
les Tribunaux pour la Traduction et Interpretation des Langues Espagnole
et Italienne, enseigne ces deux Langues chez luy, rue du Cœur Volant[15]
et en Ville; c’est celuy même qui a publié un Dictionnaire[16], une
Grammaire, et une Nouvelle Metode pour la Langue Italienne[17], et qui a
traduit les Lettres du Cardinal Bentivoglio, le Pastor Fido, etc.

  [14] Ce nom, qui a longtemps été populaire dans les classes, n’étoit
    pas le sien. Il se l’étoit donné, en italianisant son nom véritable,
    Vigneron.

  [15] Ajoutons, d’après Jal, _Dict. critique_, p. 1242, «à l’enseigne
    du _Chapeau couronné_.»

  [16] Ce dictionnaire italien ne lui appartenoit pas beaucoup plus que
    son nom à l’italienne. La Monnoie nous l’apprend sans ménagement
    dans une note du glossaire de ses _Noëls bourguignons_: «le
    plagiaire, dit-il, qui s’est emparé du dictionnaire italien d’Oudin
    et l’a fait imprimer sous le nom de Vénéroni, étoit un pédant nommé
    Vigneron.» Il est juste d’ajouter qu’il n’avoit pas--ce qu’oublie La
    Monnoye--nié ce qu’il devoit à Oudin, quand, en 1681, il avoit donné
    une nouvelle édition de son dictionnaire. Il avoit mis sur le titre:
    «continué par Laurent Fevrette et par Vénéroni.» C’est bien plus
    tard, lorsqu’il fut mort, que son nom italianisé le lui fit
    attribuer tout entier.

  [17] Il n’a pas plus fait cet ouvrage qu’il n’a fait l’autre. «Sa
    méthode, lisons-nous, au mot «Vénéroni», dans le _Dictionn. histor._
    de l’abbé Ladvocat, n’est pas de lui, mais du fameux Roselli, dont
    on a imprimé les aventures en forme de roman. A son passage en
    France, il alla prendre un dîner chez Vénéroni, qui, ayant vu qu’il
    raisonnoit juste sur la langue italienne, l’engagea à faire une
    grammaire pour laquelle il lui donna cent francs. Vénéroni n’a fait
    qu’y ajouter quelque chose à son gré, et la donna sous son nom.»

Messieurs Martin, rue saint Sauveur: Gracy, rue saint Honoré: et
Philippi, rue de Vaugirard, enseignent pareillement les Langues
Espagnole et Italienne.

Les maîtres pour la Langue Allemande sont, Messieurs Pascal, rue des
mauvais Garçons: Leopol, rue saint Martin: Meremberg, Perger et
Benicourt, au quartier saint Germain des Prez.

Les maîtres pour la Langue Angloise sont, Messieurs Paul et Dalais[18],
Auteur de l’Histoire de Sevarambes[19], rue des Boucheries saint
Germain.

  [18] Ses vrais noms sont Denis-Valrasse Allais. Il avoit servi en
    Angleterre, et revenu à Paris, il y donnoit, comme on le voit ici,
    des leçons d’anglois et de françois. Il publia, en 1681, une
    _Grammaire françoise méthodique_, et, deux ans après, un abrégé en
    anglois de cette grammaire.

  [19] Cette _Histoire des Sevarambes_, qui a été souvent réimprimée,
    est en 2 vol. in-12. On y trouve, à l’imitation de l’_Utopie_ de
    Thomas Morus, tout un nouveau système de gouvernement politique et
    religieux.

M. de la Croix, près la place des Victoires, enseigne à parler le
Turc[20].

  [20] Pétis de La Croix, à qui l’on doit l’_Histoire de Tamerlan_,
    celle de _Gengiskhan_, et, ce qui l’a rendu plus célèbre, la
    traduction des _Mille et un Jours_, que Le Sage revit pour le style.
    En 1692, l’année même où nous le voyons figurer ici, il fut nommé
    professeur en langue arabe au Collége Royal. Il le resta jusqu’à sa
    mort, en 1713.

Les maîtres pour la langue Arabique sont, Messieurs de Lipy[21] et son
neveu, au Collège de Cambray.

  [21] Lisez Dippy. C’étoit un syrien d’Alep. Il cumuloit la place de
    professeur en arabe et syriaque avec celle de secrétaire interprète
    du Roi. Il professa au collége de France--appelé ici Collége de
    Cambray--de 1670 à 1709. J.-B. de Fiennes lui succéda comme
    secrétaire interprète, et c’est Antoine Galland, auteur des _Mille
    et une Nuits_, qui eut sa chaire d’arabe. Il ne la garda que six
    ans.

Messieurs Veneroni, l’Abbé Brice, et Richelet[22], rue des Boucheries,
enseignent la Langue Françoise aux Etrangers.

  [22] Ce n’est pas moins que Pierre Richelet, auteur du fameux
    _Dictionnaire_. Ne pouvant vivre de ses livres ni de ses causes, car
    il étoit avocat au Parlement, il s’étoit mis à donner des leçons de
    langue françoise, sans y gagner autant que Pécourt et Létang avec
    leurs leçons de danse, ce qui le rendoit amer comme nous l’avons vu
    dans une note précédente. Bien des gens de son mérite en étoient
    réduits à ce métier. De Lisle, le géographe, couroit comme lui le
    cachet: «Il alloit enseigner en ville, lit-on dans le _Longueruana_,
    et ces misérables qui envoient leur carrosse à un comédien,
    faisoient venir à pied un septuagénaire, qui en son genre étoit le
    premier homme de France.»

M. Frosne, Architecte, près la fontaine S. Ovide, enseigne aux personnes
distinguées, les Fortifications, l’Architecture civile et plusieurs
autres parties des Mathematiques; on peut le consulter utilement sur les
Batimens et sur le Calcul des Toisez.

Messieurs le Pautre[23], rue du Foin, et d’Honneur à l’entrée de la rue
de la Coutellerie, enseignent la plus excellente pratique du dessein.

  [23] Pierre Le Pautre, fils aîné de Jean, qui avoit brillé, comme
    dessinateur et graveur, dans les premiers temps du règne. Il fut
    lui-même, dans le même genre, d’un talent fort distingué. _V._, à
    son nom, l’_Abecedario_ de Mariette.

Les maîtres fameux pour le Jeu de la Paume sont, Messieurs Bidault, rue
saint Germain l’Auxerrois: Sainctot, rue des mauvais Garçons: Mion, rue
de Bussy: Jourdain[24], Cerceau, le Page et Clergé, dont l’Auteur ignore
les adresses[25].

  [24] Ils étoient deux de ce nom, comme on le verra dans la note
    suivante.

  [25] Si Blegny ne sait pas leur adresse, c’est qu’ils n’en avoient pas
    de fixe. Ils jouoient «à la représentation», comme on diroit
    aujourd’hui, dans n’importe quel jeu de paume, à leur choix, et cela
    deux fois la semaine. Le roi leur avoit accordé ce privilége, après
    les avoir vus jouer à Fontainebleau, le 26 octobre 1687. Dangeau, à
    qui nous devons ce renseignement, nous donne leurs noms, qui
    diffèrent, pour un ou deux, de ceux qui sont ici: «Ils feront,
    dit-il, afficher comme les comédiens. Ils sont cinq: les deux
    Jourdain, Le Pape, Clergé et Servo.» Pour celui-ci, croyons-nous,
    c’est Sercot qu’il faut lire: d’abord parce que ce nom se rapproche
    davantage de celui de Cerceau donné ici; ensuite parce qu’on le
    trouve comme étant celui d’un fameux paumier du temps de la Fronde
    dans la Mazarinade, _Le Ministre d’Etat flambé_.

M. Revaire, Fourbisseur du Roy, demeure aux Galeries du Louvre[26].

  [26] «Revoir, fourbisseur, dit Germain Brice, t. I, p. 72, travaille
    aux gardes d’épées et en d’autres choses de cette sorte d’une
    manière qui le distingue fort des autres maîtres de sa profession.»

M. Cadeau, aussi fameux Fourbisseur, demeure sur le Pont au Change.




ARMES ET BAGAGES DE GUERRE ET DE CHASSE.


Le magasin Royal des Armes est à l’Arsenal, sous la direction de M.
Titon, Entrepreneur Général des fournitures d’Armes[1].

  [1] Son fils Titon du Tillet, à qui l’on doit ce singulier monument,
    le Parnasse françois, qui fut longtemps exposé dans une des salles
    de la Bibliothèque Nationale, et le livre qui l’explique, avec la
    biographie de ceux qui y figuroient en statuettes de bronze, fut,
    comme son père, attaché aux fournitures d’armes. Il avoit une charge
    de commissaire des guerres. Le Magasin royal, créé par le père, ne
    resta pas à l’Arsenal, où il l’avoit d’abord établi. En 1701, il
    étoit transféré à la Bastille: «le Magasin de Titon, lisons-nous
    dans l’édition de G. Brice publiée cette année-là, t. I, p. 341, est
    sur la première porte de la Bastille qui donne dans la place. Il est
    rempli de quantité d’armes de toutes les sortes, et l’on y trouve
    tout ce qu’on peut désirer sur cet article.»

Il y a aussi un grand magasin d’Armes et Equipages de Guerre, chez M.
Benicourt[2], devant l’orloge du Palais.

  [2] Il est appelé «De Benicourt», dans l’édit. de 1691, p. 22.--Sa
    maison étoit déjà célèbre, en 1640. Voici l’adresse qu’il prenoit
    alors, et qu’on trouve dans un compte, pour achat d’armes, publié
    par M. P. Paris dans son édition de Tallemant, t. IX, p. 474:
    «Pierre Bignicourt, marchand quincaillier du Roy, à Paris, rue de la
    Barillerie, à l’enseigne de _la Chasse Royale_, devant les loges du
    Palais.»

M.      marchand quincallier, à l’entrée du quay de la Mégisserie, fait
aussi beaucoup de fournitures.

Le plomb pour les Armes à feu, se vend en gros et en détail chez
plusieurs marchands, sous l’orloge du Palais, et au Fauxbourg saint
Antoine[3].

  [3] Liger, dans le _Voyageur fidèle_, 1715, in-12, p. 381, reproduit
    ceci textuellement. Il ajoute: «on vend la poudre à tirer à
    l’Arsenal, où elle se fabrique: elle s’y débite en gros et en
    détail, il y a aussi d’autres épiciers qui en vendent dans plusieurs
    quartiers de la ville.»

Messieurs Regnault et Lopinot, Tapissiers, près le Collège Mazarini[4],
ont un grand assortiment de Lits, de Tentes et de Pavillons de Guerre.

  [4] Le second est nommé seul dans l’édit. précéd., p. 64, avec cette
    adresse plus détaillée: «au deuxième pavillon du collége Mazarini,
    devant l’hôtel de Créquy.»

On en trouve aussi chez les Tapissiers Fripiers des pilliers des
Halles[5].

  [5] «Qui pour l’ordinaire, ajoute _le voyageur fidèle_, p. 382, en ont
    un assez grand assortiment en temps de guerre.»

Les Cordonniers qui vendent des bottes vieilles et neuves, et qui
entreprennent la fourniture des Régimens, sont placez rue de la
Barillerie, près le Palais[6].

  [6] «Ce sont eux qui font les souliers de fatigue, qu’on nomme
    souliers de bottes.» Edit. de 1691, p. 25. On s’en servoit encore
    pour aller par les rues, tant elles étoient boueuses: «Quoi qu’il ne
    pleuve pas, lisons-nous dans la traduction d’une _Lettre italienne_
    sur Paris, écrite le 20 août 1692 par un Sicilien, et publiée pour
    la première fois, dans le _Saint Evremoniana_, 1700, in-8, p. 385,
    on ne laisse pas de marcher souvent dans la boue. Comme l’on jette
    toutes les immondices dans les rues, la vigilance des magistrats ne
    suffit pas pour les faire nettoyer... Autrefois les hommes ne
    pouvoient marcher à Paris qu’en bottines, ce qui fit demander à un
    Espagnol, les voyant en cet équipage le jour de son arrivée, si
    toute la ville partoit en poste.»

Les Sieurs Paul et Daumal, rue saint Honoré, sont de fameux
Epronniers[7].

  [7] _Le Voyageur fidèle_, p. 382, après avoir parlé du grand «commerce
    d’éperons» qui se faisoit rue Saint-Honoré, ajoute: «les
    quincailliers en vendent aussi, mais qui ne valent pas les premiers
    à beaucoup près.»

Près la porte saint Antoine, on fabrique des Tambours pour les troupes.

Les charettes et quaissons de guerre, sont fabriquez pour la plus grande
part à l’entrée du Fauxbourg saint Antoine.

Les Bahutiers qui font les coffres, malles, fourreaux de pistolets,
etc., sont en grand nombre au quartier du Palais, au bout du pont Notre
Dame, à l’entrée du Fauxbourg saint Germain, et aux environs de saint
Honoré.

On fait sur le quay de la Mégisserie, à la porte du Fort l’Evêque[8],
diverses sortes de raizeaux et tirasses[9] pour la chasse.

  [8] Liger, qui reproduit cet article, p. 384 de son _Voyageur fidèle_,
    ajoute: «du côté de la rivière», ce qui n’étoit pas inutile à
    dire, l’entrée principale du For-l’Evêque étant rue
    Saint-Germain-l’Auxerrois.

  [9] Ce sont des filets à prendre les cailles et les perdrix.

Les Oizeleurs du même quay[10], vendent les raizeaux à prendre des
Rossignols.

  [10] Il sera reparlé d’eux plus loin.

Pour les chevaux, mulets, harnois, etc. Voyez l’article suivant.

La manufacture des Buffles pour la Cavalerie est chez M. Jabac, rue
neuve saint Medéric[11].

  [11] C’est ce commerce qui, nous l’avons dit, p. 109, avoit commencé
    la fortune de Jabach à Paris: «la France, lisons-nous dans un
    passage du _Dictionnaire des arts et métiers_, par l’abbé Jaubert,
    t. I, p. 427, qui complètera notre première note, est redevable à
    Colbert de la préparation des peaux de buffle: il y attira pour cet
    effet M. de la Haye, de Hollande, et ensuite M. Jabach, de Cologne,
    qui obtinrent un privilége exclusif pour établir leur manufacture à
    Corbeil.» Cette manufacture fut ensuite transférée à Paris, chez
    Jabach lui-même, où nous la voyons ici.




CHEVAUX ET EQUIPAGES.


Le marché pour les chevaux et pour les mulets, se tient les Mercredis et
les Samedis non fetez, au bout du Fauxbourg saint Victor, depuis deux
heures de relevée jusqu’à six[1].

  [1] Cet article est plus curieux dans l’édit. de 1691, p. 33: «le
    marché aux chevaux, aux mulets, aux porcs et aux bêtes azines, se
    tient les mécredis (_sic_) et samedis, le matin pour les porcs, et
    l’après dinée pour le reste, au bout du faubourg Saint-Victor.»

Les autres jours on trouve des chevaux de toutes espèces, chez les
Sieurs Guerte, rue de la Bucherie: François Paris, place Maubert:
Charles Paris, rue des Rats[2]: Grenier, cour de la Jussienne[3]: du
Pont, cul de sac des Provençaux: Guillory, rue Perdue: Prevost, le
Moine, Harasse, Arnoult et Anceaume, rue et devant les murs saint
Martin, où sont encore logez les Sieurs Rotelet et Briquet, marchands
Hollandois[4], qui ont un grand assortiment des plus beaux Chevaux de
Carosse.

  [2] Ce quartier de la place Maubert--la rue des Rats, qui est
    aujourd’hui rue de l’Hôtel-Colbert, s’y trouve--et celui des
    environs de l’abbaye Saint-Martin étoient surtout ceux des
    maquignons, aussi l’édit. précédente se borne-t-elle à dire, p. 33:
    «Il y a un grand nombre de chevaux au quartier de la place Maubert
    et de l’abbaye Saint-Martin-des-Champs.»

  [3] On l’appeloit aussi la cour Tricot. Elle alloit de la rue de la
    Jussienne à la rue Montmartre. Ce n’avoit été longtemps qu’une Cour
    des Miracles.

  [4] Je crois qu’il faut lire Béquet, ce qui seroit une légère
    altération du nom hollandois Becker. Le marquis de _la Femme
    d’Intrigue_, comédie de Dancourt, jouée en 1692, parlant de ses
    dettes (acte III, sc. 10), dit ce qu’il doit «à Jame et à _Béquet_,
    tant en chevaux de selle que de carrosse.»

Il y a plusieurs Selliers Carossiers, qui tiennent dans leurs Chantiers
des Carosses tous faits et des Chaises montées; par exemple, les Sieurs
Gervais et Vignard, rue saint Martin; Bailleul et des Moulins, rue des
vieux Augustins; Stoquet, dans l’enclos de la foire saint Germain[5];
Moreau, rue Mazarini; le Roux, rue des petits Champs; Treverger, rue de
Berry; l’Amiral, au petit Marché; Marceau, rue des quatre Vents; la
Ville, rue de Tournon; Poivret, rue de Taranne; la Place, rue de
l’Esgoust, etc.

  [5] «Il y a un grand nombre de carrossiers qui ont leurs magasins dans
    l’enclos de la foire Saint-Germain.» Edit. 1691, p. 51.

Plusieurs Boureliers sont renommez pour les Harnois de la plus grande
propreté; par exemple, les Sieurs Barbier, rue Coquilliere; Miquelet et
Langlois, rue de Seine[6], etc.

  [6] Liger, p. 385, en indique aussi rue Saint-Antoine.

Les beaux et magnifiques Carosses de louage pour les Princes,
Ambassadeurs et grands Seigneurs etrangers, se trouvent chez les Sieurs
Dalençon[7], rue Mazarini; Dauphiné et du Puis, rue du Four saint
Germain; Clovet, rue des vieux Augustins; David et l’Escuyer, rue de
Seine; et Guérin, rue des Boucheries saint Germain[8].

  [7] «Et chez la veuve Chavanon...» Edit. 1691, p. 51. On y voit aussi
    indiqués: «Champot, rue de Seine, et Ferrat, rue des Boucheries»,
    qui ne se trouvent pas ici.

  [8] Lister qui, étant à la suite d’un ambassadeur, le comte Portland,
    crut pouvoir prendre une de ces voitures, en fut fort content:
    «Elles sont, dit-il, ch. II, bien dorées, ont de bons chevaux et des
    harnois propres. Les étrangers les prennent au jour ou au mois, sur
    le pied de trois écus d’Angleterre par jour, c’est-à-dire dix-huit
    ou dix-neuf francs à peu près.»

La veuve le Roux, derrière l’Hotel de Salé[9], a aussi de très beaux
Carosses de louage[10].

  [9] Il existe encore, avec sa principale entrée, rue de Thorigny.
    C’est aujourd’hui l’Ecole centrale. Il fut bâti sous Louis XIII par
    Aubert, fermier de la Gabelle du sel, ce qui lui fit donner par le
    peuple le nom d’hôtel Salé.

  [10] Cet article, dans l’édit. précédente, p. 51, est plus détaillé:
    «Il y a encore des magasins de carrosses rue Michel-le-Comte,
    vieille rue du Temple, derrière l’hôtel Salé; rue de Bussy, et rue
    du Four du faubourg Saint-Germain.»

Les Remises où l’on tient d’ailleurs des Carosses de louage au mois, à
la journée, sont encore rue Mazarine, rue des vieux Augustins, rue des
Boucheries saint Germain, rue des Petits Champs, rue de Hurepoix, rue
Gît-le-Cœur, rue des grands Augustins, rue de Bussy, etc.[11].

  [11] Dans l’édition précédente, au chapitre XXXIII, consacré aux mêmes
    objets, sous ce titre: _Des voitures parisiennes_, se trouvent
    d’assez curieuses différences, p. 50-51: «Il y a des calèches
    attelées à vingt sols par heure, dans tous les temps du jour, sur le
    quay des Augustins, place du Palais-Royal, Croix du Tiroir, rue de
    la Ferronnerie, rue Mazarine et rue Saint-Antoine, devant les
    Jésuites.--Aux mêmes endroits, et en divers autres carrefours et
    places, on trouve des chaises à deux porteurs pour un écu par
    demi-journée, et des chaises à ressorts traînées par un seul homme,
    à un écu par jour, ou dix sols par heure.»--L’existence des
    carrosses à l’heure n’étoit encore que tolérée. Elle ne devint
    légale et privilégiée que par ordonnance du mois d’août 1698. Le
    tarif en fut alors plus élevé. On paya 25 sols la première heure, et
    20 sols les autres. Les fiacres n’eurent plus alors le droit de
    stationner sur les places, réservées désormais à ces carrosses à
    l’heure. Ils redevinrent des voitures de remises qu’on ne pouvoit
    louer qu’à la demi-journée, au jour ou au mois. (_Traité de la
    Police_, t. IV, p. 441-442.)

On trouve des Mulets et des Littières à loüer chez M. Mariette,
Capitaine des charrois de Monsieur, près la porte saint Jacques, et chez
un Bourelier fort stilé aux équipages de mulets, à l’entrée de la rue de
Richelieu.

