The Project Gutenberg EBook of Paternité, by Max du Veuzit This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: Paternité Author: Max du Veuzit Release Date: December 25, 2008 [EBook #27626] Language: French *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PATERNITÉ *** Produced by Daniel Fromont [Transcriber's note: Max du Veuzit (pseudonyme d'Alphonsine Vavasseur-Acher Mme François Simonet) (1876-1952), Paternité (1912)] Max du VEUZIT PATERNITE COMEDIE EN UN ACTE Représentée pour la première fois au GRAND THEATRE DU HAVRE PARIS C. JOUBERT, Editeur, 25 rue d'Hauteville Répertoire de la Société Dramatique Tous droits de traduction,de reproduction et de représentation réservés pour tous pays y compris la Suède, la Norvège et le Danemark Copyright By. Joubert 1912. Extraits de presse : "...L'auteur vise aussi une autre thèse--et cette idée est haute et noble en soi par sa justice et sa générosité. Elle défend ardemment la cause qui veut que les enfants soient moins étroitement liés par les liens du sang que par ceux qu'ont formés entre eux et leurs éducateurs, les témoignages répétés d'affectueuse confiance et de tendresse éprouvée. Cette pièce n'est pas sans valeur. Une âme féminine y flotte, délicate et sensible. Elle y a mis le meilleur de son sentiment ému." (Albert HERRENSCHMIDT, Petit Havre) "...Max du Veuzit ainsi qu'il l'avait déjà fait dans C'est la loi!... met la loi en contradiction avec les sentiments et les situations de tous les jours." (Georges RIMAY, Cloche illustrée) Paternité Pièce en un acte PERSONNAGES: LUCIENNE VILLERS... 16 ans. JULIA... MAURICE VILLERS, père de Lucienne... 48 ans. PAUL ROMAGNY, beau-père de Lucienne... 45 ans. La scène représente un salon de gens riches: fauteuils, guéridon, bureau; au premier plan, à gauche, un canapé. Porte à droite; double porte au fond. Beaucoup de fleurs partout. Un grand portrait de femme au mur. Sur le guéridon, un écrin vide; sur le bureau un encrier. Au lever du rideau, Lucienne brode silencieusement, assise sur le canapé, sa corbeille à ouvrage auprès d'elle. SCENE PREMIERE LUCIENNE, JULIA JULIA, entrant, un bouquet de roses rouges dans les bras. Mademoiselle doit être contente. Ce ne sont pas les fleurs qui lui manquent! Depuis le matin, il en arrive à chaque instant. LUCIENNE, cessant de broder On en a encore apporté? JULIA A la minute, ce gros bouquet! LUCIENNE, se levant Oh, mais il est joli! Qui l'envoie? JULIA C'est une commissionnaire qui me l'a remis... Il y a une carte. LUCIENNE Ah!... voyons... (elle cherche dans les fleurs). Voici. (lisant) Monsieur Fernand Desmoulins. (joyeuse) Oh! JULIA Monsieur Desmoulins ne pouvait pas oublier mademoiselle. LUCIENNE Naturellement... un ami d'enfance! (prenant le bouquet). Elles sont jolies ces fleurs. JULIA Des roses rouges, c'est significatif! LUCIENNE Significatif? JULIA Dame!... le langage des fleurs... LUCIENNE Tu connais ça, toi? JULIA Un peu. LUCIENNE Alors... des roses rouges... ça veut dire? JULIA Que mademoiselle me pardonne... ça veut dire: violent amour. LUCIENNE Bah! (elle rit) ah! ah!... quelle idée! (rendant les fleurs à Julia). Tiens, mets ces fleurs dans l'eau. JULIA Bien (elle va à la porte. Se retournant). Faut-il les laisser aussi dans le salon, celles-là? LUCIENNE Non, non!... Porte-les dans ma chambre. JULIA, riant Ah! ah! Mademoiselle voit bien. (Elle se sauve). SCENE II LUCIENNE, puis PAUL ROMAGNY LUCIENNE Quelle sotte! Elle s'imagine... Il est vrai qu'il n'est pas marié, monsieur Fernand... et très joli garçon!... On jouait au petit mari et à la petite femme autrefois! (Elle sourit, prend la carte et l'examine). J'aimerais m'appeler madame Fernand Desmoulins... ça m'irait très bien ce nom-là!... Oui, mais voilà: je suis jeune... trop jeune! Ses parents ne voudraient pas... Bah! attendons! ROMAGNY, entrant Eh bien, fillette, es-tu contente? LUCIENNE Si je suis contente! (lui sautant au cou) Oh, papa, comme tu es gentil! ROMAGNY Alors, mon cadeau t'a fait plaisir? LUCIENNE Mais beaucoup, beaucoup!... Quand j'ai ouvert l'écrin, j'ai poussé un cri de joie... Tiens, vois... (elle montre un bracelet autour de son bras) Je l'ai mis tout de suite... (gravement) pour aujourd'hui seulement... Je sais bien, nous sommes en deuil (elle regarde le portrait) Pauvre maman!... (un temps). Mais j'étais si heureuse, j'ai voulu l'essayer. Il est joli, hein? Il fait très bien... C'est le premier bijou sérieux que tu me donnes... Il faut que je t'embrasse encore. (elle l'embrasse) Mon papa chéri! ROMAGNY, rendant le baiser Ma petite fille! (il s'asseoit sur le canapé). LUCIENNE Maintenant, je vais le retirer et le serrer précieusement avec les bijoux de maman... dans son coffret (elle défait le bracelet et le serre dans l'écrin). J'ai déjà beaucoup de choses, tu sais! Vous m'avez toujours très gâtée, tous les deux. ROMAGNY, tristement Elle t'aimait tant ta pauvre maman! LUCIENNE, émue Oui, elle m'aimait... elle était si bonne et si douce! (après un silence très triste, elle se penche vers Romagny). Il ne faut pas pleurer, papa... sois moins triste... surtout aujourd'hui... (un temps). Voyons, fais risette à ta petite Lucienne... une grosse risette... (Romagny sourit) Là!... Oh! mon papa chéri, comme je t'aime! (câlinement) Tu m'aimes bien aussi, toi, dis? ROMAGNY Mais, oui, je t'aime, ma fillette... Et pourtant!... LUCIENNE Comment, tu m'aimes et pourtant! il faut m'aimer tout court, moi!... vilain papa qui dit des choses... (elle l'examine et change de voix brusquement). Mais qu'est-ce que tu as?... Pourquoi me regardes-tu ainsi? Qu'est-ce qu'il y a? ROMAGNY Rien. LUCIENNE Mais si... je vois bien, je te connais tant! Tu es soucieux? ROMAGNY Eh bien, oui!... J'ai des ennuis. LUCIENNE Tu as des ennuis!... dans tes affaires!... ROMAGNY Non, malheureusement... Si c'était une perte d'argent, je ne me tracasserais pas tant[.] LUCIENNE C'est autre chose de plus pénible? ROMAGNY Oui... C'est à cause de toi. LUCIENNE De moi! Comment