Les Sieurs Rousseau, près la porte du Pont aux Choux[12]: Dole, vieille
rue du Temple: Didier, rue des Fossez de Condé: et Jourdain, rue de
Bourbon, font des Corps de Carosse qui resistent fort longtemps.

  [12] Elle se trouvoit à l’endroit où la rue du Pont-aux-Choux
    débouchoit sur le rempart, et devoit son nom au pont-levis jeté sur
    le fossé, à quelques pas d’un marais planté de choux, comme un autre
    situé un peu plus en avant dans la ville, où croissoit l’oseille,
    avoit donné son nom à la rue de l’Oseille. La porte du
    pont-aux-Choux s’étoit d’abord appelée porte Saint-Louis.

On trouve de bons ouvriers pour les Ressorts et Arcs de Carosses et de
Chaises au petit Arsenal, rue de Limoge au Marais, rue des Gravilliers,
porte saint Antoine, rue du Sepulcre[13] et enclos de la Foire St
Germain[14].

  [13] C’est aujourd’hui la rue du Dragon.

  [14] Cet article est différent dans l’édit. précédente, p. 59: «Il y a
    un taillandier à l’Arsenal, un autre près Saint-Roch, et un
    troisième devant les Premontrez du faubourg Saint-Germain, qui font
    très-bien des arcs de carosses.» On y lit aussi, p. 51: «les
    ressorts de la bonne trempe se font au même faubourg
    (Saint-Antoine), près la porte et rue de Charenton, devant les
    Filles angloises»; et, un peu plus bas: «on trouve de vieux arcs et
    ressorts de carrosses à l’épreuve, chez un grand nombre de
    dépesseurs (_sic_) du quai de la Mégisserie.»

Pour les Glaces de Carosse, voyez l’article des marchandises des
Miroitiers.

On fait et on vend dans plusieurs boutiques et angards du Fauxbourg
saint Antoine, des Chaises et Soufflets[15] à juste prix.

  [15] Les _soufflets_ étoient une sorte de chaise roulante à deux roues
    et fort légère, pour une ou deux personnes, dont le dessus de cuir
    ou de toile cirée se plioit ou se replioit comme un _soufflet_,
    suivant le temps. Louis XIV se servoit souvent d’une de ces petites
    voitures. (_Journal de la santé du Roi_, publié par M. Le Roy, 1862,
    in-8, p. 299.)

Les Courtiers qui font vendre et acheter toutes sortes d’équipages, sont
les Sieurs de Mouy, rue Geoffroy Langevin: des Lauriers, rue du Four,
près l’Hôtel Impérial: la Montagne, place Maubert: la Croix, cul de sac
des quatre vents: Jurande et le Breton, rue Bourlabé: le Febvre, rue du
petit Heuleu[16], etc.

  [16] Pour la fin de cet article, il y a quelques détails de plus dans
    l’édit. de l’année précédente, p. 33: «Jacques Jurande, rue
    Bourlabé, chez un maréchal, fait courtage de chevaux et d’équipages.
    Autant en font le Breton, même rue, à la Croix de Fer, le Febvre,
    rue du Petit-Huleu, Cavé, rue Geoffroy-Lasnier, et la Croix, rue du
    Cœur-Volant, près la foire Saint-Germain.»

Le nommé Loüis, logé devant les murs saint Martin, fait principalement
le courtage des mules et mulets.

Les Sieurs Brie devant les Incurables; et Bouton, rue Git le Cœur, au
Gallion, sont des particuliers qui ont de bons Remedes pour les maladies
des Chevaux[17].

  [17] Du temps de Liger, c’est un nommé Prieur, rue aux Ours, qui étoit
    le plus expert de ces «médecins de chevaux», comme il les appelle,
    p. 387.

Entre les Marchands en réputation pour le même fait, sont les Sieurs
Rabeau, rue de la Corne: du Gas, vieille rue du Temple: Mars, carrefour
des trois Maries; et Lafond, près l’Hotel d’Angoulesme.

La veuve Robillon, Carrossiere au fauxbourg saint Michel, nettoye
parfaitement bien les Carosses et Chaises[18].

  [18] «On trouve tous les dimanches et fêtes, dit l’édit. de 1691, p.
    51, et encore tous les mécredis et samedis, des charrettes
    couvertes à la porte de Saint-Denis, qui mènent aux villages
    circonvoisins.--On trouve en tous temps aux environs du Pont-Royal,
    des batelets couverts qui conduisent où l’on veut à la descente de
    la rivière.» A la porte Saint-Denis le «passage du bois de Boulogne»
    doit son nom aux voitures qu’on y prenoit pour cette promenade.




PASSETEMPS ET MENUS-PLAISIRS.


Le Théâtre du Palais Royal[1], où sont representées les Tragedies, les
Pastoralles et autres Piéces en Musique, est ouvert pour toutes les
representations les Mardis, les Vendredis et les Dimanches, et encore
les Jeudis, lors qu’il s’agit de Pièces nouvelles[2].

  [1] L’Opéra, qui occupoit dans l’aile droite du palais, du côté où
    s’ouvre aujourd’hui la rue de Valois, la salle que Richelieu avoit
    fait bâtir pour les représentations de sa _Mirame_, et qui avoit
    ensuite servi de théâtre à Molière. C’est à sa mort que Lulli se
    l’étoit fait donner par le roi.

  [2] «Lors qu’une pièce commence à vieillir, le théâtre est fermé les
    jeudis. On paye à la porte un louis d’or pour les places des
    premières loges, un demi-louis pour celles des secondes, et trente
    sous pour celles du parterre et du second amphithéâtre.» Edit. 1691,
    p. 8.

Les Livres du sujet se vendent à la porte du Théâtre trente sols en
paroles seulement, et en partition onze livres en blanc[3], et douze
livres dix sols reliez[4].

  [3] C’est-à-dire brochées.

  [4] «Un louis d’or reliez en basane, ou douze livres dix sols reliez
    en veau», p. 9.

M. Berrin, Dessinateur ordinaire du Cabinet du Roy[5], qui donne les
Desseins de toutes les décorations, habits et machines des Opera, etc.,
demeure aux galleries du Louvre[6].

  [5] Jean Bérain, qui eut de son temps une si grande réputation, que
    l’on ressuscite un peu dans le nôtre. C’est pour ses décorations de
    théâtre que Mariette (_Abecedario_, t. I, p. 119) fait surtout son
    éloge: «Jamais il n’y eut, dit-il, de décorations de théâtre mieux
    entendues, ni d’habits plus riches et d’un meilleur goût que ceux
    dont il a donné les dessins pendant qu’il étoit employé pour
    l’Opéra, c’est-à-dire pendant presque toute sa vie.» La maquette de
    sa décoration du 5e acte d’_Armide_, en 1686, figure en ce moment à
    l’exposition théâtrale de l’Exposition universelle. On a de lui un
    recueil in-fol. de 99 planches d’ameublement: _Ornements inventez_
    par J. Bérain.

  [6] Il y mourut le 26 janvier 1711: «Il a un cabinet fort curieux, dit
    Brice, où l’on trouve avec des tableaux rares une quantité
    très-grande de dessins, entre lesquels les siens ne sont pas la
    moins belle partie.»

Les Comediens François qui ont leur Hotel rue des fossez saint Germain
des prez[7], représentent tous les jours alternativement des Tragedies
et des Comedies.

  [7] Aujourd’hui rue de l’Ancienne-Comédie, nom qui lui est venu de ce
    théâtre même, qui, du reste, existe encore en partie au fond de la
    cour de la maison qui fait face au café Procope. On y emmagasine des
    papiers peints. Ce fut l’atelier de Gros.

Les Comediens italiens, représentent les Dimanches et les jours que le
Theatre de l’Academie Royale de musique est fermé, sur leur Theâtre de
l’Hotel de Bourgogne, rue Mauconseil[8].

  [8] A l’endroit où, comme on sait, fut plus tard la Halle aux cuirs.

Messieurs Baraillon pere, fameux Tailleur pour les habits de Theatre[9],
et M. son fils pour les masques et autres choses necessaires pour les
Ballets et Comedies, demeurent ruë saint Nicaise[10].

  [9] Jean Baraillon, qui avoit commencé par être tailleur de la troupe
    de Molière. Une sœur utérine de la comédienne Mlle de Brie étoit sa
    femme depuis 1673. Le fils, dont il est parlé ici après lui, étoit
    né de ce mariage. C’est lui qui, avec le chevalier d’Arvieux, avoit
    organisé la mascarade turque du _Bourgeois gentilhomme_, en 1670.
    D’après un compte retrouvé par M. Campardon, il n’y avoit pas fourni
    moins de cent trente-huit habits.

  [10] L’administration et ce qu’on appeloit «le magasin de l’Opéra»,
    s’y trouvoit déjà. Ils y restèrent jusqu’à la fin du règne de Louis
    XV.

Les Sieurs du Creux, au bout du pont Notre Dame, et Boille, rue du
Colombier saint Germain, vendent aussi des Masques de Theâtre et de
Carnaval[11].

  [11] Ducreux fit aussi les fournitures pour le _Bourgeois
    gentilhomme_. On voit par le compte cité tout à l’heure, et qui
    s’élève pour lui à 454 livres, que non-seulement il y fournit les
    masques, mais «les jarretières, perruques, barbes et autres
    ustenciles.»

Mademoiselle Poitiers, vis à vis les Quinze-Vingts, rue saint Honoré,
fait des Coëffures en cheveux pour les Balets et Opera.

Les Sieurs Frangeon et la Croix, Brodeurs des Habits pour les Balets du
Roy, demeurent le premier rue saint Estienne, à la Ville neuve, et
l’autre, rue neuve saint Denis, proche la porte.

Le Sieur Roussard, Plumassier du Roy, tient un grand magasin de Plumes
pour les Balets et Tragedies, rue saint Honoré.

Messieurs Cossard et Guerinois vendent toutes sortes d’Etoffes or et
argent pour les Balets, Opéra et Mascarades, ils demeurent ruë saint
Denis, près le grand Châtelet.

Autant en fait, M. Harlier, ruë de la Coutellerie, qui fait et vend des
Etoffes brodées or et argent.

Le Sieur du Vandiet, Sculpteur, pour la fabrique des Marionnettes et
Mannequins, demeure rue de Hurepoix, près le pont saint Michel[12].

  [12] Il est appelé «Du Vaudiet» dans l’édit. de 1691, p. 49, et son
    adresse y est différente: «rue de la Huchette au Tambour.»

Le Sieur Careme, qui fait les Feux d’artifices de l’Hotel de Ville et de
l’Opera[13], demeure rue Frementeau[14].

  [13] Denis Caresme, dont le père, Thomas Caresme, mort en 1688, avoit
    été «ingénieur des feux d’artifice de S. M.» Denis étoit concierge
    des basses cours du Louvre, ce qui explique son logement rue
    Fromenteau. Ses feux d’artifice figurés et colorés n’étoient pas que
    pour l’Opéra. Il en fit aussi pour la Comédie italienne. _V._ le
    _Théâtre_ de Ghérardi, t. I, avertissement. Il mourut en 1700. Son
    père, qui logeoit au Marché-Neuf, faisoit non seulement des feux
    d’artifice pour le roi, mais pour la Ville. (_Bibliogr. des
    Mazarin._, t. I, p. 388.) En cela, comme on le voit ici, il lui
    avoit succédé. Charles-Nicolas Guérin lui succéda à lui-même.
    (_Archives de l’Hôtel-Dieu_, t. I, p. 130.)

  [14] Caresme est mentionné au chapitre XXXIX de l’édition de 1691, p.
    59, mais sans qu’il y soit dit qu’il travailloit pour l’Opéra. «Le
    sieur Morel», qui vient après, s’y trouve aussi. On lit de plus, à
    la suite: «le sieur Moisy, qui a une boutique sur le Pont-Neuf, et
    une veuve qui en a une devant la Bastille, font des fusées pour les
    merciers et pour les particuliers qui en ont besoin.»

Le Sieur Morel, même talent, demeure rue de Tournon.

Le Sieur du Mont, place Maubert, montre les tours de Gibeciere[15].

  [15] On s’en amusoit même chez le Roi. _V._ dans les _Mélanges
    histor._ de Michault, t. I, p. 16-19, l’anecdote d’un de ces
    prestidigitateurs qui, pendant une soirée de Versailles, escamota un
    verre énorme et le fourra dans les chausses un peu trop lâchées de
    ce pauvre abbé Genest, l’académicien.

On tient tous les Dimanches matin sur le quay de la Mégisserie, du costé
du Châtelet, une espèce de marché d’Animaux vivans pour le plaisir;
sçavoir, Lapins, Pigeons, Oiseaux de cages[16], Cochons d’Inde, etc.

  [16] Les oiseaux de cage étoient surtout le commerce de ce quai, le
    dimanche. Quelques-uns se payoient très-cher. Les serins, par
    exemple, qui étoient encore des oiseaux assez rares, montoient
    jusqu’au prix de deux cents livres. (Hervieux, _Traité des Serins de
    Canaries_, 1709, in-12, chap. XXIII.) Sous la Régence, les grandes
    dames en faisoient trafic. Après qu’on les avoit bien stylés chez
    elles, elles les envoyoient revendre sur le quai. (Lémontey, _Hist.
    de la Régence_, t. II, p. 319.)

La Demoiselle Guerin, rue du petit Bac[17], fait commerce de petits
Chiens pour les Dames[18].

  [17] «Près les Petites maisons.» Edit. de 1691, p. 33.--On l’appelle
    aujourd’hui, par interversion, petite rue du Bac.

  [18] C’est-à-dire les chiens de chambre ou de manchon. Les plus à la
    mode étoient encore à ce moment, quoique déjà un peu en baisse,
    comme on le verra plus loin, les chiens de Bologne, sorte de
    carlins, qu’on frottoit aussitôt nés d’esprit de vin à toutes les
    jointures pour les empêcher de croître. Ils se vendoient quelquefois
    fort cher. Tallemant (édit. P. Paris, t. III, p. 304) raconte qu’un
    extravagant d’italien, nommé Promontorio, en offrit un à la
    princesse Marie de Mantoue, pour cinquante pistoles à payer quand
    elle serait reine. Elle accepta, et dix-huit mois après devint,
    contre toute apparence jusque-là, reine de Pologne. On comprend
    qu’elle paya alors gaîment les cinquante pistoles. L’espèce des
    chiens de Bologne s’est perdue, même à Bologne. (Valery, l’_Italie
    confortable_, p. 78-80.) Sur la fin du règne de Louis XIV, les
    chiens _Burgos_ commençoient à les remplacer. Ils préludoient à la
    mode des chiens d’Espagne, ou épagneuls, qui date de la Régence.
    Entre eux et les bolonois s’étoient un instant glissés les chiens
    loups: «On ne carresse plus, lisons-nous dans la _Lettre italienne_
    déjà citée, que ceux qui ont le museau de loup et les oreilles
    coupées, et plus ils sont difformes, plus ils sont honorés de
    baisers et d’embrassements.»

Les Boules de Buis et de Gayac à jouer, se font en perfection par le
Sieur Baudry, Tourneur, rue du petit Lion, et par un autre Tourneur de
la rue Troussevache.

Les Epiciers Orangers de la rue de la Cossonnerie, font venir des Boules
de Marseille qu’ils donnent à fort grand marché.

Les Jeux d’Echets et Triquetracs se font et se vendent chez les
Tablettiers du Marché Neuf et de la rue des Assis.

Les Academies de Jeux de Cartes ont été defendues, et on ne joue
publiquement dans les Jeux de Paume qu’au Billard[19].

  [19] La défense contre les jeux de cartes n’étoit sans doute pas aussi
    sévère quand avoit paru l’édition de l’année précédente, car voici
    ce qu’on y trouve, p. 49: «On joue aux cartes et au billard dans
    presque tous les jeux de paume, qui sont en plus grand nombre au
    faubourg Saint-Germain qu’ailleurs.»--Les jeux défendus dans les
    maisons publiques ne pullulèrent que plus frauduleusement dans les
    particulières. C’est alors que l’on vit partout de «ces femmes
    brelandières» dont parle la _Xe Sat._ de Boileau, et que visoit
    l’abbé de Villiers dans une de ses _Epîtres_, 2e édit., p. 375,
    lorsqu’il nous rappelle

                 ... L’industrieux génie
        Qui trouve par le jeu l’art d’avoir compagnie.

    «--Eh! dit Colombine dans l’_Avocat pour et contre_, acte III, sc.
    7, ne pouvons-nous pas donner à jouer à la bassette, et vivre
    honorablement dans Paris, comme une infinité de gens aussi gueux que
    nous.» Il y eut jusqu’à des femmes de conseillers au Parlement qui
    tinrent ainsi des maisons de jeux. _V._ P. Clément, _la Police_ sous
    Louis XIV, p. 340-341.

Pour les fameux Maîtres de Dance et de Paume, voyez l’article des Nobles
Exercices.

Pour les Joueurs d’Instrumens, voiez l’article de la Musique.

Le Sieur Alexandre Vauboam[20], rue des Assis, fait des Castagnettes en
perfection.

  [20] Lisez Roboam. C’est le même qui a été nommé plus haut, p. 211,
    comme «fabricant de guitares en perfection.»




JARDINAGES.


Monsieur le Marquis de Villacerf[1], Sur-Intendant et Ordonnateur des
Batimens et Jardins du Roy[2], demeure rue de l’Egout, près la place
Royale.

  [1] Edouard Colbert, marquis de Villacerf, déjà mentionné plus haut,
    p. 124.

  [2] Il avoit eu cette place à la mort de Louvois, auquel il tenoit par
    sa mère, comme par son père il tenoit à Colbert. Il dut s’en
    démettre, en 1699, à la suite des trop longues malversations de
    Mesmin, «son commis principal, en qui, dit Saint-Simon, il se fioit
    de tout.»

M. le Nostre, Directeur et Controlleur des Batimens et Jardins de Sa
Majesté[3], demeure aux Tuilleries[4].

  [3] André Le Nostre, trop célèbre pour ses travaux à Versailles, à
    Trianon, à Saint-Germain, aux Tuileries, pour que nous ayons à
    parler de lui longuement.

  [4] Il y mourut, le 15 septembre 1700, à quatre-vingt-sept ans. Il s’y
    étoit fait, dans une de ses dépendances, une collection de tableaux
    de maîtres, de médailles, de porcelaines, etc., dont on peut lire la
    description au chap. IV du _Voyage_ de Lister, et au commencement de
    la _Jeunesse de Bachaumont_, qui fut publiée en 1859 par les soins
    de Fréderic Lock, d’après un manuscrit de l’Arsenal, dans les
    premières livraisons du _Magasin de Librairie_.

M. le Bouteux, neveu de M. le Nostre[5] et Directeur de l’Orangerie des
Tuileries[6], demeure à l’Arsenal.

  [5] Michel Le Bouteux, fils de celui qui avoit eu un si beau jardin,
    rue de la Madeleine, à la Ville-l’Evêque, où tout le monde pouvoit
    s’aller promener, comme on le voit dans le roman de Mme de
    Villedieu: _Mémoires de la vie de Henriette-Sylvie de Molière_,
    édit. de 1701, p. 110. On a du père: _Plans des bastiments et jardin
    de la Norville_; _Plan du jardin et château de Louvois_; _Plan du
    château de Presles, près Beaumont_, etc.; et du fils: _Plan et
    élévation du château de Villacerf_, toutes planches très-rares.

  [6] Il avoit de plus, en survivance, la conciergerie de cette
    Orangerie. (_Etat de France_, 1692, p. 498.)

M. Molet, Jardinier ordinaire de Sa Majesté[7], demeure au vieux
Louvre[8].

  [7] Charles Mollet, fils de Claude Mollet, qui avoit été sous Henri
    IV, sous Louis XIII et dans les premiers temps du règne de Louis
    XIV, «jardinier ordinaire et dessinateur des plans, parcs et jardins
    des maisons royales», et de qui l’on a un livre si curieux: _Théâtre
    des plants et jardinages_, etc., 1652, pet. in-4º. Un autre de ses
    fils, André, frère de Charles, qui est ici, avoit été maître des
    jardins de la reine de Suède, et avoit publié à Stockolm, en 1651,
    in-fol.: _le Jardin de Plaisir, contenant plusieurs dessins de
    jardinages, tant parterre en broderie, compartiments de gazon,
    bosquets et autres_.

  [8] Sa charge, qu’il transmit en survivance à son fils Armand, le 1er
    février 1692, étoit celle de «jardinier du Petit-Jardin parterre,
    qui est au-devant des fenêtres du Louvre.» Il étoit donc tout
    naturel qu’il logeât dans ce palais. Son père avoit demeuré tout
    près à l’hôtel de Matignon, et il avoit fait planter, vers 1606, sur
    la belle place, qui étoit alors au-devant, «quantité de mûriers
    blancs.» (_Archives curieuses_, 1re partie, t. IX, p. 130.)

M. Carbonnet, aussi Jardinier de Sa Majesté, demeure près saint Roch,
tous trois après M. le Nostre, ont un grand talent pour les desseins de
Parterres, de Bosquets, etc.

M. Balon, Directeur de la Pépiniere du Roule[9], demeure là même.

  [9] On sait que c’est de cette pépinière du Roule que le nom de la rue
    de la Pépinière est venu. Voici ce qu’on lit sur Balon qui la
    dirigeoit alors, dans l’_Etat de France_ de 1692: «M. Balon, qui est
    au jardin de la pépinière au Roule, établie en 1670, est directeur
    des plants d’arbres des maisons royales.» Noël de Morlaix, que
    Lister y alla voir (_V._ son _Voyage_, ch. X), fut le successeur de
    Balon à la pépinière du Roule.

Il y a encore divers autres Jardiniers de grands Seigneurs, qui sont
renommez pour les compartimens, par exemple,

Messieurs de la Saulsaye à l’Hotel de Condé: de Marne, rue de l’Egout
près la place Royale: Godeau, près saint Roch à l’Hôtel de saint
Poüange[10], etc.

  [10] Il s’ouvroit rue Neuve-des-Petits-Champs et devoit son nom au
    cousin de M. de Villacerf, le marquis Gilbert Colbert de
    Saint-Pouange, dont le fils eut, par mariage, en 1702, la
    principauté de Chabannais. La rue, qui fut percée de 1775 à 1777 sur
    l’emplacement de l’hôtel et de son jardin, prit ce dernier nom
    qu’elle porte encore.

Les Jardiniers qui sont exercez à la construction des cabinets et
ornemens de treillages[11], sont entr’autres Mrs de la Saulsaye[12] et
Godeau ci-devant désignez: Carpentier à l’Hotel de Lesdigüires[13], et
au Fauxbourg saint Antoine: le Roux, rue de Pincourt: Hennetin, rue de
la Muette[14]: et le Normand, rue de Montreuil.

  [11] On peut voir sur les estampes du temps, qui représentent des
    jardins, et dues pour la plupart aux jardiniers-artistes, qui en
    avoient dessiné l’ordonnance, quelles proportions monumentales on
    donnoit à ces treillages: «le grand avantage, dit Lister, qu’ils ont
    dans les villes, c’est, outre la beauté du travail, de cacher le
    vilain aspect des maisons voisines.» _Voyage à Paris_, chap. IX.

  [12] On a vu tout à l’heure qu’il étoit jardinier de l’hôtel de Condé.
    Il s’y étoit fort distingué, comme le prouvent les deux planches
    très-rares où sont figurés les treillages du jardin, à cette époque.

  [13] Lisez de Lesdiguières. C’étoit l’ancien hôtel que Zamet avoit
    fait bâtir sous Henri IV, rue de la Cérisaie, près du petit Arsenal,
    dont il n’étoit séparé que par une impasse. Il appartenoit alors, à
    Françoise de Gondi, veuve du duc de Lesdiguières. Mme de Sévigné,
    dans ses _Lettres_, en vante la beauté, mais en regrette la trop
    grande solitude et le difficile accès. (Edit. Hachette, t. X, p. 374
    et 467.) Les jardins surtout en étoient magnifiques. Carpentier qui
    en avoit la direction, et qui excelloit, comme on le voit ici, pour
    les treillages, ne les y avoit pas épargnés: «Celui du fond, dit
    Lister, étoit fort noble, et avoit coûté dix mille livres; un autre
    en avoit coûté six mille. J’en remarquai un plus petit, et, le seul
    que j’ai vu ainsi, tout en feuillage de fer peint en vert.»

  [14] Ou de _la Meute_, comme on l’appeloit en 1540, à cause de quelque
    maison de chasse. C’est dans cette rue, qui va de la rue de Charonne
    à celle de la Roquette, que Tamponnet, peut-être sur le même
    terrain, eut sous le premier Empire et la Restauration, ses
    admirables serres qui ne contenoient pas moins de cinq mille
    orangers de toutes tailles, et où l’on vit la première collection de
    _camélia_. (Dufey, _Memorial parisien_, 1821, in-12, p. 67.)

Les Jardiniers qui font commerce de Fleurs, Arbres et Arbustes pour
l’ornement des Jardins, sont au Fauxbourg saint Antoine[15]: les Sieurs
Julien et Guyot dit petit Claude, ruë de Pincourt: Chevalier, ruë des
Amandiers: Tremel et Grebey, rue de la Raquette: le Breton, rue de
Charonne: du Puis, Huby et Hely, ruë de Baffroy[16]: Gaumont Jacques et
du Buisson, grande ruë du Fauxbourg: Marechal, rue saint Bernard, etc.

  [15] _V._ sur ces floristes du faubourg, _le Mercure_ d’avril 1721, p.
    176, et celui de juin-juillet de la même année, 2e partie, p. 112.

  [16] Elle est adjacente à la rue de Charonne.

Et en divers autres quartiers de la Ville et des Fauxbourgs sont les
Sieurs Thibaut fils, rue des Boullais: Baptiste, près les Invalides:
Jacques, ruë de Taranne[17]: des Crochets, près la porte saint Martin:
Besnard, Fauxbourg saint Laurent, etc.

  [17] Le jardin de Morin, dont ce Jacques étoit peut-être le jardinier,
    se trouvoit rue Taranne, derrière la Charité. C’étoit un des plus
    célèbres de Paris pour les plantes rares. Le premier _filaria_, dit
    Sauval, t. III, p. 4, y fut planté.

Le Sieur Billette, Jardinier du Roy, dont la femme est Bouquetiere de Sa
Majesté, a de très belles fleurs et de très beaux arbustes: mais il est
ordinairement en Cour.

Le Sieur Baudouin, Jardinier Marager[18], près la Barrière des
Incurables[19], cultive toutes sortes de Fruits et de Legumes precosses
avec un succez merveilleux.

  [18] C’étoit l’ancien mot, que celui de «maraîcher» remplaça. Jaubert
    l’emploie encore dans son _Dictionnaire des arts et métiers_, t.
    III, p. 49. La Quintinie avoit cependant consacré l’autre depuis
    longtemps, avec une simple différence d’orthographe, dans son livre
    sur _Les jardins_, préface, p. XVII. Distinguant ceux qui s’occupent
    d’arbustes et de fleurs de ceux qui s’occupent de légumes, il dit:
    «les uns qu’on nomme simplement jardiniers, les autres qu’on nomme
    maréchais.»

  [19] Il est singulier que Blegny n’ait cité ici que ce «marager» de la
    barrière des Incurables ou de Sèvres. Dans les faubourgs
    Saint-Antoine et Saint-Martin, où affluoient les fleuristes, ils
    étoient, eux aussi, en nombre, et cela depuis longtemps. Dans _les
    Registres criminels du Châtelet_ (1389-1392), il est parlé, t. II,
    p. 252 et 522, des marais qu’ils cultivoient et des gardes qui les
    préservoient contre les maraudeurs. Charles V avoit protégé cette
    culture de la banlieue parisienne, et il en existe des preuves chez
    quelques descendants de ceux qu’il avoit privilégiés: «On conserve,
    dit M. A. Ysabeau dans un article reproduit par _le Salon
    littéraire_ du 21 août 1843, p. 12, on conserve avec soin dans
    plusieurs familles de maraîchers--les Dulac, Deberg et autres--des
    chartes de Charles V, concédant aux ancêtres de ces familles des
    marais, à la condition de les dessécher pour les convertir en
    jardins. Depuis cinq siècles, les familles désignées sur ces chartes
    n’ont pas cessé d’exercer de père en fils, sans interruption, la
    profession de jardinier.»

M. Tournesol[20], demonstrateur au Jardin du Roy, entend
particulierement la culture des plantes medecinales[21].

  [20] Lisez Tournefort. C’est le célèbre botaniste-voyageur, qui étoit
    professeur au Jardin Royal depuis 1683, et de l’Académie des
    Sciences depuis un an seulement. Lister le vit souvent, et parle
    beaucoup de lui dans son _Voyage_.

  [21] Il combinoit, en effet, la botanique et la médecine, comme on le
    voit par son _Traité des matières médicales_.

Aussi fait un des Pères Minimes de la Place Royale.

On trouve chez les Provençaux, au cul de sac de saint Germain
l’Auxerrois[22], rue de l’Arbre sec, des Orangers, des Citronniers, des
Jasmins, des Mirthes et des oignons de Tubereuses, de Narcisses de
Constantinople, de Hiacinthes Orientales, de Lis Alphodelles, de
Martagons Pomplions, etc.

  [22] Il est derrière le chevet même de l’église, et il prit alors pour
    le garder jusqu’à présent le nom de ces _Provençaux_ qui y faisoient
    leur commerce.

Les Mercredis et Samedis on tient sur le quay de la Megisserie, une
espèce de marché franc pour les fleurs, arbres et arbrisseaux[23]; où
l’on trouve d’ailleurs des graines de choux-fleurs, et des cardons
d’Espagne.

  [23] Ce marché aux fleurs s’étoit d’abord tenu à l’Ile-Saint-Louis,
    «le long du quai Bourbon», dit Sauval, qui en vit la fin. On
    l’appeloit «la foire aux oignons», à cause des fleurs à oignons dont
    on y faisoit surtout le commerce. «Tous les ans, dit Sauval, t. II,
    p. 662, on voit ce quartier, tout couvert qu’il soit de maisons, se
    métamorphoser en un instant, et devenir un jardin fleuri, bien
    varié, et qui sent si bon que l’air en est tout embaumé.»

Les Jardiniers d’Orléans qui apportent tous les ans à Paris vers la fin
de Septembre, une fort grande quantité d’arbres fruitiers à hautes et
basses tiges, logent pour la plûpart grande rue du Fauxbourg saint
Antoine, au Nom de Jésus et aux deux Clefs[24].

  [24] Il y avoit déjà plus d’un siècle qu’on avoit fait à Orléans de
    grands progrès dans la culture des jeunes arbres fruitiers,
    forestiers et d’agrément. A la fin du dernier siècle, on n’y
    évaluoit pas à moins de 200,000 le nombre des pieds d’arbres qui s’y
    vendoient sur place, ou qui s’y exportoient à Paris ou ailleurs,
    chaque année. Les _forestiers_ étoient surtout fournis par les
    faubourgs Saint-Marc et Saint-Vincent, et les arbres à fruit ou
    d’agrément par le faubourg Saint-Marceau, où cette culture s’est
    maintenue et même étendue.

On peut d’ailleurs en tous temps trouver un grand assortiment d’arbres
fruitiers chez les Sieurs Le Faucheur à Bagnolet, et Robineau au
Menil-Montant.

Le Sieur de la Forest, concierge de la Samaritaine[25], fait des Pompes
et autres machines pour l’elevation des eaux.

  [25] La Samaritaine, sur le Pont-Neuf, étant considérée comme Château
    Royal, avoit un concierge, comme nous le voyons ici, et un
    gouverneur.

Ruë saint Pierre, du coté de la rue Montmartre, on fabrique une sorte de
pompe industrieuse qui n’est pas d’une grande depense, et au moyen de
laquelle un seul homme peut elever sans peine et sans effort huit ou dix
muids d’eau par heure, l’Inventeur offre d’en faire la demonstration aux
curieux, aussi bien que des Orloges et Cadrans pour les vens, au soleil
et à la lune, qu’il fabrique d’ailleurs pour la commodité du public.

Pour les livres de Jardinages, voyez l’article du commerce de Librairie.

Le Sieur le Febvre, sur le quay de la Mégisserie, a un grand assortiment
de graines et oignons de Jardins[26].

  [26] Lister, ch. X, _ad finem_, nous parle de ce M. Lefebvre «le
    marchand de graines», qui avoit, en outre de sa boutique du quai, où
    le même commerce se fait encore, un fort beau «jardin fleuriste.»
    Ses tulipes étoient particulièrement superbes: «Il en avoit, dit-il,
    une grande et belle collection, beaucoup de panachées et d’une
    grande variété.»

On vend des pots de terre à ances bronzez et dorez pour l’ornement des
Jardins, chez le Sieur du Vivier, grande rue du Fauxbourg saint Antoine,
à l’entrée de laquelle on vend d’ailleurs des caisses peintes en
fayances.

Chacun peut faire fabriquer à son gré des pots de fayance pour les
Jardins à la Fayancerie de saint Cloud.

Ceux qui sont emaillez en violet et tachetez de blanc, viennent de la
Fayancerie de Roüen[27].

  [27] Il sera parlé plus loin de cette fayencerie, ainsi que de celle
    de Saint-Cloud.




TAPISSERIES[1] ET MEUBLES ORDINAIRES.

  [1] Le Sicilien, dont la lettre sur Paris fut traduite dans le _Saint
    Evremoniana_, s’étonna de voir des tapisseries partout, sur les
    murailles des chambres. «C’est un usage général, dit-il, comme en
    Italie de les embellir par des sculptures.»


Il y a un magasin de Tapisseries de Flandres[2], rue du petit Lion[3],
et un autre pour les Tapisseries de Beauvais[4], rue de Richelieu.

  [2] Tapisseries de haute lisse--c’est-à-dire faites sur un métier
    perpendiculaire--et à personnages ou à verdures. Les ouvriers
    flamands que Henri IV avoit fait venir en 1603, avoient perfectionné
    ce genre de fabrication aux Gobelins, où ils avoient été établis.

  [3] «Derrière l’hôtel de Bourgogne.» Edit. 1691, p. 35.

  [4] «Au milieu de la rue de Richelieu.» _Id._--La manufacture de
    Beauvais étoit une création de Colbert, en 1660. Les ouvriers
    flamands, qu’il y avoit établis, y travailloient en haute lisse
    comme aux Gobelins.

Les Marchands Forains qui negotient les Tapisseries d’Aubusson[5], sont
rue de la Huchette et aux environs.

  [5] Elles étoient de basse lisse, c’est-à-dire faites sur un métier
    horizontal. Fabriquées par des femmes, et avec des laines moins
    fines, le bon marché en rendoit le débit bien plus général que celui
    des tapisseries de Beauvais. Le tarif des douanes de 1664 et années
    suivantes le prouve.

M. Dansvüiche[6], carrefour sainte Opportune, fait commerce en gros de
Bergames[7] et Tapisseries de Rouen, façon de Hongrie[8].

  [6] Son nom est écrit «D’Answihc» dans l’édit. précéd.--C’étoit
    certainement un flamand.

  [7] Les bergames étoient un mélange de laine et de bourre de soie que
    l’on teignoit ordinairement en gris ou en rouge.

  [8] On en faisoit aussi à Paris. Elles étoient fabriquées avec de la
    tonture ou _tontisse_ de laine. C’est de là que les premiers papiers
    peints, qui remplacèrent les tapisseries, en les imitant de leur
    mieux, furent appelés des papiers-tontisses.

Les Tapisseries Bergames, Damas-Caffart[9], petites Etoffes, Satin de
Bruge[10], Taffetas des Indes et diverses etoffes à faire du meuble, se
vendent en détail et en diverses boutiques et magasins près l’aport de
Paris.

  [9] Sorte de damas, dont la trame étoit de fil, et les chaînes de
    soie. C’étoit une étoffe «légère, commode et de grand débit», qu’en
    1604, un marchand de Troyes demanda au Roy de fabriquer dans son
    pays avec privilége. (_Archives curieuses_, 1re série, t. XIV, p.
    232.)

  [10] Sorte de damas-caffart, mais avec une rayure différente, et qui
    se rapprochoit aussi beaucoup du _satin de Chine_. Le marchand de
    Troyes, cité dans la note précédente, demanda aussi à fabriquer de
    ces satins de Bruges, en 1604.

Les Marchands Tapissiers renommez pour les meubles magnifiques, sont
entre plusieurs autres Messieurs Bon l’ainé, Tapissier du Roy, rue
Tictonne; Bon le cadet, Tapissier de Monsieur, rue aux Ours[11];
Barelle, à Luxembourg; Montonnet, Cellier et Mendron, rue Michel le
Comte[12]; Bernier et Malet, rue des Bourdonnois, etc.

  [11] «Les sieurs Le Bon frères, fameux tapissiers, demeurant rue aux
    Ours et rue Platrière.» Edit. 1691, p. 36.--Leur vrai nom étoit, en
    effet, Le Bon. C’est ainsi que l’aîné, Louis, est nommé dans l’_Etat
    de France_ de 1692, p. 179 et 682, en qualité de tapissier du Roi
    pour le trimestre d’avril, et de tapissier ordinaire du duc de
    Bourgogne. Coulange le nomme dans sa chanson sur _Un vieux lit de
    famille_, p. 72 de son Recueil, mais c’est Bon qu’il l’appelle pour
    la mesure du vers:

        Autant de modes que d’années,
        Aujourd’hui le tapissier Bon,
        A si bien fait par ses journées
        Qu’un lit tient toute une maison.

    Ces énormes lits des frères Le Bon étaient célèbres. _V._ le
    _Mercure galant_, t. III, p. 300.

  [12] C’est le fils de ce Mandron, tapissier comme lui, mais Vieille
    rue du Temple, qui créa chez lui le théâtre de société, d’où sortit
    Lekain. Mandron lui-même y jouoit «les rois». _V._ une lettre de lui
    dans le _Journal de Paris_, 1er mars 1778, p. 238.

Messieurs Cussy aux Gobelins, Boulle aux galeries du Louvre[13], le
Febvre, rue saint Denis au Chesne vert[14], etc., travaillent par
excellence aux meubles et autres ouvrages de marquetterie.

  [13] Il a beaucoup mieux l’article qu’il mérite dans l’édit. de 1691.
    Le voici avec celui qui le précède, et qui devroit aussi se
    retrouver ici: «les meubles d’orfèvrerie sont fabriquez avec grande
    perfection par M. De Launay, orfèvre du Roy, devant les galeries du
    Louvre. M. Boul, son voisin, fait des ouvrages de marquetterie d’une
    beauté singulière.»--Nous n’avons pas à nous étendre sur
    Charles-André Boulle, le merveilleux ébéniste du grand règne, que
    l’on connoît aujourd’hui par de si intéressantes notices, à
    commencer par celle de Mariette dans l’_Abecedario_, où il dit: «Ses
    meubles enrichis de bronzes magnifiques et d’ingénieux ornements de
    marquetterie sont d’un goût exquis, et la mode ne leur fait rien
    perdre de leur prix.» Il avoit le goût passionné des tableaux, des
    estampes plus encore, et des dessins. Il s’y ruina. En 1686, il
    étoit déjà la proie de ses créanciers, et se trouvoit bien que le
    Louvre, où il logeoit, fut lieu d’asile. Louvois, furieux un jour de
    ce qu’il ne s’exécutoit pas assez vite pour quelques meubles de
    l’appartement du Dauphin, où il avoit déjà décoré un si admirable
    cabinet tout de glaces et de marquetteries, menaça de lui enlever ce
    refuge. Voici la lettre impitoyable qu’il écrivit à ce sujet, le 4
    février 1686, à son agent La Chapelle: «Boulle promet à Mgr le
    Dauphin, depuis longtemps, quelques sièges, lesquels il n’achève
    point. Je vous prie de voir en quel état ils sont, et de lui dire
    que, s’il ne les achève, je le ferai sortir du Louvre, et le ferai
    mettre au For-l’Evêque à la discrétion de ses créanciers, et que je
    ferai faire son ouvrage par d’autres.» Citée par M. Rousset, _Hist.
    de Louvois_, t. III, p. 381. En 1704, la gêne de Boulle étoit encore
    plus grande et ses embarras plus pressants. Le Roi l’en sauva.
    (_Correspond, admin. de Louis XIV_, t. II, p. 843.) Le plus grand
    deuil de sa vie fut l’incendie de son chantier au Louvre, et la
    destruction par les flammes de la plus grande partie de sa
    collection, dans la nuit du 20 août 1720. Quoique déjà bien vieux,
    il eut assez d’énergie pour survivre. Il ne mourut que douze ans
    plus tard, le 1er mars 1732. Il avoit quatre-vingt-neuf ans et
    quelques mois. _V._ sur lui, dans _les Archives de l’Art françois_,
    par MM. de Chenevières et de Montaiglon, t, IV, p. 321-350, un
    travail qui résume à peu près tout ce qu’on sait sur lui.

  [14] Fils de Claude Lefebvre, dit Saint Claude, qui avoit travaillé
    comme tapissier chez Fouquet, à Vaux.

M. Marseille, ruë S. Denis, près la Sellette, vend des Tapisseries de
cuir doré de Flandres.

Celles de France se fabriquent près la porte saint Antoine.

Les Cabinets[15], Bureaux, Biblioteques et autres meubles de
placages[16], de noyers, d’ébène, de cedre, etc., sont fabriquez et
vendus au Fauxbourg saint Antoine, à la porte saint Victor, rue neuve
saint Mederic, rue Grenier S. Lazare, rue du Mail, etc.

  [15] Richelet décrit ainsi, en 1688, dans son _Dictionnaire_, ces
    meubles, dont la mode revient: «Espèce d’armoire avec des tiroirs,
    faite d’ébène, de noyer ou d’autre beau bois, propre à serrer des
    hardes.» On en vendoit aux foires. Le Sganarelle de _L’Amour
    médecin_, act. I, sc. 2, veut donner à sa fille «un cabinet de la
    foire St-Laurent.» Dans le _Tarif des droits d’entrée_, etc., du 18
    sept. 1664, se trouvent de curieux détails sur ces cabinets.