cela? (Elle s'asseoit auprès de lui). ROMAGNY Maurice Villers m'a écrit ce matin. LUCIENNE Mon père? ROMAGNY Oui, ton père. LUCIENNE Qu'est-ce qu'il veut? ROMAGNY Il dit que maintenant, ta mère étant morte, il tient à t'avoir auprès de lui. LUCIENNE Ce n'est pas possible! ROMAGNY Si, malheureusement. LUCIENNE Mais alors, toi, papa? ROMAGNY Moi, je ne suis que ton beau-père, le second mari de ta mère après son divorce avec Maurice Villers... Et voilà bien ce qui me tracasse: je t'ai élevée, aimée, vue grandir; j'ai vécu de ta vie depuis treize ans!... et aujourd'hui, je ne suis rien... L'autre peut t'enlever à moi quand il voudra. LUCIENNE Comment? Il peut! Il a le droit! ROMAGNY Il est ton père, ton vrai père, il a la loi pour lui... les enfants appartiennent au père. LUCIENNE Pourtant lorsque maman vivait? ROMAGNY Il n'usait pas de ses droits... par délicatesse envers ta mère, dit-il... peut-être aussi parce qu'il était toujours absent de Paris. Je ne crois pas d'ailleurs qu'il eût pu se charger de ton éducation... Il n'est pas riche!... De mauvaises spéculations... un caractère un peu léger, volage... des goûts trop dispendieux... Enfin, il s'est ruiné très jeune. LUCIENNE Et j'aurais été une lourde charge pour lui jusqu'ici? ROMAGNY Oui, je crois. LUCIENNE, se levant brusquement Ah, je devine! Il t'a laissé le soin de mon entretien, de mon éducation et maintenant que je suis élevée, que tu as payé tous les frais, il vient te dire: rendez-moi ma fille! ROMAGNY Je n'ai pas dit... LUCIENNE J'ai compris, va! ROMAGNY Non, vraiment, je ne puis croire... d'un père... LUCIENNE Comment expliquer autrement son silence jusqu'à ce jour? (Un temps. Changeant de ton) Il veut me reprendre! oh! cela ne sera pas! Il faut lutter, me refuser à lui... Il ne faut pas que tu consentes. ROMAGNY S'il veut te prendre, je n'ai pas le pouvoir de l'en empêcher... Je ne suis rien, moi! LUCIENNE Mais c'est abominable, cela! (Elle éclate en sanglots). Je ne veux pas aller avec lui! Je ne veux pas te quitter, moi, papa. ROMAGNY, l'attirant contre lui Ma petite Lucienne... Voyons, ma chérie, ne pleure pas... Il faut être bien raisonnable, bien forte, pour ne pas m'enlever mon courage... Et puis, le dernier mot n'est pas dit. Tu penses bien que je ne vais pas te laisser partir comme cela. Je vais le prier, le convaincre, essayer de tous les moyens. LUCIENNE Oh, oui! tu vas l'empêcher, n'est-ce pas... Il ne faut pas qu'il me prenne. Qu'est-ce que je ferais sans toi? j'ai l'habitude... je te dis tout... je me sens vivre à tes côtés. Auprès de lui, je serais toute seule, je le connais à peine: je ne l'ai vu que deux fois à la pension!... Je n'oserais même pas lui parler de maman!... Aucun souvenir qui nous lierait, aucune douleur commune qui nous rapprocherait... ce serait atroce! ROMAGNY Pour moi aussi ce serait dur! Pourtant, si le sacrifice de mes sentiments devait assurer ton bonheur, je le ferais volontiers... J'accepterais tout pour que tu sois heureuse! Mais voilà: le seras-tu seulement ensuite? LUCIENNE Non, non. Je ne puis être heureuse loin de toi... Pour moi, tu es mon vrai papa; celui que toute petite, on m'a appris à aimer et à respecter; celui qui m'a toujours entourée de soins et comblée de caresses... Te quitter! Ne plus te voir! oh, comme je m'ennuierais!... (un temps). Ecoute, tu lui diras que je veux rester ici, que maman m'a confiée à toi et qu'elle m'a recommandé de t'aimer toujours comme un père. ROMAGNY Pauvre femme!... Elle ne se doutait guère que sa mort ferait changer si vite d'attitude Monsieur Villers... Trois mois seulement, qu'elle n'est plus là et déjà il te réclame. LUCIENNE Oui, mais tu vas lui écrire... ROMAGNY Il va venir lui-même chercher ma réponse. LUCIENNE Ici? ROMAGNY Oui! LUCIENNE Quand? ROMAGNY Aujourd'hui... cet après-midi à trois heures. LUCIENNE Déjà! ROMAGNY C'est pourquoi je t'en ai parlé si tôt. Je n'avais pas le temps de différer. LUCIENNE Trois heures! mais, alors, c'est tout de suite! ROMAGNY, consultant sa montre L'heure approche effectivement. LUCIENNE Il nous donne à peine le temps de réfléchir... C'est ce matin que tu as reçu sa lettre? ROMAGNY Oui. (Il cherche dans sa poche). Tiens, la voici. Lis-la. (Il lui donne la lettre). LUCIENNE, lisant "Monsieur, "Je désire reprendre ma fille auprès de moi. Sa mère est morte depuis trois mois. D'un autre côté, je compte me fixer définitivement à Paris; rien ne m'oblige donc plus à vivre séparé de mon enfant. Je me présenterai chez vous, demain mardi, vers trois heures. "Veuillez agréer, etc." ROMAGNY Il ne tergiverse pas. LUCIENNE Non, c'est net! ROMAGNY Il ne semble pas admettre la possibilité que je te dispute à lui. LUCIENNE Il est fort de ses droits. ROMAGNY Je serai fort de ma tendresse, moi! LUCIENNE Et aussi de la mienne... de mon désir de ne pas te quitter. Ma volonté doit bien compter pour quelque chose... Il faut le lui dire! ROMAGNY Oui, oui! je lui dirai tout ça... et encore autre chose! Depuis ce matin, je me suis renseigné... je crois savoir à présent quelle musique il faut chanter pour plaire à ses oreilles... J'userai de tous les moyens, sois tranquille! Je ne me rendrai pas facilement. LUCIENNE C'est ça! ne cédons pas! (Elle écoute) On a sonné, je crois. ROMAGNY Serait-ce déjà lui... il est trois heures, c'est le moment. (La bonne entre). SCENE III LES MEMES, JULIA JULIA, entrant Monsieur... c'est un Monsieur. ROMAGNY Il a donné son nom? JULIA Non, mais il m'a dit que Monsieur devait l'attendre. ROMAGNY Bon! Faites entrer... (Julia sort. -- A Lucienne). Et toi, ma fillette, éloigne-toi. LUCIENNE Comme je vais être inquiète!... Tu me diras... ROMAGNY Je t'appellerai aussitôt. LUCIENNE Refuse surtout! ROMAGNY Oui, oui, Va! (Elle sort emportant sa corbeille à ouvrage). SCENE IV ROMAGNY, puis MAURICE VILLERS ROMAGNY Pauvre petite! Jamais je ne pourrai me séparer d'elle... JULIA, à la cantonade Oui, oui, Monsieur est seul. ROMAGNY, se tournant vers la porte Le voici. VILLERS, entrant