  [16] «Et de marqueterie.» Edit. 1691, p. 35.

Il y a sur la Ville Neuve un très grand nombre de Menuisiers qui
travaillent à toutes sortes de meubles tournez et non tournez[17].

  [17] C’étoient des ouvriers du faubourg Saint-Antoine, que, sous Henri
    IV et sous Louis XIII, grâce à une exemption de taille et au droit
    de pouvoir travailler sans maîtrise, on avoit attirés dans ce
    quartier encore désert de la Ville-Neuve-sur-Gravois, c’est-à-dire
    de la butte Bonne-Nouvelle, rue Bourbon-Villeneuve--aujourd’hui
    d’Aboukir,--et rue de Cléry, etc., où, comme on sait, le même métier
    et le même commerce des meubles s’exercent encore.

Les Tapissiers-Fripiers qui vendent et loüent toutes sortes de
meubles[18] faits, sont pour la plupart sous les pilliers des Halles,
rue de la Truanderie, Montagne sainte Genevieve, Descente du Pont Marie,
et[19] rue Grenier sur l’eau.

  [18] Ces «louages de meubles» aux Halles sont gaîment tournés en
    ridicule dans une pièce du Théâtre Italien, _Le grand Sophy_, jouée
    en 1689: «GROGNARD. Je ne sais à quoi il tient que je ne jette tous
    les meubles par la fenêtre.--MEZZETIN. N’allez pas faire cette
    sottise-là, s’il vous plaît, il faut que je les rende au fripier. Je
    ne les ai loués que pour deux heures. Allons, meubles, sous les
    piliers des Halles! (_Tous les meubles se plient et
    disparoissent._)» _Théâtre_ de Ghérardi, t. II, p. 158.

  [19] «Derrière Saint-Gervais.» Edit. précéd., p. 36.

Le Sieur Quenel, rue des Bourdonnois, fait venir des Chaises de Jonc
d’Angleterre[20].

  [20] «Les tourneurs qui vendent des chaises garnies de jonc et
    de paille, sont pour la plupart au Marché-Neuf, rue
    Grenier-Saint-Lazare et rue Neuve-Saint-Médéric.» _Id._--L’usage ne
    s’en répandit pas chez nous, car lorsque Grosley alla en Angleterre
    au siècle suivant, il trouva ce genre de chaise excellent, et nous
    le recommanda, comme si l’essai n’en avoit pas encore été fait. Il a
    été plus heureux de nos jours. _V._ le curieux livre de Grosley,
    _Londres_, édit. de 1755, t. I, p. 238.

Il y a plusieurs Argenteurs et Doreurs pour les meubles de fer rue
Dauphine, rue de la Verrerie et Fauxbourg saint Antoine[21].

  [21] L’art. est plus détaillé dans l’édit. précéd., p. 36: «les
    argenteurs et doreurs, qui vendent des chenets, foyers, girandoles,
    vaisselles et autres ouvrages de fer et de leton dorez et argentez,
    ont leurs boutiques rue Dauphine et rue de la Verrerie.»

Le Sieur Baudry, Tourneur, rue du petit Lion, fait et vend des Mortiers
et Pilons de Boüis pour les officiers[22], d’une propreté particulière.

  [22] Lisez: les officines.

Pour les Tableaux et Meubles de la Chine, voyez l’article des Curiositez
de cabinet.

Il faut neanmoins ajouter que les Sieurs Charpentiers et Bourgeois, quay
de l’Ecole, peignent et vendent les portraits de la Cour en bordures[23]
pour l’ornement des chambres et des salles.

  [23] Nous dirions «en cadres.» Richelet dit en effet dans son
    _Dictionnaire_: «BORDURE, bois de menuiserie pour mettre un portrait
    ou une glace de miroir.»

Pour les Lits de Camps, Tentes et Pavillons, voyez l’article des Armes
et Bagages de Guerre.

Pour le Linge, voyez l’article des Toilles et Dentelles de fil.

Les Sieurs Roügeot, vieille rue du Temple, et Landois, rue Neuve saint
Honoré, ont une grande habitude à bien raccommoder et remettre en
couleur les Tapisseries de haute lisse.

Les Tapisseries peintes sur du Bazin façon de haute lisse[24], se
vendent dans un magasin prés les Quinze vingts.

  [24] On les peignoit aussi sur du coutil. L’abbé Jaubert en parle dans
    son _Dictionnaire des arts et métiers_, t. IV, p. 205: «Ces autres
    tapisseries, dit-il, que l’on fait de coutil, sur lequel, avec
    diverses couleurs, on imite assez bien les personnages et les
    verdures de la haute lisse.» Il écrivoit cela en 1773, et ajoutoit
    que c’était une invention assez nouvelle. On voit ici qu’elle datoit
    de quatre-vingts ans au moins.

On vend des Coutils en gros au Bureau des Marchands Tapissiers rue saint
Martin, et encore chez Messieurs Milon, même rue, et Prevost, près
l’Hotel de la Monnoye.




CHAIR ET POISSON.


Pour le Bureau des Marchands-Bouchers, voyez l’article des Bureaux
publics.

Les Boucheries de Paris qui sont ordinairement ouvertes sont près
l’aport de Paris, place aux Rats[1], quartier des Quinze-vingts[2],
marché du Temple[3], coin de S. Paul[4], porte S. Antoine[5], marché
Neuf[6], montagne sainte Geneviève[7], place Maubert[8], Fontaine S.
Severin, quartier S. Nicolas des Champs[9], rue Montmartre[10], rue
Comtesse d’Artois, pointe saint Eustache; rue de Bussy, petit Marché,
Croix rouge[11], et ruë des Boucheries saint Germain.

  [1] Rue Saint-Jacques-la-Boucherie, près de l’impasse du Chat-Blanc.
    Sous Louis XV, cette boucherie de l’Apport-Paris appartenoit aux
    anciennes familles bouchères La Dehors et Saint-Yon. _Mercure_, mars
    1739, p. 439.

  [2] C’est-à-dire en face des Quinze-Vingts, de l’autre côté de la rue
    Saint-Honoré, à l’endroit où se trouvoit la rue Jeannisson, qui,
    jusqu’en 1830, s’étoit appelée pour cela _rue des Boucheries_.

  [3] Il étoit où fut construite, en 1811, la rotonde du Temple, pour
    _la Halle aux vieux linges_.

  [4] Dans la rue Saint-Antoine même.

  [5] Du côté de la Bastille.

  [6] Dans la partie qui avoisinoit le pont Saint-Michel. C’étoit une
    des plus anciennes boucheries de Paris. Il s’y trouvoit, au-dessus
    de la porte, des sculptures qu’on disoit de Jean Goujon. On
    l’abattit au XVIIIe siècle, et le Marché-Neuf en fut de beaucoup
    agrandi. Suivant la légende, les mouches n’entroient pas dans cette
    boucherie, et «les viandes, dit M. de Paulmy, s’y conservoient par
    conséquent beaucoup plus fraîches que partout ailleurs.» _Mélanges
    d’une grande Bibliothèque_, t. XLIII, p. 263.

  [7] Un peu au-dessus du collége de la Marche.

  [8] Auprès de la fontaine, qu’on y avoit depuis peu transférée de la
    place de Grève.

  [9] Dans la rue Saint-Martin même.

  [10] Près de l’égout, c’est-à-dire à la hauteur à peu près du passage
    du Saumon.

  [11] Vis-à-vis la rue du Cherche-Midi.

Dans toutes ces Boucheries, un Boucher seulement vend les jours maigres
pour les malades.

En Carême, le détail de la viande de Boucherie, de la Volaille et du
Gibier appartient à l’Hotel Dieu où se tient alors la principale
Boucherie[12], mais on ne laisse pas de vendre de la viande pour les
malades au profit de cet Hopital à la Boucherie du petit Marché saint
Germain, à celle du marché du Temple, à celle de la place aux Rats, et à
celle de la rue saint Honoré près les Quinze-vingts.

  [12] La rigueur étoit telle sous Louis XV, pour cette observance du
    maigre en carême, que Servandoni ayant voulu, dans la pièce de
    _Léandre et Héro_, jouée pendant le carême de 1750, au théâtre des
    Tuileries, mêler un sacrifice à son spectacle, dut obtenir de
    l’Hôtel-Dieu la permission d’acheter la génisse et le veau, qui
    devoient y jouer les rôles de victimes. _V._ à cette date,
    l’_Inventaire des archives de l’Hôtel-Dieu_, t. I. V. aussi _Rev.
    des Provinces_, 15 fév. 1866, p. 351.

M. Thibert, Boucher de cet Hopital, demeure près l’aport de Paris[13].

  [13] Il étoit--nous l’avons déjà vu plus haut, note sur Le
    Coulteux--d’une des plus anciennes familles de Paris. Son nom, comme
    celui des Saint-Yon, des Legoix, etc., remontoit à l’époque du règne
    des bouchers et de Caboche. Il le savoit, et, de concert avec les
    représentants des autres vieilles familles bouchères, il en usoit
    pour se créer un privilége et un monopole sur tous les étaux de la
    grande boucherie--celle de l’Apport-Paris--et sur ceux du cimetière
    Saint-Jean. (Depping, introduct. au _Livre des Métiers_ d’Est.
    Boileau, p. LVI.) Le roi, pour en finir avec ce monopole de Thibert
    et des autres, en fit don à Mme de Montespan et à sa sœur Mme de
    Thiange. Ils résistèrent, et, en 1691, l’époque même où nous sommes,
    il en résulta un curieux procès, dont on peut lire, aux mss. de la
    Bibliothèque Nationale, les pièces et les factums dans la
    _Collection_ Delamarre, nº 21, 656, fol. 1-185.

Entre les Bouchers qui font de grosses fournitures à la livre pour les
grands Seigneurs, sont à l’aport de Paris, Messieurs Boücher, Maücousin,
Crochet et Tibert; au cimetiere saint Jean, Messieurs Charles de Liziere
et Aubry; près saint Nicolas des Champs, Mrs Laval, Triplet, Laurent et
la veuve Hotaüt; à la grande Boucherie saint Germain, Mrs Madelin,
Cottard, Valet, Bricet et Gallier; à la rue Montmartre, M. Parisot; et
montagne sainte Genevieve, Mrs Gaudron et le Lievre.

Les Detailleurs de Tripes et de Pieds de Moutons qui sont dispersez dans
tous les quartiers, les achetent en gros tous les matins près l’aport de
Paris.

Le Marché aux Bœufs et Moutons se tient à Sceau près le Bourg la Reine,
les Lundis et Mardis; et celui des Veaux à Paris sur le Port de la Greve
presque tous les jours et principalement le Vendredi[14].

  [14] Lister, tout anglois qu’il fût, ne trouva pas, sauf sur un point,
    la viande de Paris mauvaise: «le mouton et le bœuf, dit-il, sont
    bons, et valent à peu près les nôtres, sans les surpasser toutefois.
    Quant au veau, il n’en faut pas parler: il est rouge et grossier. Je
    ne pense pas, d’ailleurs, qu’il y ait pays en Europe, où l’on
    réussisse pour cet élevage aussi bien qu’en Angleterre.» (_Voyage à
    Paris_, ch. VI.) Quoique inférieure, cette viande entroit pour
    beaucoup dans la consommation, que la lettre du Sicilien, déjà
    citée, évalue ainsi, probablement avec plus de fantaisie que de
    vérité: «On dit que l’on mange à Paris, chaque jour, quinze cents
    gros bœufs, et plus de seize mille moutons, veaux ou porcs.» V. plus
    bas, note 17, sur les _offices de Vendeurs de veaux_.

Le Marché de la Volaille, du Gibier[15], des Agneaux et des Cochons de
lait se tient sur le quay des grands Augustins presque tous les
jours[16], mais principalement les Mercredis et Samedis[17].

  [15] La même lettre dit que la consommation du gibier et de la
    volaille étoit «prodigieuse.»

  [16] La consommation de la viande étoit telle, même à l’Hôtel-Dieu,
    qu’on y avoit dressé un tournebroche qui pouvoit en faire rôtir
    1,200 livres à la fois. (_Inventaire des Archives hospitalières_,
    Hôtel-Dieu, p. 330.)

  [17] Il y avoit, pour ce marché, des «jurés vendeurs et conducteurs de
    volailles», dont les jetons--le Cabinet des médailles en possède un
    de 1709--sont des plus curieux. Ils représentent, au revers, Adam et
    Eve entourés des animaux de la création, et on y lit cette devise:
    _Proderit his pecus et volucer_, le troupeau et l’oiseau viendront à
    eux.--En 1694, on créa de nouveaux offices de vendeurs de veaux et
    volailles, qui produisirent, avec ce que rapporta en même temps «le
    traité des eaux et fontaines», 4,536,400 liv. (Forbonnais, _Essai
    sur les Finances_, année 1694.)

Les Rotisseurs fameux pour les grandes fournitures, sont les Sieurs
Guerbois près la Boucherie saint Honoré[18], et Meüsnier rue du Temple,
qui entreprend d’ailleurs les plus grandes Nopces et Festins avec
beaucoup de réputation.

  [18] C’étoit, en effet, un des plus renommés de Paris pour les bons
    repas. Il étoit du meilleur ton d’aller, comme on disoit, dîner chez
    La Guerbois, car c’est la femme qui étoit en réputation plus encore
    que le mari. _V._ ce que nous avons dit de ce cabaret dans notre
    _Histoire de la Butte Saint-Roch_, p. 126-128. Le nom de Guerbois,
    qui se trouve comme enseigne sur la boutique de quelques
    pâtissiers-traiteurs: rue Croix-des-Petits-Champs, rue des
    Saints-Pères, etc., est un dernier débris de cette renommée
    culinaire.

Entre les Charcutiers renommez, sont les Sieurs du Cerceaü rue de
l’Arbre sec, pour les Jambons façon de Mayence; Robinot montagne sainte
Genevieve[19] pour les Andoüilles; et de Flandres ruë des Barres pour
les bons cervelats.

  [19] «Devant le portail des Carmes de la place Maubert.» Edit. 1691,
    p. 27. Il y est, comme ici, nommé pour la façon des «bonnes
    andouilles.» Après lui vient, pour la même renommée, «la veuve
    Maheult, rue Montmartre.»

La foire du Lard et des Jambons se tient le Mercredi Saint ruë et parvis
Notre Dame[20].

  [20] Il est parlé ainsi de cette foire du Parvis dans une mazarinade,
    _Suite de la révélation_, ou _le second oracle rendu par le Jeûneur
    du Parvis Nostre-Dame_, 1649, in-4º p. 3:

        Dans ce Parvis, où l’on contemple
        La face d’un superbe temple,
        Jambons croissent de tous côtés,
        Ainsi que s’ils étoient plantés.

    Le Jeûneur de la mazarinade étoit une statue que l’on croyoit
    antique, et qui se trouvoit entre la fontaine du Parvis et la porte
    de l’Hôtel-Dieu. On l’appeloit ainsi parce qu’elle étoit seule à ne
    pas prendre sa part des monceaux de victuailles de la foire «au Lard
    et aux Jambons» du Parvis. «Oyez», dit une autre mazarinade:

        Oyez la voix d’un sermonneur,
        Vulgairement nommé Jeûneur,
        Pour s’estre vu, selon l’histoire
        Mille ans sans manger et sans boire.

M. Fagnaült Ecuyer de cuisine[21] de Monseigneur le Prince, fait de très
excellentes andoüilles qu’il vend à des personnes de connoissance.

  [21] C’étoit le nom que prenoient la plupart des gens de cuisine dans
    les maisons princières. Chez le Roi, où le principal s’appeloit
    «Ecuyer-bouche», il y avoit, rien que pour le cuisinier-commun ou du
    grand commun: douze écuyers, plus huit maîtres queux, et douze
    enfants de cuisine ou _galopins_.

Le Sieur Olivet près la porte de Richelieu, fait un commerce particulier
de Boudin blanc et de pieds à la sainte Menehoult.

Le Sieur Boursin Traiteur près la place des Victoires, est renommé pour
le Boudin blanc[22].

  [22] Au chapitre XXXIX, p. 59, de l’édition de 1691, il est aussi
    mentionné. On y trouve, de plus, l’indication de son enseigne: «Au
    Mont Sainte-Catherine», ce qui prouveroit qu’il étoit de Rouen.--Les
    boudins blancs commençoient d’être une friandise à la mode, quoique
    ce ne fût guère que l’ancien «blanc manger» du moyen-âge, qui,
    suivant Didier Christol, dans sa traduction du _De obsoniis_ de
    Platine, au chapitre _Jusculum album_, se composoit d’amandes et de
    blancs de chapons pilés avec de la mie de pain mollet, du sucre et
    du gingembre, etc.

On peut par le Messager de Blois recouvrer en hiver de très bonnes
Andouilles et Langues de porc fourrées, et par celuy de Troyes des
Langues de porc et de mouton fumées.

On trouve des Mortadelles d’Italie et des Saucissons de Boulogne[23],
chez le Sieur Pilet Epicier grossier[24] rue de l’Arbre sec devant saint
Germain l’Auxerrois.

  [23] C’est ainsi qu’on prononçoit Bologne.

  [24] Epicier en gros.

On en trouve aussi quelque fois tout proche chez les Provençaux[25].

  [25] _V._ plus haut ce que nous avons dit sur eux et sur le cul-de-sac
    auquel ils ont laissé leur nom.

Le marché du Poisson d’eau douce pour la vente en gros, se tient au
quartier des Halles à l’entrée de la rue de la Cossonnerie.

La vente en gros du poisson de mer se fait à la Halle au Poisson[26] par
les Officiers vendeurs de marée[27].

  [26] Il arrivoit par la voie du Nord, en traversant _le
    Val-Larroneux_, qui en prit le nom de faubourg et de rue
    Poissonnière. Il étoit apporté, comme on le voit dans les
    lettres-patentes enregistrées le 12 mars 1519, «tout de fresche
    pondeure, par les voituriers et chasseurs de marée, à chevaux,
    sommes et paniers.»

  [27] Comme aujourd’hui, ils vendoient à la criée. L’exposition du
    poisson se faisoit de trois heures du matin à sept heures. Le revers
    du jeton des marchands et jurés faisoit allusion à ces heures
    matinales. On y voyoit un coq, avec cette devise: «_Vigilantibus
    omnia fausta_.»

Passé huit heures du matin on ne trouve plus de Poisson de mer ni d’eau
douce aux Halles, si ce n’est de la seconde main comme dans les autres
marchez.

Les Marchands qui font commerce en gros de Morues et Harangs, sont M.
Corrüe et la veuve de Coste rue des Prescheurs, et Mesdames Thibault,
Levier, Estancelin et Ferrand sous les Pilliers des Halles[28].

  [28] Voici les noms tout autres qu’on trouve dans l’édit. précédente,
    p. 61: «Messieurs Gelée, rue Chanverrerie; De La Marche, rue des
    Prêcheurs; Iacinthe, rue Saint-Denis; et Regnauld, sous les piliers
    des Halles.» Levier, nommé tout-à-l’heure, et Gelée étoient de la
    famille de Regnard, enfant des Halles, comme on sait, et de parents
    qui étoient dans ce commerce. _V._ notre _Notice_ sur lui.

Il y a des bateaux et boutiques de poisson sur la riviere entre le Pont
neuf et le Pont au change, où l’on vend des carpes et brochets en gros.

Le Ton mariné se vend chez les Epiciers de la rue des Lombars et de la
ruë de la Cossonnerie.

La Gelée pour les malades se vend en tous les quartiers de Paris chez
presque tous les Traiteurs, et chez quelques Apoticaires, et encore aux
Enfans trouvez parvis Notre Dame.

Les Hameçons qui servent pour la pêche à la ligne, se vendent chez les
Chaisnetiers[29] du quay de Gesvre[30] et chez ceux de la rue saint
Denis.

  [29] Richelet dit à ce mot dans son Dictionnaire: «Ouvrier, qui fait
    des agrafes, et de toutes sortes de petites chaînes, pour pendre des
    clefs et des trousseaux, et pour attacher des chiens, etc.»

  [30] «Sous la galerie de Gesvres.» Edit. 1691, p. 112. On appeloit
    ainsi les boutiques en galerie couverte que le marquis de Gesvres,
    gouverneur de Paris, avoit fait construire sur le quai, qui porte
    son nom, vers 1642.




MARCHANDISES DE BEURRE ŒUFS, FROMAGES ET LEGUMES.


Le Bureau des Marchands Fruitiers, Orangers, Fromagers, Beurriers, etc.,
est à présent au Cloître saint Jacques de l’Hôpital[1].

  [1] Rue Saint-Denis, au coin de la rue Mauconseil.

Les Jurez en Charge de cette Communauté[2], sont les Sieurs Ravenel
l’ainé[3], ruë des Precheurs; Marié, place Maubert; Cheron et Ravenel le
jeune, sous les piliers des Potiers d’étain.

  [2] Ils n’étoient institués que depuis quelques mois. La déclaration
    royale qui les constituoit, en les réunissant à la communauté des
    fruitiers, orangers, beurriers, fromagers-coquettiers, est du 19
    juin 1691.

  [3] Il est appelé Pierre Ravenel dans un arrêt du 9 juin 1694,
    confirmant la sentence du lieutenant de police, en faveur des
    marchands fruitiers, etc. «A l’encontre des nommez Val, sa femme, et
    autres soy-disant facteurs des marchands forains de beurre, œufs et
    fromages.»

Ceux d’entre les Maîtres de cette Communauté qui font commerce en gros,
de Beurre frais et salé, Œufs et Fromage, sont lesdits Sieurs Chéron et
Ravenel[4]; et encore les Sieurs Baron, rue de la Poissonnerie; le Clerc
l’ainé[5], rue de la Cossonnerie; Maloüvrier, Roger[6], le Clere le
jeune[7], Hüe, Guilbert, Samson ainé et Samson cadet sous les mêmes
piliers, Bacquet ainé, Bacquet cadet, et Guilloü[8], rue des Precheurs.

  [4] Sébastien Ravenel, d’après le même arrêt.

  [5] Jean Leclerc.

  [6] Nicolas Roger.

  [7] Julien Leclerc.

  [8] Jean-Baptiste Guillou.

Autant en font Mesdames Prignet, Bonvallet Alexandre et Prevost, rue des
Precheurs.

Les Sieurs Bazin frères, rue Mondetour, qui font aussi commerce
d’œufs[9], tiennent d’ailleurs grand magasin de Fromage de Brie, de
Beauvais, de Marolle, de Pont l’Evêque et autres.

  [9] Ils se vendoient surtout au détail, ainsi que les fromages et le
    beurre, «aux environs du Pilori.» Edit. 1691, p. 27.

Autant en font les Sieurs du Tarre sous les mêmes Piliers, et Godeau[10]
rue des Precheurs.

  [10] Jacques Godeau.

Sous les mêmes piliers jusqu’à neuf heures du matin, on trouve des
païsans qui vendent en petits pains le beurre de Vanvre[11].

  [11] Il étoit déjà très-célèbre, et le Roi en avoit son fournisseur
    particulier, Blaise Giu, «le seul, disoient les lettres du 16 mars
    1668, par lesquelles lui étoit constituée sa charge de beurrier
    royal de Vanvres, le seul qui ait trouvé la perfection de faire du
    beurre de Vanvres, dans la bonté et excellence qu’il peut être.»
    Jal, _Dictionn. critique_, p. 214.

Le Beurre en pots et en tinettes d’Isigny et autres lieux, est encore
commercé par les Epiciers de la rue de la Cossonnerie.

On peut recouvrer du Beurre de Bretagne de la Prevalaye[12] par
l’entremise du Messager ordinaire.

  [12] Les beurres d’Isigny et de la Prévalaye sont, on le sait,
    toujours célèbres.

Il en vient d’Isigny aussi de très excellent en petits pots, en hiver
seulement, qui est commercé principalement par lesdits Sieurs Ravenel,
Baron, Güilloü et la veuve Prunier.

Les Facteurs des marchandises cy-dessus qui vendent pour les Marchands
forains[13], sont les Sieurs Val, Barthelemy, Ravenel et la Ramée, quay
des Augustins, et encore lesdits Sieurs Baron, Ravenel le jeune, et
Samson l’ainé cy devant nommez.

  [13] Ce sont ces facteurs qui eurent, en 1694, un procès qu’ils
    perdirent, ainsi qu’on l’a vu plus haut, avec la communauté des
    fruitiers. Val et Baron, dont les noms suivent, y avoient surtout
    été engagés.

Les Facteurs pour la vente du Beurre de Normandie[14], sont les Sieurs
Aüfroy, Hüe et Clicot, rue Betizy; Levé, rue Tirechappe, et Prévost, rue
de la Monnoye.

  [14] Dans l’arrêt rendu pour le procès, dont nous venons de parler,
    sont nommés plusieurs «marchands de volaille, beurre et autres
    marchandises de la province de Normandie», qui avoient pris partie
    pour les facteurs. Ce sont: Nicolas Duchemin, de Thorigny; François
    Laurent, de Saint-Lô; Michel Danton, marchand à Caen; Jacques
    Manninot, Jacques Savart, Michel Laurent, de Falaise; Nicolas
    Lemoine, Elie Poret, Antoine Guérin, Thomas Mane, Pierre Ponnier,
    Jean Benoist, Jean Martin, Henry Chertier, Geoffroy Germain, Pierre
    Du Moutier, Christophle Roussel, Marie Le Doux, etc.

Les Legumes se vendent en gros les matins jusqu’à huit heures dans la
rue de la Lingerie, et en détail dans tous les marchez[15].

  [15] «Les marchandises de bouche se trouvent en gros et de première
    main, de grand matin, aux Halles, où chaque genre de denrées a son
    département.--Passé huit heures dans les marchez et aux Halles
    mesmes, on n’a presque plus rien que de la seconde main.--Les
    herbages se vendent rue de la Lingerie et au coin Saint-Paul, où
    quelques jardiniers du faubourg Saint-Antoine s’arrêtent le matin,
    ainsi qu’au cimetière Saint-Jean, pour ne pas aller jusqu’aux
    Halles.» Edit. 1691, p. 27.

A la decente du Pont Marie qui va au port saint Paul, il arrive bien
souvent des Fromages de Brie qu’on vend en gros[16].

  [16] Il n’y a pas, surtout dans cette seconde édition, assez de
    détails sur les petits marchés de Paris. Liger, dans _le Voyageur
    fidèle_, p. 343-354, est plus complet. Il mentionne la place ou
    _petit marché au marais du Temple_--aujourd’hui marché des
    Enfants-Rouges,--«où l’on vend, dit-il, du beurre, des œufs, etc.»;
    le _petit marché Saint-Jacques_, près de la porte du même nom, où se
    fait le même débit, mais le mercredi et le samedi seulement; le
    _petit marché de la Croix-Rouge_, pour le lait, le fromage, le
    beurre, les légumes, et enfin--ce qui nous fournit une étymologie
    parisienne longtemps cherchée,--«la place appelée _la Pierre au
    Lait_, proche, dit-il, de l’église de Saint-Jacques-la-Boucherie.
    C’est un petit marché fort étroit, ajoute-t-il, où il va beaucoup de
    laitières. On y trouve aussi des œufs frais, du beurre et autres
    denrées de cette sorte.»

Pour les Fromages de Rocfort, voyez l’article suivant.

Les Fromages de Lorraine arrivent au Chariot d’or devant l’Abbaye saint
Antoine, et en quelques autres hotelleries du même quartier.




OFFICES DE FRUITERIES.


Il y a un grand nombre de Confiseurs rue des Lombards[1], et quelques
uns ruë saint André, et rue saint Honoré près le Palais Royal, qui
vendent en gros et en détail toutes sortes de confitures seches et
liquides de Dragées, de Massepains, de Biscuits amers[2], etc.

  [1] Il en reste encore quelques-uns. La maison la plus célèbre par
    exemple, celle du _fidèle Berger_, y exista jusque dans ces derniers
    temps. Elle est déjà mentionnée par Roze de Chantoiseau dans son
    _Almanach général d’indication_ pour 1773: «Ravoisé, y est-il dit,
    rue des Lombards, au _Fidèle Berger_, confiseur très-renommé, etc.»

  [2] C’est-à-dire aux amandes amères, comme on le verra plus bas.

On peut par le Messager de Dijon recouvrer deux sortes de Confitures
exquises et inimitables; à sçavoir, des Prunes de Moyeux[3] et de
l’Epine vinette[4].

  [3] C’étoit une sorte de prune confite. Il en venoit encore beaucoup
    de Dijon, lorsqu’en 1741, Savary fit son _Dictionnaire du Commerce_.
    Le petit marquis, Louis-Provence de Grignan, se faisoit un grand
    régal de cette confiture; aussi Mme de Sévigné écrit-elle à Mme de
    Grignan: «Songez à vos moyeux pour Provence.» Lettre du 22 sept.
    1675.

  [4] Il venoit de Dijon de l’épine-vinette en grappes confites et en
    pastilles: «J’ai cru me ressouvenir, écrit Voltaire à D’Argental, le
    4 août 1777, qu’on faisoit autrefois des pastilles d’épine-vinette à
    Dijon, et j’en ai fait tenir une petite boîte à votre voisin
    (Thibouville).»

Il y a un Patissier, rue Bailleul près la Croix du Tiroir, et un autre
rue saint Nicolas au Fauxbourg saint Antoine, qui vendent en gros et à
juste prix aux Officiers, Aubergistes et Limonadiers, des biscuits, des
macarons, des craquelins[5], etc.

  [5] Le craquelin étoit un gâteau rond à rebord, fait seulement à la
    farine et au sel, et _croquant_ sous la dent. Il se faisoit surtout,
    comme on le voit ici, chez les pâtissiers des faubourgs, où de
    pauvres femmes s’en fournissoient pour les venir revendre en ville.

On trouve des Biscuits, des Macarons, des Massepains, des Cornets, etc.,
chez tous les Patissiers de Paris, entre lesquels le Sieur de l’Etoile
rue saint Antoine près les Filles sainte Marie, fait de très bons
Biscuits d’amendes ameres.

Le Sieur Billard, rue Montorgueil, est renommé pour les Biscuits façon
de Blois[6].

  [6] Savary, dans son _Dictionn. du Commerce_, 1741, in-fol., t. I,
    col. 965, dit encore: «le commerce des biscuits de Blois est
    très-considérable; il s’en fait une assez grande consommation à
    Paris.»

Les fruits en gros se vendent le matin à la Halle aux bleds depuis trois
ou quatre heures jusqu’à huit.

Sur la Greve de l’Arsenal, vis à vis l’Isle Louvier, il arrive tout
l’Eté et tous les jours aux mêmes heures, des batteaux de Fruits
nouveaux venant de saint Seine et Route[7], qui sont vendus en gros par
paniers aux Fruitieres qui font le détail.

  [7] C’est-à-dire de tous les pays riverains du fleuve, depuis
    Saint-Seine où en est la source.

Il arrive aussi frequemment des batteaux de pommes et poires venant de
Normandie sur le quay de l’Ecole.

Les Vins Muscats et de Canaries se vendent en detail aux environs de la
Croix du Tiroir[8].

  [8] Il y avoit là, depuis le règne de Louis XIII, des sortes de
    cabarets en sous-sol, où l’on ne buvoit pas d’autres vins. «Un jour,
    dit Tallemant, que notre Orphée--c’est le musicien Lambert--s’estoit
    laissé entraîner dans une de ces caves de vin muscat à la Croix du
    Trahoir, il en sortit la tête en compotes, etc.» (_Historiettes_,
    édit. P. Paris, t. VI, p. 199.)--Elles se trouvoient, rue
    Saint-Honoré, un peu plus haut que la rue de l’Arbre-Sec, au coin de
    laquelle se voyoit, comme on sait, la Croix du Trahoir.

Les Provençaux qui logent au cul de sac saint Germain l’Auxerrois,
vendent en gros des Fromages de Rocfort, des Olives, des Anchois, du Vin
de saint Laurent, des Figues, des Raisins, des Brugnons, des Amandes et
autres fruits secs de Provence.

Autant en font les Epiciers de la rue de la Cossonnerie, qui vendent
d’ailleurs des Capres fines, des Oranges et des Citrons de Provence, de
la Chine[9] et de Portugal.

  [9] Ces petites oranges, que nous appelons aujourd’hui des mandarines,
    étoient alors fort recherchées. Il n’y avoit qu’un demi-siècle que
    la culture en avoit commencé en Portugal, d’où elles nous venoient.
    C’est à cause de leur prix que, dans _l’Avare_, voulant mettre hors
    de lui son père Harpagon, Cléante lui propose pour sa collation des
    plateaux entiers d’oranges de la Chine. Tout ce genre de fruits
    étoit, du reste, à la mode, parce qu’il n’étoit pas à la portée de
    tout le monde: «les oranges et les citrons, dit _la lettre
    italienne_ déjà citée, tiennent le premier rang entre les choses qui
    se vendent cher, parce qu’elles viennent d’Italie et de Portugal, et
    ils sont plus estimez que les autres fruits: telle est l’inclination
    de l’homme, qui ne trouve bon que ce qui coûte beaucoup.»

Messieurs Lion, rue de Truanderie[10], et Jourdan, ruë S. Denis, au
cheval blanc[11], tiennent aussi magasin de fruits de Provence[12].

  [10] Son adresse, dans l’édit. précéd., est «rue Jean de l’Epine, à
    l’enseigne de la ville de Tours.» Cette rue étoit près de celle de
    la Truanderie.

  [11] _V._ son art. plus bas, au chap. Epiceries.

  [12] «On vend des Truffles, rue Serpente, au Messager de Toulouse.»
    Edit. 1691, p. 111.

Le Sieur Chaillou, rue de l’Arbre sec; de Rere, rue Dauphine, et
Regnault au Jeu de Metz, sont renommez pour le bon Chocolat et pour le
Caffé en graine et en poudre.

On vend un Traité curieux du Thé, du Caffé et du Chocolat, chez la veuve
Nion, quay de Nesle[13].

  [13] C’est le traité cité plus haut à l’art. Librairie. Il est de
    Blégny, lui-même, qui ne manque jamais l’occasion de rappeler ce
    qu’il a fait.

Les Sieurs Huré, place Dauphine[14], et Letgüyüe, rue Dauphine, sont
renommez pour les bons melons.

  [14] Son article est plus curieux dans l’édit. précéd., p. 29: «le
    sieur Huré, marchand de melons, à qui l’on peut avoir toute
    confiance en payant un bon melon ce qu’il vaut, a tous les ans sa
    boutique à l’entrée de la place Dauphine.»

Le Sieur Luquet, rue saint Denis, devant la rue du petit Lion, fait et
vend des carafons de liege fort legers et fort propres pour rafraichir
les liqueurs à la glace[15].

  [15] On appeloit alors carafons les seaux qu’on remplissoit de glace
    pour y faire rafraîchir le vin en bouteilles. Il avoit été fort
    ingénieux d’y appliquer le liége à cause de sa porosité. C’étoit,
    avec une tout autre matière, le système des alcarazas espagnols, où
    cette porosité entretient la fraîcheur par l’évaporation. La glace,
    dans ces seaux de liége, qui, d’ailleurs, sont encore d’usage, se
    conserve plus longtemps que dans les autres.

Le Sieur Joubert, qui demeure au quartier de la Croix du Tiroir, rue des
vieilles Etuves, à l’enseigne du Soulier d’or, vend des Olives et des
Anchois[16] à juste prix pour les Cabaretiers et Aubergistes.

  [16] On s’en fournissoit depuis longtemps à Nice, Cannes, Antibes,
    etc. Olivier de Serres, _Théât. d’agricult._, 1605, in-4º, p. 660,
    parle de «barrils d’anchoies (_sic_)» qui en venoient.

Il y a un magasin de Pistaches[17], rue Bourlabé, chez Madame Nave.

  [17] Les pistaches du Levant étaient en vogue depuis le XVIe siècle.
    _V._ A. Paré, Liv. XVIII, ch. 43. On en faisait d’excellentes
    dragées.

Pour le sucre et autres denrées domestique, voyez ci-après l’article
d’Epiceries et denrées domestiques.




PANNETERIE ET PATISSERIE.


Entre les Patissiers renommez pour la patisserie, sont les Sieurs le
Coq, rue de l’Université, quartier saint Germain[1]; le Hongre, rue
saint Antoine, près les Jesuites; Mignot, rue de la Harpe[2]; Berthelot,
rue saint Louis du Palais; Luce, près les Basions Royaux[3]; Sonnet,
près saint Roch; Bouliet, rue des Déchargeurs; Gravier, à l’entrée de la
rue saint Antoine; la veuve Langlois, à la Bazoche, rue saint André[4],
et pour ce qui regarde les Biscuits, Macarons, Craquelins, Massepains,
Cornets, voyez l’article precedent.

  [1] Dans la 1re édit., il est donné, p. 27, comme ayant «une grande
    réputation pour toutes sortes de patisseries.» Puis on lit à la
    suite: «Ainsi en est-il du sieur Flechmer, rue Saint-Antoine, au
    coin Saint-Paul, celuy-ci fait un grand débit de fines brioches que
    les dames prennent chez luy en allant au Cours de Vincennes.»--Les
    marguilliers de Saint-Paul, avec lesquels, en bon voisin, il
    s’entendoit, lui faisoient commander tous les pains bénits de la
    paroisse. Ils en avoient une part du profit, ou tout au moins une
    _paraguante_, comme on appeloit alors le pourboire. Marigny, après
    leur avoir dit, dans son poëme du _Pain Bénit_, qui parut en 1673,
    tout ce qu’il y avoit de scandaleux dans leurs exigences pour que le
    gâteau fût bien large, bien épais, «bien étoffé», ajoute:

        Encor ne pouvez-vous souffrir
        Que le pain que l’on doit offrir
        S’achète ailleurs qu’en la boutique
        De Fléchemer, qui pour l’argent,
        Afin d’avoir votre pratique,
        Se qualifie effrontément
        De patissier de la fabrique.
        Que son pain soit grand ou petit,
        Il est selon votre appétit.
        S’il vous donne une _paraguante_,
        Et s’il fait bien boire Regnault,
        Votre fabrique est fort contente:
        L’offrande est faite comme il faut.

  [2] «Le sieur Mignot, rue de la Harpe, n’a pas seulement beaucoup de
    réputation pour la patisserie, mais encore pour toutes espèces de
    ragoûts, étant patissier traiteur.» Edit. de 1691, p. 28.--Voilà qui
    le venge de Boileau. C’est, en effet, le Mignot de la _Satire du
    Repas_, où il est donné, il vous en souvient, pour «l’empoisonneur»
    qui sait le mieux son métier. De notre temps, il eût fait au
    satirique un procès en diffamation. Il s’y prit, pour sa revanche,
    comme on s’y prenoit du sien. Il rendit satire pour satire. Cotin
    venoit d’en faire une contre Boileau, dont il vouloit aussi se
    venger. Ils s’entendirent ensemble, et, pendant plusieurs semaines,
    il ne sortit pas un gâteau de chez Mignot qui ne fût enveloppé du
    papier satirique de Cotin. Sa boutique, du reste, ne prospéra que
    mieux du mal qu’on en avoit dit: «Ce matin, dit Brossette, à la date
    du 22 oct. 1702, dans ses _Mémoires_ sur Boileau, en passant dans la
    rue de la Harpe, l’on m’a montré la maison où Mignot, patissier et
    traiteur, tenoit autrefois sa boutique. C’est vis à vis la rue
    Percée. Un nommé Couterot tient la même boutique de patissier.
    Mignot a quitté sa profession en 1700, et il vit de son bien.» Il
    avoit eu surtout une grande réputation pour les biscuits
    (Vigneul-Marville, _Mélanges_, t. III, p. 291).

  [3] Cabaret de la rue Saint-Honoré, dont il sera dit un mot plus loin.

  [4] On y mettoit fort bien les levrauts en pâtés, si l’on en croit le
    procureur de la 3e _Satire_ de Furetière. On m’a fait, dit-il,

        On m’a fait un présent d’un levreau d’importance,
        Que j’aurois plus gardé, n’étoit cette occurence;
        Si je le mangeois seul j’aurois quelque remords;
        J’ai dit qu’on luy fît faire un brillant juste au corps
        Et l’ai fait envoyer exprès _à la Bazoche_.
        Il fait plus de profit en pâte qu’à la broche.

M. Prevost, Boulanger de Monsieur et de Madame[5], demeure près le
Palais Royal.

  [5] Dans l’_Etat de France_ pour 1692, p. 774, c’est Jacques Converset
    qui est indiqué comme boulanger de la maison de Madame. Pour celle
    de Monsieur, p. 736, l’indication manque.

Le Sieur Verité, Boulanger, près la Magdelaine[6], fournit Nosseigneurs
du Parlement, et est fort renommé pour le Pain de Seigle et pour le Pain
au lait[7].

  [6] En la Cité.

  [7] Ces «pains au lait» étoient spéciaux aux boulangeries dites «de
    petits pains», et ils y avoient des noms particuliers suivant leurs
    formes. On les appeloit _pains à la mode_, _pains de Ségovie_, et
    encore _pains à la Montauron_, mais ce nom avoit à peu près passé
    pour faire place à un autre, comme on le verra plus loin. Fagon
    avoit défendu au Roi l’usage de ces pains au lait. (_Journal de la
    Santé_, p. 211, 223.)

Il y a plusieurs autres Boulangers renommez pour diverses sortes de
Pains, par exemple, les Sieurs Dantan, près les Jacobins, pour le petit
pain; de Lorme, rue aux Ours; et le Comte, au cimetiere saint Jean, pour
le pain molet[8]; des Monceaux, rue de Tournon, et le Comte, rue
Galande, près la place Maubert, pour différentes sortes de Pains[9].