Monsieur. ROMAGNY, s'inclinant Monsieur. VILLERS C'est à Monsieur Paul Romagny que j'ai l'honneur de parler. ROMAGNY A lui-même... Monsieur Mauriec Villers sans doute? VILLERS Oui, monsieur... ROMAGNY, désignant un siège Veuillez vous asseoir, je vous prie. VILLERS Merci. Vous avez reçu ma lettre? ROMAGNY Oui, ce matin... je vous attendais. VILLERS Alors, vous savez... ROMAGNY Quelle est votre intention? Parfaitement. VILLERS Je veux reprendre ma fille auprès de moi. ROMAGNY Vous me l'avez écrit, mais... VILLERS C'est mon plus vif désir. ROMAGNY J'ai cru le comprendre. Cependant, j'avoue que ce désir si vite exprimé m'a un peu surpris. VILLERS, simplement Pourquoi? C'est tout naturel que je reprenne ma fille puisque sa mère est morte... Je dois même m'excuser auprès de vous d'avoir attendu jusqu'à ce jour pour régler la situation... J'étais loin, il y a trois mois... en Egypte. Je n'ai appris la mort de madame Romagny que six semaines après l'événement. Je me suis mis en route aussitôt et me voici... Je suis à Paris depuis deux jours seulement. Pardonnez-moi donc ce retard absolument involontaire. ROMAGNY Oh, monsieur! VILLERS Vous aviez peut-être pensé que je me désintéressais du sort de Lucienne? ROMAGNY Je n'ai pas supposé un instant... VILLERS Le doute était possible. Mon silence, mon absence permettaient toutes les suppositions... Enfin me voici! Il me reste à vous remercier d'avoir bien voulu garder ma fille jusqu'à ce jour. ROMAGNY Ne me remerciez pas! Je considère Lucienne comme ma propre fille. Ici, auprès de moi, elle est chez elle, et elle peut y rester aussi longtemps qu'il lui plaira. VILLERS, un peu embarrassé Je suis vivement touché, monsieur... ROMAGNY, un temps. Changeant de ton Ainsi vous comptez la reprendre? Votre intention est bien arrêtée. VILLERS Sans doute... C'est tout indiqué! Tant que la mère a vécu, par délicatesse, pour racheter quelques-uns des torts que j'ai eus vis-à-vis d'elle, j'ai pu accepter de vivre complètement séparé de mon enfant. Mais à présent, rien ne s'oppose plus à ce que je goûte enfin, aux joies de la paternité. ROMAGNY Je comprends vos sentiments. Pourtant, avez-vous réfléchi aux difficultés que votre décision allait soulever? VILLERS, surpris Quelles difficultés? ROMAGNY Lucienne ne vous connaît pas. VILLERS Elle apprendra à me connaître et j'espère à m'aimer. ROMAGNY A son âge, un nouveau visage... VILLERS Elle n'est plus une enfant: elle prend seize ans aujourd'hui. (Gaiement). Je ne pense pas qu'elle voit en moi un croquemitaine disposé à la dévorer. ROMAGNY, hochant la tête Elle a ses habitudes: ce changement va bouleverser sa vie. VILLERS, un peu étonné Mon Dieu, je ne vois pas. Elle va être comme tous les enfants élevés loin de leurs parents. A un certain âge, on les retire de pension. Je n'ai jamais entendu dire qu'aucun d'eux ait souffert de ce changement d'habitudes. ROMAGNY, arpentant la scène Ce n'est pas tout à fait la même chose. Il ne s'agit pas pour elle de quitter une pension étroite où l'on étouffe entre les murs... C'est le foyer où elle a été élevée, où elle a grandi, c'est la vie large et facile qu'elle y a trouvée, qu'il lui faudra abandonner... Pardonnez-moi d'entrer dans ces détails, mais vous devez comprendre... le bonheur de Lucienne m'oblige à toucher certaines questions... VILLERS N'insistez pas, j'ai compris! Vous voulez parler de ma situation modeste relativement à la vôtre. ROMAGNY Justement. VILLERS Je n'ai jamais fait l'injure à ma fille de croire qu'elle pouvait rougir de se trouver chez son père dans une position plus précaire que celle où elle a vécu jusqu'ici. ROMAGNY, vivement Vous m'avez mal compris. Loin de moi, l'idée d'une pareille insinuation. Lucienne est trop droite, trop bonne et trop fière pour ressentir un sentiment aussi bas. VILLERS Je l'espère bien. ROMAGNY En évoquant ce sujet, c'était à vous, à vos sentiments paternels que je faisais appel... Avant votre propre satisfaction, vous cherchez surtout le bonheur de votre fille? VILLERS Sans doute. ROMAGNY Or, la richesse ne le donne pas toujours mais elle est tout au moins un puissant auxiliaire. VILLERS Ce qui veut dire? ROMAGNY, appuyant Que tant que Lucienne vivra au près de moi, sa situation, son avenir, seront complètement assurés. (Après un temps, changeant de ton) Votre intention est de la reprendre. Vous voulez qu'elle vive à vos côtés, qu'elle partage votre existence, mais avez-vous réfléchi à toutes les conséquences, aux devoirs, aux charges que vous assumiez du même coup? En un mot, pouvez-vous lui donner une situation équivalente à celle que vous allez lui faire perdre. VILLERS, froissé Monsieur, cette insistance... ROMAGNY, vivement Serait très indiscrète et très maladroite s'il ne s'agissait pas du bonheur de Lucienne. (S'excusant). Avant de commencer, je vous ai prié de m'excuser si je touchais certains sujets... Il faut bien que nous envisagions la question sous toutes ses faces... (Le priant). C'est moi qui ai élevé l'enfant, vous ne pouvez me refuser aujourd'hui le droit de savoir ce qu'elle va devenir? VILLERS Soit... Je comprends les sentiments qui vous guident et je veux bien y faire droit. ROMAGNY Eh bien? VILLERS Rassurez-vous! ma fille peut me suivre sans inquiétude. Je ne la reprends pas pour la voir souffrir ni pour la rendre malheureuse et j'espère qu'auprès de moi, elle continuera d'ignorer la gêne. ROMAGNY Comment ferez-vous? Vous êtes sans fortune. VILLERS, un peu gêné Mais pas complètement... j'ai des ressources. ROMAGNY Aucune. Inutile de chercher... Je me suis renseigné et je sais quelle est exactement votre situation... Vous comptiez beaucoup sur vos chemins de fer égyptiens. Mais vous avez été trompé, volé plutôt, comme vous avez pu vous en rendre compte, vous-même, en allant là-bas... Pour sauver votre signature de certaines promiscuités, vous avez dû sacrifier tout ce qui vous restait. Vos terres de Blagny elles-mêmes, sont hypothéquées pour une somme supérieure