  [8] On l’avoit aussi appelé _pain à la Reine_. Comme il y falloit plus
    de levure qu’aux autres et qu’il n’étoit pas ainsi réglé selon les
    lois de la médecine, la Police ne l’avoit d’abord que toléré (O. de
    Serres, p. 822). En 1688, il faillit être tout à fait défendu à la
    suite d’un procès entre les Boulangers et les Cabaretiers, dont nous
    avons ailleurs donné longuement le détail. _V. Le Roman de Molière_,
    p. 191-227.

  [9] Presque tous étoient fort grands, comme notre _pain Jocko_, dont
    le nom est une altération de celui du _pain Coco_ du Languedoc. Le
    Sicilien, dont nous avons déjà cité la lettre, s’étonne de ces pains
    énormes, et il en parle avec une exagération amusante: «le pain est
    bon, il est blanc, bien fait, dit-il, et un seul pain est quelque
    fois si grand qu’il suffit pour rassasier une semaine entière
    pendant plusieurs jours; ce qui a fait dire à un plaisant que si
    cette manière de faire de grands pains eût été dans la Judée au
    temps du Messie, les cinq mille Juifs qui furent rassasiés se
    seroient plutôt étonnés du four que du miracle.»--Le plus grand
    étoit le _grand pain bourgeois_, dont Jean Alassin avoit obtenu le
    privilège en juin 1649, et qui avoit fini par être accepté, malgré
    l’opposition des boulangers et surtout des meuniers. C’étoit un pain
    bis-blanc, qui se distribuoit au poids en échange du blé (_Bibliog.
    des Mazarinades_, t. I, p. 411-412). Une brochure in-4º de 7 pages
    et rarissime contient sur cette spéculation de boulangerie populaire
    des données curieuses: _Tarif des droits que l’entrepreneur du
    Magasin de grand pain Bourgeois, estably dans la rue des Rosiers au
    petit hôtel d’O, a costé de la vieille rue du Temple, prend tant
    pour le déchet ordinaire de la farine au moulin ou ailleurs que pour
    les frais dudit moulin et de la fabrique ou du cuisson (_sic_) du
    pain._

La veuve Ronay, rue saint Victor, fait un pain de table excellent de
toutes farines, qu’on nomme Pains à la Joyeuse[10].

  [10] C’est un souvenir du règne de Henri III, où, après les noces du
    duc de Joyeuse avec la sœur de la Reine, tout fut «à la Joyeuse»
    dans Paris, même le pain.

Il y a dans la Cour des Quinze-Vingts plusieurs Boulangers qui font un
Pain de menage[11] de toutes farines qui est trouvé d’un bon goût.

  [11] Cette expression «pain de ménage» est déjà dans le _Théatre
    d’agricult._ d’O. de Serres, 1605, in-4º, p. 824.

Le Boulanger qui fabrique le petit pain de mouton pour les enfans[12],
demeure rue de Seine, quartier saint Germain[13].

  [12] Le _pain-mouton_ étoit une sorte de petit pain saupoudré de
    grains de blés que les valets étoient chargés de donner aux enfants
    pauvres, quand venoient les étrennes. Il différoit beaucoup--sauf
    par le nom--du _pain de mouton_, qui se faisoit avec du beurre, du
    fromage, et de la pâte, et n’étoit guère plus grand, dit Richelet,
    qu’un écu d’argent. On le donnoit aussi aux enfants «un peu devant
    et un peu après le jour de l’an.» L’abbé de Marolles a parlé dans
    les notes de sa traduction d’_Athénée_, 1680, in-4º p. XXXIX, où
    certes l’on ne l’attendoit guère, d’une femme qui fut célèbre en son
    temps, par le débit qu’elle faisoit de ces petits pains, en criant
    par les rues: «à mes petits pains de mouton, Mesdames!»

  [13] Dans l’édit. précéd., p. 62, son adresse est «rue des Mauvais
    Garçons», celle du faubourg Saint-Germain, sans doute, près de la
    rue de Seine.

Le Sieur Ozanne, rue de Guenegaud, est renommé pour le pain Paget[14] et
pour une sorte de pain façon de Gonesse[15].

  [14] C’étoit, croyons-nous, le pain à la Moutauron, avec un nom plus
    nouveau, mais déjà ancien lui-même. Jacques Paget Du Plessis,
    d’abord maître des requêtes, puis intendant des finances, avoit fait
    fortune en s’arrangeant avec les partisans, lorsque Moutauron, un de
    ceux-ci, avoit sombré après quelques années de la plus grande
    magnificence, qui lui valut, comme on sait, la dédicace de _Cinna_.
    Tout étant de mode, le pain à la Moutauron fut remplacé par le pain
    Paget, comme la fortune de Paget avoit succédé à celle de Moutauron.

  [15] On sait que le pain de Gonesse, qui devoit, dit-on, ses qualités
    à l’eau du pays, étoit celui qu’on préféroit à Paris, dont il
    formoit en grande partie l’approvisionnement. L’arrivage s’en
    faisoit deux fois par semaine, et il avoit sa halle particulière:
    «On ne prendra pas Paris, disoit Condé, suivant le cardinal de Retz,
    par des mines, comme Dunkerque, et par des attaques, mais si le pain
    de Gonesse lui manquoit huit jours.» Lister le trouva excellent et
    bien supérieur à celui de Paris. «Il est extrêmement blanc, dit-il
    (chap. VI), ferme, léger et fait avec du levain. Il est
    ordinairement en pain de trois livres.» Le prix de trois deniers
    anglois la livre, qu’il donne ensuite, équivaut à trente-et-un
    centimes d’à présent.

Le Sieur Jacques, rue saint Honoré, est renommé pour le pain biscuit
qu’on mange avec les liqueurs.

Les Sieurs l’Esteuve, près saint Medard, et Adam, rue saint Denis, au
Roy François[16], fabriquent des Fours pour le public.

  [16] C’est-à-dire Cour du Roy François, ancienne Cour des Miracles,
    qui n’a disparu que dans ces derniers temps, et qui devoit son nom à
    cette enseigne.

Il y a plusieurs Paindepiciers rue Marivaux[17] et porte S. Denis.

  [17] On les appeloit aussi «patissiers de pain d’épice.» Ils étoient
    peu nombreux à Paris, à cause de la concurrence de ceux de Reims.




MARCHANDISE DE VINS ET D’APRESTS.


La Halle aux Vins[1] est à la porte saint Bernard, où il y a des Bureaux
pour les droits du Roy[2]. On y trouve de bon et franc vin de Bourgogne
chez le Sieur Compagnot.

  [1] Elle avoit été établie en 1662.

  [2] La porte Saint-Bernard, qui avoit la forme d’un arc de triomphe,
    datoit de 1674. Elle se trouvoit sur le quai de la Tournelle, un peu
    au-dessus du pont. On la démolit au commencement de la Révolution.
    Sous l’Empire, la Halle aux vins, sa voisine, fut reportée plus
    haut, sur la plus grande partie de l’enclos de l’abbaye
    Saint-Victor, qu’elle occupe toujours. Les travaux d’installation
    commencèrent en 1811.

Le Bureau des Maîtres et Gardes de la marchandise de vin[3], est rue
Grenier, sur l’eau, derriere saint Gervais.

  [3] Ils jouissoient des mêmes priviléges que ceux des six corps
    marchands, et ils pouvoient, comme eux, devenir échevins ou consuls.
    Ils avoient pour armoiries, depuis 1629, un navire d’argent à
    bannière de France, flottant avec six nefs autour, et une grappe de
    raisin en chef sur champ d’azur.

Tout proche rue des Barres, M. Milon fait commerce en gros de Vins de
Champagne[4].

  [4] La mode n’en faisoit que commencer, et le plus souvent on ne
    l’appeloit que _Vin de Sillery_ ou _Vin de la Maréchale_, à cause de
    la maréchale d’Estrées, à qui appartenoit le vignoble de Sillery,
    par lequel avoit préludé cette première vogue. Le Roi y contribua.
    Le vin de Champagne fut longtemps sa seule boisson. (_Journal de la
    Santé_, p. 211 et 350.)

Du nombre des douze Marchands de Vins du Roy[5], qui font les grandes
fournitures en pieces et en bouteilles, pour la Cour, pour l’armée et
pour le public, sont Messieurs Cresnay rue Notre Dame[6], de Bray rue de
la Huaumerie, Bourdois au bout du Pont saint Michel, Petit rue des
Petits Champs, Bourdois près l’aport de Paris, Morisson[7] rue de la
Huchette, Darboullin rue Coquilliere[8], Tardiveau Fauxbourg saint
Marcel, Hardon[9] rue Beaubourg, Triboulleau rue de la Mortellerie[10],
Alexandre rue des Assis, etc.

  [5] Ils étoient, suivant l’_Etat de France_, p. 628, les premiers
    privilégiés suivant la Cour. On les appeloit «la Cave des Douze.»

  [6] Son enseigne étoit «à la Pomme de pin», et c’est par conséquent
    son cabaret que doit désigner ainsi l’édit. précédente, p. 28: «la
    Pomme de pin, derrière la Magdelaine.» Un autre, portant la même
    enseigne, indiqué aussi dans cette première édition, se trouvoit rue
    d’Orléans.--On sait que Crenet est, comme Mignot, assez maltraité
    dans _la Satire du Repas_, pour les mélanges «d’auvernat et de
    lignage» qu’il vendoit, dit Boileau, «pour vin de l’Ermitage.» Le
    reproche étoit, paroît-il, assez juste, d’après une anecdote que
    raconte Brossette; aussi Crenet ne réclama-t-il pas. Dancourt l’a
    mieux traité dans l’_Eté des Coquettes_, joué en 1690. On y chante à
    la fin:

        Sans cadeaux et sans promenades
        L’Amour les tient peu sous ses lois,
        Et sans Crenet et la Guerbois
        L’Amour n’a que des plaisirs fades.

  [7] Edme Maurisson, d’après l’_Etat de France_, p. 628.

  [8] Dancourt, à la scène IV des _Agioteurs_, joués en 1710, parle de
    sa veuve, qui lui avoit alors succédé: «SUZON... Vous irez de là
    chez Madame Darboulin, rue Coquillière, dire qu’on porte au même
    endroit, dès ce matin, les douze douzaines de bouteilles de vin de
    Bourgogne, et la douzaine de Champagne que je payai hier.»

  [9] Hugues Hardoin, et non Hardon.

  [10] Il étoit le plus en vogue à la fin du siècle. Suivant le
    _Théophraste moderne_, p. 422, on ne trouvoit bons que les vins
    qu’il vendoit.

Et du Nombre des vingt cinq[11] sont Mrs Groü Doyen, Avrillon près le
Puits Certain, Coquart rue du Temple, Charles rue de la Huchette, Baron
rue du Paon, Rousseau rue d’Avignon[12], Sellier montagne sainte
Genevieve, Paris près la Grève, Moricault l’ainé place Maubert,
Roussillard près le Pont Marie, Riberolle Isle Notre Dame, Moricault le
jeune rue des Boucheries saint Germain, Forel joignant la Comedie
Françoise[13], Baron et Guibault au cimetiere saint Jean[14], Gaudin
près le Pont Notre Dame, True rue Galande, la Nopce près le Palais,
Courtois, rue saint Honoré, le Gendre rue des Noyers, Migret Fauxbourg
de Richelieu, etc.

  [11] Les vingt-cinq «cabaretiers», suivant la Cour, qu’il ne falloit
    pas confondre avec les douze «marchands de vin», quoiqu’ils en
    portassent le titre et eussent les mêmes privilèges. On pouvoit chez
    eux non-seulement vendre «le vin à pot, mais donner des repas
    complets. _V. Le Traité de la Police_, t. III, p. 719, et la
    _Correspondance_ de Colbert, t. II, 1re partie, p. 169. Les
    cabaretiers ordinaires, qui n’étoient pas en même temps marchands de
    vin comme les vingt-cinq, ne pouvoient au contraire fournir pour les
    noces et repas que leur salle, le pain, le vin, les couverts, linges
    et salades. Il falloit apporter le reste. _V._ à ce sujet un arrêt
    du 1er août 1705, rendu contre le cabaretier Joseph Filastreau.--Il
    sera parlé plus loin des marchands de vin qui vendoient surtout au
    pot.

  [12] C’est son cabaret qui est indiqué ainsi dans l’édit. précéd., p.
    28: «à la Galère, derrière Saint-Jacques la Boucherie.» Il avoit, en
    effet, cette enseigne, déjà ancienne dans la rue d’Avignon, qui en
    prenoit parfois le nom de «rue de la Galère.» Sauval, t. I, p.
    111.--_V._ sur la maison qu’y occupoit Rousseau, de curieux
    renseignements dans l’édition que M. Cocheris a donnée de
    l’_Histoire du Diocèse de Paris_, par l’abbé Le Beuf, t. III, p.
    506.--Il est continuellement parlé de ce fameux cabaretier dans les
    pièces du temps: _le Chevalier à la mode_, de Dancourt, _les
    Chinois_ et _la Fille de bon sens_ de la Comédie italienne, etc.
    Coulange ne l’a pas oublié dans ses couplets. Il y chante:

        Chez Rousseau portons nos écus.

  [13] Il tenoit le cabaret de _l’Alliance_, qui étoit, en effet, près
    de la Comédie françoise établie, depuis 1688, rue des
    Fossés-Saint-Germain. (_Hist. amour. des Gaules_, t. III, 435.)
    C’est à sa porte que mourut subitement, en 1701, le gros
    comédien-auteur Champmeslé. _L’Alliance_ est citée, pour les
    débauches qui s’y faisoient, dans plusieurs pièces du théâtre
    italien: _la Cause des femmes_, _Pasquin et Marforio_, _les
    Aventures des Champs-Elysées_, où Forel est nommé.

  [14] Les cabarets y étoient déjà nombreux sous Louis XIII. Saint-Amand
    l’appelle «un cimetière»

        Fait pour enterrer les ennuis.

Il y a plusieurs autres Marchands renommez pour les fins Vins et pour la
belle Viande, par exemple, Messieurs Lamy aux trois Cuilleres rue aux
Ours[15], Loisel aux bons Enfans[16] près le Palais Royal, Fitte au
grand Loüis rue Bailleul[17], Berthelot à la Conférence rue Gémis
Laurent, du Monchel au Soleil d’or rue saint André, du Test à la Corne
rue Galande, de Sercy à la petite Galere rue de Seine[18], etc.

  [15] Celui-ci étoit en telle vogue, qu’il avoit fini par dédaigner le
    nom de cabaretier, pour prendre celui de traiteur, que tous les
    autres, cela va de soi, prirent aussitôt comme lui, même ceux des
    guinguettes. «COLOMBINE, _déguisée en chevalier_. Quand vous
    donnerai-je à souper chez Lamy?--ISABELLE. Vous perdez le respect,
    chevalier, une fille de ma qualité au cabaret!--COLOMBINE. Oh! s’il
    vous plaît, Lamy n’est pas un cabaret, c’est un traiteur de
    conséquence...» _Le Banqueroutier_ (1687), théâtre de Ghérardi, t.
    I, p. 390. Il est nommé dans le prologue du _Grondeur_ (1691).

  [16] Il avoit pris pour enseigne le nom même de sa rue, qui alloit, du
    reste, fort bien à un cabaret.

  [17] Fitte, qui est aussi nommé deux fois dans _Turcaret_, comme
    l’homme des meilleurs repas, a eu l’honneur d’être cité par
    Chaulieu, en 1704, dans son épître au chevalier de Bouillon:

                    Chevalier, reçois ces vers
                    D’une muse libertine.
        Qu’ils aillent sous ton nom de _popine_ en _popine_
                    Apprendre à tout l’univers
                    Que _Fite_ et La Morilliére,
                    Pour n’avoir point de Césars,
                    Ont pourtant sous leur bannière
                    Leur héros, ainsi que Mars.

  [18] C’est chez lui que Saint-Amand étoit mort le 29 décembre 1661,
    après une maladie de deux jours: «Son ami, l’illustre abbé de
    Villeloin, si connu dans la République des Lettres, dit Fr. Colletet
    dans _l’Abrégé des Annales de Paris_, 1664, in-12, p. 439, l’assista
    en ce dernier moment et luy rendit ce dernier devoir de son amitié
    qu’il luy avoit juré depuis tant d’années.»

Il y a d’ailleurs en différens quartiers de la Ville et du Fauxbourg des
Traiteurs et Marchands de Vins qui font nopces ou qui tiennent de grands
Cabarets, et où il se fait de gros Ecots, par exemple, Mrs Clossier à la
Gerbe d’or rue Gervais Laurent, Blanne à la Galere rue de la Savaterie,
Bedoré au petit Panier rue Tirechape[19], Robert près les Consuls[20],
Aubrin à la Croix Blanche rue de Bercy[21], Martin aux Torches cimetiere
saint Jean[22], Guérin à la Folie rue de la Poterie, Payen au petit
Panier rue des Noyers, Cheret à la Cornemeuse rue des Prouvaires[23].

  [19] L’édit. de 1691, p. 28, le loge «rue Troussevache.»

  [20] «Au cloître Saint-Méderic, chez Robert.» _Id._

  [21] Un autre cabaret de «la Croix blanche», étoit rue aux Ours. Edit.
    de 1691, p. 28.--Chapelle fréquentoit celui de la rue de Bercy, au
    Marais. Il avoit deux entrées, l’une sur cette rue, l’autre sur une
    rue parallèle, qui en avoit pris le nom de rue de la Croix-Blanche.
    Elles étoient toutes deux fort étroites, et il a suffi, en 1850,
    d’enlever l’îlot de maisons qui les séparoient, pour n’avoir qu’une
    seule rue de largeur réglementaire.

  [22] Ce cabaret est déjà nommé comme un des fameux dans les _Visions
    admirables du Pelerin du Parnasse_. 1635, in-12.

  [23] Il est cité dans la pièce _Les Souffleurs_, acte I, sc. XI. Les
    auteurs y alloient beaucoup. (_V._ notre Notice sur
    Regnard.)--Dancourt qui, on le sait, par une anecdote connue, se
    consoloit chez Chéret de la chute de ses pièces, l’a nommé, dans sa
    comédie, _Madame Artus_. Acte I, sc. XI.--Chéret fit fortune. Son
    fils devint procureur au Parlement, et ce sont ses petites-filles,
    Mlles Chéret, très-ardentes jansénistes, qui, en 1758, pour tenir
    tête au curé de Saint-Séverin, créèrent une sorte de petite église
    qu’elles opposèrent à la sienne. (_Journal_ de Barbier, édit. in-18,
    t. VII, p. 81 et 377.)

On peut aussi boire et manger proprement et agréablement au Loüis près
le Jeu de Metz[24], à la porte S. Germain rue des Cordeliers, à la Reine
de Suède rue de Seine, aux Carneaux rue des Déchargeurs, à la petite
Bastile rue Betizy[25], au petit Pere noir rue de la Bucherie[26], aux
trois Chapelets rue saint André, à la Galère rue saint Thomas du
Louvre[27], au Soleil des Perdreaux[28] rue des Petits Champs, au Panier
fleuri rue du Crucifix saint Jacques de la Boucherie[29], à la Porte
saint Denis chez Hory, à la Boule blanche, et au Jardinier[30] Fauxbourg
saint Antoine.

  [24] Deux autres cabarets avoient cette enseigne du «Louis»; l’un, qui
    étoit peut-être celui de Le Gendre, nommé tout-à-l’heure, se
    trouvoit rue des Noyers; l’autre, rue Bourg-l’Abbé.

  [25] Il y avoit au port Saint-Paul un autre cabaret de «la petite
    Bastille.» Edit. de 1691, p. 28.

  [26] On y venoit de tout Paris, pour la beauté de la cabaretière et
    l’excellence des vins. C’est pour l’hôtesse que Coulange fit son
    couplet:

        Si tu veux sans suite et sans bruit, etc.

    Dans la farce italienne des _Deux Arlequins_, le vin du cabaret du
    _Père Noir_ est chanté, acte I, sc. III:

                      ARLEQUIN.
          Qu’un bon levraut suivi d’un dindon tendre
        Soit tantôt sur le soir pour nous deux apprêté
        Et prends au _Père Noir_ d’un bon vin velouté
          Deux flacons dignes de m’attendre.

  [27] C’est le même cabaret de _la Galère_, qui, dans l’édit.
    précédente, est indiqué «près le Palais-Royal.»

  [28] «Des six perdreaux.» _Id._

  [29] Un autre «Panier fleury» est indiqué rue Tirechappe, dans l’édit.
    précédente. Il donna son nom à un passage, qui alloit de cette rue à
    celle des Bourdonnois. Rousseau et Diderot dînoient souvent en
    pick-nik, au cabaret du _Panier fleury_, dans les premiers temps de
    leur séjour à Paris. (V. _les Confessions_, 2e part., liv. VII.)

  [30] «Au Jardinet.» _Id._

Les Marchands de Vins qui vendent quelquefois en gros et qui debitent
beaucoup au pot[31] et en bouteilles, sont entr’autres, Messieurs
Mariette, au carrefour saint Benoist, de la Cour rue du Crucifix saint
Jacques de la Boucherie, Bernard devant le Pont Neuf, Saulsay rue des
Poulies, Rougeault près l’aport de Paris, Bricet Butte saint Roch,
Haumont et Berthelot rue des Boucheries saint Germain, des Hottes rue de
la Fromagerie, Darlu, Hardouin et Joly près le Palais Royal.

  [31] Les bourgeois faisoient vendre la plupart «à pot» ou «au pot»,
    chez ces marchands de vin, le produit de leurs vendanges: «M.
    BERNARD. Ne vaut-il pas autant vendre mon vin à la campagne que de
    le faire vendre à _pot_ dans Paris, comme la plupart de mes
    confrères.» Dancourt, _la Maison de campagne_, scène XXXII.

Le même M. Joly donne fort bien à manger à trente sols par tête[32].

  [32] L’édition de 1691, p. 28, cite encore quelques autres cabarets:
    «_Au petit Paris_, rue de la Verrerie; _à la petite Epousée_, rue
    Saint-Jean en Grêve; chez Tessier, au coin Saint-Paul; _au Cormier_,
    rue des Fossez-Saint-Germain; _à la Vallée Tissart_, rue Vaugirard;
    _au Milieu du Monde_, à la Grenouillère, où demeure Lognon, renommé
    pour les matelottes; _à la Chasse Royale_, près la porte
    Saint-Louis; _aux Bâtons royaux_, rue Saint-Honoré.» Les _Bâtons
    royaux_ se trouvoient près de Saint-Roch, dont les marguilliers y
    alloient faire bombance. (_V._ notre _Histoire de la Butte_, p. 52.)




HOSTELS GARNIS ET TABLES D’AUBERGES.


Il y a des Appartemens magnifiquement garnis pour les grands Seigneurs à
l’Hotel de la Reine Marguerite rue de Seine[1], et à l’Hotel de Bouillon
quay des Théatins.

  [1] Liger, dans son _Voyageur fidèle_, p. 325, le met aussi au nombre
    des hôtels garnis renommés. Il existe encore au nº 6 de la rue de
    Seine. C’est un pavillon détaché du magnifique hôtel que la première
    femme d’Henri IV s’étoit fait construire, et dont les jardins, qui
    s’étendoient jusqu’à la rue des Saints-Pères, ne survivent plus que
    par un jardinet planté de quelques arbres, où l’on descend, comme
    sous Henri IV, par un double perron. La façade du pavillon est
    restée ce qu’elle étoit. On s’est contenté de l’exhausser d’un
    étage, mais du même style, au-dessus duquel on a reconstruit les
    anciennes mansardes. Le conseiller d’Etat Gilbert des Voisins
    l’habitoit au XVIIIe siècle, et les Mirabeau, dont les boiseries
    intérieures conservent encore le chiffre, y étoient venus après lui.

Il y a encore plusieurs autres Hotels meublez en differens quartiers,
par exemple, le grand Duc de Bourgogne rue des petits Augustins, l’Hotel
d’Escosse rue des saints Pères, l’Hotel de Taranne, l’Hotel de Savoye,
et l’Hotel d’Alby rue de Charonne, l’Hotel de l’Isle, l’Hotel de
Baviere, l’Hotel de France, et la Ville de Montpellier rue de Seine,
l’Hotel de Venise, et l’Hotel de Marseille rue saint Benoist, l’Hotel de
Vitry, l’Hotel de Bourbon, l’Hotel de France, et l’Hotel de Navarre rue
des grands Augustins[2], la Ville de Rome rue des Marmouzets, l’Hotel de
Perpignan rue du Haut Moulin, l’Hotel de Tours rue du Jardinier[3],
l’Hotel de Beauvais rue Dauphine, l’Hotel d’Orléans rue Mazarine,
l’Hotel du saint Esprit rue de Guenegaud, l’Hotel de saint Agnan rue
saint André, l’Hotel d’Hollande[4], l’Hotel de Beziers, l’Hotel de
Brandebourg, l’Hotel de saint Paul et le grand Hotel de Luyne rue du
Colombier.

  [2] On peut remarquer que beaucoup de ces hôtels étoient dans le
    faubourg Saint-Germain. Les étrangers le préféroient, et les hôtels
    garnis s’y étoient multipliés en conséquence: «depuis que la paix
    étoit faite, lit-on dans les _Annales de la Cour et de la Ville_,
    pour les années 1697-1698, t. II, p. 135, il y avoit eu dans Paris
    un si grand abord d’étrangers, que l’on en comptoit quinze à seize
    mille dans le faubourg Saint-Germain seulement... Le nombre s’accrut
    encore bientôt de plus de la moitié, en sorte que, au commencement
    de l’année suivante, on trouva qu’il y en avoit trente-six mille
    dans ce seul faubourg.»

  [3] Lisez rue du Jardinet. Cet hôtel, que Liger place avec plus de
    raison rue du Paon, où il en subsista des restes jusqu’aux dernières
    démolitions, devoit son nom aux archevêques de Tours, dont il avoit
    été longtemps la propriété. Vauvenargues y descendoit pendant ses
    congés de semestre. Les lettres que lui écrivit Voltaire portent
    cette adresse.

  [4] C’est un des hôtels que, dans _la Comtesse d’Escarbagnas_, scène
    XI, Julie, voulant se moquer de la ridicule provinciale, lui nomme
    comme autant d’hôtels de grands seigneurs: «On sait bien mieux,
    dit-elle, vivre à Paris dans ces hôtels, dont la mémoire doit être
    si chère: cet hôtel de Mouhy, Madame, cet hôtel de Lyon, cet hôtel
    d’Hollande. Les agréables demeures que voilà!»

On mange à table d’Auberge[5] dans presque toutes les maisons garnies
cy-devant designées à vingt, à trente ou à quarante sols par repas[6]:
mais l’Auteur ignore encore sur quel pied elles sont reglées chacune en
particulier[7], en attendant sur cela un plus grand eclaircissement, les
Provinciaux peuvent s’assurer qu’on loge et qu’on mange d’ailleurs dans
les Hotels et Auberges ci-après aux differens prix qui seront marquez,
par exemple:

  [5] C’étoit encore le mot le plus en usage. Gourville dans ses
    _Mémoires_, 1re édit., t. I, p. 306, dit toutefois déjà «Table
    d’hôte», de même que les deux Hollandois qui vinrent à Paris en
    1657, et dont M. Faugère a publié le curieux _Journal de Voyage_. V.
    p. 191. Nous lisons aussi dans une pièce de Dancourt: «M. BERNARD. A
    _table d’hôte_, je vous entends, tant par tête.» _La maison de
    campagne_, 1688, scène XXX. En somme, c’est, je crois, suivant
    l’importance des hôtels et des prix qu’on disoit _table d’hôte_ ou
    _table d’auberge_.

  [6] Même les plus chères de ces tables d’hôte ou d’auberge n’étoient
    pas pour les délicats, qui ne vouloient que des cabarets «à gros
    écots», sans prix fixe. Dans _les Côteaux_ ou _les Marquis friands_,
    qui furent joués à l’hôtel de Bourgogne, en 1665, Clidamant et
    Oronte, deux de ces gourmets, s’en expliquent nettement scène XI:

                        ORONTE.
        Les repas de grand prix sont bien plus agréables
        Et la cherté des mets les rend plus délectables.
                        VALÈRE.
        A ce plaisant discours, que réponds-tu, Marquis?
                        CLIDAMANT.
        Que je ne veux jamais disner à juste prix.
                        LÉANDRE.
        Voilà d’un vrai Marquis le parfait caractère.

  [7] Selon Liger, p. 326, «ces prix fixes» ne l’étoient pas toujours.
    Ils varioient selon que la cherté des vivres étoit plus ou moins
    grande.

A quarante sols par repas à l’Hotel de Mantouë rue Mouton[8], à l’Hotel
de l’Isle de France rue de Guénégaud, etc.

  [8] Dans l’édit. précédente, p. 28, se trouve une autre adresse, qui
    est la vraie, et un plus long détail: «le sieur de La Motte, à
    l’hôtel de Mantouë, rue Montmartre, tient une fort bonne table à
    quarante sols par repas, et fournit même une seconde table aux
    intervenants.»

A trente[9] au petit Hotel de Luyne rue Gît le Cœur, à la Galere rue
Zacharie, aux Bœufs et aux trois Chandeliers rue de la Huchette, etc.

  [9] «Rue Saint-André, à l’hôtel de Chateau-Vieux.» Edit. 1691, p. 29.

A vingt à l’Hotel d’Anjou rue Dauphine, au petit S. Jean[10] rue Gît le
Cœur, au Coq hardi rue saint André[11], à la Croix de fer rue saint
Denis[12], au Pressoir d’or et à l’Hotel de Bruxelle rue saint
Martin[13], à la Croix d’or rue du Poirier, à la Toison rue Beaubourg,
etc.

  [10] «Et au grand hôtel de Luynes.» _Id._

  [11] «Le sieur Vilain, rue des Lavandières, près la place Maubert, à
    la Galère.» _Id._--Il a, p. 63, un petit article supplémentaire: «le
    sieur Vilain, marchand de vin, aussi renommé pour ses bons apprêts,
    demeure rue des Lavandières, à l’entrée de la place Maubert, à la
    Galère.»

  [12] Ajoutons près de Saint-Leu. Il y a, sur un dîner à ce cabaret, un
    curieux sonnet de François Colletet, qui se termine par ce vers,
    bien digne d’un pauvre poëte, depuis longtemps à jeun:

        Moi, je mange aux repas, et bois sans dire mot.

    Un autre hôtel de _la Croix de fer_ se trouvoit rue de la Harpe,
    adossé aux ruines des Thermes. Marmontel y logea en arrivant
    d’Auvergne à Paris.

  [13] Conrart, chez qui se réunit d’abord la Société littéraire, où se
    recrutèrent les premiers membres de l’Académie françoise, logeoit
    près de cette auberge de la rue Saint-Martin. (Marcou, _Pellisson_,
    p. 80.) Plus d’une séance de la nouvelle Académie dut s’y terminer.
    Suivant Vigneul-Marville, en effet, on ne se séparoit pas sans avoir
    fait légèrement ripaille.

A quinze à la Ville de Bourdeaux et à l’Hotel de Mouy rue Dauphine, à
l’Hotel couronné rue de Savoye, au petit Trianon rue Tictonne, à la
ville de Stokolm rue de Bussy, à la belle Image rue du petit
Bourbon[14], au Dauphin rue Maubuée, etc.

  [14] «Rue de la Rose, à la Samaritaine.» Edit. 1691, p. 29.

A dix sols[15] au Heaume rue du Foin, au Paon rue Bourlabé, au Gaillard
bois rue de l’Echelle, au gros Chapelet rue des Cordiers[16].

  [15] Boileau, _satire X_, vers 673-676, nous dit à peu près ce
    qu’étoient ces auberges:

        T’ai-je encore décrit la dame brelandière
        Qui de joueurs chez soi se fait cabaretière,
        Et souffre des affronts que ne souffriroit pas
        L’Hôtesse d’une auberge à dix sous par repas.

  [16] «Et à l’hôtel Notre-Dame, rue du Colombier.» Edit. de 1691, p.
    29.

Il y a d’ailleurs quelques Auberges où il y a trois tables différentes,
à quinze, à vingt et à trente sols par repas, par exemple, à la Couronne
d’or rue saint Antoine[17], au petit Bourbon sur le quay des Ormes, et à
l’Hôtel de Picardie rue saint Honoré[18].

  [17] Cette auberge, très-agrandie, subsista jusqu’aux démolitions pour
    la prolongation de la rue de Rivoli. C’est de là que partoient les
    gondoles de Versailles.

  [18] Un autre hôtel plus célèbre de cette rue étoit «l’hôtel
    Saint-Quentin», où descendit Leibnitz, lorsqu’il vint à Paris, et où
    logea Jean-Jacques Rousseau, dont il prit et a gardé le nom. (_V._
    nos _Enigmes des rues de Paris_.) L’abbé de Marolles, dans ses
    _Mémoires_, 1755, in-12, t. I, p. 75, a parlé de ces intéressants et
    sérieux hôtels du quartier des Grès--la rue des Cordiers en fait
    partie--où se rencontroient théologiens et poëtes.

Les gens qui ne peuvent faire qu’une très mediocre dépense, trouvent
d’ailleurs dans tous les quartiers de Paris de petites Auberges où on a
de la soupe, de la viande, du pain et de la biere à suffisance pour cinq
sols[19].

  [19] Liger, p. 327, employant un mot que Saint-Simon emploie aussi
    d’ailleurs, appelle franchement ces «petites auberges» _gargotes_,
    «où l’on vit, dit-il, à la portion, à si petit prix que l’on veut.»
    On avoit eu aussi déjà l’idée d’une sorte de grande marmite
    économique, pour des soupes, au meilleur marché possible. _V._
    Helvétius, _Traité des Maladies_, chap. _Bouillon pour les
    pauvres_.--Dans les auberges à cinq sous le dîner, on logeoit,
    suivant d’Argenson, à un sou la nuit. Marivaux ne donne pas d’autre
    gîte à son _Paysan parvenu_ arrivant à Paris: «Je me mis, lui
    fait-il dire avec sa préciosité ordinaire, dans une de ces petites
    auberges à qui le mépris de la pauvreté a fait donner le nom de
    gargote.»


FIN DU TOME Ier.




  TABLE
  DES ARTICLES
  DU
  LIVRE DES ADRESSES DE PARIS.[1]

  [1] Nous donnerons à la fin du volume la table alphabétique de
    l’édition de 1691.


  Tome I.

  Affaires Ecclésiastiques                                        15
  Exercices de piété                                              21
  Finances Royales                                                26
  Trésoriers Payeurs des Gages et Rentes                          40
  Conseils du Roy et Chancellerie                                 46
  Secretaires du Roy                                              54
  Scéances des Tribunaux                                          78
  Vacations des Tribunaux                                         86
  Docteurs et Licentiez en Droit                                  87
  Secretaires et Greffiers du Conseil, des Cours Souveraines
    et des Juridictions Subalternes                               93
  Contraintes Judiciaires                                        100
  Bureaux Publics                                                106
  Administration des Hospitaux                                   112
  Banquiers                                                      117
  Academies et Conferences publiques                             120
  Biblioteques particulières et publiques                        129
  Collèges et Leçons publiques                                   138
  Mathematiques                                                  146
  Medecine ordinaire                                             150
  Medecine empirique                                             156
  Opérations chirurgicales                                       157
  Matières Médecinales simples et composées                      164
  Pension pour les Malades                                       178
  Bains et Etuves                                                182
  Impressions et Commerce de Librairie                           185
  Musique                                                        204
  Fameux Curieux des Ouvrages magnifiques                        216
  Dames Curieuses                                                231
  Commerce de Curiositez et de Bijouteries                       236
  Commerce des Ouvrages d’Or, d’Argent, de Pierreries, etc.      244
  Premieres Instructions de la Jeunesse                          248
  Nobles Exercices pour la belle education                       253
  Armes et Bagages de Guerre et de Chasse                        261
  Chevaux et Equipages                                           264
  Passetemps et Menus Plaisirs                                   269
  Jardinages                                                     275
  Tapisseries et Meubles ordinaires                              283
  Chair et Poisson                                               289
  Marchandises de Beurre, Œufs, Fromages et Legumes              296
  Offices de fruiteries                                          300
  Panneterie et Patisserie                                       304
  Marchandises de Vins et d’Aprests                              309
  Hostels garnis et Tables d’Auberges                            316




  TABLE ALPHABÉTIQUE
  DES PRINCIPALES
  MATIÈRES CONTENUES EN CET OUVRAGE[1]

  [1] Afin de continuer à reproduire aussi exactement que possible le
    livre de Blegny, nous nous sommes conformé pour cette table, comme
    disposition, texte et orthographe, à celle qu’il a donnée dans sa
    première édition et qui--nous ignorons pourquoi--ne se retrouve pas
    dans la seconde. Nous nous sommes contenté d’y faire les additions
    nécessaires.



A.

  Abrégé de la science des temps, II, 205.
  Académies, I, 120.
  Académie de découvertes, I, xlv, xlix, 9.
  Académie Françoise (Listes de 1676 et 1705), II, 275, 289.
  Accouchements, I, 159 et II, 69.
  Adresses casuelles de la ville de Paris, I, xlij.
  Affaires ecclésiastiques, I, 15.
  Adresses recouvertes après l’impression, II, 68.
  Adresses diverses, II, 73.
  Adresses (autres) nouvellement recouvertes, II, 177.
  Affiches, I, vj, xxxij, xxxiv; II, 345, 357.
  Affiches (petites), I, 10.
  Afficheurs, II, 75.
  Agneaux, I, 292.
  Aiguilles, II, 24.
  Alimens, I, 289.
  Almanachs, I, 193; II, 190.
  Almanach spirituel, I, 26.
  Amirauté, I, 70.
  Andouilles, I, 293-294.
  Anchois, I, 302-303.
  Animaux, I, 289. (Chair et poisson.)
  Apoticaires, II, 69.
  Architecture et Maçonnerie, II, 102.
  Arcs de carosses, I, 47, 267.
  Ardoises, II, 118.
  Argenteurs, I, 287.
  Armes et Bagages de guerre et de chasse, I, 261.
  Armoires, II, 344.
  Asnes, I, 264.
  Auberges (tables d’Auberges) et Hostels garnis, I, 316.
  Avis du Bureau d’adresse (Liste des), II, 302.
  Avis généraux, II, 341.
  Avis du journal général de France (Liste des), II, 373.

B.

  Bailliage du Palais, I, 77.
  -- du Temple, I, 86.
  -- de Saint-Jean de Latran, I, 86.
  Bains et Etuves, I, 182.
  Balliveaux, II, 122.
  Bandages, I, 13.
  Banquiers, I, 117.
  Banquiers expéditionnaires en cour de Rome, I, 18 et II, 68.
  Baromètres, I, 242.
  Bas, II, 30.
  Bateaux (gardes), I, 111.
  Bateurs d’or, II, 46.
  Bâtimens du Roy, II, 87.
  Bénéfices et Bénéficiers, I, 19.
  Bêtes azines, I, 264.
  Beurre (Marchandises de), œufs, fromages et légumes, I, 296.
  Bible polyglotte, II, 319.
  Bibliothèques, I, 129.
  Bijouteries, I, 237.
  Bijouterie de cire, II, 68.
  Billards, I, 274.
  Biscuits, I, 301.
  Boëtes d’Allemagne, II, 23.
  Bœufs, I, 291.
  Bois de taillis à vendre, II, 338.
  Bonneterie (Ouvrage et Commerce de), II, 28.
  Bonnets carrés, II, 75.
  Bottes, II, 65.
  Bouchons de liège, II, 7.
  Boucles d’oreilles, II, 317.
  Boulangers, I, 306.
  Boules à jouer, I, 274.
  Bois à brûler, II, 8.
  -- à bâtir.
  Boudin blanc, I, 294.
  Bouquetières, I, 165.
  Bouteilles de poche, II, 42.
  Brefs et Bréviaires, I, 192.
  Bureau d’Adresses (Listes générales du), II, 332-346, 356, 364.
  Bureau des Indes Orientales et Occidentales, I, 108-109.
  Bureau d’adresses ou de rencontre, I, xx, xxiv et II, 302.
  Bureau des Merciers, II, 18.
  Bureaux publics, I, 106.
  Buscs et bois d’Evantails, II, 24.

C.