à leur réelle valeur. VILLERS, amèrement Vous êtes bien renseigné! ROMAGNY C'est pourquoi je m'étonne que vous cherchiez à reprendre Lucienne... Le moment pour vous est plutôt mal choisi. VILLERS Ce n'est pas moi qui ai dirigé les événements... Je regrette que la mort de madame Romagny corresponde avec les pertes d'argent que je viens de subir, mais mes droits et mes devoirs de père n'en sont pas diminués pour ça. (Un temps. Doucement) A mes côtés, ma fille ne manquera de rien. Je me priverai plutôt du nécessaire pour satisfaire tous ses désirs. ROMAGNY Mais son avenir? Avez-vous réfléchi à son avenir. VILLERS Son avenir? je l'assurerai. ROMAGNY Comment? VILLERS Par mon travail. ROMAGNY, haussant les épaules Travailler! A votre âge! Vous n'avez jamais rien fait! VILLERS Parce que ma vie n'avait pas de but, parce que j'étais seul monde jusqu'ici. (Avec feu) Ah, vous vous étonnez que je veuille reprendre mon enfant alors que dans ma situation, mes sentiments paternels sont presque un luxe! Mais ne comprenez-vous donc pas que c'est justement parce que je suis malheureux qu'il me faut Lucienne. Elle sera ma richesse comme elle sera tout mon courage et tout mon espoir!... Travailler pour moi seul? oui, vous avez raison, j'en suis incapable. (Avec force) Mais travailler pour elle, pour la rendre heureuse, pour assurer son avenir! Ah, cela c'est autre chose!... Elle sera ma force, mon but, le talisman qui me donnera le courage de persévérer et de vaincre, l'aimant qui me guidera vers le succès final. ROAGNY Prenez garde de ne trop vous illusionner. Vous courez après un mirage, car ce gain que vous envisagez, cette richesse future que vous espérez sont tellement problématiques!... Dans toutes les entreprises on escompte toujours la réussite: il serait beaucoup plus sage de prévoir le contraire. VILLERS, un peu ironique Alors, vous pouvez tout aussi bien redouter pour vous la ruine matérielle. ROMAGNY, souriant Mes chances de misère sont moins grandes que vos chances d'insuccès. La situation que je ferai à Lucienne si elle reste avec moi, est moins aléatoire que celle que vous comptez lui donner, voyons? VILLERS J'en conviens. ROMAGNY, changeant de ton Tenez... jouons franchement, cartes sur table. (Un temps) Vous ne connaissez pas Lucienne... ou si peu! Vous voulez la reprendre parce que, surtout, vous espérez puiser à ses côtés, le courage qui vous manque pour recommencer tout seul votre vie... (Avec une émotion grandissante) Moi, j'ai élevé l'enfant, je l'ai vue grandir, pendant treize ans, j'ai vécu de sa vie, formant son intelligence et pétrissant son coeur. Je l'aime autant que si elle était vraiment ma fille. La pensée de la perdre me cause un déchirement profond. Ce m'est atroce de songer que je puis cesser de la voir... Je ne sais si vous comprenez tout mon affolement. Vous avez vécu seul, vous ignorez ce que c'est que d'avoir toujours eu un être chéri auprès de soi... Mais moi!... (il regarde le portrait tristement) En trois mois, perdre la mère, perdre l'enfant... C'est ma vie complètement brisée. VILLERS, gêné du désespoir qu'il cause Vous saviez bien que Lucienne n'était pas réellement votre fille... vous n'ignoriez pas mon existence... ce qui arrive aujourd'hui était prévu. ROMAGNY, même air Non, je n'avais pas prévu!... Votre long silence... vous vous êtes si peu occupé de Lucienne jusque-là... J'avais fini par vous oublier... (Un temps. S'animant) Mais, voyons! il doit y avoir un moyen... Je suis riche, très riche! Outre le bonheur de votre fille, je puis aussi faire le vôtre... Votre fortune est compromise, je puis vous fournir les moyens de la rétablir et vous assurer une nouvelle existence sans soucis matériels. VILLERS, sans comprendre M'assurer une nouvelle existence? ROMAGNY, fébrilement Oui, vous faire riche, tout de suite... un chèque... cent mille francs! Deux cent mille francs, tenez! Avec cette somme, vous payez vos créanciers et vous vous remettez à flot. C'est la vie large et facile, à la minute même, comprenez bien!... C'est plus sûr que votre travail cela! (Il va à son bureau, prend un carnet de chèques dans un tiroir et vivement, en griffonne une page). Vous acceptez, n'est-ce pas?... (Villers le regarde agir sans répondre) Deux cent mille francs. Il vous faudrait plusieurs années pour gagner cette somme en admettant que vous réussissiez... (cessant d'écrire) Tenez, c'est fait!... (Il revient vers Villers) Vous n'avez plus qu'à me signer un reçu... Lisez... (Villers lit, puis fixe longuement Romagny). VILLERS, très calme Vous voulez?... Quoi?... ROMAGNY, nettement Je veux garder Lucienne. VILLERS Et moi? ROMAGNY, avec brusquerie Vous aurez les deux cent mille francs, vous! C'est bien payé, il me semble! VILLERS, secoue lentement la tête, puis dépose le chèque sur le guéridon. Simplement. Votre chagrin vous égare, monsieur; autrement, je m'expliquerais mal votre offre injurieuse. ROMAGNY, décontenancé Vous refuser?... Comment!... C'est la fortune que je vous donne. VILLERS, sourire hautain Je ne vous demande que ma fille. ROMAGNY, suppliant Mais puisque pour moi, elle est tout... que vous ne la connaissez pas, vous! VILLERS Je n'en suis pas moins son père. ROMAGNY, s'énervant Vous ne l'aimez pas comme moi! VILLERS, vivement Qu'est-ce qui vous fait croire que je n'aime pas mon enfant? ROMAGNY, même ton Votre indifférence depuis treize ans. VILLERS, calme Je vous ai déjà donné les motifs qui ont dicté ma conduite jusqu'à ce jour. Faut-il vous les répéter? ROMAGNY, avec rage Comment vous croire, avec la vie que vous avez toujours menée! VILLERS, froidement Je pourrais vous répondre, monsieur, que ma conduite passée ne regarde que moi. Mais tout à l'heure, comme beau-père de Lucienne, je vous ai reconnu certains droits. Je prendrai donc la peine, sinon de me disculper, du moins de remettre les choses au point. (S'échauffant) Parce que j'ai mené jusqu'ici une vie joyeuse de plaisirs, de fêtes, d'aventures, parce qu'en un mot, j'ai fait la noce, pour me servir de l'expression courante, s'ensuit-il que je sois incapable de ressentir les mêmes sentiments qu'un autre mortel plus sage et plus calme que moi?... d'après vous, le rire exclurait les larmes, le bonheur ignorerait l'inquiétude et les soirs de folies ne seraient jamais suivis d'amertumes matinales! A l'homme rangé, seulement, les sensations du coeur et le pouvoir d'aimer; aux autres, la froideur, la sécheresse et l'indifférence, alors!!... (plus doucement) Non, l'humanité n'est pas si compliquée que ça: elle pleure quand elle souffre, elle rit quand elle est heureuse. Dans tous les coeurs, il y a place pour ces deux sentiments: la joie et la tristesse, qu'on soit léger, volage, sérieux ou grave. (Un temps. Il réfléchit, puis a un rire nerveux) Ah! ah! j'ignore ce que c'est que d'avoir eu toujours un être chéri auprès de moi! Mais vous, monsieur, avez-vous connu la tristesse de la solitude? ROMAGNY, amèrement Je vais l'apprendre si vous m'enlevez Lucienne. VILLERS Vous ignorerez quand même l'intime et indicible mélancolie de ceux dont le foyer a été brisé par leur faute, de ceux qui, après avoir connu les joies de la famille, sentent le vide de l'abandon moral autour d'eux... (Avec ironie et avec tristesse) On est jeune et le plus souvent orgueilleux; on ne veut pas avouer sa souffrance, et pour la cacher ou ne pas la sentir, on rit, on joue, on fait la noce... comme moi!... La pente est dangereuse quand aucune main amie n'est là pour vous retenir... Ca va vite! On commence pour s'étourdir, pour oublier, et c'est par faiblesse qu'on continue... Mais la nature ne perd pas ses droits pour ça et le moi intérieur n'en est pas émoussé au point de rester neutre lorsqu'il s'agit de son enfant, de sa race... (Emu, à mi-voix) Sous le sourire railleur du blasé, se cache une âme qui se souvient, qui pense... et quand on a quitté le masque, de commande, que nul témoin ne nous observe, on soupire, on regrette et parfois, on pleure... (Après un temps, il reprend le chèque, le froisse légèrement, puis le rejette. Assez brusquement:) Comment avez-vous osé m'offrir de l'argent pour que j'abdique mes droits de père, pour que je renonce à la douceur d'être aimé de ma fille? ROMAGNY, embarrassé J'espérais... Je ne m'attendais pas à votre révolte paternelle... VILLERS, avec force Parce que je suis ruiné vous me supposiez capable de toutes les bassesses! ROMAGNY Non, non! ne croyez pas!... Ce n'est pas ça... (tristement) Si vous saviez combien j'aime Lucienne! Pour la conserver près de moi, il me semblait que tous les moyens étaient bons... Vous m'auriez demandé la moitié de ma fortune, je vous l'aurais donnée... (Il s'accoude la tête dans ses mains) Vous venez de m'enlever mon dernier espoir... Ne plus voir ma fille autour de moi!... après treize ans!... Pauvre petite... comme elle va pleurer... VILLERS, inquiet Lucienne va pleurer? ROMAGNY Hélas! VILLERS Sait-elle que je veux la reprendre avec moi? ROMAGNY Oui. Je le lui ai appris. VILLERS, hésitant Alors... que dit-elle? ROMAGNY Elle ne veut pas (vivement) Elle ne nous connaît pas, c'est un peu naturel. VILLERS, amèrement Je lui fais peur... A ses yeux, je suis un étranger qui veut troubler sa vie. ROMAGNY Mon Dieu!... Il ne faut pas lui en vouloir. Elle ne m'a jamais quitté, n'est-ce pas... VILLERS, réfléchissant Elle va pleurer... Je ne voulais pas la faire pleurer... Pourtant. ROMAGNY Voulez-vous la voir? VILLERS Volontiers. ROMAGNY Vous pourrez lui expliquer... VILLERS Lui expliquer?... Non! C'est vous qui lui parlerez... je préfère. ROMAGNY Qu'est-ce que je lui dirai? VILLERS Vous lui direz.. que... (Il réfléchit, puis tristement:) Tenez, vous lui direz que je la laisse libre. C'est elle qui choisira entre nous deux. ROMAGNY, joyeusement Oh, merci!... Je n'osais pas vous le demander, mais il faut bien que la volonté de la petite compte un peu pour quelque chose. (il sonne). VILLERS, soupirant Votre joie me fait pressentir ma défaite. ROMAGNY, gravement Je vous donne ma parole, monsieur, que je ne vais pas influencer Lucienne... Avant votre arrivée, je lui ai dit seulement mon vif désir de ne pas me séparer d'elle, mais le choix qu'elle va faire tout à l'heure, sera librement consenti. Je vous l'affirme. VILLERS Je vous crois. (La bonne entre). SCENE V LES MEMES, JULIA JULIA Monsieur a sonné? ROMAGNY Priez mademoiselle de venir ici. JULIA Bien, monsieur. (Elle sort). SCENE VI VILLERS, ROMAGNY, puis LUCIENNE (Jusqu'à l'arrivée de Lucienne, les deux hommes gardent le silence). VILLERS, entendant des pas La voici. (Il va s'accouder à la cheminée). ROMAGNY Oui. (Lucienne entre. Elle s'arrête gênée près de la porte après avoir salué Villers). LUCIENNE, à Romagny Vous me demandez, mon père? ROMAGNY Oui, ma chérie. Approche, là, près de moi... (Un temps. Lucienne s'avance vers lui. Lentement et avec émotion:) Je t'ai fait connaître tantôt la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui pour nous tous. Ton père désire te reprendre avec lui... Tu sais que s'il ne tenait qu'à moi, je te garderais toujours ici... mais je ne suis que ton beau-père, moi! Monsieur Villers est ton père, ton vrai père! Il t'aime et il souffre d'être séparé de toi. (Lucienne pleure silencieusement) Cependant, il ne veut pas user de ses droits pour contraindre ta volonté. Il te laisse le droit de choisir entre lui et moi... Réfléchis bien, Lucienne. La minute est grave... Tous les deux nous t'aimons vraiment, chacun pour des raisons personnelles... Mais moi, je ne suis presque rien! L'affection et l'habitude m'unissent seulement à toi... Tandis que lui! (Chaleureusement) Lui, c'est ton sang, c'est ta race, c'est l'hérédité, l'atavisme, c'est tout, quoi!... (Un temps) Eh bien? Nous attendons, Lucienne?... Que décides-tu? (Villers écoute avec angoisse). LUCIENNE, éclatant en sanglots Je ne veux pas te quitter, moi, papa! ROMAGNY, faiblement Ma petite Lucienne! Je sais bien... Mais ton père! Regarde-le... Il