  Cabarets. V. _Traiteurs_.
  Cabinets d’ébeine, II, 353, 382.
  Cabinets, I, xxxiv.
  Café et cacao, I, 303.
  Caffé et chocolat, I, 303.
  Caisses de jardin, I, 282.
  Calçons et chaussons de chamois, II, 37.
  Calendrier, II, 218.
  Calottes, II, 75.
  Cancers, I, 170.
  Canepin, II, 75.
  Canifs, II, 48.
  Caractères d’imprimerie, I, 194.
  Caractères des signes et planètes, II, 200.
  Carrafons, I, 303.
  Carrières, II, 112, 113.
  Carosses de louage, remises, I, 266.
  Carosses de route, II, 160.
  Carrosses à vendre, II, 323, 325, 348, 359, 367.
  Cartes à jouer, I, 274.
  Carte généalogique de France, II, 322.
  Cartons, II, 27.
  Cassolettes philosophiques, I, 243 et II, 35.
  Catherinettes, I, x, xij.
  Cerisaies à Montmorency, II, 311.
  Chair et poisson, I, 289.
  Chaircutiers, I, 293.
  Chaises de moquette, II, 315, 353.
  Chaises de porteur, II, 339.
  Chaises roulantes, II, 317, 333, 366.
  Chaisnetiers, I, 296.
  Chambre des comptes, I, 64.
  Chambre souveraine des décimes, I, 85.
  Chambre du Trésor, I, 75.
  Chancellerie, I, 146; II, 348.
  Changements, I, 79.
  Chapeaux (Commerce de), II, 38, 63.
  Chapeaux à vendre, II, 320.
  Charbon de terre, charbon de bois, II, 9.
  Charges à vendre, II, 310, 338, 347, 348, 350, 352, 359, 362, 366.
  Charrettes de routes, I, 263; II, 174.
  Charité (directrices de), I, 23.
  Châtelet, I, 70.
  Chaux, II, 105.
  Chevaux et équipages, I, 264.
  Chevaux à vendre, II, 317, 319, 321, 323, 327, 333, 347, 353, 359,
    360, 367.
  Cheveux (Ouvrages et Marchandises de), II, 39.
  Chiens, I, 273.
  Chinoiseries, V. _Lachinage_.
  Chirurgiens, II, 68.
  Choses diverses à vendre, II, 316.
  Cicle solaire, II, 211.
  Ciment, II, 105.
  Cireure (cirage) de cordonniers, II, 67.
  Citrons, I, 302.
  Clavecins, I, 205; II, 72.
  Clouds, II, 137.
  Coches par terre et par eaux, II, 172.
  Cochons, I, 292.
  Coffres, I, 239.
  Coiffeuses, I, 271; II, 41, 73.
  Collèges, I, 138.
  Colliers de perles à vendre, II, 319, 322, 361.
  _Committimus_ (droit de), II, 375.
  Commerce des Ouvrages d’or, d’argent, de pierreries, de perles,
    I, 244.
  Conférences, I, 127; II, 86.
  Connétablie, I, 75.
  Confiseurs, I, 300.
  Confituriers I, xxxiij.
  Conseils du Roi et Chancellerie, I, 46.
  Conserves balsamiques, I, 170.
  Consuls, I, 76.
  Consultations  chirurgicales, I, 158.
  Consultations médicinales, I, 151; II, 77.
  Contraintes judiciaires,  I, 100; II, 343.
  Coquillages, I, 236.
  Cordes à instruments, I, 215.
  Cordonnerie (Ouvrages et Marchandises de), II, 65.
  Courriers, II, 249.
  Cours des Aides, I, 63; II, 78.
  Cours des Monnoyes, I, 69.
  Courtiers, Couratiers, I, xij, 10.
  Couteliers, Couteaux, II, 47.
  Craquelins, Biscuits, Macarons, etc., I, 301.
  Crêpes et Crêpons, II, 13.
  Creusets, II, 75.
  Cristal minéral, I, 175.
  Cuirs et vendeurs de cuirs, II, 86.
  Cuivre, II, 46.
  Curé d’Evry, empirique, I, 156.
  Curieuses (Dames), I, 231.
  Curieux (Fameux) des Ouvrages magnifiques, I, 216.
  Curiosités (Commerce de) et de bijouterie, I, 236.

D.

  Damasquinerie, I, 240.
  Danse, I, 124, 126.
  Déclarations du Roy, I, 190.
  Découpeurs, I, 62.
  Demandes pour acheter, II, 327, 340, 354, 368, 382.
  Dents malades, I, 170-172; II, 178.
  Dentelles, Points, Boutons, Galons d’or, II, 16-17.
  Département des courriers, II, 249.
  Descentes (Bandages), I, 12, 173 et II, 85.
  Diamants du Temple, I, 248; II, 316.
  Diamants à vendre, II, 322.
  Docteurs et Licentiez en droit, I, 87.
  Domestiques, I, vj; II, 49, 344, 358, 376.
  Doreurs, Argenteurs, I, 287.
  Draperies, II, 11, 314.
  Drogueries, I, 165.
  Drogueries chimiques, I, 175.
  Drogueries étrangères et de Montpellier, I, 175.
  Durée des jours et des nuits, II, 242.

E.

  Eau catholique de Paracelse, II, 320-321.
  Eau de Cordoue, I, 172; II, 34.
  Eaux distillées, I, 175.
  Eaux et forêts, I, 76.
  Eau histerique, I, 172.
  Eau rouge de la reine d’Hongrie, I, 172.
  Eaux minérales, I, 175.
  Eaux de vie, I, 176.
  Echets, I, 274.
  Ecoles (petites), I, 18.
  Ecole médicinale, I, 141.
  Ecrans, II, 22.
  Eclipses, II, 242.
  Ecritoires, II, 27.
  Ecrivains jurés, I, 249; II, 53.
  Edits et déclarations du Roy, I, 190.
  Eolipiles, II, 324.
  Eguilles et Epingles, II, 24.
  Election, I, 77.
  Emailleurs, I, 242.
  Emplâtre de la manufacture royale, I, 13.
  Epacte et Lunaisons, II, 213.
  Epiciers, I, xxxiij, 302; II, 5-6.
  Epiceries et autres denrées domestiques, II, 5.
  Essences de Rome et de Gènes, II, 33.
  Essence végétale, I, 14, 172.
  Estampes et tableaux, I, 239.
  Etoffes à meubler, I, 284.
  Etoffes indiennes, II, 13.
  Etoffes d’Italie, II, 13.
  Etoffes de soie d’or et d’argent, I, 272 et II, 13.
  Etoffes de l’Apport-Paris, II, 339.
  Etuves ordinaires, I, 182.
  Evantails, II, 20.
  Exercices (Nobles) pour la belle éducation, I, 253.
  Exercices de piété, I, 21.
  Experts Ecrivains, II, 53.
  -- Arithméticiens, II, 54.
  -- Maçons, Charpentiers, II, 54.
  -- Couvreurs, II, 54.
  -- Généalogistes, II, 53.

F.

  Fabrique des Monnoyes, II, 245.
  Fayences, I, 283; II, 43.
  Fer (Ouvrages et Marchandises de), II, 129.
  Fer blanc, II, 46, 131.
  Fermiers généraux, I, 28, 32; II, 79.
  Ferme à vendre, II, 313.
  Ferrailles, II, 129.
  Fêtes mobiles, II, 217.
  Feux d’artifices, I, 272.
  Figures de plâtre bronzées, I, 241.
  Fileurs d’or, II, 46.
  Finances royales, I, 26, 33.
  Flûtes et Flageollets, I, 212.
  Foires (Etat des plus considérables), II, 266.
  Fontainiers, II, 155.
  Fourneaux, II, 75.
  Fourrures, II, 35, 38.
  Frère Ange, empirique, I, 157.
  Frères cordonniers, II, 67, 322.
  Frères tailleurs, II, 61.
  Friperie, II, 60.
  Fromages, I, 297.
  Fruiterie (offices de), I, 300.
  Fruits secs I, 302.

G.

  Gants (marchandises des gantiers et parfumeurs), II, 31.
  Garçons de métier, II, 50.
  Garçons de cuisine et de cabaret, II, 49.
  Garnitures de rubans, II, 24.
  Gazettes, I, xvij, xxix, 193.
  Généalogies, II, 53.
  Gibecières, I, 273.
  Gobelins, II, 92-93.
  Glaces de miroirs, II, 141, 142.
  Grand Conseil, I, 61.
  Grains balsamiques, I, 13, 171.
  Grains dépuratifs du sang, I, 172.
  Graines de jardins, I, 282.
  Graveurs en taille douce, II, 68.
  Graveurs de médailles, II, 153.
  Graveurs en lettres, II, 152.
  Graveurs en pierre, II, 153.
  Greffiers du Parlement, I, 94.
  Grenailles, I, 248.
  Grenier à sels, I, 79.
  Guainiers, II, 37, 49, 74.
  Guinguettes, II, 305.
  Guipures, II, 17.
  Guitarre, I, 211.

H.

  Habillements (habits d’hommes et de femmes), II, 58.
  Habits et manteaux à vendre, II, 319.
  Habits faits de théâtre et de mascarade à quatre pistoles par an,
    I, 271 et II, 62.
  Hameçons, I, 296.
  Harans, I, 295.
  Hautbois, I, 212.
  Herbages, I, 165.
  Hôtel de Ville, I, 75.
  Heures, I, 192.
  Horlogers. V. _Orlogeurs_.
  Hospitaux (Administration des), I, 112.
  Hostels garnis et tables d’Auberges, I, 316.
  Huile d’amandes et autres tirées sans feu, I, 175.
  Huile d’olive, II, 5.
  Huissiers, I, 100.
  Hydromètres, I, 242.
  Hypocras, I, xxxiij.

I.

  Immeubles à louer, à vendre, à échanger, II, 304.
  Indiction romaine, II, 212.
  Instructions (premières) de la jeunesse, I, 248.
  Instruments  mathématiques et de chirurgie, II, 48.
  Instruments à vents, I, 212; II, 72.

J.

  Jambons, I, 293.
  Jardin médicinal, I, 26.
  Jardin Royal, II, 87.
  Jardinages, I, 275.
  Jartières, II, 23.
  Jeûnes et solemnitez, II, 215.
  Jurés bourgeois, II, 54.
  Jouailleries, II, 23.
  Juges et Consuls, I, 76.
  _Journal des avis et affaires de Paris_, I, xxxv.
  _Journal des Savants_, I, 191.
  _Journal du Bureau de rencontre_, I, xxxix.
  Juridiction des Poudres et Salpêtres, 1, 79.
  -- des Garennes, _ibid._
  -- du Chantre Notre-Dame, I, 17, 20.

L.

  Laboratoire du sieur de Blégny, I, 169.
  Lachinage, I, 239.
  Lait d’anesses, de chèvres ou de vaches, II, 72.
  Lancettes, II, 47.
  Lapins, I, 273.
  Laquais, II, 50, 344, 358, 376.
  Lard, I, 293.
  Leçons particulières, I, 138.
  Leton, II, 46.
  Lettre Dominicale, II, 211.
  Librairie (impressions et Commerce de), I, 19, 185.
  Lieux où se trouveront tous les quinze jours les livres d’avis,
    II, 330.
  Linges, points et dentelles, II, 15.
  Lingots d’or et d’argent, I, 248.
  Lits, I, 284, 285.
  Lits à vendre, II, 314, 315, 334, 352, 360, 361, 368.
  Litières, I, 267.
  Livres d’avis, II, 330.
  Livres de Mathématiques, I, 190.
  Livres de Médecine, I, 162, 163, 190.
  Livres de piété et d’église, I, 20, 26.
  Lods et ventes, II, 309.
  Loupes, I, 174.
  Lustres et girandoles, II, 143.
  Luths, I, 211.

M.

  Macarons, I, 301.
  Machinistes, II, 121.
  Maçonnerie (lieutenant général de la), I, 78; II, 102.
  Maçons et Manœuvres, II, 102.
  Magistrats (principaux), I, 55.
  Maisons à louer, 305-308, 333, 362.
  Maisons à vendre, II, 308-313, 334-337, 349, 351, 367, 368.
  Maladies vénériennes, I, 171.
  Maladies des yeux et des oreilles, I, 174.
  Marchandises d’Outre-Mer, II, 20.
  -- de Dieppe, II, 22.
  -- de Saint-Claude, II, 23.
  Maréchaussée, I, 75.
  Marionnettes et Manequins, I, 272.
  Marqueterie, I, 286.
  Manufactures des ouvrages du Roy, II, 87.
  Maroquins, I, 109; II, 38.
  Masques, I, 271.
  Matériaux à bâtir, II, 105.
  Mathématiques, I, 146, 254 et II, 71.
  Matières métalliques (Commerce de diverses matières), II, 45.
  Matières médicinales, I, 164.
  Médailles, I, 130, 221, 223, 225, 227, 230; II, 382.
  Médecine et Médecins, I, 150.
  Médecine ordinaire, I, 150.
  Médecine empirique, I, 156.
  Médecins jurés, II, 52.
  Melons, I, 303.
  Menus Plaisirs, I, 269.
  Menuiserie, II, 121.
  Menuisiers en ébène, II, 353.
  Mercerie, Quincaillerie (Commerce de), II, 18.
  _Mercure galant_, I, 193.
  Mercure d’or, I, 13.
  Messageries, II, 166.
  Meubles à vendre, II, 314.
  Meubles de la Chine, I, 236, 240.
  Meubles ordinaires et Tapisseries, I, 283.
  Meubles d’orfévrerie, II, 73.
  Meubles vieux, I, 287.
  Migniatures, II, 97, 98.
  Miroirs, II, 21, 140, 353, 361.
  Mirouettiers, II, 21, 140, 353, 361.
  Moëllons, II, 107, 113.
  Monnoies (Fabrique des nouvelles), II, 244.
  Montres à vendre, II, 322, 361.
  Morrhues, I, 295.
  Mouches, II, 76.
  Moulin à blé à vendre, II, 324.
  Moutons, I, 291.
  Mulets, I, 264.
  Musettes, I, 212.
  Musique, I, 204.

N.

  Nombre d’or, II, 210.
  Nomenclateurs, I, vj, 7.
  Nourrices, II, 49.
  Nourriture, I, 289.

O.

  Œufs, I, 296.
  Officialité, I, 16, 18, 21.
  Officiers nouveaux, Metteurs à bord et gardes bateaux, I, 111.
  Olives, I, 303.
  Omissions et changements, I, 79.
  Opérations chirurgicales, I, 157 et II, 68.
  Opérateurs pour la pierre, la cataracte, les dents, I, 160.
  Orlogeurs, II, 73, 349, 361.
  Oranges, I, 302.
  Ordonnances (Nouvelles), I, 186.
  Orgues, I, 205, 206; II, 316.
  Orvietan, I, 169.
  Ouvrages exquis de peinture et de sculpture, II, 92.
  Ouvrages et bois de Menuiserie, II, 121.
  Ouvrages et fournitures de Charpente, II, 115.
  Ouvrages et fournitures de Couvreurs, II, 118.
  Ouvrages d’or, d’argent, de pierreries, de perles, etc. (Commerce
    des), I, 244.

P.
  Panneterie et Patisserie, I, 304.
  Paniers à fruits, I, 301.
  Papetiers (Marchandises de), II, 26.
  Parfumeurs (Marchandises des), II, 31.
  Parlement, I, 86.
  Parties casuelles, I, 38, 108.
  Pastel, II, 99.
  Patissiers, I, 300, 304.
  Paveurs (Ouvrage des), II, 157.
  Peaux pour les chapeliers, II, 38.
  -- pour les foureurs, II, 38.
  Peaux de mouton en chamois, II, 36.
  -- de chagrin, II, 37.
  Peintures, sculptures, dorures, II, 144.
  Peintres, II, 178; ouvrages de peinture, II, 92, 144.
  Pelleterie et fourrure, II, 35.
  Penitencier (grand), I, 17.
  Pendules à vendre, II, 349.
  Pension pour les malades, I, 178.
  Pensions et répétitions pour les écoliers, I, 138, 249.
  Perles, I, 248; II, 319, 322, 361.
  Perruques, I, xxxiij; II, 40.
  Philosophes, I, 123.
  Pieds de porc à la Sainte-Menehould, I, 294.
  Pierre (qualité et coupe de la), II, 111, 114, 115.
  Pierreries, I, 247.
  Pigeons, I, 273.
  Pistaches, I, 304.
  Placages (meubles  de), I, 286.
  Plâtre, II, 105.
  Plomb en balles et grains, II, 46.
  Plomberies (Ouvrages de), II, 155.
  Planches de Bateaux, I, 121, 122.
  Plumes d’acier, II, 76.
  Points, II, 17.
  Poissons, I, 294, 295.
  Police, I, 186.
  Portraits en cire, II, 69.
  Porcelaines, I, 239 et II, 42.
  Porcs, I, 292.
  Poteries, Carrelage, Vuidange, II, 158.
  Poulmoniques (Conserve et liqueur pour les), I, 170.
  Précisions chronologiques et historiques des temps, II, 209.
  Prévôté de l’Hôtel du Roy et de la Ville, I, 74.
  Prévôt des Marchands, I, 75.
  Prieur médecin, I, lv, 157.
  Prisonniers (pauvres), I, 24.
  Privilégiez, Privileges à vendre, II, 77.
  Prix des Ouvrages de Maçonnerie, II, 105.
  -- de Charpente, II, 116.
  -- de Menuiserie, II, 122.
  -- de Couvreurs, II, 119.
  -- des marchandises de fer, II, 131.
  -- des Glaces, II, 143.
  -- des Pavés, II, 157, 158.
  -- des Ouvrages de Sculpture, peinture et dorure, II, 146.
  -- des Plombs, II, 156.
  -- des Nattes et Frottages, II, 156, 160.
  -- des Vitres, II, 138, 139, 140.
  Proxenètes (courtiers antiques), I, vij, viij.

Q.

  Quincailliers, II, 25.

R.

  Rabats, II, 73.
  Recommanderesses, I, x; II, 49.
  Recueil de vers, II, 325.
  Remarques sur la durée des jours et des nuits, II, 242.
  -- sur les systèmes du monde, II, 203.
  Remèdes pour les chevaux, I, 69.
  Remèdes du Roi, I, 170.
  Rentes  de l’Hôtel de Ville, I, 42.
  Répétitions pour les écoliers, I, 138, 249.
  Requestes de l’Hôtel du Roy, I, 78.
  -- du Palais, I, 78.
  Rocfort, fromage, I, 299.
  Roulliers et charrettes de routes, II, 174.
  Rubans, II, 20.

S.

  Sable, II, 157.
  Sages femmes jurées, II, 69.
  Saignée, I, 159.
  Savons, II, 7, 33.
  Savoyards, II, 21.
  Science des Temps, II, 205.
  Sculpteurs, II, 92, 145.
  Sculpture (Ouvrages de), II, 145.
  Séances des Tribunaux, I, 78.
  Secret pour guérir le _Miserere_, II, 324.
  Secrétaires du Roy, I, 54.
  Secrétaires et Greffiers, I, 93.
  Sel policreste, I, 169.
  Sergens, I, 100.
  Seringues, II, 77.
  Sermons, I, 200, 201.
  Serrures, II, 136.
  Servantes, I, x; II, 49.
  Sirop de vanille, I, 177.
  -- de thé, febrifuge, I, 177.
  Soies, II, 9.
  Souliers, II, 67.
  Squelettes, II, 77.
  Sucres, II, 6.
  Suif, II, 8.
  Supputation des Epoques, II, 210.
  Systêmes du monde, II, 203.

T.

  Table de Marbre (juridiction de la), I, 78.
  Tableaux, I, 239.
  Tableaux à vendre, II, 360.
  Tablettes à vendre, II, 359.
  Tablettes d’Alary, I, 177.
  Tablettes de poche, I, 243.
  Taillandiers, II, 47.
  Tailleurs, II, 59, 60, 61.
  Tambours, I, 263.
  Tamis, II, 77.
  Tapisseries à vendre, II, 314, 336, 350, 361.
  Tapissiers fripiers, I, 287; II, 326.
  Tapisseries et Meubles ordinaires, I, 283.
  Tapisseries de cuir doré, I, 286.
  -- d’Auvergne, II, 340.
  -- de la Savonnerie, II, 320, 326.
  -- de Flandres, I, 283.
  -- de Beauvais, I, 283.
  -- d’Aubusson, I, 283.
  -- de Bergame et de Rouen, I, 284.
  Tarif des nouvelles monnoyes, II, 244.
  Temporalité, I, 79.
  Tentes et pavillons de guerre, I, 262.
  Tentures de haute lice, I, 283; II, 315.
  Terre cizellée, I, 240.
  Théorbes, I, 210; II, 326.
  Terres, fiefs et seigneuries à vendre, II, 337, 338, 349, 360, 363,
    367.
  Thériaque de Rouvière, I, 167.
  Thermomètres, I, 242.
  Tireurs d’or, II, 46.
  Toiles cirées, II, 76.
  Tontine, I, 44.
  Tourneurs, II, 51, 103-104.
  Traiteurs, I, 314, 315, 319.
  Treillis d’Allemagne, II, 13.
  Trésor des Almanachs, II, 193.
  Trésor d’Esculape, II, 177.
  Trésor Royal (Gardes du), I, 28.
  Trésoriers, I, 38, 53.
  Tribunaux, I, 78.
  Triquetracts, I, 274.
  Trompettes et timbales, I, 215; II, 73.
  Truffles, II, 71.
  Tuiles, II, 119.
  Tuyaux de tolle de fer à brûler du bois sans fumée, II, 76.

V.

  Vacations des Tribunaux, I, 86.
  Vaches de Roussy, II, 37, 38.
  Volailles, I, 292.
  Vapeurs, I, 171; II, 79.
  Veaux, I, 291.
  Verre (Vitriers), II, 44, 138.
  Verrerie (Commerce des Verriers), II, 41.
  Vérifications et rapports de jurez, II, 52.
  Vins de liqueurs, I, 301.
  Vins (Marchandises et aprest de), I, 309 et II, 318, 324.
  Violle et Viollon, I, 209, 210 et II, 317.
  Vieux papiers et parchemins, II, 28.
  Vitriers (Ouvrage des), II, 138.
  Voyer, I, 109.

Y.

  Yeux artificiels, II, 75.




TABLE DU TOME PREMIER


  Introduction                                                         v
  Le _livre commode_ contenant les adresses de la ville de Paris       1
  Table générale des articles                                        323
  Table alphabétique des matières contenues dans les deux volumes    325




NOTE DU TRANSCRIPTEUR


L’orthographe est conforme à l’original.

On a recopié, dans cette transcription du tome premier, la partie
correspondante de la table des articles, ainsi que l’index alphabétique,
qui figurent dans le tome II de l’original. On a également ajouté une
table pour le présent tome, sur le modèle de celle du tome II (en
reprenant les libellés des éléments recopiés, et en extrapolant les
numéros de page).






*** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK LE LIVRE COMMODE DES ADRESSES DE PARIS POUR 1692, TOME 1/2 ***


    

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