souffre! LUCIENNE, se serrant contre lui Je ne veux pas te quitter. Non! non! VILLERS, après un silence pénible Ne pleurez pas, Lucienne. Je ne suis pas venu vers vous pour vous faire de la peine... Votre désir est un ordre pour moi... Restez auprès de votre... père. Moi, je vais partir. ROMAGNY, se levant vivement Monsieur, je... VILLERS, l'interrompant d'un geste Non! ne vous excusez pas... J'aurais dû prévoir... C'est si naturel! (Il prend son chapeau). Adieu! (Comme il se dirige vers la porte, Lucienne a un geste pour le retenir. Un sanglot convulsif souligne son geste). ROMAGNY, bouleversé C'est terrible! (à Villers) Ne partez pas comme ça. Ce n'est pas possible!... Vous allez être très malheureux... (Il regarde le portrait et hésite) Avant, ça n'aurait pas été possible... mais aujourd'hui!... Ce n'est qu'un préjugé à vaincre... (A Villers). J'ai besoin d'un associé, soyez-le. Restez. Voulez-vous?... Notre fille aura deux pères. LUCIENNE, à travers ses larmes Oh, oui! (Elle a un élan vers Villers comme pour le supplier d'accepter). VILLERS Rester?... moi? ROMAGNY Oui: demeurez ici, avec nous. LUCIENNE Oh, oui! VILLERS Rester? Oh non! ce n'est pas possible! LUCIENNE Oh! ROMAGNY Pourquoi? VILLERS Parce que... demain... plus tard... vous regretteriez la généreuse proposition que la pitié vous arrache en ce moment. ROMAGNY Mais non! VILLERS Si. Entre nous, il y a un passé que nous ne pouvons abolir ni l'un ni l'autre et qui se dressera toujours pour nous séparer. ROMAGNY Nous avons de la volonté... VILLERS, l'interrompant Oh! il ne suffit pas de vouloir pour ne pas penser... ROMAGNY Lucienne serait là pour nous rapprocher. LUCIENNE Oui... VILLERS Au contraire, c'est sa présence qui nous rappellerait sans cesse ce que nous voudrions oublier... Ce sont ses baisers et ses caresses dont nous deviendrions jaloux... Ce sont surtout les souvenirs intimes qu'elle éveillerait en nous que nous nous reprocherions mutuellement au point d'en éprouver de la haine l'un pour l'autre. ROMAGNY Mais alors? VILLERS Je vais m'éloigner. LUCIENNE Oh! ROMAGNY L'enfant vous appartient autant... plus qu'à moi... VILLERS Non... elle est à vous surtout. ROMAGNY Mais... VILLERS Elle est à vous plus qu'à moi, oui!... Je comprends bien à présent... Je lui ai donné la vie, c'est vrai, mais c'est vous qui m'avez remplacé auprès d'elle. C'est vous qui avez assumé la tâche de l'élever. Vous avez rempli envers elle tous les devoirs que j'aurais dû accomplir... Aujourd'hui, l'enfant vous préfère à moi, c'est tout naturel... c'est son droit, c'est même son devoir... Je recueille maintenant le fruit de ma négligence et de mon indifférence... (avec force) Un homme ne devrait jamais oublier qu'il est père ni momentanément abdiquer ses droits au profit d'un autre. ROMAGNY Il y avait le divorce. VILLERS Le divorce n'est pas en cause. Le divorce sépare l'homme et la femme, le père et la mère, mais il ne diminue pas les devoirs de ceux-ci vis-à-vis de leurs enfants... leurs charges restent les mêmes... Pour l'avoir oublié ou pour ne pas y avoir pensé plus tôt, je paye cruellement aujourd'hui mon erreur... Enfin! le châtiment doit atteindre le coupable... Gardez l'enfant! C'est à moi de me priver de ses baisers et de ses caresses. LUCIENNE, à Villers Mon père. VILLERS, la regarde et va vers elle. Merci, Lucienne... merci de ce cri-là. (Il l'embrasse longuement) Adieu! (Il se dégage et sort brusquement pour cacher son émotion). LUCIENNE Oh! (Elle tombe assise sur un canapé et pleure la tête dans ses mains). ROMAGNY, l'examine un moment avec tristesse, puis à mi-voix Lucienne... (Elle le regarde, se lève, se jette dans ses bras. Le rideau tombe lentement pendant qu'elle continue de pleurer sur l'épaule de Romagny). FIN Grande Imp du Centre -- Herbin, Montluçon. End of the Project Gutenberg EBook of Paternité, by Max du Veuzit *** END OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK PATERNITÉ *** ***** This file should be named 27626-8.txt or 27626-8.zip ***** This and all associated files of various formats will be found in: https://www.gutenberg.org/2/7/6/2/27626/ Produced by Daniel Fromont Updated editions will replace the previous one--the old editions will be renamed. Creating the works from public domain print editions means that no one owns a United States copyright in these works, so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United States without permission and without paying copyright royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part of this license, apply to copying and distributing Project Gutenberg-tm electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG-tm concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you charge for the eBooks, unless you receive specific permission. If you do not charge anything for copies of this eBook, complying with the rules is very easy. You may use this eBook for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports, performances and research. They may be modified and printed and given away--you may do practically ANYTHING with public domain eBooks. Redistribution is subject to the trademark license, especially commercial redistribution. *** START: FULL LICENSE *** THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK To protect the Project Gutenberg-tm mission of promoting the free distribution of electronic works, by using or distributing this work (or any other work associated in any way with the phrase "Project Gutenberg"), you agree to comply with all the terms of the Full Project Gutenberg-tm License (available with this file or online at https://gutenberg.org/license). Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project Gutenberg-tm electronic works 1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg-tm electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to and accept all the terms of this license and intellectual property (trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all the terms of this agreement, you must cease using and return or destroy all copies of Project Gutenberg-tm electronic works in your possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a Project Gutenberg-tm electronic work and you do not agree to be bound by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph 1.E.8. 1.B. "Project Gutenberg" is a registered trademark. It may only be used on or associated in any way with an electronic work by people who agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few things that you can do with most Project Gutenberg-tm electronic works even without complying with the full terms of this agreement. See paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project Gutenberg-tm electronic works if you follow the terms of this agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg-tm electronic works. See paragraph 1.E below. 1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation ("the Foundation" or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection of Project Gutenberg-tm electronic works. Nearly all the individual works in the collection are in the public domain in the United States. If an individual work is in the public domain in the United States and you are located in the United States, we do not claim a right to prevent you from copying, distributing, performing, displaying or creating derivative works based on the work as long as all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope that you will support the Project Gutenberg-tm mission of promoting free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg-tm works in compliance with the terms of this agreement for keeping the Project Gutenberg-tm name associated with the work. You can easily comply with the terms of this agreement by keeping this work in the same format with its attached full Project Gutenberg-tm License when you share it without charge with others. 1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern what you can do with this work. Copyright laws in most countries are in a constant state of change. If you are outside the United States, check the laws of your country in addition to the terms of this agreement before downloading, copying, displaying, performing, distributing or creating derivative works based on this work or any other Project Gutenberg-tm work. The Foundation makes no representations concerning the copyright status of any work in any country outside the United States. 1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg: 1.E.1. The following sentence, with active links to, or other immediate access to, the full Project Gutenberg-tm License must appear prominently whenever any copy of a Project Gutenberg-tm work (any work on which the phrase "Project Gutenberg" appears, or with which the phrase "Project Gutenberg" is associated) is accessed, displayed, performed, viewed, copied or distributed: This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org 1.E.2. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is derived from the public domain (does not contain a notice indicating that it is posted with permission of the copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in the United States without paying any fees or charges. If you are redistributing or providing access to a work with the phrase "Project Gutenberg" associated with or appearing on the work, you must comply either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg-tm trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9. 1.E.3. If an individual Project Gutenberg-tm electronic work is posted with the permission of the copyright holder, your use and distribution must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms will be linked to the Project Gutenberg-tm License for all works posted with the permission of the copyright holder found at the beginning of this work. 1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg-tm License terms from this work, or any files containing a part of this work or any other work associated with Project Gutenberg-tm. 1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this electronic work, or any part of this electronic work, without prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with active links or immediate access to the full terms of the Project Gutenberg-tm License. 1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary, compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including any word processing or hypertext form. However, if you provide access to or distribute copies of a Project Gutenberg-tm work in a format other than "Plain Vanilla ASCII" or other format used in the official version posted on the official Project Gutenberg-tm web site (www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means of obtaining a copy upon request, of the work in its original "Plain Vanilla ASCII" or other form. Any alternate format must include the full Project Gutenberg-tm License as specified in paragraph 1.E.1. 1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying, performing, copying or distributing any Project Gutenberg-tm works unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9. 1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing access to or distributing Project Gutenberg-tm electronic works provided that - You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from the use of Project Gutenberg-tm works calculated using the method you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed to the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, but he has agreed to donate royalties under this paragraph to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid within 60 days following each date on which you prepare (or are legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty payments should be clearly marked as such and sent to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in Section 4, "Information about donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation." - You provide a full refund of any money paid by a user who notifies you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he does not agree to the terms of the full Project Gutenberg-tm License. You must require such a user to return or destroy all copies of the works possessed in a physical medium and discontinue all use of and all access to other copies of Project Gutenberg-tm works. - You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the electronic work is discovered and reported to you within 90 days of receipt of the work. - You comply with all other terms of this agreement for free distribution of Project Gutenberg-tm works. 1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project Gutenberg-tm electronic work or group of works on different terms than are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing from both the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and Michael Hart, the owner of the Project Gutenberg-tm trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below. 1.F. 1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread public domain works in creating the Project Gutenberg-tm collection. Despite these efforts, Project Gutenberg-tm electronic works, and the medium on which they may be stored, may contain "Defects," such as, but not limited to, incomplete, inaccurate or corrupt data, transcription errors, a copyright or other intellectual property infringement, a defective or damaged disk or other medium, a computer virus, or computer codes that damage or cannot be read by your equipment. 1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the "Right of Replacement or Refund" described in paragraph 1.F.3, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project Gutenberg-tm trademark, and any other party distributing a Project Gutenberg-tm electronic work under this agreement, disclaim all liability to you for damages, costs and expenses, including legal fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE PROVIDED IN PARAGRAPH F3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH DAMAGE. 1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a written explanation to the person you received the work from. If you received the work on a physical medium, you must return the medium with your written explanation. The person or entity that provided you with the defective work may elect to provide a replacement copy in lieu of a refund. If you received the work electronically, the person or entity providing it to you may choose to give you a second opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If the second copy is also defective, you may demand a refund in writing without further opportunities to fix the problem. 1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth in paragraph 1.F.3, this work is provided to you 'AS-IS' WITH NO OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTIBILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE. 1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied warranties or the exclusion or limitation of certain types of damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement violates the law of the state applicable to this agreement, the agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any provision of this agreement shall not void the remaining provisions. 1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone providing copies of Project Gutenberg-tm electronic works in accordance with this agreement, and any volunteers associated with the production, promotion and distribution of Project Gutenberg-tm electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees, that arise directly or indirectly from any of the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any Defect you cause. Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of electronic works in formats readable by the widest variety of computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need, is critical to reaching Project Gutenberg-tm's goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg-tm and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation web page at https://www.pglaf.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Its 501(c)(3) letter is posted at https://pglaf.org/fundraising. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state's laws. The Foundation's principal office is located at 4557 Melan Dr. S. Fairbanks, AK, 99712., but its volunteers and employees are scattered throughout numerous locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887, email [email protected]. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation's web site and official page at https://pglaf.org For additional contact information: Dr. Gregory B. Newby Chief Executive and Director [email protected] Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide spread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit https://pglaf.org While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. International donations are gratefully accepted, but we cannot make any statements concerning tax treatment of donations received from outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation methods and addresses. Donations are accepted in a number of other ways including including checks, online payments and credit card donations. To donate, please visit: https://pglaf.org/donate Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works. Professor Michael S. Hart was the originator of the Project Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For thirty years, he produced and distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as Public Domain in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our Web site which has the main PG search facility: https://www.gutenberg.org This Web site includes information about Project Gutenberg-tm, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.